Chapitre 47

                                                       

                                                         

                                                                    

Merde, j'aurais dû freiner plus tôt !

Quelques centimètres en plus et la voiture ne se serait pas contenté de frôler l'entrée du hangar.

Quelle belle chance j'ai eu, là.

                                                

— Faut vraiment que j'arrête de conduire, marmonné-je, en sortant.

— T'étais où, toi ? grogne le Choco Pie, assis sur une chaise, en face de son acolyte. T'as vu l'état de la caisse ? T'es bourré ou quoi ?

— On ne me laisse jamais conduire, j'ai dû perdre la main, soupiré-je. Tiens donc, ne serait-ce pas ce cher Monsieur Lee ?

                          

Assis, les mains attachées derrière le dossier d'une chaise, planté au milieu de cet entrepôt vide, se trouve mon cher et tendre patron, kidnappé un peu plus tôt par ce duo de choc.

Son regard hargneux me dévisage et la colère lui ronge tellement le corps, que ses dents grincent sous la force qu'exerce sa mâchoire.

C'est si amusant comme situation.

                         

— Qu'est-ce que vous faites dans un endroit pareil ? Vous qui semblez être très occupé, ces temps-ci...

                        

Les mains dans les poches, mon écharpe médicale virée il y a peu, je l'observe, d'un sérieux à toute épreuve. Son regard rouge de haine ne me dit rien qui vaille.

Tout se déroule à la perfection.

Pourvu que ça continue.

                     

— Je plaisante, ricané-je, tout en virant l'idiot du village de sa chaise, pour m'y asseoir à mon tour, une fois celle-ci posée devant Minhyuk. Vous devez bien vous douter que c'est moi qui vous ai fait venir ici.

                                  

Il penche alors la tête en arrière, d'un rire gras et bruyant, puis se reconcentre sur moi.

                        

— T'en prendre à moi de cette façon, alors que je suis ton supérieur... Tu dois vraiment être dos au mur, mon pauvre. Tu sais que tu ne vas pas t'en sortir comme ça, toi et tes hommes ?

                   

Regardez cet air supérieur sur ce visage empreint d'inhumanité... Je n'avais jamais vu un homme aussi immonde.

Enfin, si, peut-être une fois.

                                                 

— Je ne me rappelais pas avoir un papa comme vous. Merci de vous inquiéter ainsi pour moi. Détachez-le, ordonné-je ensuite, croisant les jambes.

— Hein ? s'emballe Jun. Tu voulais pas en profiter ? T'as failli crever et les hommes de Golem te coursent à cause de lui, non ?

— Peu importe, maugréé-je. Contente-toi de faire ce que je te dis.

— Je te croyais un peu plus rancunier. T'es sûr de toi, Changkyun ? tente-t-il une dernière fois, placé derrière Minhyuk.

                       

D'un coup de menton en sa direction, je lui fais comprendre qu'il peut s'exécuter, chose qu'il fait, non sans un dernier reniflement mécontent.

                                 

— Vous pouvez partir. Merci encore.

— T'es vraiment un grand malade, conclut le bleuté, avant de se diriger vers la sortie.

— Ne t'inquiète pas, je t'enverrai une belle carte une fois toute cette affaire réglée.

— Oublie-moi, plutôt, grogne-t-il, en quittant les lieux, son collègue sur les talons.

                              

Je n'ai même pas le temps de sortir mon paquet de cigarettes, que déjà, mon patron préféré s'exprime, d'un grondement énervé.

                                              

— Qu'est-ce que tu manigances, Changkyun ?

— Je dois bien l'avouer, j'ai toujours aimé faire souffrir mes paires, soufflé-je, le regard nostalgique perdu sur le plafond, le paquet enfin sorti de ma poche. Malheureusement pour vous, vous ne m'excitez pas du tout. J'espère que ça ne vous fait pas trop de peine, Monsieur Lee. Une cigarette ?

— Tu m'as l'air bien calme.

— Vous teniez tant que ça à me voir paniquer ? demandé-je, avant de tirer sur la tige de nicotine allumée.

— Tu n'as pas entendu parler des preuves qui t'inculpent ? s'enquit-il, d'un sourire en coin horripilant.

— Des preuves ? De quoi ?

— De tes meurtres. On a retrouvé une chemise avec ton sang dessus sur les lieux.

                                     

Il se la joue détective privé, maintenant ? Que c'est mignon.

                                            

— Une chemise avec mon sang ? répété-je, incertain. Ah... Celle que j'ai laissée à l'hôtel, ce soir-là ?

— J'ignore comment t'en es arrivé là, mais tu récoltes ce que tu as semé, persifle-t-il. Un flic du nom de Gwanwoong a l'air de t'en vouloir sérieusement et il a l'intention de te foutre dans la merde, tout en laissant Golem se charger de toi. N'oublie pas qu'ils ont perdu leur chef et trois hommes. Ils ne t'ont jamais aimé de toute façon. Ne t'attends pas à ce qu'ils oublient d'un coup ce que tu leur as fait. Et ça sera le même châtiment pour tous les pitres qui bossent sous tes ordres. Changkyun, tout ce qui t'attends désormais, c'est l'enfer et rien d'autre.

— Alors, c'est vous le responsable ? Vous êtes d'un caustique, pouffé-je. Et donc ? En tant que coupable principal, vous n'allez vraiment rien faire ?

— Tu crois que je vais rentrer les mains dans les poches ? sourit-il, bien trop amusé. Je peux apporter ta tête aux Golem, si tu insistes. Je ne sais pas si me libérer était une bonne idée.

