Chapitre 38

"- Yume tu es venue ! Je suis trop contente !

Je regarda Yura me sourire depuis son lit.

Beurk.

- Je suis vraiment heureuse que tu sois là, maman ou d'autres gens de la famille viennent tout le temps me voir mais je préfère quand c'est toi qui est là, me dit-elle un peu embarrassée.

Je pénétra entièrement dans la pièce et vins m'asseoir sur un bout de son lit où elle était déjà installée.

- T'as pris tes médicaments ? demandais-je hargneuse. Guéris vite s'il te plait, ça me saoule que tu sois malade, à cause de ça maman et l'autre pas beau arrêtent pas de me tourner autour.

Ma sœur jumelle rigola quelques instants de son rire cristallin avant de m'assurer qu'elle avait bien pris son traitement, même s'il était apparemment à vomir."


J'inspirai calmement, me remémorant mes souvenirs d'enfance avant d'ouvrir les yeux vers la caméra et de commencer à raconter mon histoire.

Moi- J'avais une sœur. Une sœur jumelle pour être précise. Elle était l'ainée, de 36 minutes. Apparemment moi je n'avais pas vraiment envie de sortir découvrir le monde. Aujourd'hui encore ça se ressent dans ma personnalité et mes actions, j'agis toujours cachée, protégée dans ma petite bulle. Parler devant les caméras, j'ai pas vraiment l'habitude.


"- Mais je comprends pas, d'habitude il te parle pas pourtant le type que t'appelle "pas beau" ? demanda innocemment Yura.

Je soupira.

- Bah... Tu sais... Les adultes hein..."


Moi- Yura - ma sœur - avait un alter puissant, c'était la chouchoute. Ah oui c'est vrai j'ai oublié d'en parler mais en réalité ma famille, les Kirisawa, il s'agit d'une famille de vilains et de criminels. Donc ma famille connaissait All for One. C'était un "ami de la famille", il venait souvent nous voir le mercredi ou venait manger le week-end.

Je rigola légèrement.

Moi- Rien que me rappeler son sourire quand il me faisait un cadeau à Noël me file la gerbe.

Je repris mon discours.

Moi- Donc ma mère était heureuse car ma sœur avait l'alter de manipuler les gens rien qu'en parlant. Et moi bah... J'avais pas d'alter. Ou du moins je ne savais pas encore que j'en avais un à cette époque. J'étais un petit génie scolaire mais c'est tout. J'étais donc la rejetée de la famille, la petite incapable. J'aurais aimé dire que ça ne me dérangeais pas mais bon... C'est pourtant ce que j'essayais de penser mais rien n'y faisais : j'étais folle de jalousie envers ma jumelle. Pourquoi était-elle née avec un bon alter alors que je n'en avais pas du tout ?


"- Tu sais, le répète pas à maman mais moi, au final, j'aime bien être malade. Grâce à ça, je rate les entrainement avec maman et le "monsieur pas beau" et en plus tu viens me voir ! D'ailleurs comme toi t'es forte pour les cours tu veux pas venir m'aider quand je suis malade ?"


Moi- Pourtant Yura elle... Elle m'aimait bien. Ça parait normal peut-être, après tout, généralement les frères et sœurs s'entendent bien enfants mais moi, ça m'énervais encore plus de la voir sourire quand j'arrivais ou de recevoir la plus grosse part de gâteau de sa part. Mais je ne disais rien. De toutes façons je ne l'a voyais pas non plus souvent, à cause de ma mère, elle n'aimait pas que je reste avec Yura.

Je ricana amèrement en repensant au traitement que me réservait ma mère.

Moi- Et puis avec All for One, ma mère avait préparé un programme bien strict pour l'éducation de Yura, avec des entrainements d'alter poussés bien sur. Le problème c'est qu'un jour elle tomba malade. Je ne sais pas si cela a un rapport avec le fait que ces deux là la poussait constamment à bout mais je sais que du haut de nos six ans on avait aucune idée de ce qui poussait les adultes à agir comme ça.


"- Maman s'en fiche que tu sois bonne pour les maths ou les japonais, tout ça c'est pas important pour toi. Concentres-toi plutôt sur ce qu'on te demande de faire, répliquais-je peu sensible aux envies d'instruction de ma sœur."


Moi- Yura n'était pas douée pour les études. A vrai dire je crois que notre mère préférait cela ainsi, l'éducation est un moyen d'apprendre à réfléchir par soi-même en nous faisant engranger un maximum de connaissance au préalable et je doute que ma mère avait envie que Yura soit capable de réfléchir toute seule. Elle n'avait visiblement pas besoin d'être intelligente pour ses projets. Un jour que Yura était malade, elle m'avait demandé de l'aider à étudier. J'ai cruellement refusé. Les études étaient le seul domaine dans lequel je pouvais exceller, je n'allais certainement pas y aider ma rivale.


