L'air était lourd, je sentais les regards sur moi, pas toujours favorables, même si certains étaient compatissants, d'autres m'en voulait encore.

Heureusement le réal était sympathique, il ne me regardait pas forcément gentiment mais plus de manière à me mettre en confiance, ce qui était beaucoup mieux.

Réal- Bon on va commencer. Vous êtes prêtes Aoi ?

Je serrais encore plus mes jambes l'une contre l'autre alors que mes doigts tapaient frénétiquement sur mes genoux. Étant plutôt frêle et de petite taille, le fauteuil me paraissait immensément large pour moi. Sale nervosité.

Moi- Oui, répondis-je simplement, essayant de ne pas trembler.

Aujourd'hui pour la première fois j'allais tout raconter, pas seulement l'histoire de Mélodie, mais aussi a mienne. C'est si différent de parler de soi.

Au début je ne voulais pas, je sais déjà que mon histoire pathétique va d'un coté attendrir et susciter la pitié des bienveillants et de l'autre, exciter les haters qui vont me taper dessus en me hurlant de ne pas jouer la victime.

Ça n'a jamais été mon but. Je ne sais même pas comment ce réal a fait pour me convaincre. Il a un je-ne-sais-quoi qui me pousse à lui faire confiance. Peut-être aussi que comme le temps a passé, je finis par m'assouplir, ou juste me languir de son retour. Dire que si ça se trouve elle est morte depuis longtemps...

J'entendis comme au loin une voix déclarer que ça tournait, l'air se vida, comme aspiré par un immense aspirateur, laissant place au silence depuis la première fois que j'étais arrivée sur le plateau de tournage.

Réal- Bien mademoiselle, parlez nous de vous s'il vous plait. Qui êtes-vous ?

J'ouvris la bouche mais la referma ne sachant d'un coup plus ce que je voulais dire. Je repris une grande inspiration avant de finalement commencer sans trop savoir où aller.

Moi- Je m'appelle Aoi. Je suis qu'une fille paumée, perdue par son complexe d'alter et sa culpabilité. Et puis je vous ai croisé, je pensais que c'était par hasard mais en fait vous me cherchiez non ? Enfin, vous m'avez proposé de parler pour votre biopic d'une "légende", celle qui a tout subit, la pire martyre qu'il y a eu depuis quelques siècle. L'imbécile qui m'a fait avouer que je l'aimais bien le jour où l'on s'est dit adieu.

Rien que de dire cette phrase, je repensais à son sourire de ce jour-là, j'avais un peu oublié son visage, et le décor était un peu flou mais son sourire, lui, impossible de l'oublier.

Réal- Bien, maintenant, parlez-moi de votre enfance, comment vous en êtes arrivé là. Vous avez été dans la célèbre Alliance des vilains après tout, qu'est-ce qui a fait basculé votre vie à cette époque pour vous détourner de l'histoire banale du citoyen ordinaire ?

Eh bah, il tire sur la corde lui, avec ses formulations à la limite du raisonnable. Après il avait pas tord pensais-je avec un faible sourire.

Moi- J'avais une famille normale à vrai dire. Deux parents amoureux, un frère stupide et une sœur insupportable. Ils sont tous morts. Je ne me souviens même plus de leur nom.

Ce devait être à cause de ce genre de phrase que les gens me trouvaient insensible et détestable.

Moi- J'ai eu mon alter vers 4 ans comme tout le monde mais on ne s'en était pas rendu compte. La base de mon alter est d'accentuer la part de folie que les gens ont en eux, cette partie de mon alter est passive, je n'y peux rien. Il prend effet lorsque quelqu'un est proche de moi, et s'intensifie de plus en plus tant que la victime reste à mes cotés, jusqu'à devenir complètement folle.

Je soupiras. Je n'avais jamais dit à personne - à part lui - ce qui allait suivre.

Moi- Ma famille s'est entretué à cause de mon alter. Au fur et à mesure des mois, ils étaient devenus de plus en plus bizarre, obsessifs, agressifs, égoïstes. C'était violent, avec plein de sang, de cris d'agonie. J'y ai assisté du début à la fin, de mon frère poignardant ma sœur avec une fourchette pour un histoire stupide, jusqu'à la décapitation de celui-ci par ma mère.

Je voyais les yeux s'écarquiller, les chuchotements commençaient et les gens me regardaient horrifiés. Faut dire que c'était un peu gore.

Moi- C'est mon père qui a mis fin au massacre. Il a achevé tout le monde avec un bon coup de brique dans le crane (NDA : Je suis en train de prier pour que ma mère voit jamais ce que j'ai écrit- en plus j'écris ça en écoutant Bon Appetit S, l'opening de Blend-S allez écouter vite fait si ça vous dis, juste le titre vous montre le rapport avec ce que j'écris 😭) avant de venir m'enlacer en s'excusant que j'ai assisté à ça, m'assurant qu'il allait tout faire pour retrouver son état normal.

