Chapitre 33 Cole
— Tu crois qu'il est mort ? demanda une petite voix chétive.
La tête dans le coltard, une odeur sucrée vint chatouiller mes narines, ça sentait le chocolat et la guimauve. Seigneur, j'avais besoin d'une autre aspirine, la douleur était plus intense que quelques heures plus tôt.
— Bourré comme il était hier soir, ça ne m'étonnerait pas, lui répondit une voix haut perchée que je trouvais très désagréable.
J'ouvris les yeux petit à petit et la lumière du soleil traversant la fenêtre de ma chambre m'aveugla pendant quelques instant, m'éblouissant complètement. Mais je n'avais pas besoin de voir pour savoir qui se trouvait dans ma chambre.
— Sortez d'ici, bande de microbes ! grognai-je à l'intention de Cayley et Joey en posant un oreiller sur ma tête.
— Eh non, ricana ma saleté de demi-sœur, malheureusement, il est bel et bien vivant.
Elle allait me les payer !
Je me levai à toute vitesse en les tuant du regard et ils déguerpirent comme des fusées de ma chambre avant que je ne puisse les chopper et me dirigeai vers la porte pour la claquer de toutes mes forces.
J'avais beau leur répéter des centaines de fois de ne pas rentrer dans ma chambre, ils n'en faisaient qu'à leurs têtes.
Sales gosses !
D'ailleurs, la porte était fermée à clé alors comment avaient-il fait pour rentrer ?
Alors je me souvins de cette nuit, d'Olivia couchée à côté de moi et je me retournai pour retrouver la place qu'elle avait occupée totalement vide, ce qui fut un sacré soulagement. Je ne pense pas avoir pu lui faire face à mon réveil, ça aurait été super gênant. Surtout que je ne me souvenais toujours pas de ce qui était arrivé la veille, ni de comment elle avait fini dans mon lit. D'une chose j'étais certain : il ne s'était rien passé entre nous.
Ma tête me faisait un mal de chien, ayant l'impression qu'un homme-orchestre était en train de foutre le bordel là-dedans. J'allais par conséquent me recoucher immédiatement.
Mon pied toucha quelque chose en bas du lit et je fronçai les sourcils, ne sachant pas de quoi il était question. Je me redressai sur le matelas et vis de quoi il s'agissait : du t-shirt qu'Olivia m'avait emprunté. Je le pris délicatement et constatai qu'il était froid, ce qui voulait dire qu'elle était partie depuis un moment déjà, sinon le tissus aurait gardé la chaleur de son corps.
Je me recouchai et soupirai en contemplant le plafond, sans ne penser à rien de particulier. C'était le vide et c'était d'autant mieux ainsi, c'était ce que je recherchais toujours : que mon esprit me laisse en paix.
Soudain, mon téléphone se mit à vibrer sur ma table de chevet et je vis accessoirement l'heure : il était neuf heures. Et Elijah était en train de m'appeler.
Au bout de quelques secondes et même si je n'avais pas très envie de lui taper la discute, je décrochai.
— Allô ?
Ma voix était vraiment enrouée, je ne m'en étais pas rendu compte plus tôt lorsque j'avais gueulé sur Cayley et Joey.
Sales gosses, pensai-je encore.
— Eh bin ! Toujours vivant ?
Mais qu'est-ce que tout le monde avait à demander ça ? Tenait-on tellement à ce que je crève ?
— Malheureusement. Qu'est-ce qu'il y a ?
— Je vois que tu es de mauvaise humeur, constata-t-il.
Je levai les yeux au ciel et dissimulai un soupir d'agacement.
— Comme à chaque fois que je me coltine une gueule de bois, marmonnai-je.
Franchement, qui après une nuit de beuverie pétait la forme ? Personne. Surtout lorsque deux mioches entraient dans sa chambre pour le réveiller avec de sales petits chuchotements sinistres.
— Olivia est bien rentrée ?
Hein ? Quoi ? Pourquoi est-ce qu'il demandait pour elle ?
