✎ Chapitre 29 : Mettre fin au désastre
La nuit que j'avais passée n'avait pas été une partie de plaisir, loin de là. J'avais beau essayer de faire taire mes pensées, elles revenaient toujours à la charge. J'avais donc tenté de fermer l'œil tout en les laissant faire, en vain. Résultat, je n'avais pas réussi à fermer l'œil de la nuit.
La discussion que j'avais eu avec mon supérieur m'avait, à mon plus grand étonnement, beaucoup apaisée. Je ne me sentais plus autant torturée par la fin tragique de ma dernière mission, bien que la blessure en moi était loin d'avoir cicatrisé. À présent, j'étais déterminée à changer de vie, à prendre un nouveau chemin, à passer un cap. Tout cela, je me sentais désormais prête à le faire. Je n'étais plus retenue par ce besoin de protéger, de prendre soin de ma sœur. En toute honnêteté, l'annulation de cette responsabilité avait engendré la libération d'un immense poids qui pesait sur mes épaules depuis bien longtemps.
Il se trouvait que, hier soir, j'avais pris une décision cruciale. En effet, j'avais prévu de mettre fin aux recherches que les autorités menaient pour me retrouver. Autrement dit, j'avais décidé de me livrer moi-même aux héros.
J'avais fini par comprendre la gravité de la situation. Si je voulais avoir une chance de revoir Shoto et de pouvoir à nouveau passer du temps avec lui, ainsi qu'en compagnie des incroyables personnes qui constituaient la seconde A, je devais obligatoirement passer par cette étape. Je devais me rendre, c'était indispensable. Ainsi, après avoir assumé les terribles conséquences de mes actes, j'allais pouvoir tout recommencer à zéro. Cela allait sans doute être long et difficile à traverser, mais j'étais certaine de pouvoir y arriver. J'étais désormais capable de tout surmonter grâce à cette volonté qui s'était éveillée plus tôt en moi.
Le ciel était encore un poil endormi, bien que l'aube venait blanchir l'horizon peu à peu. Voilà que j'avançais assurément, regardant droit devant moi, en direction du lycée Yuei. Après plusieurs heures de travail acharné, j'étais parvenue à forcer l'ouverture de son mur de sécurité, grâce à ma compétence de piratage informatique.
En effet, j'avais décidé de mettre fin à ma fuite à cet endroit précis. Je me fichais royalement de ce dont j'allais avoir l'air, ni même de la peur ou bien le dégoût qu'allaient ressentir la plupart des étudiants en me voyant débarquer, et ce parce que je ne venais pas pour eux. Les seules personnes qui m'intéressaient n'étaient autre que mes anciens camarades de classe. Et, quand bien même la majorité me dévisageait de la même façon que le reste de l'établissement, cela ne faisait rien. Je savais néanmoins qu'une personne dérogerait à la règle. Et cette personne, c'était Shoto. Lui et seulement lui était certain de cerner le fond des choses, et de comprendre que ce que je voulais montrer, c'était que je n'avais pas un mauvais fond comme les autres le croyaient. Voilà tout ce qui comptait pour moi.
Après tout, n'était-il pas normal de mettre fin à quelque chose là où tout avait commencé ?
Arrivée -après vingt bonnes minutes de marche intensive- à destination, je pris le temps de m'arrêter pour inspirer et expirer un bon coup. J'attendis quelques secondes, scrutant les alentours pour vérifier la présence ou l'absence de gens dans la rue. Comme le jour venait à peine de se lever, la plupart des habitants étaient encore cloîtrés chez eux, bien au chaud dans leur lit. Seules quelques personnes étaient dehors, occupées à sortir leurs poubelles. Heureusement pour moi, personne ne faisait attention à moi. J'étais même presque sûre qu'aucune d'elles ne m'avaient reconnue, bien que mon nom et ma photo étaient probablement affichés partout dans la ville.
Je pris mon courage à deux mains et m'avançai en direction de l'entrée du bâtiment principal. Je m'engageai dans le premier couloir, puis dans un des escaliers. La fatigue ramollissait mes mouvements, je n'étais clairement pas au meilleur de ma forme. Maintenant que j'avais fait un pas vers la fin, il était impossible de faire demi-tour. Même si je le voulais, je ne pouvais pas. Mon manque de sommeil jouait en ma défaveur et atténuait royalement mes capacités intellectuelles comme physiques.
Je m'arrêtai quelques secondes plus tard devant le bureau du directeur, lieu où j'avais prévu de me dénoncer. Sans tarder, je frappai à la porte et attendis que la souris m'autorise à entrer pour le faire. En ouvrant la porte, je pu constater qu'elle était en train de terminer sa tasse de thé.
À ma vue, le proviseur haussa un sourcil. À l'évidence, il ne me reconnaissait qu'à moitié. Je ne pouvais pas lui en vouloir puisqu'il n'était que 7h du matin. Il était rare que quelqu'un ait les idées claires à une heure pareille.
-Bonjour, commençai-je comme si de rien n'était.
La souris me dévisagea de plus belle.
-Bonjour...?
Elle semblait on ne peut plus perplexe.
