Chapitre 43

                               

                    

                             

— C'est quoi cette tête ? rit-il. T'es pas content de me voir ?

                       

Sa voix sombre et narquoise me fait frissonner. Inconsciemment, elle m'aide même à me détendre.

                                

— Qu'est-ce que tu fous ici ? râlé-je, de plus en plus épuisé.

— Tu n'en as vraiment aucune idée ?

                                   

Son petit sourire en coin... Il pourrait, pour certain, être aussi énervant que celui de Minhyuk. Mais pas pour moi.

Non, pas du tout.

Ils sont si différents. Totalement incomparables.

                                 

— T'es sérieux ? m'apostrophé-je. C'est toi qui... ?

— Et oui.

— Mais... C'était la came de Minhyuk.

                         

Pourquoi a-t-il fait ça ?

Qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez lui ?

                               

— Je sais. Il a la manie de cacher ses joujoux toujours au même endroit, depuis que je le connais.

— Où est-ce qu'elle était ?

— Sous l'armoire de sa femme.

                            

Sa nonchalance sera à jamais inégalable.

Si j'avais pu avoir cette capacité, moi aussi. Je suis certain que ma vie n'aurait pas été pareille.

                                                    

— De sa femme ?

— J'ai demandé à ces deux gars d'aller la piquer et la planquer dans tes bureaux.

— Ces deux gars ? répété-je. Ah ! Les mercenaires ?

— Oui.

— Comment t'as fait pour les convaincre de t'aider ?

— Rien de bien compliqué, souffle-t-il, d'un haussement d'épaules. Ils ne font pas partie du milieu, je te rappelle.

                                      

Du plus loin que je m'en souvienne, Changkyun a toujours su sur quel fil tirer, et ce, avec n'importe qui. Comme s'il voyait les failles de chacun, comme s'il connaissait le moindre petit secret des personnes qu'il côtoie.

Voilà pourquoi, en plus de sa beauté, il me fascinait tant. Et voilà pourquoi, il me fascinera toujours.

Jamais je ne pourrai lui en vouloir pour quoi que ce soit. Je sais qu'il fera toujours les choses avec calme et réflexion. Je ne connais pas toutes les raisons, mais je sais, à chaque fois, qu'il fait les choses parce qu'il sait qu'elles doivent être faites.

                        

— C'était bien la peine de me sortir tes si belles phrases, si c'était pour me vendre comme ça, marmonné-je.

— De quoi tu parles ?

                            

Son petit air innocent, sa tête penchée sur le côté...

Son odeur si douce, ses gestes si délicats, sa voix si basse et calme, même lorsqu'il réclame de la violence...

                            

— Je croyais qu'on devait voir lequel de nous deux vivrait le plus longtemps.

— Ah ! s'écrie-t-il. Désolé, je ne pensais pas vraiment ce que je disais... Et puis, on était dans la merde tous les deux.

— On l'est toujours, d'ailleurs, soupiré-je.

— Oui, c'est pas faux. Enfin, pour le moment, commence par raconter que tu as agi seul pour la drogue. Ça compliquerait trop les choses si notre groupe devait se retrouver impliqué là-dedans. Tu peux faire ça pour moi ? Tu devrais pouvoir survivre plus longtemps en taule, non ?

                                        

Il y a vraiment un monde entre Minhyuk et lui.

Comment peut-il être si neutre, même après ce genre de choses ?

C'est sans doute plus facile pour lui.

Changkyun me ressemble un peu, d'une certaine façon. Il porte un masque devant les gens et même devant lui-même, pour se protéger et continuer à pouvoir agir avec assurance.

Si seulement j'avais eu le courage de perdre ce masque. Peut-être qu'il aurait bien voulu de moi à ses côtés et peut-être même qu'il n'aurait pas rejoint le clan ?

Qui sait...

                                

— C'est quoi ces fringues ?

— J'ai sali mon costume, donc j'ai emprunté des vêtements, place-t-il, avec bien trop de douceur.

— Ça me rappelle de mauvais souvenirs, de te voir habillé comme ça, murmuré-je, le regard plongé sur ses fins pectoraux visibles au travers de ce pull léger.

— De mauvais souvenirs ?

                     

Perdu dans ma mémoire, je m'approche de lui par automatisme et m'accroche à son haut, le nez glissé dans son cou.

                               

— Arrête, tu vas étirer le col, râle-t-il.

— Je vais enfin pouvoir vivre sans avoir à subir ta sale tête, grogné-je, tout en mordillant avec force la peau de son cou.

— Tu sortiras vite.

                            

Son doux rire emplit l'habitacle de la voiture, tandis que je continue de dévorer sa peau à l'odeur addictive, noyé dans mes souvenirs les plus agréables.

Ceux où j'étais collé à lui, lorsqu'il acceptait que je le retrouve, rien que lui et moi, après ces parties de Godori... C'était la belle époque.

Comment peut-il sentir aussi bon ?

J'aime tellement cette odeur. Elle m'hypnotise, m'apaise.

Si seulement j'avais eu l'opportunité de quitter ce milieu... J'en aurais changé des choses dans ma vie. Y comprit celle d'avouer au monde entier qui je suis vraiment.

