16. Roses Rouges

Harley

Je n'arrivais toujours pas à y croire. J'avais couché avec Damon Hansson. Ce type insaisissable. Peut-être allait-il maintenant se montrer plus distant ? Allait-il qualifier tout cela d'erreur ? Mon Dieu, je ne pouvais même pas l'imaginer avec une autre femme. Non. Hier, j'ai cédé, oui, et étrangement... je ne regrette rien. Je n'ai même pas eu peur, sans doute parce qu'il s'est montré plus prudent que moi à chaque étape, demandant toujours mon consentement. Je crois que c'est clair maintenant : Damon était littéralement mon seul espoir, ma lumière, celui qui veillerait sur moi. Attends, qu'est-ce que je raconte ? Il se fiche de toi, Harley, OK ? J'étais indécise, nous nous sommes livrés, nous avons succombé pendant quelques instants, et voilà. Mais pourquoi ai-je l'étrange impression que ce rapprochement allait devenir encore plus profond ? Je crois que... je pouvais retrouver confiance en moi grâce à lui. Oui, je le pouvais. J'ai tellement aimé ce moment. Est-ce que je me sentirais plus en sécurité avec lui, dans une chambre, dans un lit, dans l'obscurité ? Je ne sais pas, mais il fallait que je le découvre, que je vive cela... avec lui, je crois.

Quand il m'a finalement avoué par message qu'Isa était elle aussi une victime de Stephen, je me suis métamorphosée. Ce type est un monstre qui ne mérite pas de vivre, putain.

Je me prépare. Lily était déjà sortie et quand je lui ai dit ce que j'avais fait avec Damon, elle a d'abord cru que je plaisantais. Dans une voiture, sérieusement ? Crédible, non ? Original. Je suis avec vous tous, ceux qui aiment se livrer corps et âme dans une bagnole. Elle était fière de moi. Encore. Peut-être que je parviendrai un jour à l'avouer à mes parents ? Mais à quoi bon ? Je ne veux pas y penser, pas maintenant.

J'enfile un jean noir taille basse et un crop top blanc, dont le décolleté laisse entrevoir juste ce qu'il faut. Est-ce que je m'habillais sérieusement... pour lui ? Je suis pitoyable. De toute façon, j'allais me changer en enfilant leurs tenues gothiques trop sexy. Je me maquille rapidement, trace un trait d'eye-liner noir, et décide de laisser mes cheveux détachés tout en attachant quelques mèches en un chignon. J'enfile mes chaussures, récupère mon téléphone, et me dirige vers la porte d'entrée. Juste à ce moment-là, on sonne. Peut-être que Lily avait oublié quelque chose. Je me précipite et ouvre la porte.. mais il n'y a personne. En baissant les yeux, je remarque un bouquet de roses rouges accroché à la poignée. Hein ? Qu'est-ce que c'est que ça ? Damon ? Non, il serait entré. Je regarde malgré moi autour, mais personne. Seules ces roses rouges. J'entre finalement dans l'appartement et découvre un papier plié. Je le déplie et lis seulement trois mots :

Tu me manques.

Euh, d'accord. Je dépose le mot sur la table sans y réfléchir, attrape mes clés, et sors. J'allais sérieusement être en retard. Je ne vois que Damon qui pourrait m'offrir cela. Je lui demanderai durant mon service.

En arrivant, je découvre Alden, puis Carter qui me saluent gentiment. J'avance dans le long couloir pour poser mes affaires et me changer, mais je tombe sur Isa, en pleurs. Inquiète, je me dirige rapidement vers elle. À ma grande surprise, je découvre Stephen à ses côtés. Mais bon sang, qu'est-ce qu'il fait ici ? Il n'a aucun droit d'être là.

— Oh, ma jolie, me dit-il avec un sourire suffisant.

— La ferme ! Qu'est-ce que tu fous là ? Dégage, tout de suite, ou ça va mal se terminer.

Sans discuter, il relâche l'emprise qu'il avait sur le poignet d'Isabella et s'éloigne lentement, non sans me murmurer au passage :

— J'espère que le bouquet de roses rouges t'a plu. À bientôt.

Mes yeux s'écarquillent en réalisant. Merde. Ce n'était pas Damon ; c'était lui. Fait chier. Il sait où j'habite. C'est quoi encore ce merdier ? Je suis maudite. Calme-toi, Harley. Il y a Damon, il ne le laissera pas te toucher. Je sors de mes pensées, un peu affolée, et me dirige vers Isa. Elle est dans un état lamentable, ses lèvres tremblent. Sans réfléchir, je l'enlace.

— Oh Isa... c'est fini. Il t'a fait quoi, cet enculé ?