— En tout cas je constate qu'elle ne t'a pas achevé, alors c'est un très bon signe.
— Pourquoi aurait-elle dû le faire ?
Eli partit d'un fou rire qui me fit décoller le combiné de mon oreille, tellement son cri me brisa le tympan ainsi que la tête. Je me recouchai et attendis qu'il cesse de se marrer comme un dingue, je n'étais vraiment pas d'humeur à supporter des gamineries.
— Après les choses que tu as dites et faites, je me demande encore comment est-ce que tu respires. Mais bien évidemment et comme toujours, tu ne t'en souviens pas, soupira-t-il, ayant l'air de prendre un malin plaisir en comprenant le degré de mon amnésie.
Je savais que j'allais regretter ma question, mais... je devais au moins avoir quelques détails pour que je puisse me rappeler ce qui s'était passé pendant la soirée. Le dernier souvenir net et précis que j'avais, c'était moi en train de boire énervé qu'Olivia n'ait pas voulu m'écouter tout en me prenant la tête avec mon ami. Ensuite, c'était le blackout total.
— Qu'est-ce que j'ai fait ? soupirai-je.
— Hum... j'ignore vraiment par où commencer, mais en tout cas, je peux t'assurer que je n'avais jamais autant rigolé de toute ma vie.
Bon, s'il s'était fendu la poire, ce que j'avais bien pu faire n'était pas si terrible que ça enfin de comptes.
— Je te promets, tu étais tordant ! Mais malheureusement... Olivia n'a pas dû penser comme moi.
D'accord, j'avais fait des conneries et en plus, à son encontre. Bon sang, mais qu'est-ce qui s'était passé ? J'avais beau essayer de m'en souvenir, il y avait un trou de quelques heures dans ma mémoire.
— Accouche, Fuentes, dis-je en essayant de me montrer patient, car mon ami était visiblement en train de prendre un plaisir fou à me voir trimer pour me rappeler ce que j'avais bien pu commettre comme méfait la veille.
Il ricana encore une fois et marmonna :
— Je n'arrive pas à croire que je vais faire ça.
Mais de quoi il parlait ?
Il se racla la gorge et chanta :
— In the jungle, the mighty jungle, the lion sleeps tonight.
Mon cœur rata un battement et le rythme devint plus frénétique ensuite. Cette chanson... je n'avais pas cessé de la chanter pendant un moment la veille. Je tanguais sur mes pieds et le monde bougeait autour de moi, ou plutôt, j'étais tellement ivre que tout semblait bouger autour de moi.
« Chante, mon petit suricate ! » avais-je bafouillé alors que j'étais appuyé sur Olivia tandis qu'elle et Eli me ramenaient à la voiture.
La scène qui me vint ensuite à l'esprit, ce fut de moi me penchant sur elle et déposant un baiser baveux sur sa joue, alors que je rigolais comme un pauvre abruti.
— In the jungle the quiet jungle, the lion sleeps tonight, continua Elijah. Bonne chance avec les souvenirs !
Et il raccrocha après s'être marré une dernière fois.
Je déposai le téléphone sur ma table de nuit et pris mon visage entre mes mains, alors que tous les souvenirs commençaient à affluer dans mon esprit tels des flashs, les uns à la suite des autres. On pouvait dire que je l'avais bien énervée. Le moment avec les clés... Non mais qu'est-ce qui clochait chez-moi, sérieux ?! J'avais fait en sorte qu'elle me tripote alors que je les avais dans la poche de ma veste... je me demandais comment est-ce que je ne lui avais pas sauté dessus. Définitivement, cette vodka ne m'avait fait aucun bien.
« D'accord, je chante... mais tu dois me dire un de tes secrets », disait la voix d'Olivia dans mon souvenir.
Elle m'avait regardé avec malice, mais ça n'avait pas duré car ma réponse l'avait totalement laissée de marbre.
