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It makes sense to turn again

All night we turn and turn

Innocence, too young to love

Alone »

Too Young To Love - The Big Pink

🥀 ● 🥀

Printemps 1989

« Pourquoi lorsque le sujet de la famille était évoqué en classe, tous les regards se tournaient vers elle ? Elle était à nouveau la cible de nouvelles moqueries.

La première fois que cela s'était produit, c'était lorsque la maîtresse leur avait demandé d'expliquer à toute la classe le métier de leurs parents. Lorsque son tour était arrivé, elle avait déclaré sur un ton tout à fait naturel qu'elle n'avait pas de père.

C'était à partir de là, que les moqueries sur son père avaient commencées. Blessée et humiliée, elle était restée très discrète sur le sujet depuis, et voulait même cacher le fait qu'elle n'avait qu'un parent.

Mais il y en avait toujours un pour le rappeler et relancer ainsi les moqueries. Elle ne cessait de se demander pourquoi ils étaient aussi cruels avec elle.

Elle se sentait comme la bête noire de la classe, le vilain petit canard que personne ne désirait apercevoir dans son champ de vision. Pourquoi devait-elle endurer ce calvaire ?

Chaque jour, elle espérait se lever et découvrir que tout ceci n'était qu'un affreux cauchemar. C'était le cas, sauf qu'il était réel.

Chaque instant qu'elle passait sous les moqueries, elle se détruisait petit à petit, jusqu'à perdre toute confiance envers les nouveaux visages qu'elle croisait. »

🥀 ▪ 🥀

- Sharon, tu es avec nous ?

La voix de Cassie me sortit de mes pensées. Nous étions en ville à la recherche de bons angles de vue pour une prise parfaite, ce qui n'était pas gagné d'avance.

Francky avait eu cette brillante idée d'organiser cette sortie un samedi après-midi lors des heures de pointe. Nous étions sans cesse bousculés et à chacune de nos prises, un passant parvenait à apparaître dessus, gâchant ainsi chacune de nos photos.

Mais depuis le début de cet exercice, mon humeur était évasive. Elle n'était pas passée inaperçue aux yeux de mes amis.

- Désolée, je...

- Pensais encore à lui, me coupa Francky en levant les yeux en l'air.

Cassie rigola face à l'exaspération de ce dernier et elle lui lança :

- Francky, pour la première fois, Sharon est amoureuse et c'est réciproque. Tu ne vas pas lui reprocher d'être aux anges.

Il soupira, tournant son regard vers moi. Je savais qu'il était content pour moi, mais d'une manière différente. C'était bien Francky ça.

- Si elle n'avait aucun moyen pour communiquer avec lui, je comprendrais, sauf que ce n'est pas le cas.

- C'est bon, Francky. Je t'ai dit que j'étais désolée, répondis-je, agacée.

Je commençais à ne plus supporter toute cette foule. Cette oppression commençait à me rendre mal. Il fallait que je prenne l'air, enfin, un peu plus d'espace pour souffler sans me sentir étouffée par ce monde qui ne cessait de faire des vas et viens. Je m'éloignais vers l'entrée d'un parc beaucoup plus calme. L'air frais du mois de décembre me fit le plus grand bien.

J'avais gardé contact avec Joe. Sa présence me manquait énormément et certes, nos conversations comblaient ce manque, mais ça ne suffisait pas.

Chaque matin, je recevais un doux message de Joe, me souhaitant une belle journée. Tous les soirs, je prenais le temps de lui répondre et ça devenait toujours des conversations téléphoniques interminables.

Nos discussions étaient interminables. On parlait de tout, de notre journée, de notre programme pour le week-end. Mais le sujet qui revenait le plus souvent était celui de la musique. Cette conversation était devenue un rituel, que nous répétions tous les soirs depuis un mois.

- Dès que j'ai quelques jours, je viens te donner des cours de guitares, m'avait-il dit une fois.

Ce que je trouvais formidable, c'était que je ne ressentais plus aucune gêne, j'étais enfin parvenue à me débarrasser de ces barrières qui m'empêchaient d'avoir une quelconque approche avec une personne. Je me sentais comme libérée de cette timidité qui m'empoisonnait la vie.

- Attention !

Sortant de mes rêveries, je tournai la tête et aperçus un jeune homme en vélo foncer tout droit sur moi. Dans l'immédiat, je m'écartai tandis que son bicycle fou continuait sa course à toute vitesse.

Malgré une tentative de dérapage pour arrêter son engin, ce dernier se renversa sur le côté, entraînant son conducteur avec. Ce dernier fit une roulade au sol avant de gire immobile sur l'herbe.

