CHAPITRE 9
Non, il n'avait pas besoin des autres quand Louis était devenu tout pour lui.
Il avait eu un peu peur, d'abord, que Louis ne s'éloigne comme pour se sacrifier, afin de le laisser retrouver ses amis. Il s'était préparé à des regards fuyants, une forme de froideur. Il avait compris depuis bien longtemps que Louis, sous ses airs de mauvais garçon avait en réalité un coeur aussi tendre que le sien, et qu'il était doté d'une confiance en lui assez basse. Dans ses mots, Ari avait toujours deviné que Louis ne pensait pas vraiment qu'il pouvait l'aimer lui et seulement lui, pour la personne qu'il était, malgré ses nombreuses déclarations fiévreuses.
Mais à sa grande surprise, Louis adopta le comportement contraire. Il avait l'air décidé à ne pas lâcher Ari d'une semelle, et à lui prouver qu'il avait fait le bon choix en le choisissant.
(En réalité, Ari aurait préféré ne jamais à avoir à faire de choix entre ses meilleurs amis et son amoureux mais du toute façon, il ne regrettait pas la décision qu'il avait prise. Louis n'était pas toxique pour lui, il le savait.)
Ils passaient tout leur temps ensemble. Lorsque Louis était libéré par Julia dans ses obligations professionnelles, ils allaient à la bibliothèque pour étudier. Ari savait que son père le tuerait s'il comprenait qu'il était en train d'abandonner ses études et Louis appréciait de toute façon améliorer son latin. Ils avaient même commencé à faire un peu de géographie et d'histoire, et Louis s'était découvert un intérêt tout particulier pour l'astronomie. À chaque fois qu'ils en parlaient, Ari avait l'impression de faire naître un océan d'étoiles dans ses yeux, ce qui était assez merveilleux. Un jour, il lui annonça qu'il avait un cadeau pour lui. Ils étaient seuls à l'étage supérieur de la bibliothèque, installés à la table la plus reculée de la grande pièce, dissimulés par une grande étagère de papyrus. Louis eut l'air surpris :
— Un cadeau ?
— Oui.
Ari se baissa pour fouiller dans son sac, et en sortit un petit sachet en soie rouge. Il le tendit à Louis, ses joues légèrement colorées.
— Ouvre.
Louis soupesa d'abord prudemment le paquet puis en délaça le noeud. Il resta immobile un long moment, tellement long que Ari eut l'impression que cela ne lui plaisait pas. Il remua sur sa chaise, s'éclaircissant la gorge :
— Lou ?
Le jeune homme releva la tête. Ses paupières étaient bordées de larmes.
— C'est si beau Az...
Il sortit doucement le pendentif du petit sachet. Une minuscule étoile se balançait au bout d'une chaine en or, très fine. Le bijou était délicat, et d'une étrange couleur bleue aux reflets verts.
(Honnêtement, Ari devait avouer que cela lui plaisait beaucoup de savoir que le vert de ses propres yeux et le bleu de ceux de Louis étaient réunis en une seule pierre.)
Ari se leva pour aider Louis à accrocher le bijou autour de son cou. Il le lui passa délicatement, et admira pendant de longues secondes la pierre déposée contre la peau du garçon. Le mélange était absolument parfait. Louis toucha la pierre du bout de ses doigts, ayant du mal à croire qu'un tel objet lui appartenait. Il n'avait jamais rien possédé d'aussi beau.
Louis le remercia un nombre incalculable de fois, visiblement vraiment ému, et le soir, lorsqu'ils furent rentrés dans sa chambre, il allongea Ari sur son lit et lui fit l'amour avec une vigueur étonnante. (Ari avait adoré voir le pendentif briller contre la poitrine nue de son petit-ami pendant qu'il s'enfonçait en lui de plus en plus vite.)
Quand ils n'étaient pas à la bibliothèque en train de travailler, ils arpentaient la ville. Ari emmenait Louis partout, le faisant passer pour son esclave personnel (il détestait dire ça, mais au moins ils avaient accès au gymnase, aux thermes et aux théâtres). Ils usaient de milles et un stratagèmes pour pouvoir rester ensemble, ce qui s'avérait souvent difficile. Ari n'avait jamais pris vraiment conscience de tous les privilèges qui étaient les siens, mais maintenant qu'il voyait Louis se faire refuser des massages aux thermes avec un air offusqué venant de la part des autres esclaves qui ne voulaient pas toucher l'un des leurs, cela lui donnait mal au ventre. Il avait presque honte de sa richesse et de sa condition d'homme libre. Heureusement, Louis n'arrêtait pas de lui répéter que ce n'était pas de sa faute, que c'était la société qui était comme ça. Ari faisait tout son possible pour ne pas mettre de barrières entre lui et son amoureux (mais peut-être qu'elles étaient déjà toutes tombées lorsqu'il s'était allongé sous lui, le nez dans l'herbe, et qu'il l'avait laissé prendre possession de son corps). Louis savait qu'ils étaient sur un plan d'égalité, et c'était assez rafraîchissant pour l'un comme pour l'autre. Louis rabrouait Ari comme il l'aurait fait d'un autre esclave (Ari lui avait déjà avoué qu'il aimait beaucoup son petit côté autoritaire et son air têtu), et de la même façon, Ari ne faisait jamais allusion à une éventuelle différence entre eux. Il parlait du travail de Louis de façon naturelle, lui disait sans arrêt qu'il était fier de lui et qu'il admirait son courage, et lorsque, parfois, ils rencontraient des jeunes gens à la bibliothèque, il présentait Louis comme un étudiant.