Elle semble d'abord surprise par la brutalité de mes mots, puis sèche ses larmes. Je ne savais pas si elle allait se confier, mais si elle le faisait, je le ferais aussi.

— Je... tu le connais ? me demande-t-elle.

— J'aurais aimé ne jamais croiser son chemin, si tu veux tout savoir. Il t'a toi aussi...

Elle me regarde, et dans ses prunelles, je vois tout. On se comprend sans avoir besoin de mots. Le poids de cette réalité nous lie d'une manière que je n'aurais jamais souhaitée.

Je m'apprête à partir, sentant que rester là serait trop douloureux, mais elle retient mon poignet et murmure :

— Merci...

— Camélia aussi est une victime, si tu veux tout savoir. On l'arrêtera, d'accord ? C'est promis.

Aussi abasourdie que moi par mes mots, elle acquiesce doucement.

Je sors et tombe sur Damon. Il me dévisage, et son sourire disparaît aussitôt.

— Ça va ? Qu'est-ce que le pédo faisait ici ? J'ai failli le remettre à sa place, mais son regard en disait long. Tout va bien, rassure-moi, Harley.

Il passe une main dans mes cheveux, puis autour de mes hanches. Je lui murmure :

— Tout va bien. C'est Isa... J'hésite, mais je continue. J'ai un autre problème, par contre... Ce matin, en sortant de chez moi, on a sonné à ma porte et... il n'y avait personne, seulement un bouquet de roses rouges. Et j'ai bien eu sa putain de confirmation... c'était lui.

Il me regarde, mais ne flanche pas. Son regard devient plus dur, et je sais à cet instant qu'il veut me protéger, qu'il ne laissera personne m'approcher.

— Fait chier, c'est quoi son délire avec les roses rouges, merde...

Il me caresse doucement les mains, puis pose un baiser sur mes tempes et murmure :

— Si tu veux, viens chez moi, si tu ne te sens pas en sécurité.

J'acquiesce doucement. Il retire ses mains, et nous pénétrons dans la salle principale du café. La journée s'annonce périlleuse, ça craint.

***

La nuit tombait, et j'entends soudain Matthew hurler dans la salle de repos. Sans réfléchir, je suis ses cris.

— PUTAIN, MAIS TU TE FOUS DE MOI, OLIVER ?! DEPUIS QUAND, HEIN ? DIS-MOI !

— Calme-toi, Matt, écoute... je suis désolé. Je te jure que j'ai une femme et un enfant, mais ça date d'avant notre rencontre. C'était réciproque entre nous, d'accord ?

Je n'ose pas entrer, mais fait chier. Il avait construit une putain de famille dans le dos de celui qui n'avait d'yeux que pour lui.

— C'est bon. C'est terminé. J'ai compris. Dégage et va retrouver ce qui te sert de famille.

Sur ces mots, il se barre.

— Il ne te mérite pas, Matthew.

— Harley... je...

Je ne le laisse pas finir et le prends dans mes bras.

— Chut... C'est bon, c'est fini maintenant. Ton gars, c'était pas un fidèle, putain. Tu mérites tout le bonheur du monde, alors s'il te plaît, avance et fous-le en rogne. Il finira par regretter et se sentir coupable.

— Merci... t'es la meilleure, putain.

Je me détache, il allume une clope, et disparait au loin. Wouah, quelle journée...

Je pars me changer et rejoins la salle principale. Il n'y a plus de clients, et tant mieux. Je repère facilement Damon, qui me détaille avec un sourire en coin. Oh non, fait chier. Mon bas-ventre commence déjà à s'enflammer, et sans plus attendre, je me dirige vers lui.

— Arrête ça tout de suite, ça me déconcentre.

— Je te déconcentre, me dit-il en riant.

Je sais que Stella est encore au comptoir et qu'elle est sans doute en train de nous fixer et d'écouter ce stupide échange.

— Bon, allez, viens, me dit-il.

En quelques minutes, on se retrouve dehors.

— Merde, Damon, attends. Je dois d'abord passer chez mes parents récupérer un truc. Et qu'est-ce qu'on fait pour ma voiture ?

— Pas de souci. Tu vas gentiment m'indiquer le chemin, tu récupères ce que tu as à récupérer, puis on ira tranquillement chez moi. Quant à ta voiture, je vais la garer dans le parking souterrain privé, ça te va ?

J'acquiesce doucement, je monte dans sa voiture, celle qui me rappelle tant de souvenirs. Je lui passe mes clés et patiente. Je suis à la fois excitée à l'idée de passer la nuit chez lui, mais je dois rester sur mes gardes. Le monstre n'est jamais loin. Et en fait, il sera juste au-dessus de nous... Cette pensée me déroute, mais je m'en fous. Du moment que je suis avec lui.