« Tes seins... j'ai envie de croquer dedans depuis que je les ai vus ! »
— Oh seigneur ! m'exclamai-je en me levant d'un bond de mon lit, les yeux écarquillés et le cœur battant à cent à l'heure. Je n'ai pas osé dire ça, si ?
On dirait bien que oui, mon petit Cole, dit ma conscience, qui elle semblait également se taper un gros fou rire.
J'avais totalement perdu les pédales !
— Argh, c'est pas vrai ! geignis-je en m'asseyant au bord de mon lit.
Je n'arrivais pas à croire que je lui avais dit une chose pareille. Comment avait-elle fait pour ne pas me foutre un pain ? Parce que je le méritais amplement après tout ce que j'avais fait.
En comprenant tout ce qui s'était passé, je me demandais vraiment pourquoi elle avait pris la peine de prendre soin de moi cette nuit. Cette fille... je n'arrivais pas du tout à la cerner. Et c'était vraiment très frustrant. Tout en elle l'était !
Mais pourquoi lui avais-je dis une chose pareille, bordel ? Bon... je devais bien avouer qu'il y avait une part de vérité dans cette confession, mais elle n'était pas censée le savoir ! Je devais admettre que depuis que je l'avais vue en topless, malgré moi, j'y repensais pas mal.
Qu'est-ce que je devais faire maintenant ? Faire comme si de rien était ? Comme si je ne me souvenais de rien ? Ou au contraire, aller m'excuser ? Je me voyais toutefois très mal lui dire : « Désolé pour hier et en fait, je n'ai pas envie de croquer dans tes seins ». Là, ce serait le coup de poing en plein nez assuré.
Alors peut-être tout simplement... la remercier ? Sans entrer dans les détails ? Juste lui dire : « Merci d'avoir veillé sur moi » ? Non, c'était trop gnangnan, elle allait se foutre de ma tête la connaissant.
Frustré comme jamais, je décidai d'aller manger un morceau, mon ventre criant famine. Un bon petit déjeuner me ferait voir les choses sous un autre angle.
Je sortis de ma chambre et descendis au rez-de-chaussée. Vu l'heure, ils devaient tous être à table en train de déjeuner tranquillement.
Lorsque j'arrivais à la salle à manger, tout le monde était là, dont Mrs Vega en train de servir du jus d'orange fraichement pressé à mon père, qui en me voyant parut vraiment surpris.
— Oh ! Jayden ! Tu déjeunes avec nous ?
Je ne pris même pas la peine de lui répondre et m'assis tout simplement à ma place assignée.
— C'est bien que tu te joignes à nous, commenta Piper, de son air hypocrite qui me donnait la gerbe.
Oublie-la, elle veut juste te provoquer, c'est l'un de ses jeux préférés, pensai-je pour me tranquilliser.
Cayley était assise en face de moi et me lançait des petits regards entendus, semblant s'amuser d'une chose que seule elle pouvait comprendre. Cette gamine était vraiment bizarre, pas étonnant que personne dans son école ne puisse la piffrer.
Joey quant à lui, il jouait avec ses céréales et s'en mettait partout, il avait même jusqu'à du lait au cacao dans ses cheveux blonds. Et personne ne lui disait rien, les adultes trop occupés à lire leurs revues de merde.
— Joey, dis-je un poil énervé, cesse de jouer avec la nourriture et mange.
Il me regarda avec ses gros yeux bleus et cessa de faire l'idiot pour se mettre à manger convenablement. Ce n'était pas un gamin têtu, contrairement à moi lorsque j'avais son âge, il obéissait plutôt bien, mais si on ne lui faisait aucune remarque, il continuait tout simplement.
Ce n'était pas la faute du gosse, j'en étais parfaitement conscient, mais de ces adultes qui l'entouraient et qui faisaient comme s'il n'existait pas, tout simplement parce que c'était plus simple de confier ses enfants à une tierce personne que de s'en occuper soi-même.
— Tu veux une salade de fruits, Jayden ? me demanda aimablement Clara, alors qu'elle nettoyait d'un chiffon sorti de la poche de son tablier les cheveux de mon demi-frère.