En espérant que le réal mettra un warning avant de passer mon témoignage, ce serait gênant que des gamins entendent ça. Moi-même j'aurais pu m'en passer pensais-je ironiquement.

Moi- Pendant un moment mon père et moi avons trainé dans les bas-fonds, mon père trempait dans des affaires louches pour nous faire survivre, mais étrangement je me sentais bien, parce que je savais que mon père m'aimait. Quand j'y pense, c'est vrai que j'aurais peut-être du être un peu effrayée... Et puis ensuite...

"- Si tu restes là, il risque de t'arriver des trucs. J'ai pas mal de sœurs, mais comme t'es pas grosse, il doit bien rester une petite place dans notre abri."

Ma bouche se fendit d'un sourire nostalgique alors que je repensais à lui.

Moi- J'ai rencontré un garçon formidable, un ami qui a toujours pris soin de moi, mon plus grand regret, celui qui a toujours été de mon coté mais que je n'ai jamais remercié.

Réal- Comment s'appelle-t-il ?

Moi- Il s'appelait Kei.

Réal- Il est donc décédé.

Moi- Oui. Il est mort à ma place, déclarais-je tristement. Je ne le méritais pas.

Réal- Vous ne l'aviez jamais évoqué auparavant. Qui était-il ?

Moi- Ce fut le meilleur ami de Takeo, l'ex de Mélodie, mais avant tout, ce fut mon ange gardien.

Réal- Comment vous êtes-vous rencontré ?

Moi- Dans les bas-fonds, il y trainait comme moi, dans l'espoir d'une pièce, d'un linge, ou encore d'un truc à se mettre sous la dent. A un moment mon père a commencé à me laisser seule de plus en plus longtemps et c'est là qu'il est arrivé dans ma vie, en m'offrant un abri. C'était pas bien grand, pas bien propre non plus, assez bruyant aussi, il avait 4 petites sœurs. Je me demande ce qu'elles sont devenus aujourd'hui. Peut-être qu'elles sont mortes ? Il ne m'a jamais dit où il les avait caché.

Dire que lui il avait toujours tout su de moi.

Moi- On est devenus inséparable. Me demandez pas comment exactement, ça c'est juste fait comme ça, on s'appréciait assez dans cette enfer pour rester ensemble, alors on l'a fait. A l'époque, je ne savais toujours pas que j'avais un alter et pendant de longues années j'ai cru que c'était à cause de celui-ci que Kei m'avait suivi pendant le reste de sa vie. En réalité, il m'aimait déjà avant que mon alter ne fasse effet sur lui. Pas longtemps avant de mourir, il a dit que mon alter l'avait sauvé. Sur le coup je n'avais pas compris mais maintenant si. Si mon alter n'avait pas accentué son amour pour moi, il n'aurait probablement pas tenu, avec une vie si misérable. Je lui ai donné une raison de vivre. Moi.

Réal- Comment avez-vous découvert votre alter ?

Moi- J'ai rencontré All for One. Mon père s'était mis à travailler pour lui et un jour il réclama à me voir. Et là il me révéla que j'étais la cause de l'effondrement de ma famille. Comme vous le voyez, ça a toujours été un charmant personnage, ricannais-je amèrement en me remémorant l'effroi dont j'avais été prise ce jour-là.

Réal- Vous avez dit au début que votre père était mort aussi. C'est All for One qui l'a tué ?

Moi- Oui et non. Ce jour-là, All for One m'avait promis qu'il allait trouver un moyens de faire revenir mon père à la normale mais qu'il avait besoin d'étudier mon alter pour ça. En réalité, il se servit de mon père comme cobaye et entreprit des recherches sur mon alter, comme pour la sœur de Yume Kirisawa. Quand je m'en suis rendue compte, mon père était déjà à bout et il s'est excusé de ne pas avoir pu me protéger en me demandant de le laisser se suicider. Il est mort dans mes bras.

Je garde toujours le souvenir de ce moment, où sentant la chaleur s'échapper du corps de celui qui m'avait mis au monde, je me promis de toujours me rappeler de lui comme d'un père aimant qui avait tout fait pour aider sa fille, mais dans sa folie.

Moi- Après ça, je me suis retrouvée seule, et All for One m'a révélé qu'il n'avait aucun moyens de stopper mon alter. J'ai voulu couper les ponts avec Kei mais, au contraire il a tenu à rester avec moi pour toujours. C'est à ce moment là que j'ai compris que je l'avais déjà contaminé. Je n'eus pas d'autres choix que de rester travailler pour All for One. J'ai travaillé sur mon alter et j'ai développé une manière d'extérioriser mon alter afin qu'il ait un impact moindre sur mon entourage. Grâce à ça je crée des papillons sombre qui ont le même effets que mon alter en plus violent, ces papillons peuvent provoquer des hallucinations par exemple.

Réal- Que faisait Kei pendant ce temps ?