Les doigts agrippés à la ceinture de son pantalon, je lèche de long en large la peau fine de ses clavicules.

J'aimerais que cet instant ne s'arrête jamais. J'aimerais être collé, tout contre lui, à jamais.

                                            

— Tu aimerais que je te rende visite ? Je te chantonnerais des chansons, si tu veux. Je me débrouille bien, tu sais ?

                      

Quel idiot.

                       

— Ferme-la. Une chanson pendant une visite en prison et puis quoi encore ?

                            

La main glissée sous son pull, j'apprécie sentir la chaleur et la douceur de sa chair.

                        

— Tu as l'air bien excité, Seokkie, susurre-t-il.

                                 

Je ne fais que grogner en guise de réponse, ce qui le laisse à nouveau rire doucement.

Dire qu'à l'époque, je ne rêvais que d'une chose. Celle que Changkyun soit une femme, pour que je puisse le protéger.

Je préférerais mourir plutôt que lui avouer, maintenant, mais peut-être qu'à l'époque, lorsqu'il n'était qu'un gamin...

                             

— Tu n'auras qu'à te trouver un type sympa pour te prêter son cul à ma place.

— Abruti, soupiré-je, le nez blotti au creux de son cou. Tu crois que je vais faire ça à un autre homme ? Je suis pas comme toi, moi. Je veux une nana, pas un mec.

— Être une femme... chuchote-t-il, l'air songeur. Oui, ça aurait sans doute facilité beaucoup de choses.

— Changkyun, murmuré-je alors, tout en relevant la tête, pour ancrer mon regard dans le sien. Un bon conseil... Quitte ce milieu, si tu ne veux pas y laisser ta peau.

                        

Son fin sourire aux fossettes adorables le rend encore plus beau qu'à l'accoutumée. C'est un spectacle si rare à voir.

Un Changkyun qui sourit sincèrement, j'aurais aimé voir ça au moins une fois dans ma vie.

                       

— Quelle coïncidence, je pensais justement la même chose.

                                

Ses prunelles semblent si tendres et calmes. Il est aussi proche de la mort que j'ai pu l'être aujourd'hui. Je ne sais pas ce qui se passera pour moi en prison, mais à présent, une chose est sûre, Changkyun est bien plus en danger que moi. Sa vie ne tient qu'à un fil et Minhyuk, sans doute enragé après notre altercation, ne voudra qu'une chose, éliminer l'éternel obstacle de sa vie, une bonne fois pour toutes.

Je sursaute lorsqu'on frappe sans délicatesse contre la vitre de ma portière. Cette dernière s'ouvre quelques millièmes de secondes après.

                                    

— C'est l'heure, claque l'un des policiers.

— Bon, j'y vais, place ensuite Kyun, sa portière déjà ouverte.

— C'est pigé, concédé-je. Je vais faire ce que tu m'as demandé. Mais j'ai une faveur à te demander en échange.

— Je t'écoute.

— Yujin est entre les mains des hommes de cette ordure, soupiré-je. Va la secourir et envoie-la loin d'ici, quelque part où elle sera en sécurité.

— Pas de problème, conclut-il, rapidement. Tu ne veux vraiment pas que je vienne te pousser la chansonnette, alors ?

— Barre-toi ! sifflé-je, une pointe d'amertume dans la poitrine.

— À plus, Seokkie.

                                   

Peu de temps après, un policier à mes côtés et l'autre, assis derrière le volant, nous démarrons.

Je n'arrive plus à m'empêcher de geindre, à présent. Les mains pressant mon flanc droit, j'essaie durement de calmer la douleur et le saignement de ma récente plaie. 

Le policier, alors alerté par mes gémissements plaintifs, s'agace avant de paniquer.

                                      

— Hoseok est blessé ! crie-t-il, à la personne au volant.

— Hein ? s'enquit ce dernier, d'un regard jeté dans le rétroviseur. Ah oui, il n'a pas l'air bien...

— Bien sûr qu'il n'a pas l'air bien ! gronde l'autre. Non, mais regarde, il perd du sang !

— Quoi ? C'est Changkyun ?

— Non, soufflé-je, le regard perdu sur le décor extérieur. C'est pas lui.

                            

J'espère que tu le paieras de ta vie. Enfoiré de Minhyuk.

                               

— Direction l'hôpital, en urgence ! Il saigne énormément !

                                    

Changkyun...

Pourquoi, même après toutes ces années, tu me plais toujours autant ?

Pourquoi, même après toutes ces années, mes sentiments pour toi, n'ont jamais disparu ?

J'espère qu'il va savoir gérer ça correctement... J'espère sincèrement qu'il restera en vie.

De nous deux, celui que le mérite le plus, ce n'est pas moi, mais bien lui.

Continue d'être fort, Kyunnie. Continue d'être l'homme brisé, mais courageux, que tu as toujours été. Si tu ne le fais pas pour toi, fais-le pour les personnes qui tiennent à toi. Parce que quoi que tu dises et quoi que tu penses, ces personnes, existent bel et bien.

                                       

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