Chapitre 49

                          

                      

— Ma vie n'existe que pour vous protéger. Faites-en ce qu'il vous plaît.

— Si tu insistes, conclut-il, en éloignant son arme de mon visage.

                   

Avant même d'ouvrir les yeux, une nouvelle douleur me fait grimacer lorsqu'un coup de feu retentit dans l'entrepôt.

Il a visé ma cuisse. Celle de l'autre jambe.

Il voulait à tout prix que je sois incapable de marcher...

                      

— Tu survivras, si tu vas voir un médecin, souffle-t-il, baissant son bras.

                  

La tête redressée, je tombe rapidement dans les yeux sombres et graves de l'homme que j'aime, avant que celui-ci ne replace son arme derrière lui.

                           

— Patron...

                                   

Il s'éloigne ainsi, sans un regard de plus vers moi, monte dans la voiture et part à toute vitesse.

Je déplie les jambes, l'estomac noué sous l'angoisse, et me traîne vers un mur non loin, pour m'y adosser. Je perds du sang et la douleur m'empêche de réfléchir, mais je dois passer au-dessus de ça. Ce n'est pas ça le plus important à l'heure actuelle. Ce qui est important, c'est de savoir où Changkyun est parti et quel genre de danger il court.

Jooheon...

                                               

— Allo ?

— C'est Hyunwoo, soufflé-je, de plus en plus dépassé par les événements. J'étais avec le patron...

— Quoi ?

— Mais il est reparti sans moi.

— Comment ça ? s'emballe-t-il, au téléphone.

— Je suis désolé.

— Tu sais où il est allé ?

                                

C'est rare d'entendre Jooheon garder son sang-froid. Ça m'aide à relativiser et à ne pas perdre espoir. Je suis content qu'il agisse ainsi. C'est ce dont j'ai besoin.

                                

— D'après ce qu'il disait, pas très loin... Il semblait vouloir rencontrer Minhyuk, vous ne savez pas où il se trouve ?

— T'es où ?

— À côté de l'aéroport.

— Ah, je vois de quoi tu parles ! C'est un énorme entrepôt gris, non ? J'y suis déjà allé avec lui. Il règle pas mal de problèmes là-bas. Tu ne dois pas être loin.

— Ok, ok, je vais chercher.

                      

Tout n'est peut-être pas perdu. Je suis blessé aux jambes, mais ce n'est pas ce qui va m'arrêter. Il a cru qu'une chose aussi insignifiante me stopperait ? Si c'est le cas, alors il s'est bien trompé.

                            

— J'espère vraiment que t'es pas loin. Nous, on est en route. On arrive dès qu'on peut !

— Ok.

                                     

Je raccroche sans plus attendre et m'aide du mur pour me lever. La douleur est très présente, mais ne m'empêchera pas pour autant d'avancer.

Tout en grimaçant et titubant, je m'éloigne de l'entrepôt aussi vite que mon état me le permet. Je parcours des yeux l'endroit où nous sommes et me mets en route, sans avoir encore repéré l'entrepôt gris. Ils sont tous plus ou moins de la même couleur en plus, alors ça risque de ne pas être facile.

Je marche depuis au moins une bonne dizaine de minutes. J'ai l'impression que cet endroit est sans fin. La pluie commence à tomber avec force, ce qui ne m'aide pas à trouver le bon chemin.

Jooheon devrait déjà être là. J'ai l'impression de passer par le même hangar, encore et encore. Je vais devenir fou avant d'avoir trouvé.

C'est...

Putain ! La Maserati !

Mon coeur bat à tout rompre dans ma cage thoracique. Ma force est revenue au galop tout comme mes pas, qui dévorent les mètres me séparant de lui.

Quand j'arrive à l'entrée du hangar, la vue qui s'offre à moi me glace le sang.

Un homme est assis sur le corps de Changkyun. Ce dernier est sur le ventre, tandis que les mains de l'homme derrière lui sont en train de l'étouffer. Les yeux clos, le visage rouge, il reste ainsi, immobile. Il n'essaye pas de se débattre et ne dit rien pour tenter de le faire stopper. Il tombe dans l'inconscience, presque avec envie.

Mon arme doit encore être dans son dos, pourtant, il ne l'utilise pas.

Comme si... Comme s'il était venu ici, avec cette envie que tout se termine de cette manière.

Voilà donc pourquoi il agissait ainsi...

Je ne peux pas le laisser faire. J'ai déjà failli le perdre bien trop de fois. C'est impossible.

Je suis désolé patron, mais je ne vais pas pouvoir le laisser faire. Vous laissez faire.

                   

— Patron ! m'écris-je, tout en fonçant vers celui que j'imagine être Minhyuk.

                              

Ce dernier se tourne au moment même où mon pied s'abat sur son épaule. Il se retrouve au sol, mais n'y reste pas longtemps. Avec une vitesse et force insoupçonnée, il se redresse et me frappe au visage. Je n'esquive pas correctement, affaiblis par mes récentes blessures, ce qui m'oblige à encaisser le coup du mieux possible. Pratiquement à tour de rôle, nous gratifions l'autre de coups brutes et emplis de rage durant de très nombreuses minutes. Alors que je suis à bout de forces et lui, à bout de patience, je n'ai pas le temps de réagir lorsqu'il pointe son arme vers moi, avant de tirer tout aussi vite.

Le sol trempé d'eau de pluie m'accueille lorsque je chute, dans un bruit assourdissant, ressemblant à celui d'un avion qui décolle, à quelques centaines de mètres à peine de nous.

Un dernier regard vers le hangar me permet de voir que Changkyun est debout sur ses pieds et se dirige vers nous, alors que Minhyuk est à deux doigts de m'achever.

Je n'aurais jamais cru qu'un jour, ce soit au tour de mon patron de me sauver, mais je suis heureux à l'idée qu'il le fasse. Je suis heureux aussi qu'il soit en vie. Je ne supporte pas l'idée de le perdre.

Malheureusement pour moi, j'ai à peine le temps de voir Minhyuk s'effondrer, avant de m'évanouir, avec l'espoir que rien d'autre n'arrive à l'homme que j'aime.

Lorsque je me réveille, des hurlements me vrillent les tympans. Mon corps me fait souffrir et je respire avec difficulté. Ma vision est floue, je ne perçois rien correctement, seuls les cris que je comprends être ceux de Jooheon me parviennent.

                      

— Dépêchez-vous ! Poussez-vous ! Mais poussez-vous !

                                  

Il semble anxieux. J'espère que rien n'est arrivé à Changkyun. Je ne pourrai jamais me le pardonner si tel était le cas.

Les sourcils froncés et les paupières à moitié closes, je retire le masque à oxygène qui m'empêche de parler et tente de trouver Jooheon, pour lui poser la question.

                     

— Hyunwoo... l'entends-je souffler, plus calme. T'en fais pas, le patron est en meilleur état que toi. Poussez-vous bon sang !

                                 

Dieu soit loué.

C'est avec cette très bonne nouvelle, que je laisse les médecins faire leur travail.

                          

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top