— Oui, ce serait bien, merci, bougonnai-je en regardant l'assiette vide devant moi.
— Ça arrive tout de suite, me répondit-elle en me faisant un clin d'œil.
Et je ne pus m'empêcher d'esquisser un léger sourire en coin. Je ne pouvais pas le nier, je l'appréciais plus que notre ancienne domestique – Maria.
Piper remarqua mon geste envers notre femme de ménage et me lança un regard noir, auquel je répondis par un sourire satisfait.
— Comment se passe le lycée, Jayden ? demanda mon père d'une voix autoritaire, mais sans pour autant décrocher le regard de son foutu journal.
Je baissai le regard et commençai à faire joujou avec la fourchette en argent qui se trouvait à ma droite, pour ensuite hausser tout simplement les épaules. Il n'en avait rien à foutre de la réponse, alors autant ne rien dire.
— Ah ! Olivia ! s'exclama-t-il en reposant son journal sur le côté de la table.
Je relevai automatiquement la vue et écarquillai les yeux sans le vouloir, alors que la fille de ma domestique venait à peine de franchir la porte de la salle à manger avec dans les mains ce qui semblait être mon petit-déj'.
— Bonjour, Mr Coleman, dit-elle respectueusement à mon père.
Et elle me contempla pendant quelques instants avant de se reprendre et venir à mon encontre afin de déposer le bol de fruits devant moi. J'espèrais qu'elle n'avait pas craché dedans pour se venger.
Elle avait les cheveux mouillés et dégageait encore ce parfum à base de fleurs de lotus sauvages qui rendait tous mes sens complètement dingues. J'adorais cette odeur et pourtant, je n'aimais pas les arômes floraux, me donnant souvent mal à la tête. Mais celui-là était tout simplement exquis.
Olivia portait un slim noir déchiré au niveau des genoux ainsi qu'un t-shirt à manches courtes bleu ciel qui lui collait au corps.
— Comment ça se passe au lycée ?
— Très bien, monsieur, merci de vous en inquiéter.
Et elle lui sourit légèrement.
— C'est bien, c'est bien. J'espère que tu te fais des amis.
— Liv est très sociable, dit sa mère alors que je ne l'avais pas remarquée arriver.
— C'est une très bonne chose. Maintenant, il ne te reste plus qu'à te trouver un garçon, ricana mon paternel.
Mais sa remarque ne sembla pas réellement faire rire Olivia, et encore moins sa génitrice. Toutefois, et bien courtoisement, elle ricana légèrement à l'insinuation – que je qualifierais de plutôt lourde – de Patrick.
— Je suis certaine que plein de garçons ont déjà jeté leur dévolu sur toi, continua Piper. Une belle fille comme toi doit avoir pas mal de prétendants.
— Elle est encore jeune, répondit Clara à la place de sa fille, qui visiblement était plutôt mal à l'aise.
D'ailleurs... qu'est-ce qu'elle avait fait à Aiden hier ?
J'essayais de faire mémoire et je me souvins d'être assis par terre dans ce qui semblait être une cuisine lorsqu'elle avait mis des vêtements ainsi qu'une paire de chaussures à l'intérieur d'un four. Elle l'avait laissé à poils, mais où ?
Mais sans le faire exprès je pouffais, ce qui me valut un regard noir de la part d'Olivia, mais je fis comme si de rien était.
— Et pour Jayden ? poursuivit l'homme d'affaires.
— Pardon ? demanda-t-elle en se tournant vers lui.
Je grinçai des dents, c'était sans aucun doute la meilleure opportunité qu'elle aurait pour me pourrir bien comme il faut.
— Oui, comment ça se passe pour lui ? Il est allé au bahut toute la semaine ?
— Oui, monsieur. Pas de problèmes ou d'incidents.
Alors ça se résumait à ça ses debriefings sur mes activités ? Elle aurait très bien pu lui avouer que je m'étais bourré la gueule la veille au soir ou encore qu'elle avait retrouvé de la coke dans le tiroir de ma table de chevet la semaine dernière, pourtant... elle n'en dit rien.