"Je finis par sortir de la chambre après avoir passé une bonne heure à dessiner et faire des origamis avec Yura.

- Que faisais-tu là-bas ! me cria ma mère qui venait de débouler dans le couloir


Moi- Ce même-jour, ma sœur m'avait demandé plus tôt pourquoi le "monsieur pas beau" - c'est comme ça que j'appelais All for One enfant - s'intéressait soudainement à moi. En effet je lui avais demandé de guérir vite pour qu'il arrête de me tourner autour avec ma mère. A ce moment je mourrais d'envie de la frapper, de lui dire que c'était de sa faute, après tout c'était vrai, depuis qu'elle était malade, on m'accordait une étrange attention que me mettait mal à l'aise, et puis je détestais Yura de toutes façons. Mais je n'en avais pas le courage. Et ça me mettais encore plus mal à l'aise : j'étais obligée de mentir, de garder mes sentiments enfouis. J'avais peur de ce qu'il m'arriverais si je blessais la petite protégée.


"J'eus peur que ma mère me frappe car j'avais dérangé ma sœur malade et commença donc à lever les bras pour me protéger mais ce qu'elle me dit à la place me terrifia tellement que j'aurais encore préféré qu'elle me frappe pour que je continue mon role de victime inutile."


Moi- Ma mère s'est soudainement mise à m'aimer. Elle a commencé à se soucier de moi et, au fur et à mesure que Yura tombait malade de plus en plus souvent et de plus en plus gravement, les simples "Comment vas-tu ?" qu'elle ne m'adressait jamais auparavant se transformaient même en "Comment as-tu passé ta journée aujourd'hui ? Tu as eu une bonne note ? Quel cadeau te plairais t-il pour ton anniversaire?". Et au lieu de me réjouir, ça m'horrifiais. Parce que plus elle semblait m'aimer, moins elle semblait s'intéresser à ma sœur. C'était si simple de changer d'attitude du tout au tout en si peu de temps ? Alors qu'elle s'était occupée de Yura depuis sa naissance elle l'a remplaçais comme si elle changeait simplement de coupe de cheveux ?


"- Voyons ma chérie, ne traines pas dans la chambre d'une malade ça n'apporte rien de bon ! Ta sœur n'est qu'une petite égoiste pourri gâtée, franchement tomber malade comme ça... Et en plus elle voudrait t'entrainer avec elle ! Viens plutôt par là ma puce, et arrête de t'approcher de la chambre de celle-là, c'est mauvais."


Moi- Ma mère m'a empêché de voir Yura. C'est à partir de ce moment là que j'ai commencé à vouloir la voir en cachette, il faut croire que je ne la détestait pas tant que ça. En réalité, c'est à ce moment que nous avons échangé nos rôles : Yura était devenu la malade incapable de quoique ce soit et j'étais devenue l'enfant préféré, à moi les gâteries et les emplois du temps de ministres qui allaient avec : on a commencé à faire beaucoup de tests médicaux sur moi. Le docteur, un partenaire d'All for One qui semblait très vieux, était lui aussi devenu un ami de la famille.


" - Dis moi petite, pourquoi une gamine comme toi passes autant de temps dans un laboratoire ?

Assise sur une chaise en plastique vert en attendant que le docteur revienne, je releva la tête et croisa le regard de cette grande femme. Son regard était ferme, résolu et déterminé. Cependant, l'espace d'un instant je cru y déceler aussi de la tristesse et de la rage, celle qui veut en terminer avec le malheur.

- Je ne sais pas."


Moi- Je ne savais pas en quoi consistaient ces tests mais je savais qu'ils faisaient plaisir à ma mère et comme je n'avais aucune envie de la contrarier, je ne disais rien et me laissait manipuler tel un pantin. Et puis un jour... Un jour, je rencontra une femme. Une femme différente de celles que j'avais connu jusque là. C'était une femme forte, pas parce qu'elle s'était entrainée dur pour frapper plus fort, mais parce qu'elle avait su surmonter la douleur des coups, elle était déterminée et rien ne semblait pouvoir se mettre en travers de sa route.


"- Docteur, qu'est-ce que tu fais à cette gosse ?

- Cela ne vous regarde pas mademoiselle Kirisawa.

La femme pinça ses lèvres à cette appellation - grâce à celle-ci je su tout du moins qu'elle faisait partie de la famille de maman - avant de me prendre dans ses bras.

