La vie s'organisait petit à petit au camps, et Gilda s'était à présent parfaitement remise de son accouchement en plein vol. Il faut dire que la supérieure Angela avait assuré haut la main cette mission et que ses soins étaient de grande qualité.

La supérieure avait du planifier de longue date leur évasion, au moins deux mois à en croire Remus et Sirius. Et elle avait ainsi parfaitement conçu son campement pour accueillir des enfants. En ce jour de fin février, une neige tombait et recouvrait toute la zone, pourtant l'air était doux grâce à un charme météorologique, ce qui permettait à Gilda de prendre la lumière avec son fils. Angela lui avait expliqué qu'elle n'aimait pas modifier ainsi la nature, mais que les enfants devant rester longtemps enfermés dans un espace restreint, faute de pouvoir passer la frontière qui était trop bien surveillée, elle voulait que leur séjour soit aussi agréable que possible.

Cependant, tout en donnant le sein à Marcus et en contemplant les enfants qui jouaient ensemble dans le campement, à présent tous égaux, elle était prise de réflexions douloureuses qui lui donnaient envie de pleurer. Il faut dire que les derniers jours n'avaient pas été simples, entre exercices d'évacuation d'urgence en cas d'attaque, surveillances, renouvellement des sorts...

Son faible niveau en magie et la présence de son fils l'excluaient d'ailleurs de la protection du campement.

Cependant, pour cela, la supérieure Angela aurait suffit. Non seulement elle avait usé d'un charme de dissimulation et d'un bouclier, mais elle avait également lancé sur le campement un charme qui foudroierait quiconque utiliserait un impardonnable ou un autre sort de magie noire. Elle avait même usé d'un sort brouilleur de Trace afin que les enfants en manifestant leurs pouvoirs ne les fassent pas repérer. Cet enchantement, sans ôter le signal, brouillait sa localisation qui perdait donc sérieusement en précision ou se déplaçait. Elle avait cependant recommandé aux enfants qui le pouvaient de s'abstenir de faire de la magie, étaient particulièrement concernés Sebastian et Eris qui avaient déjà quelques notions, mais également Marc, Jonathan et Joy qui étaient à un âge où ils auraient pu provoquer consciemment une manifestation magique. Marc et Jonathan, en effet, auraient du rentrer à Poudlard cette année-là.

Même au delà de toutes ces préoccupations, l'esprit de Gilda était plus tourmenté que jamais. Elle était mère pour la troisième fois et le père était un homme qu'elle avait aimé. L'aimait-elle toujours d'ailleurs ?

Ces deux années passées à le côtoyer tous les jours, puis plus occasionnellement au sein de l'Ordre, lui semblaient à la fois irréelles et merveilleuses. Et en même temps elle se maudissait de son irresponsabilité.

Elle qui avait quitté Poudlard justement pour s'éloigner de lui, elle avait continué à le voir et à le fréquenter. Certes ce n'était plus la même relation que lorsqu'ils formaient un couple en connaissance de cause, mais sa présence lui mettait du baume au cœur et être près de lui allait de soi. Le rapprochement s'était presque fait de manière automatique une fois qu'elle avait cessé de faire des efforts pour maintenir entre eux une distance.

Trois jours avant qu'elle ne soit capturée en juin, ils s'étaient encore vus après une réunion de l'Ordre. Ce devait d'ailleurs être la dernière à laquelle Severus avait assisté, puisqu'il avait tué Dumbledore moins d'un mois plus tard. Comment avait-elle pu être aussi aveugle ?

Alors qu'elle faisait faire à Marcus son rot d'après-tétée, Nephtis Malefoy vint s'asseoir près d'elle. Avec leur fuite, la vieille femme s'était pleinement ouverte au reste de la troupe. Ignacius lui avait très vite avoué les conversations qu'il avait eues avec Angela et Federica. Elle avait encaissé le choc d'une manière remarquable et n'avait même pas tiqué lorsqu'il avait dit s'être toujours douté que l'enchanteresse préparait un plan d'évasion. Mais aujourd'hui pourtant, Nephtis semblait fatiguée, comme si elle subissait le contrecoup des jours précédents.

Gilda lui fit une place sur le rondin qu'elle occupait et Nephtis put s'asseoir à côté d'elle :

- Elle est jolie cette neige, fut la première chose qu'elle lui dit.

- Oui c'est vrai, répondit la jeune femme. C'est assez agréable et les enfants sont contents.

En effet, ceux-ci jouaient dans la neige qui tombait sans discontinuer : ils avaient construit une rampe pour les glissades et plusieurs petits construisaient un bonhomme de neige.

- Ignacius m'a dit pour l'enfant, dit soudain Nephtis sans aucun préambule.

Gilda s'y attendait, avec tout ce qui s'était passé, mais elle ne put s'empêcher cependant de sursauter légèrement. Toutefois, ni le visage, ni la voix de Nephtis ne trahissait la moindre agressivité, pas même de la rancœur et elle poursuivit :

- Il n'aurait jamais du vous mettre dans une telle situation. Mais Hortense lui manquait tellement qu'il a cherché pendant des années à la remplacer... J'ai beau eu lui dire que les gens ne se remplacent pas, cette tête de mule n'a jamais rien écouté.

Figée devant un tel aveu, Gilda n'osait rien dire et attendait le reste de l'orage, pourtant celui-ci ne vint pas et Nephtis lui demanda d'une voix presque craintive :

- Qu'est-ce que vous ferez ? Quand tout ça sera terminé ?

