Chapitre 2 : C'est une promesse

Pour HariaKatsura, pour te féliciter d'avoir passé le bac, et parce-que tu le demandes depuis un moment XD

Le lendemain, pdv Ley

Des coups donnés à la porte me réveillent, est-ce que ces garçons connaissent les termes "réveil délicat" ?

Ley : C'est bon, j'arrive...

Alby : Grouille, on n'a pas l'habitude d'attendre pour le petit-déjeuner ! Réveil tous les jours à 6h45 !

Putain... Je me lève et m'habille, puis je sors de ma chambre et me dirige en-dehors de la Ferme. La cuisine étant trop petite pour accueillir tout le monde, les blocards mangent dehors sur des tables de fabrication artisanale. Je me prends juste une assiette et une pêche que je commence à dévorer.

Newt : Les pêches du Bloc sont bonnes, hein ?

Ley : Trop trop bonnes !

Newt : Fais gaffe à bien les garder dans ton estomac, tu vas commencer à bosser avec les Trancheurs aujourd'hui.

Ley : Je le sens mal, ton truc...

Newt : T'as raison, tu vas forcément tuer une pauvre bête. Mais bon, je vais être honnête avec toi, je pense pas que Trancheur soit le boulot qui ait le plus besoin de monde.

Ley : Qu'est-ce qui te fait dire ça ?

Newt : On ne dirait pas, mais c'est plutôt facile de s'occuper des animaux. S'il y a bien des catégories de blocards qui ont besoin d'aide, c'est les cuistots, les Bâtisseurs et les Sarcleurs. Frypan doit faire tout seul trois repas par jour pour une quinzaine de personnes, les Bâtisseurs ont perdu un membre à la mort de Georges et ils galéraient déjà à seulement trois, donc c'est la merde vu qu'ils ne sont plus que deux, et les Sarcleurs bossent la terre toute la journée à deux pour cultiver de la nourriture pour les animaux et les blocards, il leur faut quelqu'un en plus.

Ley : Tu peux m'en dire plus sur les travaux du Bloc ? Je ne connais que très peu de choses, il me faut plus d'informations.

Newt : On est quatre Coureurs, tu as rencontré tout le monde hier soir. Tu connais déjà notre seul chef cuisinier, ainsi que nos deux Medjacks. Aujourd'hui, tu vas bosser avec les Trancheurs, Winston est le Maton, c'est le gars là-bas, et Alfred l'aide, c'est le brun deux sièges à gauche. Le mec blond bien costaud là-bas, c'est Zart, le Maton des Sarcleurs, et le petit roux à côté c'est Wil, l'autre Sarcleur, ils s'occupent de cultiver toutes les plantes du Jardin. Gally et Jason, le baraqué brun juste à côté, sont les Bâtisseurs, c'est eux qui se sont occupés de construire la seconde infirmerie et d'agrandir la Ferme, quand Georges était encore là. Cet idiot voulait entrer dans le labyrinthe et il s'est fait enfermer dedans, on a retrouvé qu'une partie de ses fringues... Bref, et le dernier boulot, que personne t'a présenté, c'est celui des Coffreurs. Alby et Stan s'en occupent, c'est les gros bras du Bloc, ils se chargent d'enfermer ceux qui perturbent la vie ici ou de ramasser et enterrer les cadavres. Enfin, le cadavre. Mais bon, ils n'ont jamais grand chose à faire, alors Alby en profite pour faire son boulot de leader et Stan nettoie tout. Il adore que tout soit propre, mais il déteste le ménage, alors il se charge à chaque fête de convaincre les nouveaux de l'aider à nettoyer les chiottes.

Ley : Bah j'y ai pas eu droit...

Newt : Hé, Frypan a balancé direct que t'aimais pas les pensées du genre "les femmes à la cuisine ou au ménage", Stan n'a même pas osé approcher !

Ley : Je comprends mieux. Bon, bah je vais faire ce que je peux, hein...

Newt : Bonne chance, la bleue !

Je ne relève pas le surnom, finis de manger puis pars me laver les mains, avant de rejoindre les Trancheurs à l'Abattoir.