Il revient, mes clés en main. Il monte d'un bond et me murmure :

— C'est réglé pour ta voiture, tu m'indiques le chemin alors ?

Je lui souris et réponds :

— Merci beaucoup, merci pour tout, Damon, putain.

J'inspire profondément, ma tête bascule en arrière sur le siège, et je finis par lui indiquer le chemin. Il pose soudain une main sur ma cuisse, ce qui me pousse à le regarder.

— Hé... ça va aller. Je ne sais pas à quoi tu penses, mais, pitié, dis-moi que ça n'a aucun rapport avec cet enfoiré. Je ne veux pas que tu penses à lui. La seule façon de te libérer, c'est de céder, de succomber, et d'avancer, Harley.

Je lui souris en réponse et entrelace ma main dans la sienne. On ne bouge pas, et les premières notes de "Fire on Fire" de Sam Smith résonnent doucement dans l'habitacle. Je ferme les yeux et fais le vide.

Quelques minutes plus tard, Damon coupe le moteur, et nous descendons, d'un pas synchronisé.

— Wow. Jolie demeure.

— Mon père a toujours voulu se faire remarquer, dis-je.

— Ça n'a pas loupé, hein, dit-il en riant.

Nous nous avançons et je toque. C'est Ryder qui ouvre.

— T'es qui toi ?!

— Bonjour, ça va très bien, merci, dit Damon.

Je ne pus retenir un rire.

Je dis à Damon que je me dépêche, puis je monte à l'étage en vitesse.

Damon

— Ryder, reviens ici et laisse ta sœur tranquille.

Ma respiration s'arrête. Quoi ?! Cette voix rauque... Mais... Je me tourne et ne puis retenir ma stupeur en le voyant.

— Damon ?! murmure Gray.

Quel choc. Quand il est venu voir sa « fille », il s'agissait de... Harley ?! Je me racle la gorge, soudain gêné, puis réplique :

— Quelle surprise... Grayson Elsson.

— Puis-je savoir ce que vous faites ici, exactement ?

C'est à ce moment que je vois Harley redescendre.

— Oh, salut papa.

Je crois qu'elle ne comprend pas l'expression sur mon visage toujours étonné. Eh bien, je n'aurais jamais parié que c'était son père, bon sang.

— Harley... pourquoi Damon est-il là ?

— Vous vous connaissez ? s'offusque-t-elle.

— Mieux tu en sais, mieux tu te portes, ma fille. Ne traîne pas trop avec lui...

Est-il sérieux ? Je ne réponds rien et tente de maîtriser la fureur qui monte en moi. Harley Elsson Owen. Voilà de quoi me faire remonter des années en arrière. Je fixe Harley, son regard rempli d'interrogations, et elle prend soudain la parole, à ma grande surprise. Allait-elle avoir peur de moi après tout ce que j'ai fait ? Se méfier ? Ne plus me fréquenter ?

— Hum, ce n'est pas que, mais nous devons y aller. À plus tard.

Et sur ces mots, elle s'en va, et je la rejoins. Nous montons dans la voiture et je la regarde.

— Tu ne vas pas répondre à mes questions si je t'en pose, n'est-ce pas ? me dit-elle.

J'ai une folle envie de tout lui raconter. Mais c'est difficile, cela me ramène à mon passé, à la mort de ma sœur, à l'abandon de mes parents, Neslie et tout le reste. Je racle la gorge et réponds doucement :

— Je sais que tu sais peu de choses sur moi, Harley. Je te promets que tu sauras, mais pas maintenant. Je ne pensais pas retrouver Grayson Elsson sous ton toit, c'est tout.

Elle me regarde puis se recentre sur la route. Est-elle vexée ?

— Je comprends, se contente-t-elle de dire.

Ça me fait mal de lui cacher tant de choses, mais je ne connais pas bien sa réaction. Elle m'avait confié son horrible secret, et je n'avais pas véritablement parlé de moi. Peut-être que ce soir, j'y parviendrai. Fait chier.

— Damon... ça va ?

Elle a sans doute remarqué mes doigts crispés sur le volant. Je me détends et acquiesce doucement. Je lui jette un rapide coup d'œil. Putain, elle est belle. Quand je pense à ses gémissements dans mes bras, ses mains sur ma nuque, puis quand elle m'a... MERDE.

Nous arrivons devant mon appartement et montons dans le silence. J'espère sincèrement qu'il ne fera pas irruption dans le couloir, ce pédo. Pas le moment. Ce n'était vraiment pas le moment.

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