La jeune femme, rassurée, n'hésita pas et lui désigna les enfants qui jouaient devant elles :

- Si nous survivons à tout ça, ils auront tous besoin de moi. Après tout c'est pour me plaire qu'Ignacius les a sortis d'Azkaban.

- Vous ne serez pas seule alors, répondit la vieille femme. Nous veillerons aussi sur eux.

A cet instant, une dispute éclata entre Moon et Irene qui se mirent presque aussitôt à se battre pour une pomme de pin destinée au bonhomme de neige. Avec un soupir d'agacement, Gilda se leva, Marcus dans les bras, pour aller les séparer. Mais elle n'était pas parvenue jusqu'à elles qu'une explosion retentit et que son souffle jeta plusieurs enfants à terre. Gilda tomba à genoux avec le bébé qu'elle n'eut que le temps de protéger du choc.

Un violent souffle d'air froid balaya le campement, des hurlements retentirent et, presque aussitôt, les premiers sors fusèrent. L'un d'eux projeta le jeune Marc sur plusieurs mètres et il alla heurter un sapin avant de retomber sur le sol, totalement inanimé.

Moon hurla, figée sur place par la terreur comme la plupart des enfants. Gilda qui tenait Marcus dans ses bras vit Ignacius passer devant elle et charger l'ennemi. Elle le suivit du regard, trop hébétée pour agir malgré les cris de Nepthis qui tentait de faire fuir les enfants, et resta figée de terreur en voyant une dizaine d'hommes débouler dans le campement. L'un d'eux brandit sa baguette en direction d'Ignacius qui le chargeait :

- Avada...

Il ne put en dire plus, un éclair le foudroya sur place et il s'écroula dans la neige. Le temps d'hésitation des raffleurs qui suivit permit à Ignacius d'en abattre un tandis que Federica et Sirius se joignaient à lui pour combattre. Federica qui utilisait la baguette de Bellatrix était une très bonne combattante, cela Gilda le savait, mais cette baguette qu'elle n'avait pas obtenue dans les règles ne lui convenait guère. Comme c'était pire avec la baguette de Narcissa ou de Drago, elle avait cependant opté pour celle-ci à contrecœur.

Nephtis couvrait la fuite des enfants en lançant sortilège du bouclier sur sortilège du bouclier. Moon avait réussi à ramper vers elle et courait à présent vers Angela et Remus Lupin qui configuraient les portoloins pour évacuer les enfants (ou plutôt Remus Lupin couvrait Angela). La plupart avait d'ailleurs déjà disparu. A moins que cette illusion ne soit due au brouillard magique qui couvrait le camps à présent.

Soudain, un raffleur massif dont la silhouette ne lui était pas inconnue fondit sur Federica qui avait de plus en plus de mal à maîtriser la baguette de Bellatrix. La femme poussa un hurlement et le temps sembla s'arrêter pour Gilda.

Elle se leva, baguette en main et son fils dans les bras, et jeta un sortilège cuisant, l'un des seuls qu'elle était capable de produire, dans le brouillard en direction des cris. Le glapissement de douleur d'un homme retentit et elle le reconnut : C'était Fenrir Greyback.

- Gilda ! Venez ! S'écria Nephtis à son adresse.

La matriarche se tenait à quelques mètres, sur le tapis volant volant d'Ignacius. Gilda courut vers elle et monta sur l'engin déjà en vol. Il s'éleva aussitôt dans les airs tandis que Nephtis le dirigeait tout en jetant des sorts à la volée. Gilda posa Marcus sur la cape de Nephtis qu'elle forma en berceau et fixa d'un sort au tapis, puis elle se redressa et brandit sa baguette en direction des raffleurs qu'elles survolaient.

Son maléfice cuisant déstabilisa l'adversaire de Sirius qui put ainsi s'en débarrasser, et fuir la mêlée à la faveur du brouillard. Mais il les fit aussi immédiatement repérer et les sorts fusèrent dans leur direction. Gilda les para au mieux tout en se réjouissant qu'elles se trouvent hors de portée de la plupart des tirs.

Soudain elles aperçurent Federica effondrée sur le sol dans une tâche rouge et Ignacius qui combattait toujours tout près d'elle. Greyback cependant guettait l'instant où il pourrait percer ses défenses pour se jeter à nouveau sur sa victime.

Gilda voulut jeter un sort mais Nephtis l'arrêta :

- Vous risquez de toucher Ignacius à cette hauteur. Couchez vous sur le tapis.

Gilda obéit en retenant Marcus sous son bras, devinant à juste titre que ça allait secouer. Nepthis s'allongea également et dirigea l'engin qui fusa droit sur Greyback et un autre raffleur. Le choc les fit basculer à terre sans que les deux femmes n'en ressentent la totalité.

Mais alors qu'elles remontaient dans les airs le tapis prit feu du côté de Gilda. Nephtis eut le réflexe salvateur de saisir Marcus et voulut éteindre les flammes d'un Aguamenti. Mais elle était si fébrile que la force de son sortilège désarçonna Gilda qui bascula dans le vide, se raccrochant de justesse aux bords noircis du tapis. Nephtis n'eut pas le temps de l'aider à remonter, la jeune femme sentit dans son dos l'explosion d'un sortilège et lâcha prise.

Chutant de trois ou quatre mètres, elle vit un éclair de lumière verte suivi d'un foudroiement, s'écrasa dans les buissons qui bordaient le campement et perdit connaissance.