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Le problème, c'était que le comportement d'Ari avait aussi changé chez lui. Il ne parlait plus avec leurs esclaves de la même façon qu'avant, et ses parents et sa soeur finirent pas s'en apercevoir, lui jetant des regards curieux lorsqu'il se levait pour débarrasser la table, afin d'éviter à Sami de le faire, ou lorsqu'il proposait de donner un coup de main aux taches ménagères. Un jour sa soeur le surprit en train d'aider leurs ouvriers agricoles à porter des paniers de raisins. Ari était en train de plier sous les poids des fruits, peu habitués à des charges aussi lourdes, et il avait le visage cramoisi par l'effort.
— Ari ?! Mais qu'est-ce que tu fabriques ?, s'exclama Lucia.
Elle passait dans la cour, magnifique dans une robe de lin rose, ses longs cheveux noirs retombant derrière son dos. Ari lâcha son panier, s'épongea le front avec le dos de sa main. Il avait conscience d'être plein de poussière, de coups de soleils et de tâches de raisin.
— Rien, j'aide nos esclaves.
— Mais... Pourquoi ? Ce n'est pas ton rôle !
Ari haussa les épaules.
— Je m'ennuyais.
(C'était vrai, Louis travaillait et sans lui, ses journées étaient assez insipides.)
— Si tu t'ennuies alors tu ferais mieux d'aller rejoindre papa dans son bureau pour l'aider à faire les comptes, le reprit Lucia en pinçant ses lèvres.
— Si je dois reprendre les affaires de papa, alors il faut que je sache ce qu'est travailler, grommela Ari en reprenant son panier.
Il n'avait pas l'intention d'abandonner ce qu'il venait d'entreprendre. Lucia resta plantée à l'observer pendant un moment, puis elle finit par battre en retraite.
Bien sûr, l'histoire n'en resta pas là. Ari fut confronté à son père le soir même. Il se rendit compte en entrant dans son bureau que cela ne lui faisait plus si peur. Il gardait la tête haute, le menton droit. Peut-être qu'à force de côtoyer Louis, il était en train de devenir aussi insolent que lui.
— Lucia m'a dit que tu travailles aux côtés de nos esclaves, Ari, commença son père d'une voix claire.
— J'ai aidé à la récolte, oui.
— Ce n'est pas ta place, tu le sais ?
— Non.
Son père leva un sourcil. Il n'était pas habitué à ce que son fils lui réponde.
— Ari. Tu n'as pas besoin de participer aux travaux des champs. Tu es un intellectuel. Ta tâche dans ce monde c'est celle qui est la mienne : gérer, compter, marchander... Tu n'as pas à avoir les mains dans la terre, tu n'as pas à porter des paniers lourds et à t'abîmer les mains.
— Je voulais savoir ce qu'était travailler.
Son père afficha un sourire sarcastique.
— Et alors ? Qu'est- ce que c'est ?
— Difficile.
— Ce n'est pas comme si tu étais fait pour ça...
— Non, je veux dire, c'est très difficile. Et fatigant. Tous nos esclaves ont mal au dos. Ils ont tous des blessures et certaines ne sont pas soignées. J'ai parlé avec plusieurs hommes et beaucoup n'ont même pas de quoi manger à leur faim tous les soirs ! Pourtant, ce qu'ils font est beaucoup plus-
Son père se leva et tapa du poing sur la table. Le coup fit trembler la surface de bois, et un crayon roula et se brisa sur le sol. Ari se tut d'un seul coup et baissa la tête comme un enfant. Peut-être qu'il n'avait pas le courage de Louis finalement.
— Mais tu es fou ? Est-ce que tu veux déclencher une révolte ?! Nos esclaves sont très bien traités, et tu le sais Ari. Ils ne reçoivent que rarement le fouet, ils sont suffisamment payés pour ce qu'ils font et ils sont nombreux. Bien sur que leur travail est fatiguant, mais ce sont des esclaves ! Ils sont nés pour faire ça. Pas toi. J'aimerais que tu te le mettes dans le crâne et que tu cesses d'agir comme un enfant. Il va falloir que tu rentres dans le moule Ari, et que tu arrêtes tes excentricités !
Ari gardait la tête basse, les yeux remplis de larmes. Son père lui lançait souvent des piques et lui adressait des remarques acides mais il ne lui avait jamais crié dessus de cette façon.
— Je n'ai rien dit lorsque j'ai appris que tu avais défendu un esclave qui avait volé un pain chez Proculus. Je n'ai rien dit en te voyant passer tout ton temps hors de la maison et dormir je ne sais où. Je n'ai rien dit lorsque ta soeur m'a appris que tu avais fait rentrer un esclave chez nous, esclave qui nous a certainement volé.