Moi- J'avais obtenu de All for One qu'il le laisse tranquille. Kei était le seul qui prenait soin de moi, hors de question qu'il finisse parmi la clique des hommes de mains de ce vilain. Il menait un peu une double-vie, je m'assurais que ses sœurs et lui puissent aller à l'école et puis le soir il... Il m'aidait à tenir le coup.

Réal- C'est à dire.

Moi- On était très proche lui et moi, au yeux des gens on aurait pu passer pour un couple. Ca m'aidait à me sentir humaine après avoir fait des choses horribles pendant la journée. J'ai déjà tué des gens. Pas qu'une fois. C'était peut-être égoïste mais je me déchargeais la conscience en me laissant cajoler par celui qui m'aimait.

Réal- Vous avez dit que Kei fut le meilleur ami de Takeo. Ils se sont rencontrés à l'école je suppose ? Est-ce grâce à lui que vous avez rencontré Mélodie ?

Moi- Ils se sont bien rencontrés en cours. Avec les autres, Kei était renfermé et froid, Takeo a été le seul à réussir à s'immiscer sous sa carapace. On peut au moins lui laisser ce mérite.

Réal- Vous ne l'appréciez pas ?

Je soupira devant ce sujet pénible.

Moi- C'est pas ça mais...

Je me passa la main dans les cheveux. Comment aborder ce sujet.

Moi- C'était un indécis et c'était insupportable à voir. Il était incapable d'être ferme avec les gens et ne retenait jamais la leçon. Je ne sais pas où il en est dans sa vie en ce moment mais en tout cas à l'époque il a raté beaucoup de choses.

Réal- Comme ?

Moi- Mélodie par exemple.

Réal- Parlons en tiens. Leur relation est toujours resté assez flou jusqu'à présent. Il sont sorti ensemble n'est-ce pas ?

Moi- A la base, ils n'étaient qu'amis. Enfin, Mélodie n'était qu'amie avec lui, il l'aimait depuis le début, ça crevait les yeux. Ils sont sortis ensemble après qu'il ai réussi à faire tomber une Mélodie qui ne connaissait rien à l'amour dans ses bras. Voyez-vous, j'ai toujours vu Takeo comme un coureur de jupons, même si je me rends compte aujourd'hui que c'était un peu contre son gré.

Réal- Contre son gré ?

Moi- Il attirait les filles. Et lui, forcément en tant que "gentleman" populaire, il ne les recalait jamais clairement, s'assurant de ne pas trop les blesser pour qu'ils restent amis. Il aimait être entouré de nombreuses personnes et ne s'imaginait même pas le succès qu'il avait. Il laissait les filles se faire des idées sans s'en rendre compte et...

Je soupirais une fois de plus.

Moi- Avec Yoko dans les parages... Yoko était amoureuse de Takeo. Or, justement je reviens à la façon dont j'ai rencontré Mélodie, Takeo a fondé un groupe de musique avec Kei, puis Mélodie et Yoko l'ont rejoint, suivies de Nori et moi. Parce que All for One en avait appris l'existence et désirait que je garde un œil sur Mélodie. C'est la que j'ai appris pour les origines de Mélodie.

Je soupirais. Encore une fois, la partie à venir était assez dure à dire puisque personne n'en avait connaissance.

Moi- Yoko a fait en sorte que Mélodie voit Takeo la "tromper" tout en jouant sa meilleure amie. Grâce à ça elle a réussit - je ne sais comment - à se mettre avec lui mais au final, même s'ils n'étaient plus ensemble, ils s'aimaient toujours. Et Yoko étant un peu yandere sur les bords, elle a rejoint l'alliance des vilains pour s'assurer de se débarrasser de Mélodie. A l'époque, Kirisawa aussi était arrivée, il y avait donc un certain conflit entre elles.

Je soupira.

Moi- A un moment Nori a essayer de tuer Takeo. Une histoire de famille ou un truc dans le genre, mais elle ne l'avait probablement pas voulu toute seule, elle était foncièrement gentille. Mais... Yoko détenait un moyens de pression sur moi, Kei, et puis le fait que All for One était de son coté... Elle m'a contraite à tuer Nori. C'est un de mes plus grands regrets.

Je sentais les jugements sur moi, il est vrai qu'après à ce qu'on ait commencé à déterrer les secrets de Mélodie une fois qu'elle était devenue une légende, après que le pays soit redevenu stable, on avait ressortis cette affaire de la mort suspecte de Nori.

Je venais de leur donner la coupable.

Je continua mon récit peu à peu, mon marché avec Mel, comment elle avait fini en prison trahi par son meilleur ami. Comment moi j'avais passé un pacte avec Kirisawa pour que l'on devienne alliée et qu'on sauve Mélodie. Notre surprise quant à son état après l'avoir retrouvée aux bons soins de Lady Nagant. La manière dont Mélodie nous avait sauvé de Yoko avec son histoire d'amour. Et puis j'en vins au plus dur.

Le jour où l'on s'était dit adieu, Mel et moi, et où Kei était mort dans mes bras, tué par Hawks.