Image non conforme (part I)
Il fait sombre et ça sent le renfermé. Les lumières sont éteintes dans le véhicule et le siège conducteur et allongé vers l'arrière pour rendre la position plus confortable, pour moi comme pour Vanessa sur le siège passager. Cette prostituée que je connais bien fait son travail en laissant glisser entrer mon sexe dans sa bouche dans un va-et-vient dont la fréquence et la profondeur sont savamment calculés pour faire jouir rapidement et passer à un autre client. On se connait bien, on évolue dans la même mélasse l'un et l'autre, mais quand on parle de fric ou de boulot, le professionnalisme revient.
Curieux de voir comment l'amitié ou les relations sociales sont stoppées sur des sujets particuliers.
Mais bon, peut-être que notre relation est la raison pour laquelle elle n'utilise pas ses mains... à moins qu'elle veuille me faire payer un extra pour ça... Je n'en sais rien. Là n'est pas le problème.
Le problème c'est que je n'arrive pas à jouir ou même à prendre du plaisir. Ne me demandez pas pourquoi, je ne saurai pas vous répondre. Je fais quelques gémissements pour l'encourager, mais ça vient pas.
Ce qui vient en revanche, c'est le coup de fil intempestif sur le kit mains-libres de ma camionnette. Vanessa va pour s'arrêter, mais ma main va chercher sa nuque et lui intime gentiment de continuer. Puis, à la seconde ou troisième sonnerie, je décroche en communication privée via mes implants. Vanessa n'entendra rien.
— Salut Doug. C'est Romuald. Tu vas bien ?
— Qu'est-ce que ça peut te foutre ? Répondis-je gentiment.
— Ça a l'air d'aller alors... répliqua-t-il avec un petit rire. J'ai du taf pour toi.
Ma main va sur la gorge de la professionnelle du sexe et fait sortir mon membre de ses lèvres. Elle se redresse un peu déçue : pas de jouissance, pas d'argent. Elle comprends que la conversation est importante lorsque je redresse mon siège avec un regard sérieux.
— Vas-y, je t'écoute.
— Voyons... Tu sais bien que je ne dirais rien sur le réseau. Mais si tu veux en parler, je suis à la salle de sport.
Mon regard se porte sur ma voisine en train se se rattacher les cheveux dans la pénombre et de se remettre "en forme" pour attirer un nouveau client. La lumière s'allume quand elle ouvre la portière pour sortir. Je la retiens par la main.
— Dans combien de temps ? Demandais-je
— Tu peux être là dans combien de temps ?
— Vingt minutes.
— A dans vingt minutes alors.
La conversation finie, l'éclairage revenu sur le taudis ambulant qu'est ma camionnette, je trouve un créditube disposant de suffisamment de liquidité pour la payer. Elle n'est pas responsable ni de mon état, ni de l'appel intempestif. En plus, je lui ai fait perdre du temps... Et puis je l'aime bien, j'ai pas envie de me la mettre à dos.
Elle m'ignore et descends quand même du véhicule.
— Garde-ça. Tu pourrais en avoir besoin. Prochaine fois par contre, tu prends un supplément.
— Avec plaisirs.
— Comme tout les clients, réplique-t-elle avec un sourire triste en fermant la portière avec un claquement de casserole.
Je jette le système de paiement dans le vide-poche avant de démarrer mon tacot. Les phares s'allument automatiquement et je vois la prostituée au corps de rêve traverser les faisceaux en me faisant un petit signe de la main. Cheveux courts, rose qui tirent sur le blond au niveau des pointes, un visage d'ange, un corps emballé dans un manteau gris renforcé pour pouvoir survivre en cas de problèmes... Le parking souterrain dans lequel nous sommes n'a rien à envier en propreté à mon véhicule. Sale, quelques épaves trainent aux milieux de véhicules fonctionnels et de détritus divers.
Je sors de mon emplacement et éclaire la route de Vanessa jusqu'aux escaliers avec mon engin. Je suis presque persuadé qu'elle doit en s'amuser de cette réaction de "gentleman" à une époque où la parité est actuelle : tout le monde dans la même merde. Comment je le sais ? Son derrière commence à prendre de l'amplitude dans sa démarche et elle croise les jambes à chaque pas.
Faut qu'elle arrête où elle va finir par terre...