Ley : Hey... Je dois faire quoi ?

Winston : Toute la matinée, on va s'occuper de nourrir les animaux, et on va devoir tuer une poule cet après-midi pour Frypan.

Ley : Mais il a déjà du canard plein son frigo, pourquoi y a besoin d'une poule en plus !? La pauvre !

Alfred : C'est surtout pour les Coureurs. Fry leur fait à manger aussi, et ils aiment tous le sandwich au poulet, alors il en fait pour eux. Les sandwichs au canard, c'est pas ouf, et on a déjà essayé.

Ley : Ah oui, tout de suite, il y a un peu plus de sens.

Winston : Allez, prends ça, et va le donner aux vaches !

Quelques jours plus tard

Alby : Bon, Ley a tout essayé, qui veut la prendre ? Et le premier qui me sort une bague salace passe la nuit dans la Fosse.

Gally, Winston, Frypan, Clint et Jeff : Je la veux !/On la veut chez les Medjacks !

Alby : ... Ok, ça va être long.

Winston : Elle a un super bon feeling avec les animaux, ils l'adorent tous et limite elle les comprend ! C'est parfait pour les soins aux animaux, il nous la faut chez les Trancheurs !

Gally : Elle a chialé quand vous avez buté la poule ! Si elle fond en larmes dès que vous tuez un animal, ça va pas être possible, surtout si elle s'y attache ! Nous, on a besoin de membres chez les Bâtisseurs, et cette fille a une règle, une équerre, un compas et un rapporteur dans l'œil ! Les constructions avec elle sont plus solides !

Clint : Si c'est juste pour ça que vous la voulez, c'est stupide ! Elle a peut-être des instruments géométriques dans l'œil, mais elle n'est pas très musclée, elle ne fait rien avec vous à part porter la moitié de vos charges et vous dire où placer quoi !

Jeff : Alors qu'avec les Medjacks, tous les chouineurs qui voulaient pas se faire soigner parce-que le désinfectant ça pique ou que les médocs sont pas bons ont arrêté de rechigner ! C'est archi bon pour nous !

Frypan : N'empêche que le nombre de blessés a doublé quand elle est arrivée à l'infirmerie, les gars se blessent exprès pour qu'elle les soigne ! La mettre avec vous serait totalement contre-productif ! Moi, j'ai besoin d'aide, et tout le monde mange ce qu'elle prépare, et tout le monde adore !

Alby : Mmh... Qu'est-ce que tu en penses, Stan ?

Stan : Rien, c'est à vous de vous démerder avec ça. Juste, elle n'ira pas chez les Coffreurs, elle est tout sauf intimidante. Elle sait bien se défendre et attaquer, mais c'est tout, elle n'est pas rapide ou particulièrement forte, elle ne servira à rien.

Alby : Et toi, Zart ? Tu n'as pas parlé depuis tout à l'heure.

Zart : Bah... je veux bien que Ley aille avec nous, on a besoin de bras, elle se plaint pas énormément, mais c'est pas vraiment fait pour elle, elle n'est pas vraiment douée en jardinage.

Alby : Bon, Ley, on va te laisser choisir.

Dois-je préciser que j'étais présente durant toute la conversation, même lorsqu'ils se battaient pour moi ?

Gally, Winston, Frypan, Clint, Jeff : LEY, CHOISIS ! AVEC QUI TU VEUX ÊTRE !?

Ley : Je...

LAISSEZ-MOI DE L'ESPACE VITAL, BANDE D'ENFOIRÉS !

Ley : Je choisis Frypan !

Ce dernier crie un énorme "Oui !" pendant que les autres se répandent en lamentations, ils font un peu pitié.

Alby : Bien, Ley fait dès à présent partie des cuistots, félicitations !

Ley : Je sais pas pourquoi, mais je sens que je vais le regretter...

Alby : Bonne chance.

Frypan : Viens avec moi, Ley ! La préparation du déjeuner nous attend !

Ley : J'arriiiiiiive...

