Chapitre 17 : Recherches
Le nez plongé dans un livre plus lourd que lui, Sévrar ne faisait plus vraiment attention à ce qui l'entourait. À côté de ce que lui donnait à lire Rowenn, le jeune magicien faisait des recherches sur la téléportation pour percer le mystère de Sheireen.
Il avait appris que l'on pouvait seulement apparaitre dans des endroits déjà visités. Plusieurs fois, il avait lu que la téléportation demandait énormément d'énergie, que très peu de mages étaient parvenus à se déplacer. Certains en étaient morts.
Mais alors comment avait fait la jeune femme ? Elle avait à peine été formée dans le domaine de la magie, effleurant seulement la surface avec les forces élémentaires.
Lisant encore une énième fois la dangerosité de cette technique, le roux souffla, allait-il vraiment être obligé de demander la réponse à Rowenn ?
Sévrar referma brusquement le volume relié de cuir. Il n'apprendrait rien de plus dans celui-là non plus. Le rouquin jeta un œil par la fenêtre, le soleil descendait doucement, lui rappelant son rendez-vous immanquable de chaque fin de journée.
Il fila à la bibliothèque pour rendre une pile de livres avant de grimper des dizaines de marches pour rejoindre une petite pièce. À l'intérieur l'attendait la brune toujours alitée.
— Comment ça va aujourd'hui, Églantine ? demandait-il en s'asseyant à son chevet.
Elle était assise, le regard perdu au loin dans le paysage que laissait voir la petite fenêtre ronde. Le mont Cétus grignotait la moitié du champ. Peut-être pensait-elle à ses compagnons qui continuaient leur avancée vers Wesiria.
La brune haussait les épaules.
Sévrar se souvenait qu'elle avait toujours été pleine de vie lors des entrainements auxquels il avait pu assister. Maintenant, il avait devant lui une tout autre personne.
Lorsque Sheireen l'avait laissé aux soins des magiciens, ces derniers avaient été choqués de l'état de la jeune femme. Malgré la fleur qui l'avait stabilisé, le poison avait fait des dégâts.
— Tu ne voudrais pas faire un tour ? On pourrait marcher en discutant, tentait le mage.
Elle secoua la tête, faisant glisser la couverture qui recouvrait jusqu'alors ses épaules. Un bandage bien blanc s'apercevait sous son haut en toile, le guérisseur était déjà passé. Mais ce qui attirait davantage le regard, c'était l'absence du bras droit de la jeune femme.
Les guérisseurs avaient dû se résoudre à amputer Églantine.
— Je t'ai ramené un livre, je me suis dit qu'il pourrait te plaire. C'est un conte que ma mère me lisait quand j'étais plus jeune.
La brune tendit la main gauche pour saisir le petit livre, curieuse. Elle le déposa sur ses jambes, puis entrepris de l'ouvrir. D'une seule main, cela s'avéra plus compliqué que prévu et Sévrar crut qu'elle allait lui renvoyer l'objet à la figure, mais elle persévéra et commença à lire la première page.
Absorbé dans sa lecture, Sévrar la surprit même à sourire légèrement.
Il resta à ses côtés jusqu'à ce que le soleil ne disparaisse complètement, puis il rejoignit sa propre chambre. Un diner l'attendait. Il soupira, encore un repas sans Rowenn. Ce dernier semblait très occupé, à moins qu'il ne cherche à éviter son apprenti. Sévrar aurait pu manger avec les autres magiciens, mais il préférait le silence et ne comptait pas veiller tard.
Ainsi engloutissait-il son plat avant de rejoindre avec délice son lit.
À l'aube, à son réveil, un petit bout de papier avait été glissé sous sa porte.
C'était Rowenn qui l'envoyait encore faire des courses et lui suggérant d'emmener Églantine avec lui. Soupirant, l'apprenti s'exécutait, attrapant sa besace et se dirigeant vers la chambre de son amie.
Il toqua trois fois sur le panneau de bois avant d'entrer sous l'invitation de la jeune femme. Il était plutôt étonné de la voir réveillée à cette heure, dormait-elle assez ? Cela dit, difficile de dormir lorsque l'on n'est pas fatigué, et ses journées n'étaient pas des plus remplies, malgré les efforts de Sévrar.
— Bonjour, lançait-il guilleret.
Elle lui répondait d'un sourire timide.
— Rowenn veut que j'aille faire quelques courses, je me demandais si tu voudrais m'accompagner. À cette heure, il ne devrait pas y avoir foule et il ne fait plus froid.