Bah non, elle atteints la porte des escaliers, la passe et je l'imagine remonter vers la surface en suivant les escaliers en bétons pour rejoindre ses collègues. Masculins, féminins, transexuels, homosexuels, etc.... vous trouvez ça réducteur ? Ajoutez aussi les races : orcs, elfes, nains, trolls et métis en tout genre... Pas encore suffisants ? Prenez en considération des équipements divers comme des prothèses cybernétiques, l'utilisation de drogues (numériques ou chimiques) ou bien de moyens magiques plus ou moins dangereux pour vous donner ce que vous désirez... A savoir du plaisir contre une rémunération.
Ma camionnette reprends sa route, en suivant le chemin en empruntant une succession de rampes d'accès. Puis j'arrive à une barrière de péage d'où je m'acquitte de la redevance avec le créditube dont n'a pas voulu Vanessa. Je vérifie la ponction effectuée, et ça corresponds.
Payer, je veux bien. Me faire escroquer parce qu'un Decker a piraté le terminal pour se payer sa dose... pas vraiment.
Dehors, il fait nuit. L'éclairage public tient encore le coup dans le quartier, mais ça fait longtemps que les services sanitaires évitent le quartier pour ramasser ce qui traîne dans la rue. Que l'on parle des gens ou des détritus. Des ombres se déplacent parmi les ombres, tels des fantômes voulant éviter les ennuis ou au contraire, préparant un coup fourré potentiellement mortel.
J'en profite pour vérifier la position de mon arme dans le holster d'épaule gauche. Par précaution, je retire la protection du holster. Si j'ai besoin de la sortir rapidement, j'ai pas envie d'être dérangé par ce truc.
Au loin, devant moi, le centre ville. La ville lumière où les tours de verres touchent le ciel. Hologrammes, musiques, lasers dans le ciel, dirigeables avec panneaux publicitaire...
Ne vous y fiez pas. C'est la même merde qu'ici.
Sauf qu'ici on est libre. Pas dans une cage, qu'elle soit dorée ou non.
Mon van entre sur la chaussée avec un léger bruit de suspension rouillée, mais prends vite la direction de la salle de sport. Les lumière blafardes de la villes et de mon camion ne me gênent pas plus que cela : un implant rétinien de vision sous faible luminosité compense les risques de surprise. Et ne comptez pas sur moi pour m'arrêter aux feux rouges s'il n'y a personne dans la rue : je ne veux pas d'aventures ce soir. et je risque pas grand chose, la nuit, les flics ne viennent pas dans le coin. Sauf si un tueur de flic s'y trouve mais c'est une autre histoire...
J'évolue aisément dans ces parties sombres. à certains endroits, je préfère couper les phares pour être un peu plus discret. J'entends des coups de feu épars et distants qui ne me concernent pas. Je croise également un gang de bikers orcs en quête d'un bar à ruiner ou d'un règlement de compte à effectuer ainsi que trois punks en train de dépouiller un SDF en riant.
J'arrive à la salle de sport. Un simple garage retapé pour permettre de soulever de la fonte et taper dans des sacs de sables. Le rideau est baissé, mais il y a un accès à l'arrière pour ceux invités tardivement.
Je gare mon bahut juste devant, puis je sors avec assurance et fais le tour de l'établissement pour taper à la porte. Au bruit, elle est blindée. Les lourds verrous tournent avant qu'un troll de grande taille en survêtement bleu ne m'accueille avec un sourire. Je fais un mètre soixante-quinze, et c'est à peine si je lui arrive aux épaules. Il a des cornes de taureau, une carrure d'éléphant et une mine de patibulaire pour quiconque serait intéressé pour chercher des noises au patron. De ce que je sais, il a pire que sa bouille pour ceux qui auraient la témérité de le faire réellement. Pour le reste, j'en sais rien, Romuald a toujours été réglo avec moi, j'ai toujours été réglo avec lui. Je sais déjà ce qu'il voit. Un humain mal rasé avec un long manteau posés sur un tee-shirt qui avait vu des jours meilleurs. Le pantalon de chantier, sombre, usé mais toujours fonctionnel surmontant des chaussures d'intervention discrètes. Ma coupe en brosse courte est à mi-chemin entre celle d'un militaire et d'un SDF. Mes cheveux sont d'un roux ancien et délavé... Même si ça fait un bail qu'ils n'ont pas vu la douche.
— Bonsoir Doug, déclare-t-il avec sa grosse voix.
— Bonsoir Mike, Romuald m'attends.
— Je sais, mais j'ai une procédure à respecter.
— Pas de problèmes, dis-je en rentrant pour me mettre face au mur du couloir, les mains dans des cercles jaunes dessinés dessus. Comment va ta femme ?
— Ça va, elle a trouvé un travail de femme de ménage dans un hôtel, réponds-il en fermant la lourde porte qui se verrouille tout de suite. Tourne -toi, une arme ?