Et c'est comme ça que je me suis retrouvé dans l'équipe des cuistots. Je passe mes journées à faire de la bouffe, j'en peux plus. Ça fait presque un mois que je suis au Bloc, il ne se passe rien, aucune sortie n'est découverte. Je suis sûrement gonflée de dire ça étant donné que je suis ici depuis peu de temps comparé à Alby, Newt, et tous les autres, mais je perds peu à peu espoir. Chaque jour, moi et les autres blocards, on espère que les Coureurs vont revenir avec des nouvelles de ouf, ou au moins un minuscule élément, mais rien. C'est comme si ça ne servait à rien. Et je ne suis visiblement pas la seule à penser ça : Gally, Wil et Newt semblent également afficher un sourire et un espoir de façade. Si c'était juste Gally et Wil, je dirais rien, mais si même un Coureur commence à montrer qu'il pense qu'il n'y a aucune sortie, alors ça veut forcément dire quelque chose, non ?

Ley : Dis, Fry...

Frypan : Ouais ?

Ley : Ça t'arrive jamais de perdre espoir ? Cette histoire n'a aucun sens, c'est n'importe quoi.

Frypan : Je déprime, oui, mais je sais qu'il y a une solution. Pourquoi enfermer des adolescents amnésiques dans un labyrinthe avec de quoi se débrouiller pour survivre et même tuer les Créateurs ?

Ley : ... Pour faire une expérience...

Frypan : C'est ce qui m'apparaît de plus réaliste. Une expérience sociale, sûrement, voir comment des adolescents organiseraient une société pour survivre, un truc dans le genre. Et je pense que ta venue n'y est pas pour rien. Réfléchis, une fille qui arrive dans une société de mecs, c'est un gros élément perturbateur, ils ont forcément une réaction à observer.

Ley : En plus, c'est sûr que, selon l'âge des garçons en question, leur réaction pourrait être très différente. Avec des adultes, on aurait les deux extrêmes : intelligent et agressif, genre ceux qui verraient direct la femme comme une poule reproductrice. Alors que, dans une société d'enfants et d'adolescents, il y a de la marge. Pas encore autant de maturité que les adultes, mais pas autant de cruauté non plus.

Frypan : Exactement. C'est pour ça que je pense que ça finira un jour. Si c'est vraiment une expérience, même si ça m'étonne vu que c'est moralement pas acceptable, alors ça ne s'éternisera pas.

Ley : Ouais, sûrement...

Frypan : Arrêtons d'en parler, c'est déprimant ! En plus on doit se grouiller, les Coureurs partent dans quelques minutes et on n'a pas terminé leurs sandwichs !

On augmente la vitesse et les sandwichs sont terminés au moment où Newt rentre dans la cuisine.

Newt : Ah, vous avez fini, cool. Je vous prends ça et on y va.

Frypan : Bonne journée dans le labyrinthe.

Ley : Et gaffe aux Griffeurs, surtout !

Newt : T'inquiète, c'est pas un Griffeur qui me tuera.

Il me fait un sourire puis pose sa main sur ma tête.

Newt : Ley, Fry, merci.

Frypan : Merci... pour quoi ?

Newt a un petit sourire malicieux.

Newt : Pour les sandwichs.

Et il sort de la cuisine. Je reste quelques instants immobile puis Fry me ramène à la réalité.

Frypan : Ça t'a fait autant d'effet qu'il te touche la tête !?

Ley : Quoi ? Non ! C'est juste que... il était très bizarre, tu trouves pas... ? Il m'a jamais vraiment considérée comme une amie, je crois, je suis plus une camarade, mais là c'était quand même pas mal affectueux, non ?

Frypan : T'as raison, son "merci" aussi était très bizarre.

Ley : Je me fais peut-être du souci pour rien, mais j'ai peur que Newt... fasse une grosse bêtise...

On échange un regard puis je reprends la parole.

Ley : Je vais le suivre.

Frypan : Dans le labyrinthe ?! T'es folle ?! T'as pas d'endurance et tu connais pas cet endroit !