                        

Toujours en ricanant, les jambes croisées à son tour, il me fixe, de cet air suffisant qui le caractérise.

                                   

— Voyons, vous avez fourni tant d'efforts pour m'évincer sans me tuer, élucidé-je. Si vous vous salissez les mains aujourd'hui, à quoi auront-ils donc servi ? Et puis, vous ne pouvez pas me tuer, pour la simple et bonne raison que vous n'avez plus un sou.

— Quoi ? grommèle-t-il, méfiant.

— En dehors des lingots que j'ai récupérés avant de venir, vos propres nettoyeurs se sont chargés de vous délester de l'intégralité de votre fortune, expliqué-je, allumant une nouvelle cigarette. En fait, ils n'étaient pas satisfaits de leur pourcentage, alors, ils ont décidé de se servir eux-mêmes. Ils ont fait toutes vos planques, une par une, et ils ont tout pris. Liquide, chèques, bons, titres... Rien n'a été oublié. Connaître jusqu'au moindre poil de cul son ancien maître, il faut savoir le faire, ris-je. J'espère que vous avez apprécié leur acting tout à l'heure.

                               

Je préfère nettement voir ce visage empli d'angoisse, plutôt que de suffisance.

C'est si satisfaisant.

                   

— Tout votre argent se trouvait dans le van qui vous a amené ici. Et il file actuellement vers un lieu que seuls eux et moi connaissons. Si j'ai le malheur de mourir aujourd'hui, j'ai bien peur que tout cet argent ne disparaisse à jamais, car personne d'autre ne sait où il se trouve. Alors ? Vous voulez toujours me tuer ? À moins que vous ne préfériez me torturer pour me faire parler sous la douleur ? souris-je.

                                    

Sans préavis, l'homme assis face à moi se redresse et m'offre un violent coup de poing dans la mâchoire. Je grimace légèrement sous la douleur, tout en soufflant du nez, amusé.

                       

— T'es toujours aussi répugnant, crache-t-il, debout face à moi, les poings serrés. Tu tiens tant que ça à ce que je te bute ?

— Mais non, voyons. Je n'ai pas envie de mourir, soufflé-je, tout en essuyant le sang coulant sur mes lèvres. Même si je n'ai pas l'intention de vivre éternellement.

                                  

Il recommence. Sans un mot de plus, il attrape la chaise derrière lui par les pieds et me frappe avec le dossier de celle-ci.

Je me retrouve projeté au sol, sous la puissance du choc, et reste allongé sur le flanc droit, le haut du corps maintenu par l'appui que j'ai sur mon coude.

                                       

— Tu veux me faire croire qu'une pédale comme toi, n'a plus envie de se faire prendre comme une chienne ? ricane-t-il de dégoût. Me fais pas rire !

— À ce propos, m'enquis-je alors, en essayant d'omettre la douleur qui me vrille le haut du corps. J'ai toujours voulu me demander... Pourquoi vous détestez à ce point les homosexuels ?

— Tu te fous de ma gueule ? hurle-t-il. Ils me filent la gerbe, c'est tout. Ça se fait défoncer le cul et après ça se prend pour un yakuza. Les types comme toi, ça vit dans les poubelles et ça y reste.

— Ah, j'ai compris. En fait, c'est la soumission qui vous dérange ? Bon, puisque c'est vous, je veux bien faire un effort...

                             

Son rire mauvais continue d'emplir cet endroit grand et désert et, accroupi, il me regarde d'un air narquois.

                                   

— Qu'est-ce que ça vaut, un homme même pas foutu de baiser une femme ?

— Ah, donc bisexuel, c'est ok pour vous ? continus-je, toujours lamentablement posé sur le sol, surplombé par cette ordure. Ça aussi, ça peut s'arranger. Ça me rappelle un des gars que vous avez banni du clan. Il adorait que je baise sa femme pendant qu'il me prenait par-derrière.

— Qu'est-ce que tu insinues, là ? s'énerve-t-il un peu plus.

— Qu'en général, on ne s'acharne pas sur quelqu'un comme ça, sans raison. Je me demandais donc si votre haine des gays n'était dirigée que vers moi. Serait-ce de la jalousie, ou bien du dégoût pour ce que vous êtes également ? Vous souhaitez tant que ça être aimé par Monsieur Song ?

— Espèce de détraqué ! hurle-t-il, m'offrant un énorme coup de poing dans le ventre, près de ma cicatrice à peine refermée. Je t'interdis de me comparer à toi ! Qu'est-ce que tu viens me parler de Song, hein ? T'as jamais eu ta place parmi nous, et ça, depuis le début. Song n'a fait que te chauffer un siège temporaire que tu ne méritais pas ! J'espère que t'en as bien profité, d'ailleurs.

                                

Je crois avoir touché un point sensible.

Enragé, l'homme devant moi se lève et m'assigne un nouveau coup dans les côtes. J'essaye du mieux possible de contrôler mes geignements, ce qui se trouve être de plus en plus difficile.

À présent couché sur le ventre, la joue écrasée contre le sol, je le laisse faire lorsqu'il pose son pied sur mon dos. Il m'écrase ainsi, comme la vulgaire loque que je suis, et ricane à nouveau.

                               

— Je savais parfaitement qu'un jour ou l'autre, tu le trahirais. T'es aussi transparent que ton corps sans tatouages, Changkyun.

— Ah oui ? toussoté-je, le souffle court. Comme vous alors ?

— Hein ?

— Vous l'avez trahi, il y a déjà longtemps.

                            

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top