J'ai tué un enfant aujourd'hui.

Il n'avait que 4 ans. Je ne serai jamais poursuivi pour cet acte ; à proprement parler, ce n'est pas ma faute. Je n'avais aucun contrôle là-dessus.

Cela ne veut pas dire que je n'ai pas de remords, cependant.

Mais je le referai, c'est certain. Ce n'est pas la première fois que cela arrive, et ce ne sera pas la dernière.

Il n'a aucune idée de l'agonie laissée derrière lui.

Il est insensé, paisible. Ça fait mal maintenant, bien sûr, mais il sera oublié dans 90 ans, une vague photographie pliée d'une seule vie étouffée. Je ne l'oublierai pas pour autant. Je continuerai de le bercer jusqu'à ce qu'il se désintègre à nouveau sur Terre.

J'ai toujours été une vagabonde, je ne me suis jamais installée nulle part. Une nomade perpétuelle et saisonnière.

Le monde que vous connaissez est un endroit magnifique, produisant de nouvelles couleurs et se décomposant lentement dans le temps et l'espace, mais aucun pays ne sera jamais ma maison. Ce n'est pas comme ça que les choses se passent pour moi.

J'étais autrefois l'impératrice du peuple, leur amie spécial, l'ancêtre, une enfant, mais ces gens font partie du passé maintenant. Les nouvelles personnes, les personnes haineuses, me traitent comme une ordure. Un désert hideux et douloureux, c'est ce que ressent mon âme. Parfois, j'en frissonne, la pure insouciance, même si j'essaie de l'avaler.

Vous m'avez déjà rencontrée, plusieurs fois.

Je me souviens de vous, parmi les millions d'autres visages.

Vous me trouvez probablement fascinante, comme la plupart des gens.

Vous connaissez mon nom.

Je connais le vôtre.

Pourtant, je me sens profondément seule, même si je ne le suis jamais.

Je donne et donne et donne, des choses qui ne sont pas toujours à moi, mais j'en prends aussi.

J'ai emmené Vincent aujourd'hui. Je l'ai réclamé tranquillement d'une crique rocheuse. Il n'est pas le seul, mais il est l'un des plus jeunes. Je le connais aussi depuis longtemps, tout comme vous.

Me comprenez-vous?

Je parle plusieurs types de langue. Je veux que vous me comprenniez.

J'ai besoin de votre aide, et d'autres comme vous.

Je suis en train de m'étouffer.

Regardez vite et prêtez attention, avant que je ne m'éloigne.

Je serre chaque côte dans mes bras à la fois, pendant un bref instant.

J'ai déjà tué. Je tuerai à nouveau, et je serai là des milliers d'années après vous.

J'ai toujours été ici.

Je suis la mer.

Saisissez un coquillage et écoutez-moi.