— C'est bien, Jayden, me gratifia mon père. Tu vois que quand tu veux, tu peux faire des efforts ?
— Tu es sur la bonne voie, renchérit sa salope de femme en me lançant un sourire bien niais.
Je faillis ricaner, mais me retins, parce que sinon j'allais exploser. Je détestais cette femme, je croyais même la haïr plus que je ne haïssais ma propre mère.
— Au fait, Liv, dit Piper en attirant son attention. Il y a un poste de serveuse à pourvoir au Country Club de Green Valley. Il est à toi si tu le souhaites.
Mes yeux s'écarquillèrent, tout comme ceux d'Olivia. Mais c'était quoi ce délire ?
— Je... bafouilla la jeune hispanique, c'est très gentil de votre part, Piper, mais je ne pense pas pouvoir travailler tous les jours.
— Oui, je suis au courant pour tes cours de journalisme. Tu ne travaillerais que le lundi, le mardi et le jeudi de quinze heures trente à dix-sept heures et le week-end de midi à dix-sept heures ou de sept heures à midi, en dépendant de ton planning.
— Je n'ai pas de voiture, répliqua Olivia, comme en tentant de chercher une excuse pour ne pas accepter.
— Jayden peut t'emmener après les cours, proposa mon père sans me consulter.
Je tournai mon regard vers lui et le foudroyai sur place. Non mais il était sérieux là ?!
— Oui et pour rentrer, il y a des bus. C'est très bien communiqué. Tu serais payée huit dollars de l'heure. C'est vraiment pas mal pour quelqu'un de ton âge et sans expérience.
— Ça ne te ferait pas de mal d'avoir un boulot, Olivia, obtempéra sa mère en donnant raison à Piper.
— Mais les samedis... murmura-t-elle en regardant Clara d'un air suppliant.
J'avais pendant un instant oublié que samedi dernier elle s'était faite la mâle tôt dans la matinée et qu'elle avait pris un bus pour Vacaville... avait-ce un rapport avec ça ? Qu'est-ce qu'elle pouvait bien faire dans la ville voisine ? S'y était-elle aussi rendue hier ?
— Tu devrais accepter, ça te ferait un bel argent de poche, continua la garce qui me servait de belle-mère.
Je pouvais sentir sa détresse à mes côtés, la manière dont ses mains bougeaient par à-coups et la façon dont elle respirait : ils étaient en train de la mener à bout.
— Tu...
— Arrêtez de lui foutre la pression ! ne pus-je m'empêcher de répondre, au plus grand étonnement de tout le monde.
Le silence se fit dans la pièce, tandis que je sentais tous les regards sur moi, hormis celui d'Olivia.
— Jayden a raison, dit mon père, tu devrais y réfléchir à tête reposée, jeune fille.
— Oui, renchérit Piper, mais pas trop non plus. Si tu pouvais me donner une réponse avant la fin de la journée, ce serait vraiment bien, ma chérie.
Liv la regarda et s'efforça de lui sourire, mais je voyais parfaitement qu'elle avait beaucoup de mal à garder son calme.
— Merci, Piper. Je vous dirai ça ce soir.
— Parfait !
La jeune fille hocha tout simplement la tête et s'en alla, en évitant tout contact visuel avec moi. La tension entre nous était plus que palpable.
D'accord, elle était sans aucun doute gênée à cause de tout ce qui était arrivé hier et aussi parce qu'elle s'était réveillée à mes côtés. Comme je m'en doutais, elle avait dû veiller sur moi et s'était endormie, morte de fatigue. Qu'elle veuille m'éviter, je le voulais bien, mais au moins qu'elle soit plus discrète.
Et elle quitta la pièce, suivie de sa mère, après nous avoir souhaités un bon appétit.
— Vraiment très polie cette jeune fille, commenta mon père.
