Chapitre 22

- Maman !

Une adorable petite tête blonde se précipite vers une femme accroupie, se réfugiant dans ses bras avec la ferveur d'un exilé ayant trouvé la Terre Promise.

Le décor est flou, impossible de deviner où la scène se déroule. Seul un léger souffle de vent suggère qu'ils sont à l'extérieur.

- Allons, Denki ! s'exclame t-elle dans un rire doux, qu'est-ce qui se passe ?

Ses mains ébouriffent avec gentillesse ses cheveux, les rendant encore plus décoiffés qu'au départ, sous les vagues protestations de l'enfant.

- Y'a Tahina ! répond t-il, heureux. Y'a Tahina, et il est gentil avec moi !

- Oh, et qu'est-ce qu'il a fait de gentil, Tahina ?

- Il m'a dit que mon alter est super classe !

Un grand sourire ponctue la fin de sa phrase, donnant envie à la mère de le serrer contre elle, pour le protéger de tous les dangers de ce monde. Elle qui symbolise la sécurité, la paix, et tant d'autres choses aux yeux de son enfant, la voilà prise au dépourvu dès que celui-ci sourit, gladiatrice impitoyable désarmée face à un cœur doux.

Quand elle y repense, cela a été pareil avec son père. Les sentiments les plus humbles sont bien de ceux qui nous chamboulent le plus.

Et que dire de Tahina ? Comme elle le connaît, depuis le temps ! Un de ces amis imaginaires que les enfants cueillent dans le jardin de leurs rêveries, pour vivre un fragment de leur existance avec eux, dans une longue mais à la fois trop courte balade à travers le temps.

Elle se relève, et lâche l'enfant, qui lui donne presque aussitôt la main. Elle avance avec lui, sa petite main chaude dans la sienne lui insuffle un désir d'éternité.

La femme et l'enfant disparaissent au loin, devenant aussi vagues que le décor, avant que l'écran de chargement ne remplace cette vue.

Chargement terminé.

- MAMAN !

Le cri poussé par le blond, à l'autre bout du combiné, lui déchire le cœur.

Et pourtant, pourtant...

- Non. Pas la peine de te justifier, j'ai tout lu, en plus d'avoir eu vent de tes dernières notes, ce matin.

Son ton est froid, glacial, même.

Pourquoi est-ce qu'elle dit ça ?

- Tu te fous de ma gueule.

Elle sent sa langue saigner, le fond de sa gorge lui arrache les cordes vocales.

Pourquoi ses mots sont-ils devenu indépendants de sa volonté ?

- Déjà que je me suis saignée aux quatres veines pour te scolariser à Yuei, voilà que tu ne fous rien en cours ! Mais qu'est-ce que j'ai fais pour mériter un gosse pareil ?!

Et sa bouche déballe ses atrocités, alors qu'elle ne le veut pas. Les vrais mots la fuient, s'échappent de son cœur, les remplace par des horreurs. Ses phrases broient ses sentiments, comme un monstre des enfers, se renferment sur son fils et elle, alors qu'elle donnerait sa vie pour lui.

Pourquoi ne contrôle telle plus son propre corps ?

Devenu étrangère de son être, il n'y a que l'âme qui assiste de près à cet immense supercherie.

- NON. Ferme ta gueule, je pense avoir été gentille trop longtemps pour laisser passer ça ! Alors, sois tu fais des efforts, sois... tu t'en doutes.

Qui parle comme ça à son enfant ? Elle repense à tout ce qu'elle a perdu en cinq ans, se dit si elle cherche encore à toucher le fond.

Plus de mari, ni de belle maison, éloignée de ses amis, ce putain de boulot...

Son fils.

À l'extérieur, elle devait apparaître telle la dernière des salopes.

Ah ! Si les gens savaient...

Si certains voyaient plus loin que les mots.

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De : Tahina
T'aurai pas vu Denki ?
???

De : Tahina
Quelque soit ta réponse, j'aimerai que
tu comprennes quelque chose...
???

De : Tahina
La prochaine fois que tu me fais un coup de pute pareil,
je ne te demanderai pas ton avis pour te prendre ton innocence.
???


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