Les jambes nues de la jeune femme sortirent des draps et, gêné, Sévrar se retourna.
— Tu veux peut-être que je sorte le temps que tu t'habilles, proposait-il tout en se dirigeant vers la porte.
Le roux l'entendait enfiler un vêtement avec difficulté, sans son bras, tout devenait plus difficile. Mais, ne voulant pas la mettre mal à l'aise, il ne proposa pas son aide et sortait. Quelques instants plus tard, il l'entendit l'appeler.
Il entra de nouveau, elle était prête.
Lorsqu'ils sortirent du confort de la tour des magiciens, un vent doux les accueillit. Il faisait gris, mais, comme l'avait dit Sévrar, pas froid. Le magicien entraina la jeune femme dans les rues presque vides de Liodas d'un pas tranquille. Ils n'étaient pas pressés.
Les Zaléniens se réveillaient autour d'eux, une odeur de pain embaumait les alentours d'une boulangerie, réveillant les estomacs des deux jeunes gens. Ils s'arrêtèrent pour acheter chacun un petit pain rond à la mie blanche et chaude. Le blé ne manquait pas, la capitale était au centre de Zalia, ainsi toutes les ressources affluaient vers elle facilement, surtout les céréales récoltées sur la Terre Dorée. La guerre semblait bien loin, pourtant, Églantine ne cessait d'y penser, et bientôt, elle osa demander au roux :
— Que se passe-t-il au front ? J'ai l'impression d'être coupé du monde dans votre tour.
— Les troupes ne gagnent pas de terrain, mais n'en perdent pas pour autant, je crois. Je dois t'avouer que les informations arrivent difficilement jusqu'ici. Ce n'est pas que dû à ton isolement.
— Et mes camarades ?
— Cette information est gardée secrète. Seuls la Reine, la chef des armées et Rowenn doivent savoir où ils en sont.
— Sa Majesté est-elle au courant de mon état ?
Après tout ce silence dans la tour, l'air frais semblait avoir rendu ses forces à Églantine. La jeune femme ne s'arrêtait plus, bombardant de questions le mage qui n'avait malheureusement que peu de réponses à lui apporter.
— Je suppose oui.
La brune redevint silencieuse, croquant dans son pain qui avait refroidi. Son air renfrogné accompagna Sévrar jusqu'à l'échoppe d'herbe en tout genre. Aux sorties de l'hiver, il était normal que les réserves des magiciens soient épuisées, ainsi, le rouquin n'eut qu'à indiquer qu'il venait de la part de Rowenn pour que l'herboriste ne file dans l'arrière-boutique.
Elle revint avec plusieurs paquets que Sévrar glissa dans sa besace. Cette dernière fut rapidement remplie à tel point que la dame lui prêta un sac pour le surplus.
— Merci beaucoup, je vous le ramènerais le plus vite possible, promettait le magicien en sortant, Églantine sur ses talons.
Les bras chargés de plantes et de graines, ils rentrèrent à la tour. Les rues s'étaient remplies et la jeune femme commençait à se fatiguer, cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas autant marché.
À l'intérieur, Rowenn les attendait dans la réserve. Sévrar, content de voir son professeur, commença à lui parler sans discontinuer en rangeant alors qu'Églantine restait en retrait.
— Ainsi, j'en suis arrivé à la conclusion qu'aucun livre à ma disposition n'aurait ma réponse et n'attendait que de vous croiser enfin pour vous poser la question, concluait le rouquin.
— Et bien, je pense que je peux te révéler comment Sheireen a fait.
Tout le corps de l'elfe se tendit vers le mage, avide de réponses.
— Comme toi, son aura est spéciale, continuait Rowenn. C'est une aura noire, cela lui confère le pouvoir de se téléporter sans effort en puisant l'énergie dans ce qui l'entoure.
Les yeux de Sévrar semblèrent sortir de leurs orbites, puis il bafouilla :
— Une-une aura noire ?
— Oui.
Le chauve s'était tourné vers une étagère, pensant surement que la discussion était finie. Son apprenti se remémorait avoir lu plusieurs allusions à ses auras exceptionnelles, mais c'était la prophétie qu'il avait découverte dans le bureau de la Reine qui tournait en boucle dans son crâne.
— Alors...
— Oui ?
— C'est elle, la deuxième aura faisant partie de la prophétie que vous connaissez.
— Deux auras sur quatre, confirmait-il.
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