S'il savait, pensai-je vraiment amusé. Elle avait vraiment une sale bouche, même si les gens semblaient penser le contraire.
— Elle ne te plait pas, Jayjay ? demanda Cayley, un sale petit sourire collé si sa face de fouine.
Je lui lançai un regard noir, ce qui ne servit qu'à l'amuser davantage. Combien de fois lui avais-je dis de ne pas m'appeler comme ça ? La seule personne qui avait le droit n'était plus là, alors elle avait intérêt à se la fermer avant que je ne l'y oblige.
— Je trouve que vous iriez bien ensemble.
— Dis pas n'importe quoi, me devança Piper sur un ton qui se voulait détaché, mais moi contrairement aux autres, je sentis son énervement. C'est la fille de la domestique. Ton frère mérite une fille d'une plus haute position.
Je lui lançai un regard en coin, vraiment dégoûté par ce qu'elle venait de dire. Elle pouvait parler, ce n'était rien d'autre qu'une sale stagiaire qui avait fait du rentre dedans à mon père, elle n'avait pas un rond, rien. La seule chose qu'elle savait faire, c'était dépenser l'argent de mon père, écarter les cuisses et faire du mal autour d'elle.
Je mangeai en vitesse, ne supportant plus sa présence et me levai sans même demander la permission, ce que mon père me reprochait à chaque fois. Je fis la sourde oreille à ses injures et remontai dans ma chambre, afin d'aller prendre une bonne douche qui m'aiderait à me calmer.
***
J'entourai une serviette autour de ma taille et sortis de la douche, tout en secouant ma tête pour faire partir un peu l'eau de mes cheveux. J'avais conscience que cela faisait très « canin », mais j'avais toujours eu l'habitude de le faire, depuis petit en réalité. Lorsque j'étais gosse, je rêvais d'avoir un chien, c'était mon plus grand rêve et je n'avais pas abandonné l'idée d'en avoir un. Mais lorsque je vivais avec ma mère, celle-ci détestait toutes les « bestioles » et désormais, Cayley était allergique à leurs poils.
J'aurais pu en avoir un lorsque je vivais dans la pool house, mais ça n'aurait pas été juste pour l'animal non plus, étant donné que je n'étais pas forcément le meilleur maître possible. J'arrivais à dures peines à prendre soin de moi-même, alors m'occuper d'un autre être vivant... ça aurait été très égoïste de ma part de prendre un animal de compagnie et de ne pas faire attention à lui.
Finalement, c'était bien mieux comme ça.
Je sortis de la salle de bains et me figeai sur place en découvrant la personne qui se trouvait dans ma chambre : Piper.
En voyant la serviette autour de ma taille, elle esquissa un de ces sales petits sourires de garce et me mâta sans aucune gêne, s'attardant sur les formes de mon corps. Mais au lieu de lui montrer que je détestais, je pris un air détaché, comme si le fait qu'elle se retrouve dans ma chambre sans ma permission ne me fasse ni chaud ni froid, alors que c'était tout le contraire.
Elle devenait de plus en plus audacieuse. Elle osait venir ici alors que mon père était dans les parages ? C'était une manière détournée de me dire que quoi que je fasse, je ne pourrais pas lui échapper indéfiniment.
— Qu'est-ce que tu fais là ?
Elle appuya ses mains sur ses genoux et se leva. Je n'avais pas fait gaffe à son accoutrement lorsque j'étais dans la salle à manger, mais même un dimanche, elle était habillée sur son trente et un et portait des talons aiguilles. Chaque fois que je la voyais descendre les escaliers avec ces escarpins, je priais pour qu'elle se brise une jambe ou... même pire.
— Cela fait trois semaines qu'on ne s'est pas vus, me reprocha-t-elle.
Je serrai les mâchoires de toutes mes forces, alors qu'une colère noire bouillonnait à l'intérieur de moi.
— J'ai été pas mal occupé, répondis-je tout simplement.