(Ari avait envie de le couper pour lui rappeler qu'objectivement, si, il avait dit quelque chose, mais il avait l'impression que ce n'était pas le moment.)
— Je n'ai rien dit parce que tu es adulte et que j'estime que tu sais ce que tu fais. Mais ces derniers temps j'ai l'impression que tu oublies la place qui est la tienne ! Tu es mon fils Ari, tu es amené à reprendre notre commerce et ce n'est pas en te liant d'amitié avec tous nos esclaves que tu y arriveras ! Je ne veux pas apprendre que tu as recommencé. C'est clair ?
— Oui, souffla Ari d'une voix blanche.
— Bien.
Son père se rassit, tapota encore quelques secondes sur la surface du bureau puis lâcha, d'une voix sourde :
— Dans une semaine nous avons un dîner avec de riches commerçants de Rome. Leur fille sera là. Je compte sur toi pour faire particulièrement bonne figure.
Le message était clair. Ari se leva, le visage exsangue. Il quitta le bureau en tremblant.
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— C'est pas de ta faute..., murmura doucement Louis.
La nuit était tombée, recouvrant leurs caresses d'un voile éphémère. Dans le silence de la nuit, les doigts de Louis passaient et repassaient sur le ventre d'Ari. Le jeune homme était allongé contre lui, les yeux fermés.
— Je sais. Mais je ne sais pas comment lui dire que je ne veux pas. Faire un beau mariage est important pour mes parents, ils veulent que j'ai une femme pour tenir ma maison pendant que... que je ferais des affaires.
— C'est normal. La société le veut.
Ari grogna, repoussant la main de Louis.
— Arrête avec ce que la société veut ou pas, je m'en fous moi. J'ai envie d'être avec toi et... c'est tout.
Louis croisa les bras sur sa poitrine.
— C'est ce que je voudrais aussi, mais qu'est-ce que tu veux qu'on fasse Az ?
— Je sais pas... Partir ?
— Pour aller où ? C'est bien beau les rêves de gamin, mais je ne connais aucun endroit dans ce monde qui nous accueillerait les bras ouverts. Nos différences sociales resteront quoi qu'on fasse. Et puis, qu'est-ce qu'on ferait, ailleurs ? Si tu t'enfuis tu perdras toute ta fortune. On ne peut pas arriver dans un endroit inconnu et se retrouver sans argent.
Ari se tut. Louis était plus pragmatique que lui, il le savait. Peut-être parce qu'il connaissait la misère, la dureté de la vie. Ari se rendait souvent compte en l'entendant parler que lui n'avait aucune idée de ce qu'était souffrir de la faim, des coups et de la peur d'être revendu à un maître violent. Il se tut parce qu'il comprit que si Louis ne voulait pas partir, c'est parce qu'il était terrifié, sûrement, de plonger à nouveau dans le cercle d'une pauvreté sans fin. Ici, à Pompéi, il était en quelque sorte protégé. Certes il avait l'air de détester son métier, mais il gagnait assez sa vie pour avoir un logement individuel et Julia n'était pas si terrible. Ari ne pouvait pas lui enlever ça sans savoir ce qu'ils trouveraient ailleurs.
— Alors qu'est-ce qu'on fait ?, demanda t-il.
Il avait l'air si lasse soudain, dépassé par l'étendu de son amour pour Louis, et de tout ce qu'il signifiait.
Louis ne répondit pas, parce que lui non plus, n'en savait rien.
Ils se prirent à nouveau la main, cherchant le regard de l'autre dans la nuit.
— Je t'aime, murmura Louis.
Les yeux d'Ari papillonnèrent. Il sourit. Louis le lui disait rarement, mais quand il le faisait, il avait l'impression qu'une lumière s'allumait dans son coeur, et le réchauffait.
— Je t'aime aussi
— Alors on y arrivera.
La formule était vague. Mais Ari sut que c'était vrai. Tant qu'ils s'aimeraient, tout serait possible. Ils survivraient.
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Ils eurent des disputes, pourtant. Un peu toujours sur le même sujet. L'avenir les angoissait au plus haut point. Louis était de plus en plus fatigué, Louis avait de moins en moins envie de travailler au lupanar de Julia. Il avait souvent un air triste que Ari ne savait plus lui enlever.
Ari lui, était coincé entre son père — qui le surveillait bien plus qu'avant — et son envie de liberté. Il n'avait jamais eu autant conscience qu'il ne voulait pas rester à Pompéi. Bien sûr, il aimait la cité. Il savait que la vie y était agréable, et il n'avait pas envie de vivre au milieu du capharnaüm de Rome mais il avait envie... De voyager. De voir d'autres pays, d'autres visages. Il rêvait d'emmener Louis avec lui, de l'embarquer dans un tour du monde.
Forcément il en parlait régulièrement, et toujours Louis se braquait, détournait le regard, serrait les dents. C'était pire lorsque Ari osait évoquer son travail.
Louis explosa le jour précédent le repas d'Ari avec des commerçant romains — et leur fille.
