Chapitre 24

                   

         

                     

— Oui ! s'écrie l'homme tenu par mon collègue. Oui, on vend de la came ! Mais... Je... Je ne peux pas...

— Sunyoung, appuie sur la gâchette, tu veux ?

— Je ne peux rien vous dire de plus ! répond-il, semblant sincère.

— Où se trouve Hoseok ? pose alors le patron, redressé, la poigne refermée sur la tignasse de l'homme blessé.

           

La tête penchée vers l'arrière, l'homme en question avale difficilement sa salive, tremblant comme une feuille.

                       

— Je... Je n'en sais rien, je te le jure ! Il a appelé, il y a quelques jours, pour nous dire qu'il ne rentrerait pas au bureau et il n'est pas chez lui non plus !

— Quelques jours ? répète le boss, la mâchoire serrée. Avant ou après que je me fasse tirer dessus ?

— A-avant ! hurle-t-il, de plus en plus effrayé. Désolé, mais on n'a rien à voir avec ce qui t'est arrivé, on est au courant de rien !

— Tu vois quand tu veux ? conclut-il, d'un sourire narquois. Tu veux une petite récompense ?

— Plutôt crever.

— Comme tu voudras, sourit le patron, avant de prendre le cendrier posé sur la table, pour lui lancer violemment au visage.

             

Sans plus un regard vers l'arrière, il se lève ensuite et nous devance, près de la porte de sortie.

                    

— Rentrons.

                  

Je le suis dans la seconde, le rejoins facilement et panique lorsque debout devant la voiture, il s'effondre dans mes bras, tout juste placés devant lui.

           

— Patron ?

— Il s'est évanoui, signalé-je à Sunyoung, qui s'affole déjà bruyamment. Conduit-nous chez le docteur.

                                                   

Je savais qu'une chose ainsi arriverait. Il avait bien trop mal et était encore bien trop fatigué et affaibli...

Je m'inquiète pour Jooheon, mais je suis soulagé que son corps ait agi vite. Il va être obligé de se reposer maintenant, malheureusement pour lui.

Garé devant la bâtisse du docteur, je sors avant même que Sun n'ait pu couper le contact, soulève le patron, entre, et le dépose sur la table d'auscultation. Le docteur, occupé à remplir quelques paperasses, marmonne quelques râleries, mais se ravise en voyant l'état de son patient.

                     

— Pourquoi je ne trouve pas étonnant que cet abruti ait quitté l'hôpital alors qu'il est encore souffrant ? soupire-t-il, tout en soignant les plaies à nouveau ouvertes du patron.

                 

Si Hyungwon réagit ainsi, c'est que sa vie n'est pas en danger, pas vrai ?

                

— Jooheon a disparu, on devait et on doit l'aider, tente Sun, placé à mes côtés, debout près du docteur.

— J'en ai rien à foutre, gronde-t-il. Ce n'est pas une blessure faite en coupant des oignons, on parle ici de deux putain de balles dans le corps ! Il n'avait qu'à vous seconder par téléphone, j'en sais rien ! Et toi ? soupire-t-il, à mon égard. Tu ne savais pas le forcer à rester au lit ? Tu dois prendre soin de lui, pas le mettre en danger !

— Je suis désolé, mon rôle est de répondre à tous ses ordres, réponds-je, quelque peu déstabilisé.

                            

Je crois que je n'ai fait que le mettre un peu plus en colère... Tourné vers moi, il me fusille du regard, immobile dans le reste de ses gestes.

                               

— Tu le laisserais se faire tuer, s'il te le demandait ? pose-t-il, incrédule. Pense à sa sécurité, avant de penser à son plaisir. Une fois ne t'a pas suffi ? Tu n'as pas eu assez peur ? Il me semblait que tu voulais le protéger !

— Docteur... Ne soyez pas si dur, on fait tous les deux de notre mieux, marmonne piteusement mon collègue.

                             

Je ne sais quoi dire, ni quoi faire. Ses paroles sont blessantes, mais regorgent de vérités.

Mais je sais aussi combien Changkyun est impatient, agressif et impulsif. Je dois le protéger du mieux possible, tout en affrontant ses actes irresponsables. Il est compliqué de protéger un yakuza que rien n'arrête. J'aurais cru qu'il comprendrait ça mieux que quiconque, lui qui connaît le boss depuis tant d'années.

Je serre ainsi la mâchoire, tête baissée, et me contente d'attendre qu'il se calme.

Il ne répond rien de plus et se lève quelques minutes plus tard.

                       

— Emmène-le dans la pièce d'à côté, se contente-t-il de dire. J'ai d'autres patients qui attendent.

                           

J'acquiesce ainsi et porte avec le plus de délicatesse possible, le corps endormi du patron.

Après l'avoir allongé dans la chambre aménagée derrière le cabinet du docteur, je m'assieds à ses côtés sur la chaise mise à disposition et soupire bruyamment, tout en me frottant rageusement le visage.

                          

— Longue journée, pas vrai ?

                  

J'acquiesce pour simple réponse.