Puis elle s'approcha davantage de moi et posa une main sur mon torse nu, ce qui me donna la chair de poule, mais pas pour les bonnes raisons. Son contact me révulsait au plus haut point, me rappelant des souvenirs que je tenais à garder enfouis au plus profond de moi.
Ses yeux papillonnèrent sur mes pectoraux tandis que sa main longeait désormais mes abdominaux, descendant toujours plus bas, et que je me raidissais de la tête aux pieds.
Avant qu'elle n'aille trop loin dans son petit jeu de malade, je lui attrapai le poignet et la foudroyai du regard.
— Arrête, la suppliai-je. S'il te plait.
Mon cœur était lourd. Cette femme me répugnait, je ne savais plus quoi faire pour échapper à tout ça. Je voulais que ça cesse, mais je ne pouvais pas l'arrêter, pas à cause de ce que j'avais fait. Désormais, c'était beaucoup trop tard.
Si seulement cette soirée là n'avait jamais eu lieu...
— C'est toi qui as provoqué cette situation, m'accusa-t-elle d'un air railleur. Si tu ne m'avais pas évité, tu aurais gardé ta liberté alors que désormais, tu te fais surveiller.
Sale garce ! pensai-je en ayant des envies de meurtre à son égard. Je le savais depuis le début, c'était elle qui avait insufflé cette idée à mon crétin de paternel qui ne voyait pas plus loin que le bout de son nez.
— Ton père part vendredi en voyage d'affaires pendant une semaine et Cayley et Joey partent chez leurs mères respectives, m'annonça-t-elle. Tu as intérêt à ne pas te défiler cette fois.
Elle avait eu tout ce qu'elle voulait : que je sois surveillé et accessible, autrefois à la pool house, il lui était plus difficile de disposer de moi, même si elle avait toujours obtenu ce qu'elle convoitait.
Je me demandais même si ce n'était pas à cause de ça que Maria – l'ancienne domestique – n'avait pas dégagé, parce qu'elle avait sans doute remarqué ses allées et venues. Désormais, le personnel séjournait dans la maison au fond du jardin et ne pouvait en aucun cas voir ce qui se tramait dans le manoir une fois la nuit tombée. Dire que j'étais encore plus à sa merci serait une véritable litote. Voilà pourquoi j'avais pété un câble ce soir-là, en apprenant que j'allais désormais devoir vivre dans la maison.
Puis elle me caressa le visage, tendrement, avant d'emprisonner mes joues entre son pouce et son majeur, pour me lancer le regard le plus menaçant qu'elle avait en réserve.
— Tu sais ce qui se passe lorsqu'on me contrarie.
Je hochai la tête, abattu par cette situation qui me consumait un peu plus à chaque journée qui passait.
J'avais eu trois semaines de répit... et je savais que tout reprendrait tôt ou tard, à mon plus grand malheur. J'aurais cependant aimé que cela dure plus longtemps.
— J'ai hâte d'y être, me murmura-t-elle à l'oreille de sa voix séductrice qui me révulsait.
Puis finalement, elle plaqua ses lèvres sur les miennes, mais je les gardais fermées, tout comme mes yeux. J'imaginais que c'était quelqu'un d'autre, n'importe qui sauf elle. La sentir contre moi me donnait la nausée, que ce soient ses caresses ou ses baisers... je n'en voulais pas. Voilà pourquoi à chaque fois je devais être soûl ou drogué, pour pouvoir le supporter.
Et elle se sépara à nouveau de moi, pour m'effleurer encore une fois la joue, mais je gardai mes paupières closes, alors que j'avais cessé de respirer.
— Je t'aime, Jayden.
Elle me lâcha et j'entendis ses talons s'éloigner dans la chambre, la porte s'ouvrir et se fermer tout de suite après.
Je pris une énorme goulée d'air et m'appuyai contre le battant de la porte de la salle de bain, pour commencer à trembler de tous mes membres de manière incontrôlée, alors que ma vue se brouillait.
J'entendis également un bruit étouffé, plein de tristesse et de désespoir. Je me rendis alors compte que ce son émanait de moi et que j'étais en train de pleurer comme un môme.