Ils étaient assis sur un mur de pierre, face à la mer, éloignés de la ville. Ils étaient entièrement seuls, et s'embrassaient depuis un moment, confortablement installés. Ari, les mains posées sur les cuisses de Louis (il avait depuis longtemps relevé sa tunique pour caresser sa peau nue et brune de soleil), déposait des baisers au creux de son cou. Il ne sut pas trop pourquoi il dit ça à ce moment précis — peut être que le soleil, justement, lui tapait sur le crâne. Dans tous les cas, tout en mordillant la peau de son amoureux, il crut bon de souffler :
— Tu ne crois pas que ce serait fantastique si je te rachetais ?
Il sentit Louis se tendre sous lui mais il n'y fait pas vraiment attention, occupé à lui dessiner un suçon dans le cou. Il lécha doucement le carré maintenant rougi de sa peau et reprit :
— Tu serai mon esclave personnel et on pourrait faire tout ce qu'on veut, même-
— T'es sérieux ?
La voix de Louis n'avait jamais été aussi coupante.
Ari se redressa, bredouillant :
— Euh, oui. Enfin, ce n'était pas-
Il comprit qu'il avait fait une erreur. Les yeux de Louis étaient noirs de colère — et d'autre chose qu'il ne sut pas interpréter sur le moment.
— Je ne suis pas un objet qu'on peut se refiler. Je n'ai pas envie de t'appartenir, d'être, d'être ta propriété privée.
Ari se rendit compte que l'idée de posséder Louis de cette façon était horrible.
— Lou... Je, tu sais très bien que ce n'est pas ce qu'ai voulu dire. Si je te rachetais je... enfin je ne traiterais pas comme mon esclave. Je ne te considèrerais même pas comme tel c'est... impensable.
Mais Louis s'était fermé. Il repoussa Ari d'une main ferme, et sauta du muret, repartant vers la ville.
Ari en descendit à son tour, et tenta de le rattraper. Le poignet du jeune homme glissa dans sa main.
— Louis, Lou... Ecoute moi, ne sois pas fâché je ne voulais pas...
Louis s'arrêta. Jeta un regard lasse vers Ari :
— Je sais. C'est bon. J'ai juste... J'ai juste besoin d'être un peu seul. D'accord ?
Ari recula.
— ... D'accord. Tu... On se voit demain ?
Il haussa les épaules et se retourna à nouveau. Cette fois, Ari le laissa lui échapper.
Il venait de comprendre que ce qu'il avait lu dans ses yeux était une déception brûlante. Il avait blessé Louis. Il lui avait dit quelque chose qu'il avait ressenti comme une humiliation. Est-ce qu'on pouvait faire pire ?
Il resta longtemps, assis seul sur le petit muret, la gorge nouée et pourtant incapable de pleurer.
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Le repas était long à en mourir.
Les plats défilaient sur des assiettes d'or, le vin était le meilleur de la cave de son père, fin, parfaitement épicé.
Lucia, la soeur d'Ari, avait revêtu sa plus belle robe, drapée dans des tissus roses et translucides qui laissaient apercevoir l'ombre de sa peau blanche, suffisamment pour que les regards s'attardent sur elle un peu plus qu'il ne l'aurait fallu. Ari, lui, avait fait bien peu d'effort. Il avait juste enfilé sa tunique la plus belle, ornée de fils d'ors à peine visible. Il s'était coiffé correctement, ses cheveux bruns brillaient sous la lumière douce des bougies allumées un peu partout dans la pièce.
Les conversations étaient agréables mais Ari n'arrivait même pas à se concentrer. Il savait que son père l'observait pourtant. Il était censé faire bonne mesure, s'intéresser aux propos sur les affaires et le commerce maritime, mais il en était simplement incapable. Il hasardait quelque fois quelques remarques, mais c'était tout.
La fille des commerçants était allongée juste à côté de lui. Elle était encore moins bavarde que lui, et se contentait de picorer dans les plats qu'on lui tendait. Au bout d'un moment, Ari se rendit compte qu'elle était surement mal à l'aise. Elle était plus jeune que lui, et ses parents avaient du lui annoncer que Ari était son éventuel futur mari. Il se décida donc à se tourner vers elle et lui sourit, voulant être gentil :
— Est-ce que la vie à Rome est agréable ?
La jeune fille — elle s'appelait Olivia — parut surprise qu'il lui adresse la parole et rougit légèrement.
— Elle l'est dans notre quartier en tout cas... Mais c'est beaucoup plus bruyant qu'ici.
— Vraiment ? s'exclama Lucia qui en entendant le mot « Rome » avait immédiatement rejeté toute son attention sur eux.
Olivia hocha la tête, ses joues s'empourprant davantage.
— Oui vraiment. Il y a beaucoup de monde qui vit à Rome et les rues sont tellement empruntées la journée que l'empereur a fait voter un décret pour que les charrettes roulent la nuit, si bien qu'il n'y a jamais véritablement de calme.
Ari grimaça. Il aimait trop le silence doux des jardins de Pompéi pour avoir envie d'habiter dans la plus grande des Cité, mais Lucia, elle, paraissait enchantée :
— Ça doit être passionnant... Ici il ne se passe jamais rien ! Vous devez souvent aller au théâtre et aux Jeux ?
— Régulièrement oui... Mais je ne suis jamais allée au Colisée par contre.
