Le destin de la voyante
Le Seigneur des Ténèbres était revenu le trouver après avoir accompli ses sombres desseins dans le parc et, à présent, la Baguette de sureau se trouvait dans sa main. Plus que jamais, l'esprit de Severus était vide. Même un occulmens accompli comme lui avait du fournir de gros efforts pour se rendre impénétrable et son retour de la forêt l'y avait aidé.
Il lui semblait ne plus ressentir aucune émotion et seuls les souvenirs de l'arrestation de Sibylle et Filius tournoyaient encore dans son esprit, entrecoupés de cette nouvelle prophétie qu'il avait lui-même de très bonnes raisons de laisser le tourmenter. Ce rempart lui semblait cependant bien frêle par rapport à tout ce qui ses cachait en dessous.
Le Seigneur des ténèbres le retrouva au milieu du hall. Heureusement à cette heure-ci, les élèves étaient en classe et ils étaient ainsi parfaitement seuls.
- A présent allons rendre une visite à la voyante, dit le mage noir en prenant les devant en direction des parties basses du château.
Severus le suivit sans rien laisser paraître. Lorsqu'ils parvinrent à l'escalier qui menait aux cachots, les premiers hurlements se firent cependant entendre et il dut lutter pour ne pas perdre sa concentration. Ils descendirent lentement et n'eurent aucun mal à trouver la cellule où le frère et la sœur officiaient.
Sibylle pleurait, étendue sur le sol, et son visage suppliant rappelait à Severus celui de Charity lorsqu'elle avait repris conscience au dessus de l'assemblée des mangemorts. Un souvenir qui, il le savait, resterait à jamais gravé dans sa mémoire mais qu'il chassa sans vergogne sur le moment.
Le Seigneur des Ténèbres entra et, d'un geste, congédia les Carrow. Severus ne put faire autrement que de le suivre et le regarda se pencher au dessus de l'enseignante qui le contemplait, paralysée de terreur. D'un coup de baguette, il la força à se redresser face à lui. Ce fut comme si une main géante l'avait empoignée par le col et la maintenait à la hauteur du mage noir.
- Alors comme ça, on en sait plus que quiconque ? Lui dit-il d'une voix doucereuse. C'est tant mieux, car il y a des renseignements que je souhaiterais obtenir.
Sibylle se retrouva instantanément plaquée contre le mur de la cellule et Severus comprit ce qui allait se produire. Le Seigneur des Ténèbres prenait possession de son esprit et elle se mit aussitôt à se débattre et à le supplier.
- Non, pitié non... S'il vous plaît !
- On n'a pas toujours les idées très claires à cause de la boisson à ce que je vois... Mais il y a une prophétie que je veux entendre parmi toutes vos jérémiades : une vieille prophétie de presque dix-huit ans d'âge, vous savez ce dont je veux parler peut-être...
Sibylle secoua la tête en pleurant toujours :
- De grâce... Je ne me souviens pas...
- Endoloris !
Les hurlements de l'enseignante déchirèrent l'atmosphère et elle se tordit convulsivement contre la paroi à laquelle elle était collée. Ses lunettes tombèrent sur le sol et Le seigneur des Ténèbres marcha dessus.
- Alors ? Lui dit le Seigneur des Ténèbres en levant le sort. Est-ce que cela vous délie la langue ?
- Je... Je ne peux pas... le savoir, sanglota Sibylle. Pitié... Tous les voyants c'est comme ç... On ne se souvient jamais...
Le second doloris du mage noir la frappa aussitôt de plein fouet et elle hurla de plus belle. Severus restait immobile derrière le mage noir et, à cet instant, son esprit n'était plus qu'une coquille totalement vide. Il ne pouvait rien pour elle, si Lord Voldemort décidait de la tuer il n'y pourrait rien, et s'il lui demandait de le faire lui-même ou de la torturer à son tour, il devrait s'exécuter.
Il n'était qu'un pion dans un jeu qui le dépassait largement et finirait par mourir puisque la prophétie l'affirmait. Il était le parasite sous sa cape d'obscurité : le directeur illégitime de Poudlard qui semait la terreur depuis des mois dans l'école. La prophétie disait même qu'il serait le premier à mourir suivi « de celui qui n'aurait pas gagné la Baguette ». Mais cela, qu'est-ce que cela voulait dire ?
Était-ce Potter qui était désigné ? Et cette nouvelle ère, quelle serait-elle ?
Le Seigneur des Ténèbres leva soudain le maléfice du doloris en même temps que celui qui maintenait Sibylle contre le mur. Elle s'écroula sur le sol avec un bruit mat, remuant à peine et le souffle court entrecoupé de sanglots.
- Rappelle à notre chère amie les propos qu'elle a tenu ce matin Severus, ordonna le Seigneur des Ténèbres. Cela pourra peut-être lui rafraîchir la mémoire.