Je n'en pouvais plus.
Si c'était ça l'amour, alors je n'en voulais pas.
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Voilà! J'espère que ce chapitre vous a plu et qu'il ne vous a pas paru trop long.
Pour ce qui est de Cole, on est enfin fixés sur ce qui se passe avec Piper. La question désormais est pourquoi? Et surtout, pourquoi est-ce qu'il ne dit rien? Don't worry, il y a une explication à tout, comme à chaque fois... mais elle mettra un petit peu de temps à arriver ;)
Certains d'entre vous avaient eu des doutes par rapport au comportement distant que Cole a avec elle, ainsi qu'à cause de certaines de ses pensées. Ces personnes-là avaient vu juste, mais sur le moment je me suis vue obligée de brouiller un peu les pistes, sorry! Mais sachez, que vous avez bon oeil! :)
D'ailleurs, je tiens ici à faire une petite parenthèse sur un point qui me semble très important mais dont on ne parle pas assez: le viol masculin (qu'il soit commis par un autre homme ou dans ce cas, par une femme).
Le viol masculin est encore plus tabou que le viol féminin, ce qui fait que beaucoup de personnes pensent que ça n'existe pas ou même des hommes qui le subissent n'en sont pas pleinement conscients (lorsqu'il s'agit d'une femme). Mais tout comme le viol féminin, il est TOUT AUSSI IMPORTANT ET IGNOBLE et doit être dénoncé et puni. Beaucoup d'hommes subissent ce genre d'agressions et ne dénoncent jamais, le taux de plaintes est vraiment faible comparé à celui des femmes, pas parce qu'il n'y en a pas, mais parce qu'ils ne dénoncent pas à cause de la honte, de l'humiliation. En fait tout simplement à cause de l'image que la société renvoit de lui, c'est-à-dire d'un être qui ne doit pas pleurer, qui ne doit en aucun cas demander de l'aide en cas de problème, qui doit être en mesure de se défendre ou encore un être qui doit toujours être disposé à sauter tout ce qui bouge, alors que non. Un homme a le droit de dire NON lorsqu'il ne veut pas, tout comme la femme.
Je rappelle qu'un viol n'a pas forcément à être avec violence, il peut l'être sous la contrainte, que ce soit un chantage ou quelque chose s'y ressemblant. Une manière de forcer la personne sans qu'il n'y ait violence physique, mais même si certains croient que non, c'est un viol tout de même, vu que la personne en question n'est pas CONSENTANTE. Et les dommages psychologiques sont tout aussi importants que chez la femme.
Cette image que la société renvoit de l'homme dit "viril" est une véritable plaie pour les hommes. C'est ce que j'appelerais le machisme envers les hommes. Un homme doit être comme-ci ou comme-ça, sinon t'es pas un homme. Combien de fois a-t-on entendu : un homme ça ne pleure pas? Des tas de fois.
Un homme c'est un être humain, mais on dirait qu'il n'a pas le droit d'exprimer ses émotions, ses sentiments ou de parler ouvertement de ses doutes ainsi que de ses problèmes, il doit tout garder pour lui, enfouit à l'intérieur. Et c'est vraiment quelque chose que je trouve vraiment très injuste.
Bref, cette parenthèse terminée, on se retrouve SAMEDI midi pour la publication du chapitre 34 et cette fois, ce sera un point de vue d'Olivia.
Je rappelle que j'annonce toujours le temps restant pour la publication des prochains chapitres grâce à un compte à rebours dans les stories de mon compte insta: @le_monde_livresque_de_tam, ainsi que l'annonce de la publication. Donc n'hésitez pas à me suivre afin d'être prévenus, c'est d'ailleurs par là également que je fais toutes sortes d'annonces ayant un rapport avec mes histoires, parfois je mets même des petits extraits en avant-première, il y a aussi de temps en temps des F.A.Q etc...
Bonne fin de semaine tout le monde !
Tamar 😘
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