Ari avait entendu parler du Colisée. C'était un endroit qu'il aurait aimé visiter avec Louis. (L'idée le fit soupirer.)
À partir de ce moment, Lucia et Olivia se mirent à discuter des modes à Rome et Ari perdit le fil de la discussion. Il resta les yeux vagues, à observer les bouches qui s'animaient et les visages qui s'échauffaient. Des bribes de mots lui parvenaient dans le brouillard de son esprit, mais lui ne pensait qu'à Louis, Louis fâché contre lui, Louis qui n'allait peut-être plus jamais lui parler. Il avait envie de pleurer.
Il ne supporterait jamais un monde où Louis ne l'aimerait plus, il préférait mourir.
— Ari ?
Il leva les yeux et se rendit compte que sa vision était brouillée. Sa mère le fixait de l'autre côté de la table, l'air légèrement inquiète.
— Tu te sens mal ?
Le bruit de la conversation lui semblait assourdissant alors que la voix de sa mère n'était qu'un murmure se faufilant jusqu'à lui. Il se redressa un peu, secoua la tête.
— Ça va... Juste, j'ai eu mal à la tête.
Sa mère fronça les sourcils mais n'ajouta rien.
Ari se força à ne plus penser à Louis.
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Le repas mit encore deux heures avant de se terminer. À la fin, Ari proposa à Olivia de lui montrer les jardins. Vu le regard que son père lui adressa, il sut qu'il venait de gagner un point.
Il prit donc le bras de la jeune fille et la guida à travers la maison. Le vin avait délié sa parole, et elle n'était plus aussi timide qu'en début de soirée, ne cessant de babiller. Ari avait un peu le tournis.
(Il aurait dû avoir l'habitude pourtant, avec Louis qui ne pouvait s'empêcher de donner son avis sur tout et n'importe quoi, mais la voix d'Olivia était bien moins agréable à écouter.)
Ils sortirent dehors. Il faisait chaud, et le bruit de milles et un insectes bruissaient dans l'herbe. La jeune fille se tut, levant les yeux vers les étoiles avec un sourire.
— Comme c'est beau. J'ai l'impression que le ciel est bien plus grand ici qu'à Rome.
— Ah oui ? C'est peut-être parce qu'il n'y a aucune lumière, constata amèrement Ari.
Lui avait l'impression ce soir que le ciel était bien noir. Mais Olivia ne parut pas se rendre compte de la mélancolie dans sa voix. Elle avança vers le fond du jardin, et Ari la suivit sous les ramifications d'une vigne. La jeune femme s'arrêta soudain, et se tourna vers lui.
— Je crois que je serai heureuse d'être votre femme.
Ari ne sut pas quoi répondre. Il ne s'attendait pas à une déclaration aussi brutale. Devant son mutisme, Olivia reprit :
— Je veux dire... Vous êtes intelligent... Beau et votre soeur est très gentille. Et Pompéi me plaît beaucoup.
— Ah, euh, ce serait très bien alors, bégaya Ari sans réfléchir.
Le visage de la jeune fille s'éclaira, et elle tendit les mains pour prendre les siennes. Ari eut envie de la repousser, mais il était comme cloué au sol.
— Je trouve aussi.
Elle dit autre chose, mais Ari n'écoutait plus.
Au fond du jardin, il venait d'apercevoir la silhouette familière de Louis, appuyé contre le tronc d'un arbre. Membres déliés et regard perçant, ses cheveux en bataille au-dessus de sa tête. Depuis combien de temps était-il là ?
Olivia se tut. Elle leva les yeux vers Ari, se rendit compte qu'il ne la regardait plus mais que ses yeux étaient comme perdus au-dessus d'elle, et que le bord de sa bouche tremblait légèrement. Elle se retourna lentement, et aperçut à son tour le garçon qui attendait, à quelques mètres de là.
Ari lui lâcha les mains. Elle ne dit rien, ses bras retombèrent le long de son corps. Elle le fixa, éberluée, alors qu'il s'avançait vers l'autre garçon comme un automate. Elle ne dit absolument rien en les voyant s'enlacer lentement. La scène était irréelle de beauté et de silence.
Elle vit les mains qui se frôlent, la bouche qui murmure « pardon ». Elle vit leurs deux corps si différents et pourtant parfaitement assemblés, elle vit les doigts d'Ari se poser lentement sur la hanche de Louis. Elle vit leurs visages s'approcher, leurs lèvres se chercher dans le noir. Elle vit le baiser, la lenteur la passion la tendresse immense, infinie. Elle vit ensuite, les fronts qui se touchent, les cils qui tremblent sur le haut des joues, la main qui caresse la joue, qui s'excuse encore, vingt fois, dix fois, qui dit, douloureusement : « je ne voulais pas te faire de mal, je ne voulais pas te rendre triste, pardonne-moi mon amour ». Elle vit tout ça, le souffle coupé, et lorsqu'Ari se retourna vers elle, semblant se souvenir de sa présence, elle baissa la tête et battit en retraite, le coeur battant.