-Qui êtes-vous ? J'ai l'impression de vous avoir déjà vue, mais...
Je laissai échapper un soupir.
-Ne vous fatiguez pas, répondis-je avec une pointe d'assurance. Je vais vous rappeler qui je suis...
Je passai une main dans mes cheveux.
-Je suis T/p Toga, la vilaine qui était en infiltration dans votre lycée et qui s'est soudainement enfuie, déclarai-je.
Sur ces paroles aussi tranchantes qu'une lame aiguisée, les yeux du proviseur s'écarquillèrent d'un seul coup. Il se leva subitement de sa chaise et prit une position défensive, comme s'il craignait que je l'attaque. J'avais presque envie de rire, puisque j'étais là pour annoncer ma défaite et non pas pour les attaquer. Mais, à en voir l'expression de son visage, il n'était pas prêt à entendre ces mots sortirent de ma bouche :
-Si je suis ici, ce n'est pas pour vous nuire, repris-je d'un ton qui se voulait sérieux. Je viens pour mettre fin à cette histoire. Je me rends.
Si un trop plein de surprise pouvait faire sortir les yeux de leurs orbites, ceux de mon interlocuteur auraient été éjectés sauvagement, laissant celles-ci aussi vides que le néant.
-Êtes-vous sérieuse ? m'interrogea-t-il dans le but de vérifier mon honnêteté.
-Très.
Pour prouver la crédibilité de mes paroles, j'enlevai les armes qui étaient accrochés à ma ceinture et les déposai délicatement sur le sol. La souris prit en compte mon geste, puis informa ses collègues de ma présence à l'aide de son téléphone.
Une trentaine de secondes plus tard, les autorités débarquèrent à toute allure de sorte à ce que je n'ai pas le temps de me désister, même si ce n'était pas du tout mon intention.
-T/p Toga, vous êtes en état d'arrestation ! déclara l'un des policiers avant de s'avancer rapidement vers moi.
Derrière lui se rangeait une lignée de héros professionnels, plus intimidants les uns que les autres.
Ses mains vinrent me passer des sortes de menottes qui enveloppaient les miennes, sûrement équipées d'un système anti-alter. Il me tira vers la sortie et m'entraîna dans les couloirs du lycée, qui commençait à être envahi d'étudiants.
Si seulement la classe A pouvait voir ça...
Pdv de Shoto :
-Les gars ! Venez voir ! s'écria une voix non loin de nous qui semblait être celle de Ashido.
Alors que je m'apprêtais à la mettre dans ma bouche, je lâchai ma brosse à dent sur laquelle reposait un échantillon de dentifrice sur le bord du lavabo.
-Quoi ? fis-je, néanmoins trop faiblement pour qu'elle puisse m'entendre.
-QU'EST-CE QU'IL Y A ?? ajouta plus fortement Kirishima.
Nous entendîmes des pas qui se rapprochaient de nous à toute vitesse. Sans perdre de temps, ne souhaitant pas arriver en retard en cours, je pris de nouveau en main l'objet et l'approcha de mes dents.
-Je crois que T/p s'est faite attraper !
Je failli recracher le contenu de ma bouche.
Je relevai la tête, pour me retrouver nez à nez avec les nouvelles venues. Ces paroles avaient été prononcées par nul autre que la fille aux cheveux roses, qui venait tout juste de nous rejoindre dans la salle de bain commune, accompagnée de Toru et de Asui.
-On vient de la voir traverser la cour ! renchérit l'adolescente invisible. Je crois bien qu'elle est en train de se faire escorter jusqu'au commissariat !
-T/p ?! s'étonna Denki. Mais qu'est-ce qu'elle fiche à Yuei ?!
-On n'en sait pas plus que toi, répondit Tsuyu.
-Allons voir ça de plus près ! déclara Ashido, puis elle partit en courant.
Tout le monde la suivit, sauf moi, qui était trop occupé à terminer mon brossage de dents. Une fois fini, je me précipitai pour rejoindre mes camarades dehors.
En effet, sous mes yeux inondés d'incompréhension, T/p était en train de se faire emmener. Pourtant, la scène avait beau être authentique, j'avais l'impression que quelque chose clochait. Elle ne semblait pas le moins du monde déchaînée, puisqu'elle se laissait faire par les autorités. Elle avait même l'air étrangement détendue. Comment cela se faisait-il ?
-Elle s'est rendue, annonça Eraser Head comme s'il avait lu dans mes pensées, qui sortait de nulle part. Elle est venue jusqu'ici pour déclarer forfait. Brave décision, vous ne trouvez pas ?
Nous restâmes tous bouche-bée. "Rendue" ? "Déclarer forfait" ?Comment était-ce possible ?! Je l'avais pourtant aidée à s'enfuir et encouragée à vivre comme elle l'entendait. Alors, pourquoi avoir fait ça ? Pourquoi avoir tout fait tomber à l'eau ?
J'ai besoin que tu m'expliques, T/p...
-En effet, c'est une sage décision... approuva Momo à mes côtés, qui ne cessait de la scruter.
Puis sa silhouette disparu dans la voiture de police.
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