— C'est cool ça, ça a pas dû être facile. Toujours la même au même endroit, dis-je en soulevant le manteau.
Il prends mon pistolet, vérifie que la sécurité est bien mise avant de la déposer dans un sac de sport. Puis, il entreprend une fouille au corps sur de potentielles autre menaces.
— Tu devrais de maquer Doug, sincèrement, ça change la vie.
— Très peu pour moi, merci. Pas envie de m'emmerder avec ça.
— Mais... y'a bien cette petite pute que t'aimes bien non ? T'as pas envie d'essayer de fonder quelque chose avec elle ?
— Mike, c'est justement parce que je l'aime bien que je ne veux rien d'elle. Si un "run" part en vrille, je ne veux pas qu'elle devienne une cible pour m'atteindre.
— Compréhensible, déclare-t-il la fouille terminée, allez fait pas attendre Romuald, il est dans le bureau en haut.
Du coin de l'œil, je le vois accrocher le sac à un crochet qu'il monte jusqu'au plafond, là où sont généralement accrochés les affaires des sportifs. La salle est déserte, les éclairages fonctionnels ne sont que ceux rattachés à la sécurité incendie. Pourtant il est visible que le bâtiment est propre et le matériel entretenu même s'il est loin d'être neuf. Je monte les escaliers qui mènent vers un bureau éclairé. Je tape à la porte puis j'entre dans la pièce.
Romuald est derrière le bureau du directeur, habillé dans une tenue décontractée correcte. Mais il n'est pas seul. Trois autres personnes sont présentes, on ne se connait pas, mais un "runner" sait très bien repérer un autre "runner". Par conséquent, il est inutile de faire des présentations poussées : nous nous "connaissons" déjà.
— Salut Doug.
— Salut Romuald, dis-je en observant son visage de demi-elfe d'origine asiatique.
— Tu arrives pile à l'heure. Notre client de ce soir aime la ponctualité, et ça commences dans cinq minutes. Alors on va se connecter, prendre la mission, et faire les présentation après. Ça te va ?
— Pas de problème.
Je m'installe contre un classeur-armoire servant à la décoration et attends le lien du réseau.
Il ne tarde pas à arriver, et je suis projeté dans une autre réalité. Mon inquiétude du début, celle qui fait que je n'arrivais pas à faire quoi que ce soit prends forme : nous ne sommes pas dans un lieu neutre et discret du réseau. Nous sommes dans une salle privée d'une société d'événementiel... Conçues pour faire de jolies présentations lors de réunions d'entreprise ennuyeuses pour troupeaux salariaux. Qui sait qui nous écoute actuellement.
— Y'a plus qu'à les attendre maintenant.
— Non, nous sommes là, fit une voix sortie de nulle part avant que deux personnes n'apparaissent devant nous.
La première est une femme d'une quarantaine d'années habillée dans un tailleur noir. Elle est élégante et se tient fièrement devant nous. Des cheveux poivre et sel noué en chignon derrière la tête dans une forme de coiffure démodée, un regard dur malgré des yeux d'un brun profond. La seconde personne est un grand noir dans une tenue de sécurité corporatiste, lui aussi a des cheveux blancs sur un visage dont l'inquiétude ne peut être masquée. Les traits sont tirés et la fatigue s'y lit comme dans un livre ouvert.
— C'est votre équipe ?
— Celle que je vous propose du moins. Après, c'est un run. Aucune garantie de réussite, mais une discrétion garantie à votre égard, réponds Romuald.
La femme reste pensante un instant avant de déclarer :
— Bien, faisons affaire. Et le temps est compté. Je suis Armatie Hergan, vice-présidente de CyberTech et je vous demande de retrouver et sauver une personne. Elle s'appelle Clarissa Lamabissa, et elle est la fille de Wilbur Lamabissa ici présent...
Tout en parlant, la photo d'une jeune femme d'une vingtaine d'années apparut sur l'écran de présentation. Les photos s'enchaînaient la montrant souriante et pleine de vie dans de multiples aspects d'une existence sans histoires.
— ... Monsieur Lamabissa est le responsable de la sécurité de notre entreprise, CyberTech. Et nous ne pouvons pas faire appel à la police en raison de sa position. Il serait simple pour un concurrent de la récupérer et se servir d'elle comme moyen de pression sur son père. De plus, cette jeune femme suit actuellement une formation de Decker poussée dans l'un de nos prestigieux centre de formation. Nous avons beaucoup investi en elle, ses résultats et son comportement sont excellents. Nous n'aimerions pas voir cet investissement disparaître. Vous êtes donc chargé de la retrouver et de nous la ramener en pleine santé mentale et physique. Nous sommes inquiet, nous craignons qu'il ne lui soit arrivé malheur et nous voudrions nous assurer de sa bonne santé... Est-ce quelque chose de possible pour vous ?