Ari la rattrapa, dans un couloir aux murs bleus. Olivia lui sourit avant qu'il n'ait dit quoi que ce soit. Elle n'arrivait pas à le regarder dans les yeux — par pudeur sûrement. Mais elle souriait vraiment, et lorsqu'elle murmura, Ari sentit qu'elle ne lui en voulait pas :
— Je vais dire à mon père que je ne veux pas de ce mariage avec vous. Je suis désolée, j'en serai incapable après... ça.
Ari fronça les sourcils :
— Vous êtes dégoutée ?
— Non.
Elle sourit encore une fois. Ari eut l'impression qu'elle allait pleurer, sans savoir pourquoi :
— Non, ce n'est pas ça. Mais vous, vous êtes amoureux. Et je ne veux pas me mettre entre cet amour.
Ari lui prit la main et la serra dans la sienne.
— Merci, souffla t-il.
Olivia détourna le regard, les joues légèrement roses.
— J'espère que vous serez heureux.
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(cette manip est trop douce, on est d'accord ?)
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Ce soir-là, Louis passa la nuit avec Ari, dans sa chambre. Ils observèrent longtemps les ombres des arbres au-dehors, se déshabillèrent et firent courir leurs mains sur le corps de l'autre. Ari lut les poèmes qu'il écrivait pour Louis et Louis pleura un peu, parce que c'était niais et cruellement beau.
Ils firent l'amour ensuite, s'épuisèrent dans les draps blanc du lit. Louis entre les cuisses d'Ari, Ari le corps tordu par le désir, leurs sueurs mélangées, ventres creusés sous la caresse des langues. Mains coulant dans les cheveux emmêlés, bouches ouvertes, humides, tremblantes, gémissantes, paupières closes, crispées, gémissement étouffés dans les replis des peaux.
Louis ensuite, contre le mur, pris dans l'étau du corps d'Ari. Leurs murmures assoiffés l'un de l'autre, les dents qui mordent, les ongles enfoncés dans la chair. Encore encore. Des mots d'amour au milieu des mots crus. Baisers tendres, mèches tirés, gémis plus fort pour moi fais-le prends-moi encore et ne me laisse plus tomber mords tout mon ange ma bouche mes cuisses mon sexe mes fesses je t'offre tout et ne reprendrais rien je t'aime je t'aime encore plus fort ce sera comme ça toute la vie, ce sera comme ça, promis.
Corps effondrés, terrassés par le désir, les peaux froides de sueurs qui tremblent encore, muscles lasses, doigts enlacés sur l'oreiller, sourires fatigués dans la lumière tendre de l'aube, toutes les plaies sont réparés, l'amour intact, plus fort, à jamais.
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— L'eau de la rivière est tarie. (* note de l'auteure en fin de chapitre)
Ari releva la tête de l'ouvrage qu'il consultait, jetant un regard curieux vers Louis.
— Ah oui ?
— Oui... C'est étrange à cette saison.
C'est vrai que l'été touchait à sa fin, et qu'il y avait de plus en plus d'orages. Il était étrange que le lit de la rivière soit asséché. Ari planta son menton dans le creux de sa main, réfléchissant un instant avant de dire :
— Peut-être qu'il y a eu un éboulement quelque part, et que l'eau ne plus passer ?
— Sûrement, fit Louis en haussant les épaules.
Il était en train de regarder une carte de l'univers, et ses yeux paraissaient plus absorbés par la courbe des étoiles que par les explications pseudo-scientifiques d'Ari. Celui-ci ne put donc pas s'empêcher de demander en riant :
— Pourquoi est-ce que tu me parles de ça si tu n'es absolument pas intéressé par la discussion ?
Louis releva la tête, ses yeux brillants :
— Parce que j'aurai aimé pouvoir aller me baigner ce soir. Avec toi. Nu.
Ari déglutit. Louis se replongea dans son analyse du ciel et il expira lentement, histoire de faire baisser la température de son corps qui avait augmenté beaucoup trop vite. Il s'apprêtait à dire à Louis qu'ils n'avaient pas besoin d'aller se baigner pour pratiquer une activité incluant leur nudité lorsqu'une voix vaguement familière l'appela. Il releva la tête, et fronça les sourcils en voyant Marcus s'approcher. Visiblement, il était seul.
(Ari eut un petit pincement au coeur en réalisant qu'il y avait déjà plusieurs semaines que Nilla et Lima n'avaient pas cherché à le voir. S'il avait cru au début que ses amis réaliseraient leur erreur et reviendraient s'excuser, il avait visiblement eu tort.)
Marcus prit une chaise et vint s'installer avec eux comme s'ils l'avaient invité, ce qui n'était absolument pas le cas. Ari croisa le regard furieux de Louis, et soupira intérieurement. Que voulait l'étudiant en philosophie ?
— Bonjour Marcus, articula t-il assez peu amicalement.
Le jeune homme lui décocha un large sourire.
— Ari ! Je suis heureux de te voir. Tu viens souvent ici ?
— Assez, oui, dit-il prudemment.
Il n'avait vraiment pas envie que Marcus le rejoigne à la bibliothèque tous les jours.
— Tu aurais du me le dire ! Il y a des cours de philosophie en bas... Je peux te recommander à mes professeurs pour que tu y assistes !