Horrifiée par ce que je venais d'assister, je me précipitai vers lui qui poussa un petit gémissement :

- Tout va bien ? demandai-je.

Il se releva en grognant.

- Oui, ça va.

Quand ce dernier leva son regard vers moi en se tenant le coude, je constatai avec surprise que son visage m'était familier ; les cheveux roux, les yeux bruns.

- Jordan ? m'écriai-je.

C'était le fameux gars qui, selon Cassie, avait le béguin pour moi. Elle n'avait malheureusement jamais pu le prouver.

Jordan semblait gêné d'être reconnu. Il ramassa son engin et s'excusa d'une petite voix timide :

- Je suis désolé. J'ai perdu le contrôle de mon vélo.

- Je vais bien, ne t'en fais pas. Mais toi ? Tu as fait une mauvaise chute.

Il m'adressa un sourire qui était censé être rassurant avant de déclarer sur un ton assuré :

- Plus de peur que de mal.

À mon tour, je lui adressai un sourire soulagé. C'était surprenant que je ne ressente aucune gêne en sa présence. L'effet Joe avait certainement un rapport là-dedans. Jordan, lui, semblait être hésitant, comme s'il voulait me dire quelque chose, mais qu'il n'osait pas.

- Il y a quelque chose qui ne va pas ? questionnai-je.

- En fait, je voulais savoir si tu acceptais... Qu'on se fasse une soirée, juste pour apprendre à se connaitre.

Cette demande me fit l'effet d'une surprise. Jusque-là, Jordan avait toujours été discret et pour notre première rencontre, il désirait une sortie tous les deux. Je répondis, hésitante :

- Heu... oui, on pourrait faire ça, répondis-je, hésitante.

Il montra un sourire ravi et sembla, tout à coup, reprendre confiance en lui.

- Super. Quand est-ce que tu es disponible ?

- Le week-end prochain ?

- Parfait.

Je n'avais même pas réfléchi avant de répondre. Mais ce n'était pas comme si je risquais d'avoir quelque chose avec Joe. Deux heures de route nous séparaient.

Jordan remonta sur la selle de son vélo en toute hâte et avec maladresse avant de déclarer :

- Alors à samedi prochain.

- Mais on se verra en cours, on est dans la même classe.

Il vint frapper son visage avec sa main en se mordant la lèvre inférieure. Finalement, il n'y avait pas que moi qui commettais des boulettes.

- C'est vrai, quel imbécile je suis !

Je poussais un rire amusé avant de le regarder s'en aller au loin, manquant de tomber à nouveau. Jordan m'avait l'air de quelqu'un de sympa. Cependant, j'espérais que Cassie avait tort à son sujet, car je ne voulais pas lui faire de mal en lui brisant le cœur.

- Te voilà ! On pensait que tu t'étais volatilisée.

C'était la voix de Francky qui me ramena à la réalité, il était suivi de ma meilleure amie qui semblait étonnée.

- C'était Jordan ? Jordan Culkin ?

Je hochai la tête, étant moi-même aussi surprise qu'elle.

- Je devine qu'il voulait passer une soirée romantique avec toi, supposa Francky sans avoir la moindre idée de ce qu'il avançait.

C'était en constatant le sourire gêné que je lui montrais qu'il comprit que ce qu'il disait avait une partie de vérité. Il ouvrit grand les yeux et s'exclama :

- Oh, j'ai raison ?

- Presque, en réalité il voudrait faire connaissance avec moi.

Cassie et Francky semblaient perplexes. Malgré mon insistance sur le fait que c'était pour se connaitre et que je ne comptais pas aller plus loin, l'expression qui dessinait leur visage ne changeait pas.

- Sharon, il t'a demandé cette soirée justement par ce qu'il pense à une suite.

- Quand un gars te propose de sortir un soir, c'est tout sauf pour se limiter à de l'amitié, m'expliqua Francky.

Il s'y connaissait puisque lui-même était un mec, et je devrais de l'écouter. Sauf que je me voyais mal revenir vers lui et refuser son invitation. Je l'avais déjà fait avec Joe et sa réaction avait été plutôt... Sauvage. Mais Jordan n'avait rien à voir avec Joe.

- Tu n'as qu'à l'avertir à la dernière minute et lui dire que tu as une gastro.

La proposition de Cassie était efficace, mais cruelle à la fois. Trop cruel pour que je puisse le faire. Pourtant, je devais mettre les choses au clair avec lui.

- Je peux aussi tout lui expliquer à la fin de la soirée.

Cassie haussa les épaules, c'était aussi une autre possibilité.

* * *

Installée sur mon lit, je sortis mon téléphone de mon sac. C'était devenu mon moment préféré de la journée ; avoir ma longue et interminable discussion avec Joe. Après avoir relu une bonne dizaine de fois son message de ce matin, je pressai sur la touche verte du téléphone avant de raccrocher aussitôt.