Severus s'exécuta d'une voix qui lui parut étrangement atone :
« Dans cinquante jours précisément, la dernière bataille avant une nouvelle ère aura lieu ici-même. Celui qui la gagnera sera le maître de la mort et en maîtrisera les trois pouvoirs dont le premier n'est pas celui que l'on croit. Le parasite sous sa Cape d'obscurité sera le premier à mourir et sera suivi de près par celui qui n'aura pas gagné la Baguette. »
- Je te remercie Severus, répondit Voldemort en se penchant à nouveau sur Sibylle Trelawney qui sanglotait sur le sol. Cette parole m'est extrêmement précieuse figurez-vous. Dans cinquante jours donc je livrerai la bataille décisive qui fera tomber Harry Potter entre mes mains. Cinquante jours à attendre avant de devoir exécuter ce parasite... C'est long, presque trop... Mais après dix-sept ans d'attente, c'est terriblement peu.
- Harry Potter n'est pas un parasite... Répliqua Sibylle d'une voix faible.
Le Seigneur des Ténèbres eut un ricanement tandis que Severus sentait son cœur tomber. En une phrase, Sibylle venait de balayer son dernier espoir du survie.
Car contrairement à Minerva, et même s'il affectait de ne pas y croire, il accordait à l'enseignante et à chacun de ses propos un certain crédit, dès lors qu'il savait qu'elle croyait sincèrement à ce qu'elle disait. Si elle affirmait que Potter n'était pas le parasite de la prophétie, contrairement à ce que croyait le Seigneur des Ténèbres, c'est que c'était vrai.
Voldemort lui répondit d'une voix doucereuse :
- Vous êtes l'auteur de trois prophéties me concernant Sibylle, dont deux se sont déjà montrées capitales pour moi. Et chacune de ces trois prophéties concerne également Harry Potter... le garçon qui a survécu. 50 jours Sibylle, c'est le temps qu'il vous reste à vivre car vous pourriez encore m'être utile s'il vous venait par exemple... Une autre vision d'avenir. Sachez que je tuerai Harry Potter de ma propre main, avant de faire de même avec vous...
Trelawney ne répondit rien mais Severus remarqua qu'elle semblait se contenir à grand-peine. Le Seigneur des Ténèbres se tourna vers lui :
- Si Sibylle Trelawney dit quoi que ce soit de nouveau, dit-il d'un ton impérieux. Tiens-moi immédiatement au courant Severus. Elle doit rester vivante et sous notre contrôle jusqu'au moment où je jugerai qu'elle ne peut plus nous être d'aucune utilité. Maintenant sortons, car j'ai à faire.
Severus s'effaça devant lui et Voldemort sortit de la cellule dans laquelle Trelawney s'était remise à sangloter, celle-ci se referma par magie sur l'enseignante une fois que Severus en fut sorti lui-même sans un regard en arrière. Alecto Carrow les attendaient dans l'escalier et, sur un signe de tête de Severus, elle alla se poster devant la cellule pour monter la garde.
Le Seigneur des Ténèbres attendit qu'ils soient seuls dans le parc pour donner ses ordres :
- Potter va immanquablement venir ici car c'est ici qu'il a ses partisans les plus proches. Du moins le croit-il puisque tu as déjà liquidé quelques-uns d'entre eux. A présent, il faut remplacer au plus vite Minerva McGonagall et Filius Flitwick.
- Oui, l'occasion est trop belle de placer au cœur de cette école certains de nos proches partisans, répondit Severus. Cela fait plusieurs mois d'ailleurs que je me penche sur la question car ils formaient le noyau dur de nos opposants et je n'attendais qu'un écart de leur part pour les remplacer par des personnes compétentes. J'ai déjà quelques noms en tête que je vais convoquer dans les plus brefs délais afin de procéder.
- Fort bien Severus, Ainsi quand Potter s'introduira dans l'école, il tombera dans un piège qui ne lui laissera aucune chance. Garde simplement à l'esprit que c'est de ma main qu'il doit mourir. Car je suis le maître de la mort, celui qui a gagné la Baguette de Dumbledore...
- Oui maître, répondit Severus. Les ordres à ce propos seront très clairs.
Ils étaient parvenus au Saule Cogneur et le Seigneur des Ténèbres activa lui-même le passage secret. Severus poursuivit avant qu'il ne le quitte :
- Si Potter met un pied à Poudlard, je le capturerai personnellement. Mais je crains de n'avoir pas ce plaisir car cette école me semble impénétrable.
- Il y arrivera Severus, répondit le Seigneur des Ténèbres. Car il bénéficie de soutiens dans la place. N'en élimine pas plus d'ailleurs. Car il faut qu'il puisse pénétrer ici pour que je puisse le vaincre.
Ayant dit cela, Voldemort disparut dans le passage qui se referma sur lui. Severus attendit plusieurs minutes immobile, avant de lâcher un profond soupir et de prendre le chemin du retour vers le château, voûté sous le poids des événements de la matinée.
Il mourrait d'ici cinquante jours, il en était sûr à présent. Mais que resterait-il derrière lui ? Quel serait le monde qui lui survivrait? Tremblant et agité à cette idée, il passa la porte du hall avec l'envie croissante de tout laisser tomber, de se réfugier dans la Salle sur Demande et de passer ses cinquante derniers jours d'existence auprès de Gilda. Toutefois il se reprit : Poudlard avait besoin de lui. Dumbledore avait toujours besoin de lui et, s'il voulait avoir une chance qu'un monde débarrassé de ce foutu mage noir voit le jour, il devait impérativement tenir bon.
Faisant demi-tour, il partit en direction du fond du parc. Il avait une tombe à réparer...
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