                               

— Je vais aller nous chercher un truc à manger. On n'a plus rien à faire en attendant, de toute manière, place, d'une nonchalance forcée, Sunyoung.

— Rentre chez toi et repose-toi, Sun, suggéré-je. Je te tiens au courant.

— D'accord... J'imagine qu'il ne sert à rien de rester là à l'observer à deux, sourit-il, tristement. J'y vais, je vais tenter de faire de nouvelles recherches de mon côté. Repose-toi aussi. Quelque chose me dit que la suite n'en sera que plus intense.

                           

Je hoche à nouveau la tête, avant de répondre à son bref signe de main.

Il faut que je m'occupe...

Y a-t-il une salle de bain ici ?

J'imagine que la porte là-bas me le dira.

Hyungwon a décidément tout prévu. À force d'avoir affaire aux yakuza et surtout, à Changkyun, il n'a sans doute pas eu le choix.

Il y a même tout ce qu'il faut pour séjourner quelques jours ici, c'est parfait.

Je prends ainsi un gant de toilette, l'humidifie légèrement et reviens vers le patron.

Le docteur n'aurait pas dû lui remettre sa chemise... J'aurais eu plus facile sans elle.

Je défais malgré tout les trois premiers boutons de celle-ci, me penche un peu plus et passe le tissu mouillé contre son cou. Je passe ensuite sur son avant-bras non bandé et termine par son visage, transpirant et légèrement fiévreux.

Dois-je enlever sa chemise pour le rafraichir au mieux ?

Non, je préfère attendre qu'il se réveille, pour avoir son accord.

Ça faisait si longtemps que je n'avais pas eu l'occasion de toucher ses cheveux.

J'aime tellement la sensation de douceur qu'ils m'offrent.

Ils ont d'ailleurs bien poussé depuis notre rencontre. Je suis certain qu'il pourrait les attacher sans problème, maintenant.

Il faut que j'arrête de caresser ainsi son visage. Si jamais il venait à se réveiller, je suis certain qu'il m'insulterait pour ces gestes.

Mais comment peut-on résister ?

Comment peut-on être aussi beau ?

Sa peau couleur porcelaine, ses cheveux soyeux couleur charbon, son corps fin et délicat, son visage aux proportions parfaites. Tout chez cet homme n'inspire que la pureté et la beauté.

Comment peut-on vouloir lui faire du mal ?

                        

— Des nouvelles de Jooheon ou des autres ? entends-je, d'une voix grave et enrouée.

                        

Je retire d'un geste rapide mes doigts de son visage, les yeux fixant à présent le sol et passe quelques minutes de mon temps à plier et déplier le gant de toilette, tout en lui expliquant les seuls détails dont j'ai connaissance.

            

— Quelle bande d'incapables, finit-il par conclure.

— On attend vos ordres pour la suite. Dites-nous ce qu'on peut faire et nous le ferons, en attendant, reposez-vous ici, vous en avez besoin.

— Pourquoi tu fuis mon regard ? questionne-t-il, d'un calme et d'une assurance qui me déstabilise bien plus que je ne le voudrais.

               

Son regard posé sur moi me brûle. Je ne sais quoi dire, pourtant je sais qu'il attend de moi une réponse.

                       

— Hyunwoo.

                              

Si aucune réponse ne vient, essaye au moins de le regarder dans les yeux, Hyunwoo...

Kihyun, dans un bruit infernal, me sauve la mise et s'invite à nos côtés. De cette nonchalance habituelle, il s'avance, un sourire narquois flanqué sur le visage, et sans quelconque signe de politesse, se penche sur le corps du patron, endormi comme par magie.

                    

— Et moi qui pensais ce connard invincible, crache-t-il, amusé. Il faut croire que c'est un humain comme un autre. Bon allez, viens, s'enquit-il ensuite, rejoignant la sortie. J'ai la dalle et toi aussi, à mon avis.

                                                          

Il quitte ainsi la pièce et après un dernier regard vers le patron, je me lève. Je suis néanmoins très étonné lorsque mon élan est coupé par Changkyun lui-même. Il me maintient immobile grâce à ma cravate qu'il tient fortement entre ses doigts.

Son regard profondément plongé dans le mien semble inquiet, peureux.

Je n'avais jamais vu un regard si enfantin et attendrissant.

Il paraît vraiment fragile. Et bien trop adorable.

Perturbé par ses propres gestes, il relâche ma cravate d'un geste brusque et tourne la tête à l'opposé de là où je me trouve.

Que lui arrive-t-il ?

                

— J'allais juste le prévenir que je ne vous quitte pas des yeux, lui confié-je, attendri par ce côté de lui que je découvre. Je reste à vos côtés, n'ayez crainte.

                                   

Les fesses à nouveau posées sur la chaise, je continue de l'observer fuir mon regard.

On dirait bien que les situations se sont très vite inversées...

                     

— Peu importe, marmonne-t-il. Fais ce que tu veux.

                          

Je n'aurais jamais cru le trouver si adorable.

J'aime beaucoup le Changkyun timide et effrayé par des faiblesses qu'il ne pensait pas avoir.

J'aime, vraiment beaucoup.

                       

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