Ari hésita un instant. Il adorait vraiment la philosophie, et il était certain que son père serait très content de savoir qu'il s'adonnait à cette activité, qui élevait l'âme. Mais il ne voulait pas laisser Louis.
— C'est gentil, mais je ne suis pas tout seul, répondit-il simplement.
Marcus se tourna alors vers Louis, qu'il avait ignoré depuis le début de la conversation. Ses sourcils se froncèrent légèrement puis il sembla réaliser qui se trouvait devant lui (et le fusillait du regard).
— Oh ! Tu es Louis, c'est ça ? Tu étais là le jour des Jeux ?
— Oui, siffla l'intéressé.
Ari se tendit imperceptiblement en voyant le regard de Marcus passer de l'un à l'autre. Un regard qui semblait avoir compris quelque chose.
— Tu es... L'ami proche de Ari.
Il y eut un petit silence, puis il tourna toute son attention vers Louis et demanda :
— Tu n'es pas un citoyen libre, n'est-ce pas Louis ?
La question était si directe qu'Ari lui-même s'en trouva décontenancé. Mais Marcus ne les laissa de toute façon pas répondre, et se releva, un sourire vague sur les lèvres :
— C'est donc toi... L'esclave avec qui Ari brave toutes les hiérarchies. Étonnant... Tu n'as pourtant rien de très intéressant, visiblement.
Il pouffa, pointant du doigt le document que consultait Louis et qui était normalement conçu pour les jeunes élèves maîtrisant encore assez mal le latin. Ari vit le visage de Louis se blanchir, et son sang ne fit qu'un tour. Il se dressa, sa chaise grinçant derrière lui, attirant les regards des quelques étudiants autour d'eux. Tout son corps vibrait de colère. Marcus ne réagit pas assez vite, ne s'attendant visiblement pas à ce que Ari l'attrape par le col de sa tunique, et le tire à lui.
— Excuses-toi.
La voix d'Ari était glaciale. Marcus eut un rire mauvais. Ses yeux se posèrent sur Louis qui dévisageait son petit-ami d'un air tout aussi choqué qu'honteusement fier, et il cracha :
— M'excuser envers ça ? Un esclave ? Une pute ? Jamais. Je préfèrerais le faire à un chien.
Ari n'était pas violent. Il ne l'avait jamais été. Mais le coup partit tout seul, s'abattit sur la tempe de Marcus qui tituba en arrière. Ari avait frappé son arcade qui se mit à saigner abondamment, des gouttes noires tombant sur le parquet. Un homme se leva, courut vers le blessé. Ari resta tremblant, les yeux écarquillés, ne comprenant pas lui-même ce qui lui avait pris.
On fit évacuer Louis et Ari de la bibliothèque, les priant de ne pas y revenir. La porte se referma sur eux, et Ari tremblait encore : de peur, de colère, de honte, ils ne savaient pas lui-même.
Ils marchèrent en silence dans les rues, leurs pas trouvant seuls le chemin de l'insula où vivait Louis. Lorsqu'ils se retrouvèrent assis sur son lit, ils se jetèrent enfin un regard et Louis fut le premier à se mettre à rire. C'était nerveux, mais Ari se mit à rire aussi, et bientôt ils étaient écroulés sur le lit, l'un contre l'autre, les épaules secouées, à se repasser sans cesse la tête qu'avait fait Marcus en se redressant, sa main ensanglantée sur son sourcil.
Quand ils se furent enfin calmés, Louis roula sur le côté et grimpa sur les hanches de Ari, passant doucement son pouce sur sa joue :
— Je ne savais pas que tu avais une telle force... Ni que tu pouvais t'énerver. C'était...
— Excitant ?, proposa Ari en bougeant légèrement les hanches.
Louis leva les yeux au ciel, se mordillant la lèvre.
— Un peu. J'avoue. Mais j'ai surtout trouvé ça mignon, que tu me défendes.
Les yeux d'Ari se réchauffèrent, et il attira doucement le jeune homme contre lui, pour lui échanger un long baiser. Contre sa bouche, il murmura :
— Je te protègerais toujours. Même si je dois y laisser ma vie.
Louis le repoussa du plat de la main, riant un peu.
— Idiot. C'est moi qui pourrait mourir pour toi.
Ari entrelaça leurs doigts.
— Alors on mourra ensemble, si j'ai bien compris.
Ils échangèrent un regard amusé, parce que les mots, à cet instant, n'avaient rien de bien sérieux.
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Louis allait quitter le lupanar lorsque Athis se matérialisa devant lui, dans une robe particulièrement transparente qui laissait peu de place à l'imagination. Ses yeux étaient fardés de noir et ses lèvres étaient très rouges. Louis se demanda si elle avait pu se payer du maquillage grâce à l'argent qu'il lui avait donné, il y avait presque un mois maintenant.
Il soupira en voyant qu'elle tenait manifestement à lui barrer le passage :
— Je suis pressé, Athis. Qu'est-ce que tu veux ?
