— Une horreur, ces sièges ! râlé-je. Trop mal au cul. Voilà pourquoi je hais les camionnettes !

Pourquoi une camionnette, en plus ? On est que deux, alors pourquoi pas une voiture ?

C'est ridicule.

Ah, un appel...

— Oui, Monsieur Lee ?

— Alors ? s'enquit-il, d'un ton froid et menaçant.

— Jooheon est bien allé voir Hoseok. Par contre, il l'a quitté sans rien lui faire.

— Est-ce possible d'être aussi inutile ? grogne-t-il.

— Et apparemment, Hoseok lui aurait tout dit... Il était sur le point d'aller vous trouver, mais on l'a arrêté juste avant.

Un grognement et quelques insultes me répondent.

— On en fait quoi ? Je voulais le tuer, seulement... Je pense qu'on devrait pouvoir l'utiliser, proposé-je.

— Bien sûr qu'il faut le garder ! s'écrie-t-il, hors de lui. Vous allez ramener et buter Changkyun, grâce à ce morveux !

— Ok, ok, je fais comme ça.

— Et surtout, ne rate pas ton coup ! Ce gars semble increvable ! Alors méfie-toi de lui et bute-le une bonne fois pour toutes !

Je raccroche après lui avoir répondu par l'affirmative, soupire ensuite bruyamment, et observe la route défiler devant nous, après un regard vers l'arrière pour vérifier l'état de Jooheon, solidement attaché et allongé dans la cabine.

— Ce gars, sérieux, soupiré-je. C'est vraiment le pire... T'as vu comment il traite ses hommes ?

Blasé, Donghun, assis derrière le volant, se maintient dans le silence, comme à son habitude.

— Enfin, faut bien bosser un peu de temps en temps, conclus-je, d'un haussement d'épaules, avant d'ouvrir un paquet de biscuits. N'empêche, il me fait vraiment froid dans le dos, ce type. Il s'arrange pour que ses hommes s'entretuent et pendant ce temps, il fraternise avec le patron de Golem, pour bâtir un nouveau clan. On ne peut pas faire plus fort, même en faisant partie de la mafia.

— Et nous, on devient quoi là-dedans ? me questionne le conducteur, les sourcils froncés. On va devoir entrer dans le groupe Venom ?

— Non, on est juste des mercenaires, on n'a rien à voir avec leurs affaires.

— Pourtant, le clan Golem va fusionner avec le groupe Venom, non ?

— Minhyuk va juste filer à Golem tout le fric ramené par Hoseok et une fois ce pognon transféré à la maison mère, il gardera tous les bénéfices. Le boss de Golem sera alors largement pressenti pour devenir le numéro deux du groupe Venom. Bon, c'est pas encore le top, mais ça reste une position très intéressante. Et même si Minhyuk se fait virer de Seven, il restera sur un pied d'égalité dans sa nouvelle hiérarchie et sera quasi intouchable, quoi qu'il arrive.

— Kang-Oh n'a pas remarqué son petit manège ?

— Même s'il sait vraiment pour cette histoire de drogue, c'est pas vraiment le bon moment pour lui de faire des vagues. Pour l'heure, s'il veut que tout se passe bien de son côté, il doit faire semblant de croire ce que lui raconte Minhyuk.

— Tu parles d'une situation pas claire, soupire Donghun, épuisé rien qu'à entendre toutes ces histoires.

— Une fois que tout sera terminé, c'est le démantèlement de Phantom et Helldogs qui les attend. Ce sera une grosse perte pour Kang-Oh. Il n'aura sans doute plus le temps de se préoccuper de ses histoires de succession.

— Minhyuk le hait tant ?

— Oh que oui, pouffé-je, la bouche pleine de Choco Pie. Kang-Oh veut nommer numéro deux ce pervers. Imagine un peu le truc. C'est un peu comme si un père ignorait son fils aîné pour mettre sa cochonne de fiancée à la tête de son héritage.

Dans un dernier soufflement de nez amusé, je sors du véhicule, une fois garé à l'endroit choisi plus tôt. Nous faisons ensuite le tour de la camionnette et ouvrons les portières arrière.

— On le tue ou pas ? pose mon collègue, observant le corps de Jooheon allongé et attaché comme un pauvre petit faon.

— Non, on fait croire qu'il est mort, mais on le laisse en vie, réponds-je, tout en tirant sur les liens de ce dernier, pour le forcer à se redresser. Si jamais Changkyun débarque, on l'utilisera comme otage.

À deux, nous le soulevons et le lançons dans le hangar ouvert face à nous. Il tombe lourdement sur le sol et grimace quelques secondes, avant de nous regarder partir.

Quand je pense que cet idiot s'est mis dans cette situation, simplement pour pouvoir aider et protéger son détraqué de patron. Il est bien trop naïf.

Nous croisons une voiture passant dans le sens inverse, lorsque nous tentons de quitter l'endroit désert où séjourne encore le gamin ficelé comme un rôti.

— Quoi ? m'écris-je alors, paniqué, tombant dans le regard du garde du corps de cette raclure. Comment ? Comment il a fait pour nous retrouver aussi vite ? Et il nous poursuit en plus !

Putain de merde, c'était pas censé se passer comme ça !

Les doigts agrippés sur le tableau de bord, je regarde la route défiler, nerveux, l'esprit fusant de toute part.

— Je fais quoi ? s'enquit Donghun, les mains crispées sur le volant.

— À ton avis ? râlé-je. Sème-les !

***

— Changkyun, c'est quel genre de type ? posé-je à Minhyuk, après avoir accepté le boulot offert par ce dernier. Juste pour être au courant... De ce que je sais, ce n'est apparemment pas un yakuza très respectable... Malgré ces rumeurs, il semble toujours vous intéresser. Je crois aussi savoir qu'il a travaillé sous vos ordres, quelques années. Je me posais donc plusieurs questions...

Debout, dans ce grand hangar, à l'abri de tous les regards, Minhyuk ne réagit que par son genou qu'il fait violemment percuter contre mon ventre.

Je geins instinctivement sous la douleur, tout en tombant au sol, et me traîne ensuite contre un poteau, pour m'y appuyer, le souffle court.

— Désolé, marmonné-je, frustré et énervé.

S'il ne payait pas aussi bien, je me serais déjà barré depuis longtemps.

Quelle ordure.

— Ça fait combien de temps que tu bosses pour moi ? crache-t-il, un sourcil arqué de façon hautaine. Faudra bientôt apprendre à tenir ta langue.

— Compris.

— Ça va ? s'enquit Donghun, assis à mes côtés.

— Est-ce que ça a l'air d'aller ? râlé-je, de plus en plus irrité.

Soudain, toujours debout et dos à nous, les mains placées dans les poches, le boss me répond.

— Il peut sembler calme et posé à première vue, explique-t-il, sérieux. Seulement, une fois lancé, dites-vous bien qu'il est comme vous et que plus rien ne l'arrête.