J'ai peut-être oublié de préciser quelque chose sur les "runs". En particulier sur leurs commanditaires. Primo, ils ne font jamais rien gratuitement ou par bonté. Y'a toujours un bénéfice conséquent derrière. Secondo, ils ne donnent jamais leur vrai nom. Tertio, ils ne donnent jamais toutes les informations en leurs possessions, uniquement celles qu'ils jugent nécessaires à la réussite de notre mission suivant leurs critères. Quarto, il y'a quatre-vingt quinze pour cent de chances, qu'à un moment donné, le commanditaire essaie de nous la faire à l'envers.
— J'ai une question, fit l'un de mes futurs coéquipiers. Depuis combien de temps a-t-elle disparue ?
— Quinze jours.
— C'est payé combien ? Demande un autre sans la politesse du précédent.
— Deux mille par tête en cas de réussite, réponds la femme du tac au tac.
— Est-ce qu'elle a un SIN ? Redemande le poli.
— Bien entendu. Nous vous le fouirons. Alors ?
Romuald nous observe les uns après les autres. Chacun accepte à sa manière. Pour ma part, je ne fais que hocher la tête. Cette histoire ne me plaît pas, je détecte déjà des incohérences dans son discours. Mais j'ai besoin de fric, ne serait-ce que pour manger et payer Vanessa. Je ne peux pas être trop regardant sur la mission. Deux mille, pour retrouver une gamine un peu bourgeoise, c'est plutôt bien payé. Même avec les incohérences.
— Bien, Madame Hergan, nous avons un contrat. Je vous le ferai parvenir dans la nuit. J'espère avoir de bonnes nouvelles à vous faire parvenir rapidement.
— Très bien, monsieur Lamabissa, avez-vous quelque chose à rajouter qui pourrait aider ces personnes ? Interrogea la corporatiste
Le chef de la sécurité s'approcha de Romuald et lui prit les mains avant de le supplier :
— Par pitié, je vous en prie, retrouvez ma fille.
— Nous nous y emploierons.
— Je me permet d'insister sur le dernier point, ajouta la femme. Parfait état physique et mental. Si elle est blessée pour quelque raison que ce soit, le contrat est caduque.
— Bien entendu.
Nous quittons la zone virtuelle pour nous retrouver dans la minable salle de sport de Romuald. Nous nous observons en silence. Ce fut Romuald qui le brisa tout en sortant une bouteille en verre et cinq verres à whisky dépareillés.
— Allez, on fait les présentation de gauche à droite. Tu commences, déclare-t-il au type à l'opposé de la pièce.
— Je m'appelle Fred, je suis un adepte des flingues. J'en ai un peu partout. Je suis aussi doués en corps à corps, fut ce qu'il déclara.
Pour toute personne normale, la présentation est trop courte pour comprendre de quoi l'on parle. Pour un runner, c'est amplement suffisant. Je l'observe. Un humain avec coupe de cheveux noirs bien taillés sur un corps sec, pas un pet de gras, le mec est un sportif qui connait son affaire. Un adepte ? il doit avoir un système nerveux et des muscles boostés pour les discussions viriles qui ne manqueront pas d'arriver. Ses bras cybernétiques en métal sombre sont visibles grâce au marcel kaki qu'il porte. S'il est adepte des flingues, cela signifie que ces derniers sont probablement câblés directement à son cerveau. Un type sur qui compter tant qu'il est payé.
— Amina. Deker.
Celle qui vient d'ouvrir la bouche et prononcer ces mots avec une fausse fraicheur a une peau trop blanche pour être normale. Ses oreilles en pointes laissent clairement entrevoir des racines elfiques. Elle a une bande bleue nuit tatouée qui fait le tour de la tête en passe sur les yeux, chauve, je vois clairement les fiches de câblage qui la relient à sont Deck, clavier portable porté en bandoulière. Elle porte un pantalon moulant en similicuir noir et sa veste un surplus de l'armée. Curieusement, elle porte les même chaussures que moi. Ça me rassure un peu qu'un petit génie du piratage informatique nous aide dans cette histoire... Pour peu qu'il soit doué. Elle me parait bien jeune pour courir les ombres, mais je n'ai pas le droit de la juger : moi-même j'ai commencé très jeune, et j'ai failli y laisser ma peau plusieurs fois.