Il ne l'aurait avoué pour rien au monde, mais l'angoisse lui serrait un peu l'estomac. Il savait que Ari et lui n'étaient pas particulièrement discrets. Mais Louis n'avait pas envie de l'être, de toute façon. Quand il se baladait en ville avec le jeune homme, ils n'avaient aucun gestes l'un envers l'autre qui puissent révéler qu'ils étaient ensemble. Peut-être que leurs regards — et ce qu'ils se disaient — pouvaient les trahir, mais il était certain que les gens les voyant tous les deux pensaient à un esclave et son maître. Il était donc certain qu'Athis ne pourrait pas clamer une nouvelle fois les avoir vu s'embrasser.
Pourtant, en la voyant sourire de façon particulièrement perfide, il ne put s'empêcher de se demander : et si elles nous avaient vu, ce soir là, dans l'herbe près de la rivière ? L'idée même que quelqu'un comme elle ait pu être témoin de ce moment le fit frissonner. (Non pas parce qu'il avait honte, mais parce que cet instant, c'était le leur, pour toujours, et il le chérissait comme un secret.)
Mais Athis le détrompa très vite, avançant sa main vers sa poitrine, et tirant légèrement sur la chaîne du collier que portait Louis.
— Jolie pierre, commenta t-elle.
Louis repoussa sa main d'un geste ferme et s'empressa de cacher le collier dans le pli de sa tunique. Il le faisait toujours normalement, ne voulant pas quelqu'un remarque qu'il portait un tel objet, et il se maudit intérieurement pour avoir été aussi imprudent.
— Merci, grommela t-il vaguement, ne sachant pas où Athis voulait en venir.
La jeune femme s'appuya contre le mur, les bras croisés sur sa poitrine, battant des paupières.
— Quelqu'un te l'a offert ? Ou tu l'as volé ?
— Je l'ai trouvé, répondit prudemment Louis.
(Il savait que c'était assez peu crédible, mais il n'allait certainement pas avouer à Athis que l'étoile bleue et verte au creux de sa poitrine était un cadeau d'Ari.)
La jeune femme pouffa, et secoua la tête.
— Oh, Louis. Tu peux me le dire que tu te fais entretenir. Je pensais que ce Ari allait finir par se lasser de toi, mais visiblement, tu lui plais, non ?
Ses mâchoires se crispèrent et il ne répondit pas. Il voulait sortir mais Athis lui barrait le passage et il savait que Julia se trouvait dans la pièce d'à côté. Il n'avait pas envie de se faire remarquer.
— Combien est-ce que tu veux cette fois ?, finit-il par souffler.
Mais Athis ne répondit pas tout de suite. Son regard passa et repassa sur le corps de Louis, et elle semblait rêveuse lorsqu'elle murmura :
— Je peux le comprendre... Tu es attirant. Si tu avais été un homme libre, je pense que j'aurai fait tout mon possible pour que tu me remarques et me rachètes.
Louis grimaça :
— Ce qui ne serait jamais arrivé.
Athis sourit légèrement, puis secoua la tête.
— Je pense que tu sous-estimes mes talents de persuasion.
— Je pense que tu sous-estimes le dégoût que j'éprouve pour toi.
Une lueur mauvaise brilla dans les yeux de la jeune fille mais elle ne répondit pas, se contentant de tendre à Louis un petit morceau de papyrus plié qu'elle avait caché dans le repli de sa robe, au niveau du sein droit.
Louis le prit avec méfiance, mais les doigts d'Athis se replièrent sur les siens, l'empêchant de l'ouvrir.
— Il paraît que tu sais lire maintenant, alors regarde-le quand tu seras chez toi.
Louis allait protester mais Athis attrapa soudain sa nuque avec ses doigts et se pencha pour l'embrasser. Ses lèvres s'écrasèrent contre les siennes, collantes.
Elle éclata de rire lorsqu'il la repoussa violemment, s'essuyant la bouche avec le dos de sa main :
— Mais tu es folle ?!
— Oh ça va, ne fais pas ta prude.
Cette fois-ci, il la dégagea du passage et courut jusque dans la rue, ne voulant pas rester une minute de plus dans la même pièce qu'elle.
*
*
*
« Mardi, quand le soleil sera couché, derrière l'amphithéâtre. »
(voici ce fameux amphithéâtre !)
/// À SUIVRE... ///
* Note : Quelques jours avant la catastrophe, il y a vraiment eu des puits qui se sont taris (ici j'ai choisi de carrément tarir la rivière parce ça avait un côté plus symbolique pour Louis et Ari), des thermes qui ont été fermés et une partie d'un aqueduc (sorte de "pont" qui sert à acheminer l'eau à travers la ville) qui s'est écroulé... Tout ça était dû à des éboulements qui commençaient + aux nappes phréatiques qui étaient pompées par le volcan ! (Mais Ari et Louis vont en reparler un peu dans le prochain chapitre !)
Bref. Vous vous en doutez avec cette petite note... On se rapproche de plus en plus du jour fatal. :( Il reste normalement 3 chapitres + un épilogue... Ce qui fera que cette fiction aura 13 parties, et je trouve ce chiffre assez intéressant mdrrr.
J'espère que vous avez aimé le chapitre 9 en tout cas. 💙 Est-ce que vous avez une idée de ce que Athis a inventé pour pourrir la vie de Louis ? :))
À dimanche. 🌸
ps : deux mois depuis le concert d'Harry à Bercy... snif.
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