Ley : Je vais lui coller au train. Si jamais il s'éloigne trop de l'entrée, je te promets que je reviens. Et je vais prendre des cailloux au cas où pour marquer mon chemin.

Frypan : ... Je te couvre, mais prends pas trop de temps. Ley, surtout fais attention à toi.

Ley : Promis.

Je sors de la cuisine, ramasse de grosses poignées d'herbe et de cailloux par terre, les fourre dans les poches de ma robe, et gagne discrètement la porte ouest par laquelle Newt vient de passer. Je rentre dans le labyrinthe et suis Newt en me cachant, lâchant régulièrement un caillou ou quelques brins d'herbes pour pouvoir retrouver mon chemin, comme le Petit Poucet. Ce petit manège dure quelques heures, je suis fatiguée, j'ai chaud, j'en ai marre. Newt se retourne régulièrement, j'ai failli me faire prendre plusieurs fois, mais ça prouve qu'il n'est pas à l'aise et qu'il ne veut pas se faire surprendre. Je suis arrivée à court d'herbe et de cailloux, mais les murs du labyrinthe sont tapissés de lierre, ça fait un bon fil d'Arianne. Cependant, c'est pas pratique d'en arracher sans me faire entendre. Je m'arrête quelques secondes pour refaire le plein et stoppe immédiatement toutes mes actions quand je remarque qu'il n'y a plus aucun bruit de course, ni même de pas. Newt n'est pas dans mon champ de vision, il a tourné à gauche dans un couloir, mais je suis toujours censée l'entendre. Prise d'un mauvais pressentiment, j'abandonne toute discrétion et tourne à gauche pour retrouver le Coureur que je vois sauter du haut d'une plateforme en hauteur. Je croise son regard pendant la chute et le vois s'écraser au sol, après une chute de plusieurs mètres.

Ley : Newt... ?

Je m'approche doucement du corps du garçon, immobile, une flaque de sang s'étendant lentement sous lui, une des jambes dans un angle totalement surnaturel.

Ley : Newt ! Putain, Newt, qu'est-ce que t'as foutu !? NEEEEEEEEEEEWT !!!!

Merde, merde, je fais quoi !? D'où vient le sang !? Je me mets à hyperventiler mais reprends bien vite mes esprits, la moindre erreur de ma part peut coûter la vie du Coureur ! Sa jambe est cassée et je n'ai rien pour la redresser à part des bandages que j'ai toujours dans ma poche. Le sang provient de sa tête, il s'est sûrement assommé en tombant. Je bande son crâne et sa jambe qui saigne aussi un peu, tâchant ma robe blanche dont le bas devient rouge et humide, et cherche ses signes vitaux. Newt est encore vivant, c'est sûr, il respire et son cœur bat, mais ça ne durera pas s'il ne reçoit pas les soins appropriés. Selon sa montre, il est midi, ça me laisse jusqu'au coucher du soleil et je ne sais absolument pas quand il aura lieu. Je passe son bras gauche autour de mes épaules, le relève et commence à avancer jusqu'au virage où j'ai tourné. Qu'est-ce que... ? C'est pas possible ! Non, je me trompe peut-être, je n'ai sûrement pas laissé de caillou ici... Je venais de ce chemin-là, et je suis sûre d'avoir laissé un marqueur là-bas. Tout ira bien, je vais suivre mon chemin, et tout ira bien... Mais non, rien, il n'y a rien quand j'avance, tous mes marqueurs ont disparu... Il n'y a pas eu de vent, rien qui aurait pu les déplacer, alors pourquoi... ? Je commence à paniquer, si mes marqueurs ont disparu alors je ne pourrai sûrement pas retrouver mon chemin... Bon, je me souviens de quelques chemins que j'ai pris, je vais déjà commencer par ça. Je prends les couloirs dont je me souviens, mais je suis rapidement perdue à un nouveau croisement, et aucune trace de mes marqueurs. Je tourne la tête et tombe sur une branche de lierre totalement déchirée et pendante. C'est moi qui l'ai arrachée, celle-là, je me souviens... J'ai un léger sourire, j'ai peut-être encore un espoir, il faut que je suive les traces de branches arrachées. Newt pèse de plus en plus lourd, je suis épuisée, mais je peux encore réussir. Au nouvel embranchement, je remarque que le chemin qui continue en ligne droite est celui que j'ai emprunté tout à l'heure, la seule fois où j'ai emprunté deux fois de suite une ligne droite est la fois où je venais de la gauche, donc je vais devoir tourner à droite dès que je serai au bout de ce couloir. Au bout d'un moment, je regarde la montre de Newt, il est presque 16h. J'avance très lentement alors, même si j'arrive plus ou moins à me repérer, il est probable que je n'arrive pas à temps... Je vais accélérer la marche, tout en essayant de ne pas faire de mal à Newt. Un autre moment passe, la lumière a déjà pas mal baissé, je pense qu'il ne reste que 3 heures, au grand, grand maximum, avant la fermeture. Un autre moment, et je sens qu'il ne reste que quelques minutes, en plus il pleut. Soudain, quelque chose me redonne un grand espoir : j'entends des voix. Pas dans ma tête, comme les femmes qui m'ont donné mon nom, mais des vraies voix, des voix de blocards, et je suis sûre d'avoir entendu Alby. J'utilise alors ma voix pour lancer un unique cri, la gorge trop sèche pour dire autre chose. En continuant d'avancer, je voix la porte. Je saisis mes dernières forces et cours en essayant de ne pas glisser sur le sol mouillé, j'ai juste le temps de filer Newt, toujours inerte, à Alby, avant de tomber sur les genoux, essoufflée.

