Chapitre 13
-Quoi?!
Ce fut la subtile réaction qu'eut ma meilleure amie lorsque je lui fis part des évènements de la veille.
-Comment est-ce possible? Reprit-elle plus doucement une fois qu'elle eut remarqué tous les regards tournés vers nous.
-Je ne sais pas. Il avait l'air sincère et je n'aimais pas non plus ce qu'on était devenus, alors je lui ai pardonné, soufflai-je, un soupçon de doute dans la voix.
Je regardai ma meilleure amie, qui, les yeux écarquillés, la bouche grande ouverte, me lorgnait avec incrédulité.
Soudain, elle eut une réaction que moi-même, malgré les longues années à la connaitre, je n'aurais pu prédire. Elle se mit à frapper des mains en sautillant sur place avec la gaieté enfantine d'un bambin auquel on offrait un nouveau jouet.
-C'est pas vrai! J'ai rêvé de ce moment toute ma vie!
-N'exagère pas, quand même...
-Moi, exagérer?
Elle leva les sourcils si haut que je mis à craindre qu'ils n'aillent disparaitre sous ses cheveux. Je pouffai de rire devant la grimace qu'elle esquissait, et elle ne mit pas longtemps à rejoindre mon délire.
Nous devions sûrement être singulières à voir: deux filles se faisant face à côté d'un casier, riant à s'en tordre le ventre, dont l'une dépassait l'autre d'une bonne quinzaine de centimètres.
Indubitablement singulières.
-Et alors, que comptes-tu faire? Fit-elle une fois calmée.
Je peinais à reprendre ma respiration.
-Pardonner, j'imagine. C'est vital de pardonner.
-Bien, soupira Athéna, j'espère seulement qu'il n'y aura pas d'autre drame.
-J'espère aussi.
Je me saisis de mes affaire de français et refermai mon casier d'un coup d'épaule. Étant une mordue de lecture, j'adorais lire dans toutes les langues que je parlais. Par ailleurs, mes parents avaient toujours insisté sur l'importance d'être polyglotte. Parler plusieurs langues selon eux était vital de nos jours. Je me mis à prendre des cours intensifs de français, d'allemand et d'espagnol en réponse à leur demande. Jongler entre plusieurs activités parascolaires tout en assurant ma présence dans tous les cours et mon apport de tous les devoirs à temps commençait à relever du miracle.
-Et... hésita Athéna.
-Et?
-Pour tes parents, qu'est-ce qu'on fait?
Ma réponse mit du temps à venir.
-Aucune idée. Tout ceci ne fait que me perdre. Tout ce qu'on sait pour l'instant, c'est qu'ils sont disparus, cachés quelque part dans la nature, fuyant le jugement pour je ne sais quel odieux crime commis... Et puis, qui est "la vermine?"
La cloche sonna, coupant court notre discussion. Je rejoignis en courant la salle de classe. Comme pour une fois, la chance était de mon côté, j'arrivai quelques minutes avant l'entrée de mon enseignant.
Devant moi se trouvait un élève dont l'imposante corpulence suffisait pour cacher un éléphant. Ce qui faisait de ma place un endroit stratégique : j'allais pouvoir faire quelques micro-siestes.
Mes espoirs tombèrent à l'eau quand le bruit d'un manuel qu'on laissait tomber sur la table vint me faire sursauter.
J'avais évidemment oublié que j'avais la chance de m'asseoir à côté de Noah dans la plupart des cours...
Oh joie!
-Salut! Dit-il.
Je me mis instantanément à jouer avec mon stylo. Ce n'était pas très lucratif comme activité, mais on contrôle son stress comme on peut.
-Je suis content que ça aille mieux entre Nathanaël et toi.
Bon sang, s'il commence à tout lui raconter je vais finir par regretter de lui avoir pardonné!
-Il faudrait qu'on reparle de toute cette affaire un de ces jours.
Ma réponse fut immédiate et inhabituellement catégorique :
-Je ne pourrai pas.
-Pourquoi?
Mais il ne pouvait pas me laisser tranquille?
Je pris cependant la peine de lui répondre, constatant avec exaspération que mes mains étaient devenues moites.
Décidemment, je n'arriverai jamais à surmonter cette peur fondamentale de m'affirmer.
-Tous mes après midi sont pris par mes répétitions.
Pour une fois, la danse me servait d'excuse pour éviter de me retrouver dans des situations de gêne extrême.
Il se pencha vers moi pour murmurer, de façon que je puisse être la seule à entendre:
-Écoute, quelque chose me pousse à croire qu'en plus d'être vivants, tes parents n'auraient même pas quitté le sol américain.
Curieusement, mon coeur n'eut pas ce petit soubresaut qui caractérisait la présence de Noah. Néanmoins, cette phrase suffit pour attirer mon attention. Il prit mon silence pour une invitation à continuer.
-Peut-être qu'ils sont toujours à Los Angeles.
J'évitai de justesse une exclamation de surprise. Si cette hypothèse était exacte, le voyage ne serait donc qu'un mensonge de plus. Mais alors, qui se trouvait à bord du bateau qui a explosé?
Et pourquoi l'avoir fait exploser avec des gens à l'intérieur?
Avec les quelques informations dont j'étais dépositrice, j'en venais à la conclusion que mes parents auraient donc simulé leur propre mort.
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