— Je suis "Chêne de marbre" Shaman de l'Ours, Annonce la brute habillé dans un long manteau en fourrure au fond de la pièce.
Celui-ci a clairement des racines amérindiennes, et la coupe simple des indiens avec une petite décorations de plume et de perles. Le totem de l'ours, c'est le soigneur. Toujours bon à savoir si les balles de .45 commencent à voler.
— Douglas. Détective des bas-fonds.
C'est vrai et faux en même temps. Je n'ai pas de formation d'enquêteur, mais j'ai une grande expérience des zones où il ne vaut mieux pas aller, ainsi que des contacts un peu partout dans ces dites zones. C'est toujours mieux que de me présenter sous la dénomination de "porte-flingue".
Les membres de notre petite équipe m'observent et me jaugent comme je l'ai fait. Je me fout de ce qu'ils pensent. Seul le travail compte. J'en profite pour récupérer un verre servi par Romuald qui est en train de fermer la bouteille.
— Romuald. Je vais pas rentrer dans les détails, mais je suis un "Face"
Un "face", un caméléon capable de prendre n'importe quel rôle et de se faire passer pour tout un tas d'individus grâce à sa personnalité adaptative. Contrairement à la majeure partie des personnes présentes dans cette pièce, il manipule les mots comme des armes de précision.
— Alors ? continue-t-il après avoir bu un peu du liquide ambré dans son verre. Qu'avez-vous pensé de nos employeurs ?
— Y'a plein de trucs qui vont pas dans leur histoire. J'ai pas confiance, dis-je.
— Depuis quand fait-on confiance aux "Johnson" Dans notre métier ? Demande l'adepte. Par contre, je suis d'accord : y'a tellement d'anomalies que ça ne pourrait même pas faire un film pour Holo-vid.
— Désolée, intervint la Decker. Mais je n'ai vu aucune erreur dans le code matriciel de ce qui vient de se passer. Aucune tentative d'intrusion ou d'attaque matricielle... Même pas de mouchards.
A ces mots nous recevons tous les codes-contacts de la part de Romuald. Grâce à ça nous pouvons rester en contact où que nous soyons. Un petit fichier est également joint. Un tout petit truc écrit avec un éditeur de texte bas de gamme que j'affiche sur ma rétine.
"PITIE, NE LA RETROUVEZ PAS"
— Et ça ? Tu l'as vu ? commente Romuald après avoir haussé les sourcils deux fois, un sourire en coin sur le visage. Le père m'a donné ça juste avant la fin de la session... Mais même sans ça, je suis d'accord, ça colle pas. T'inquiète, on va t'expliquer, finit-il en buvant de nouveau dans son verre.
— Quand une corporation a besoin de retrouver quelqu'un avec qui ils ont un contrat, commente "Chêne" avec sa grosse voix, ils font appel à leur propre force de sécurité, au pire, à la police, en particulier quand ils se sentent dans leurs droits. Ils ont des capacités d'investigations et d'interventions bien supérieures aux nôtres. Qui plus est, lancer des recherches quinze jours après... C'est comme si elle ne voulait pas qu'on la retrouve.
— Le lieu de rendez-vous également, ajoutais-je. Ce n'était ni neutre ni à notre avantage. Personne ne sait si nous n'avons pas été observés et enregistrés durant l'entrevue.
— J'avoue que cette histoire sent mauvais... Plus mauvais que d'habitude. Ha ? Tiens ? Voilà la suite... ils sont rapide.
Nous recevons tous le dossier de la corporation concernant la "disparue". Son SIN, des photos, un dossier de la corporation avec ses augmentations, ses caractéristiques, ce qu'elle aime, ce qu'elle n'aime pas... Ça va jusqu'à ses préférences sexuelles et ses croyances.
La vie privée n'existe pas dans une corporation.
— On commence maintenant, démarra Romuald le verre vide dans sa main. On reste en contact par le réseau. Amina ?...
A l'appel de son nom, la Decker releva la tête.
— ... Tu te débrouilles pour accéder à son compte bancaire et à son com-link. Faut qu'on retrouve sa trace. Doug ?
— hum ?
— Les bas-fond. Si elle cherche à se planquer, c'est le meilleur endroit. Fait marcher ton réseau, quelqu'un quelque part a peut-être entendu quelque chose.
— Ça me va.
— Fred, tu l'accompagnes. "Chêne de marbre", tu me passes les rubriques nécrologique de ces derniers jours au peigne fin : ça sert à rien si on court après un cadavre.
— Et toi ? Demanda Fred.
— Moi ? Je retourne à l'école...
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