Alby : Qu'est-ce qu'il s'est passé !? Il est arrivé quoi à Newt !? Et qu'est-ce que tu foutais dans le labyrinthe !?

Ley : Plus tard... Il a besoin de soins urgents... J'ai fait ce que j'ai pu, mais j'ai peur qu'il s'en sorte pas...

Alby : Medjacks !

Clint et Jeff transportent délicatement Newt jusqu'à l'infirmerie tandis que je me relève, mon souffle légèrement retrouvé, mais peu. De plus, les larmes que je retiens forment une boule dans ma gorge, elle m'étouffe.

Alby : Ça va ?

Ley : Je te mentirais si je disais oui... On peut parler... ?

Alby comprend immédiatement le message et m'entraîne vers la Ferme, loin des blocards, et m'emmène dans ma chambre. Il patiente à l'extérieur, le temps que je me change, puis il rentre et s'assoit avec moi sur le lit.

Alby : Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Il a croisé un Griffeur ?

Ley : Non... Alby, tu n'as jamais trouvé Newt... étrange, ces derniers temps... ?

Alby : Légèrement, mais... Ne me dis pas que c'est ce que je pense.

Ley : Ce matin, il était trop bizarre, j'ai décidé de le suivre. Je suis la seule qui doit être blâmée, d'accord ? Frypan ne doit pas être puni. Bref, je l'ai suivi, et à midi je l'ai vu sauter du haut d'une des plateformes qu'il y a sur les murs... Il voulait se suicider, Alby... Si un Coureur perd espoir à ce point, est-ce qu'on a toujours une chance de sortir d'ici... ?

Alby reste silencieux, puis me frotte affectueusement la tête, sans rien dire. Les larmes montent à nouveau et je me laisse aller.

Ley : Si jamais il meurt... je m'en voudrais toute ma vie !

Alby : Rien n'est de ta faute. Ley, moi je te suis reconnaissant de l'avoir ramené.

Il se lève et se prépare à sortir.

Alby : Je vais réunir le conseil des Matons. Il faut qu'on discute de plusieurs choses. Repose-toi.