- Si vous ne dites rien c'est que ce n'est surement rien d'important, de toutes façons j'ai du doliprane dans mon sac donc, plus besoin de vous n'est-ce pas docteur ?"


Moi- Cette femme me fit sortir du laboratoire et me ramena chez moi en chantonnant une jolie mélodie tout le long de la route, suite à ça je l'a surnomma intérieurement "La dame qui chante". Ah ça doit vous dire qu'elle que chose les héros non ? C'est ce que j'ai dit à la petite Eri, quand je me faisait passer pour Aoi, elle m'avait demandé pourquoi je faisais des choses méchantes et je lui avais répondu que c'était de la faute à "la dame qui chante". Évidemment vous avez pensé que c'était Mélodie mais en vérité c'était sa mère.


"Je m'étais relevé pour aller rendre visite à Yura mais je vis de la lumière dans le salon alors je m'approcha et vis ma mère discuter avec la dame qui chante, même si discuter était un bien grand mot.

- Pourquoi es-tu venue Kaiya ?! Tu disparais avec un homme étranger à notre monde et ensuite tu reviens comme une fleur et tu me causes des problèmes avec le docteur ?! Alors dis-moi, que cherches-tu exactement Kaiya ? s'époumonait ma mère.

- Et bien j'aurais envie de te répondre que cela te concerne autant que me concerne les "problèmes de santé" de ta fille mais comme ça ne va rien changer à la situation je te propose plutôt un marché : dis moi ce que tu comptes trafiquer sur le corps de ta propre fille et je te révèle la raison de ma venue - crois-moi le savoir ne te fera pas de mal -.

Ma mère sembla hésiter quelques instants ce qui fit ricaner la dame qui chante.

- Allez Manami, on pourrais faire équipe, comme au bon vieux temps, quand on se racontait tout !

- On compte essayer de transférer l'alter de mon autre fille dans Yume mais sans l'aide d'All for One : on veut faire la prouesse de le faire grâce à la science afin de pouvoir le reproduire à l'infini. Yura a aussi des examens mais de son coté. Il faut qu'on se dépêche, elle va bientôt crever cette morveuse."


Moi- J'aimais vraiment bien la mère de Mélodie, je voulais lui ressembler. Et puis un soir, alors qu'elle discutait avec ma mère j'ai découvert la raison à tous ces examens. Un transfert d'alter. Certes, All for One en est capable, c'est même tout le principe de son alter, mais ma mère et le docteur, eux, voulaient le faire "manuellement", afin de pouvoir le faire sur n'importe qui quand ça leur chantaient. J'imagine que s'ils y étaient arrivés ils auraient fait un sacré business. Et puis je découvris par la même occasion que ma sœur allait mourir.


"La dame qui chante fronça les sourcils.

- Et si ça foire ? T'en fais quoi de tes gosses ?

- Bah, la première est malade et va mourir bientôt comme je te l'ai dit quant à la deuxième, elle est complètement inutile, elle n'a même pas d'alter, alors ce ne sera pas une grande perte."


Moi- Quand elle avait parlé, ma mère avait bien fait comprendre le peu de valeur que l'on avait à ses yeux alors, je me précipita dans la chambre de ma sœur, je ne savais pas exactement ce que je voulais faire mais je savais que je ne voulais pas rester ici jusqu'à ce que Yura meure toute seule de son coté après qu'on lui ai arraché son alter, le seul élément chez elle qui avait fait sa fierté.


"- Yura ! On doit partir !

Ma sœur se redressa péniblement étant déjà probablement presque endormie avant mon irruption dans la chambre.

- Qu'est-ce que tu dis ? me demanda t'elle en se frottant les yeux.

- Maman a dit... Maman a dit qu'on avait aucune importance à ses yeux, on va rester là à exécuter ses désirs jusqu'à ce que... Jusqu'à ce que... peinais-je à trouver mes mots.

- Je meure ? termina t'elle d'un naturel déconcertant. Oui je sais. Je sais, déclara t'elle plus péniblement. Regardes moi Yume. Je suis devenue faible. Je ne suis plus rien. Maman n'a même pas jugé utile de me cacher mon destin, continua t'elle les larmes aux yeux.

Je recula en titubant, choquée de l'état de ma sœur et du comportement de maman.

- Mais... Mais au final c'est-c'est pas très-très grave, bégayais-je tout en sachant très bien que mes paroles étaient fausses, mourir ça arrive à tout le monde et en attendant on peut s'enfuir avec la dame qui chante, c'est une gentille dame tu verras, et puis on fera pleins de jeux et... Et...

- Yume, me coupa Yura."


Moi- C'est à ce moment que je déclencha mon alter, qui étais resté paisiblement endormi jusque lors.


"- J'ai peur de mourir."

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