Une vague de doute m'envahit. Est-ce que je devais lui parler de Jordan ? Je craignais de créer des histoires pour rien. De toute façon, je ne voulais pas m'engager dans une relation avec Jordan. Et Joe ne sera jamais au courant de ma petite sortie avec lui de toute manière.

Highway To Hell de AC / DC interrompit mes rêveries. Cette sonnerie me faisait toujours sursauter lorsque j'étais concentrée ou perdue dans mes pensées et c'était le cas cette fois-ci.

C'était Joe qui rappliquait. L'envie d'entendre sa voix était si forte que je me dépêchai de décrocher. La première chose que j'entendis était un bruit sourd de musique, comme s'il était à un concert ou quelque chose de semblable.

- Joe ? appelai-je.

Avec le bruit qu'il y avait, il devait certainement mal m'entendre.

- Sharon !

Le mélange de son hurlement à travers le combiné et la musique forte provoquèrent un bruit strident qui me fit grincer des dents.

- C'est mon téléphone qui débloque ou tu as essayé de m'appeler et tu as raccroché ?

Sa voix paraissait enrouée et flou, comme s'il avait bu.

- J'ai eu un problème avec mon téléphone.

Son rire béa qui résonna dans le combiné me fit comprendre qu'il avait bu. Mes craintes étaient sans doute ridicules, pourtant j'avais peur qu'il fréquente d'autres filles et me considère comme un bouche-trou. Certes, je n'avais aucune preuve, mais mes doutes étaient là.

- Sharon, tu vas être contente.

Je m'amusais à allumer et à éteindre ma lampe de chevet, intriguée par ce qu'il avait à me dire.

- Avec le groupe, on va revenir en Californie, jouer une nouvelle fois.

Je me redressai étant toute ouïe. Je lui demandai avec pleins d'espoir.

- Vous allez revenir en Californie ? Ça veut dire que...

- Je vais enfin te donner ces putains cours de guitare ! hurla-t-il.

Sous l'effet de la surprise, je ne pus m'empêcher de lâcher un cri de joie.

- Je savais que tu serais contente.

« Adams, ramène-toi! » lança une voix qui semblait être derrière lui.

- Ouai, c'est bon ! lâcha Joe, un peu agacé.

Je me demandai à qui appartenait cette voix. Ce n'était pas celle d'une fille, ce qui me rassura.

- Quand est-ce que vous viendrez ?

- Le week-end prochain.

C'était le même jour où je devais passer la soirée avec Jordan. Je pourrai lui proposer d'aller voir Joe en concert, ainsi, il comprendra qu'entre nous, il n'y aura rien d'autre qu'une future amitié.

- On sera au JJ's Bar and Grill, samedi à vingt heures.

Après l'entente du nom de l'endroit, je ne pus m'empêcher d'afficher un large un sourire ravi. C'était certain qu'il l'avait fait exprès, car il savait que j'adorais cet endroit.

- C'est uniquement pour la bouffe que j'ai voulu y aller, s'esclaffa-t-il.

Je ne pouvais me passer de ce rire qui retentit dans mon oreille. Il était si doux qu'il me fit fondre. Après m'être retournée sur le flanc, je jouai avec ma couverture en m'exclamant sur un ton faussement offusqué :

- Donc, tu veux dire par là, que tu viens plus pour les burgers que pour moi ?

- Tu as tout compris, ma petite !

« Joe ! Bordel, tu fous quoi ? »

Il s'agissait de la même voix l'ayant interpellé quelques instants plus tôt. J'entendis Joe soupirer et déclarer avec fermeté qu'il allait venir, avant de reprendre un ton plus doux lorsqu'il s'adressa à nouveau à moi.

- Je vais devoir te laisser.

J'aurais tant aimé que notre conversation s'éternise. Le son de sa voix m'apaisait. Elle me faisait ressentir des papillons dans l'estomac. Avec lui, je me sentais si libre et j'éprouvais cette fabuleuse sensation d'exister. Sa présence commençait à me manquer. Il nous restait sept jours à attendre et je savais d'avance que ça serait long.

Hey mes Idiots !

Vous sentez la même chose que moi ?

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🌹 Alors, vous le sentez comment ce Jordan ? Il a l'air gentil, hein ?

🌹Qu'est-ce que Joe peut bien faire à Jacksonville ? (Pssst, c'est mon perso favoris, mais chut, faut pas le lui dire, c'est un secret)

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Bref, j'espère que ça vous plait toujours autant

Kisouilles ❤

Insta 📸 : wrxtetodream