J'acquiesce et tombe immédiatement dans le sommeil. Quand je me réveille, les premières lueurs du jour passent à travers la fenêtre. Ce n'est même pas l'heure de se lever. Mon ventre gargouille bruyamment et, comme dans un état second, je me lève et me dirige d'un pas mécanique vers la cuisine. Sur la table, je trouve une assiette pleine de purée et avec une tranche de rôti de dinde. Un petit mot se trouve à côté :

"Salut Ley, tu n'as pas mangé hier alors je t'ai laissé une assiette au cas où. Même si, je dois l'admettre, personne n'a beaucoup mangé... Ne t'en fais pas pour Newt. D'après les Medjacks, il va bien, il n'a plus de fièvre.

Fry"

Je souris tristement et mets l'assiette dans le micro-onde. Le goût délicieux de la cuisine de Frypan me réveille un peu et illumine un peu mon début de journée. Je fais la vaisselle, puis décide de passer à la deuxième infirmerie, celle où il y a un lit, où Newt a été transporté. Je mets mes chaussures et sort de la Ferme. Plus loin, je vois les quelques blocards dans des sacs de couchage ou des hamacs qui ont dormi à la belle étoile. Newt dormait avec eux, il me semble. Je me rends d'un pas plus vif à l'infirmerie et, quand je rentre, je tombe sur un corps immobile.

Ley : Newt... ?

Un peu paniquée, je m'approche et place ma main sur sa gorge pour prendre son pouls. Je sens des pulsations et, maintenant que je regarde bien, sa poitrine se soulève à intervalles réguliers. Il est vivant. Je soupire de soulagement, mais sursaute en entendant quelqu'un entrer. C'est Clint. De peur, et de surprise, je me mets à bafouiller.

Ley : Dé... Désolée d'être entrée, je... je voulais savoir si... !

Clint : S'il allait bien.

Ley : C'est... C'est ça...

Clint : Il était brûlant de fièvre quand tu nous l'as ramené, mais ça s'est calmé dans la soirée. C'est parfait que tu sois levée, les Matons se sont réveillés plus tôt et on comptait venir te chercher. Le conseil veut te parler, et aussi à Fry.

Ley : Il n'y est pour rien !

Clint : Ne t'inquiète pas. Viens.

Je lance un dernier regard au blond endormi, puis emboîte le pas au Maton des Medjacks, jusqu'à la salle du conseil. C'est la première fois que j'entre ici. Tous les Matons, plus Alby, sont réunis sur une sorte de gradin, sauf Fry qui est assis sur une chaise devant eux. Il y a une deuxième chaise, je m'y installe.

Alby : Ley, Frypan, on doit parler de ce qu'il s'est passé hier. On en a tous discuté pendant une partie de la nuit. Et tout le monde est d'accord.

Je refuse que Frypan soit puni alors que je suis la seule coupable. Je m'apprête à ouvrir la bouche, mais Alby me coupe.

Alby : On pense que vous ne serez pas punis.

J'abandonne ma phrase avant qu'elle ne sorte de ma bouche et reste comme un poisson hors de l'eau pendant quelques secondes.

Ley : Je comprends pour Fry, mais moi, je dois être punie, j'ai enfreint la plus importante des règles...

Alby : Fry est autant en faute que toi. Tu es allée dans le labyrinthe, et lui t'a plus ou moins aidée à passer sous nos radars. Mais, ce faisant, vous avez sauvé la vie de Newt. En plus, Ley, ce que tu as vu t'a marquée, tu as suffisamment été punie pour être entrée dans le labyrinthe.

Ley : J'irai une journée dans la Fosse.

Gally : Ley, tu... !

Ley : C'est pour faire un exemple. Si je n'y vais pas, les autres blocards croiront que vous me favorisez, ou alors que ce n'est pas grave s'ils vont là-dedans... Voire les deux. Tu l'as dit toi-même, Alby, ne pas aller dans le labyrinthe est notre règle la plus importante, alors je dois payer pour l'avoir enfreinte. Tous ceux qui entrent à l'intérieur devraient être punis pour l'exemple, même s'ils essayaient de sauver quelqu'un. Frypan, tu pourras me filer du travail supplémentaire, si tu veux.

Pdv extérieur

Sur ces sages paroles, Ley se leva, sortit de la salle du Conseil, et alla se glisser d'elle-même dans une cellule de la Fosse. Gally arriva quelques minutes plus tard et verrouilla la porte en faisant un nœud complexe avec une corde autour des barreaux.

Gally : Tu as raison. On a accepté ce que tu as dit. Tu as créé une nouvelle règle : quiconque entre dans le labyrinthe, pour n'importe quelle raison, aura une punition à subir.

Ley : C'est logique...

Il me laisse, puis c'est Frypan qui vient me voir, une bassine dans les mains.

Ley : C'est quoi ?

Frypan : Les carottes. Tu vas bosser avec moi ici.

Je lui offre un petit sourire, attrape l'épluche-légumes et la carotte qu'il me tend, et commence à éplucher. Ce retour des petites tâches du quotidien me fait garder la tête hors de l'eau, même en prison. Quand, au coucher du soleil, on me libère, je cours hors de ma cellule jusqu'à l'infirmerie. Clint et Jeff sont toujours là, ils changent ses bandages.

Ley : Comment il va ?

Jeff : Bien, on pense. Plus de fièvre, pas d'infections, ça cicatrise plutôt bien, il ne se réveille juste pas. Ça arrivera un jour, sûrement.

Ley : Un jour...

Clint : On n'est pas médecins, Ley, on connaît juste les bases. C'est pour ça qu'on nous appelle "Medjacks" et pas "médecins".

Je déglutis. C'est vrai, nous ne sommes que des enfants. Un jour passe, puis deux, puis trois, et plein d'autres. Deux nouveaux sont arrivés. Le premier, c'est Brandon, qui a rejoint les Bâtisseurs, c'est un baraqué de 15, voire 16 ans, qui a deux neurones qui sont tous centrés sur la même chose, à savoir s'imaginer des trucs pas très cathos avec moi. Le deuxième s'appelle Éric, lui a rejoint les Sarcleurs, il a l'air d'avoir 13 ou 14 ans, comme moi et la majorité des autres blocards, il est plutôt sympa. Je suis toujours la seule fille. Je passe tout mon temps libre au chevet de Newt, espérant qu'il se réveille, et mon souhait se réalise enfin 2 semaines après l'arrivée du dernier nouveau. Comme d'habitude, après avoir terminé de préparer le déjeuner, je me rends à l'infirmerie et reste à ses côtés en espérant qu'il bouge, qu'il se réveille. Cette fois, ça arrive enfin. Je suis assise sur une chaise à côté de son lit depuis environ une demi-heure quand ses yeux se mettent à papillonner.

Ley : Newt ?

Newt : Ley... ? Qu'est-ce que... ? T'es morte aussi... ?

J'ai un petit pincement au cœur, il avait sérieusement l'intention d'en finir, puis je lui réponds.

Ley : T'es pas mort, Newt. T'as sauté quelques jours avant que la Boite nous ramène un nouveau, tu te souviens ? Un peu plus d'un mois s'est écoulé depuis, un autre nouveau est arrivé il y a quelques jours.

Newt : Je... vois...

Un silence gêné s'installe, puis il reprend la parole.

Newt : Je crois que je t'ai vue quand j'ai sauté. Comment ça se fait ?

Ley : Je t'avais trouvé super bizarre, alors je t'ai suivi. Quand tu as sauté, je t'ai ramené au Bloc. Avec beaucoup de difficultés, je dois te l'avouer.

Newt : Pourquoi ? Pourquoi tu m'as sauvé ? T'aurais pu faire comme si de rien n'était, et pourtant tu as carrément risqué ta vie pour moi.

Ley : Je ne sais pas... Tu perdais espoir, ça je l'ai vu tout de suite, comme moi, en fait. Je pense que je me suis un peu identifiée à toi, c'est pour ça que j'ai refusé de te laisser mourir. On ne s'est jamais vraiment beaucoup parlé, mais tu fais partie de ceux qui m'ont accueillie au Bloc, qui m'ont rassurée, tu as toujours été super gentil avec moi, et donc ça fait que je t'apprécie beaucoup, te laisser mourir m'était inconcevable.

Il y a un nouveau silence, puis je me lève et sors la tête de l'infirmerie.

Ley : Bouche-toi les oreilles, tu viens de te réveiller, tu risques d'avoir mal à la tête. LES GARS, NEWT EST RÉVEILLÉ !

Quasiment tous les blocards se précipitent vers l'infirmerie, mais seuls Clint, Jeff et Alby rentrent.

Alby : Comment tu te sens ?

Newt : Moyen. Physiquement et mentalement.

Alby : Newt, que ce soit clair, tu retentes de te suicider encore une fois, que tu réussisses ou pas, je ferai en sorte que tu le regrettes.

Newt : Si ma meilleure tentative, à savoir aller très loin pour être sûr que personne ne me retrouve, a échoué, alors ça ne sert à rien que je retente...

Jeff : C'est Ley qui t'a ramené, tu le savais ? Elle t'a porté pendant des heures.

Clint : Et elle est venu tous les jours te voir.

Je rougis face à la balance des garçons. Mais je ne dis rien, je n'ai rien à dire.

Clint : Y a pas eu d'infection, tu es censé être en bonne santé.

Jeff : Y a juste... un seul problème. Désolé, Newt, ta jambe était totalement pétée, on a fait ce qu'on a pu, mais...

Newt se redresse, pose les deux pieds à terre, puis se lève. Il manque de tomber plusieurs fois et on le force à rester assis quelques minutes et les Medjacks l'étirent pour réactiver ses muscles. Une fois tout ce rituel terminé, Newt se met à marcher dans la pièce. Rien ne se voit plus que sa claudication. Sa jambe est pétée, pour de bon.

Newt : ... Bon, j'imagine que ça aurait pu être pire...

Personne ne dit rien, nous sommes trop troublés. Newt ne sera plus Coureur, c'est un fait. Durant les heures qui suivent, Newt en discute avec Alby et Minho, il essaiera de se rendre utile autre part, nous dînons, puis je vais dans ma chambre me coucher. Quelques minutes après m'être glissée sous les draps, j'entends toquer à ma porte. Pitié, faites que ce soit pas encore Brandon...

Ley : Quoi ?

Newt : Je peux entrer ?

Je me relève immédiatement, lui dit que oui, et le fais rentrer. Nous nous asseyons tous les deux sur le lit, et passons quelques secondes en silence. Il a l'air embarrassé.

Newt : Merci... Merci de m'avoir sauvé...

Ley : Tu ne devrais pas me remercier. Si mourir était, et est toujours, vraiment ton souhait, tu devrais me maudire.

Newt : Non, tu as fait quelque chose de bien, tu t'es mise en danger pour moi, je ne peux que te remercier de ton implication. Je ne mérite pas quelqu'un comme toi...

Je remarque qu'il a les larmes aux yeux, j'hésite sur ce que je dois faire.

Newt : Quant à mon idée de mourir, je dois t'avouer que je ne sais plus quoi penser, je ne sais plus si je veux mourir ou vivre. Si jamais je mourrais, ce serait une insulte envers toi, mais... je suis fatigué de tout ça, Ley.

Je n'hésite plus et le prends dans mes bras. Newt a exprimé tellement plus de choses en quelques minutes ce soir qu'en plusieurs mois...

Ley : Je ressens la même chose, Newt, j'en ai vraiment assez, mais j'ai décidé de vivre encore.

Je le repousse doucement et le regarde dans les yeux.

Ley : Faisons un marché. Tant que je suis en vie, tu dois vivre, pour ne pas manquer de respect à cette implication dont j'ai fait preuve. C'est uniquement si je meurs que tu pourras mourir aussi. C'est une promesse ?

Il hésite quelques secondes, puis me tend son petit doigt, je fais de même, et nous scellons notre promesse.

Newt : Merci...

Ley : De rien, Newt...

C'est ainsi qu'a commencé mon amitié avec Newt, la plus fusionnelle que je pourrais avoir avec qui que ce soit. Elle a continué pendant longtemps, si longtemps, tant que tout était normal, jusqu'à ce jour où tout a changé.

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