Chapitre 48

Le regard d'Hermione sautait d'une personne à l'autre. Aucune n'avait la même expression sur le visage. Les enfants Weasley, Georges, Ron et Ginny, la regardaient avec stupéfaction, comme si elle était un dragon avec deux têtes. Les adultes, Lupin, Maugrey et les parents Weasley, l'observaient avec méfiance. Harry, quant à lui, était plus que furieux.

Hermione se souvint alors que, la dernière fois qu'elle les avait tous vus, c'était à l'asile de Menkar, où ils attendaient tous l'exécution de Voldemort. Jusqu'à ce qu'elle l'aide à s'enfuir, ou du moins qu'elle aide celui qu'elle pensait être Voldemort... C'était un jour crucial qui semblait pourtant avoir eu lieu des années en arrière mais, en fait, ce n'était guère plus qu'une semaine.
Une partie d'elle savait que ce jour allait arriver, celui où elle allait devoir faire face à toutes ces personnes qu'elle avait aimées - qu'elle aimait toujours ! - et allait devoir répondre de ses actions. La dernières fois affait été durant la Bataille de Poudlard. Devant tout le monde, elle avait coupé court au combat final entre Harry et Voldemort, et avait aidé son maître à s'échapper. Peu après, elle avait refait face à tout le monde à la Chaumière aux Coquillages et avait fourni l'excuse qu'elle ne voulait pas que quelqu'un d'autre soit tué.

Mais maintenant ? Qu'allait être son excuse ? Non seulement elle avait sauvé Voldemort de l'exécution, mais elle l'avait aussi aidé à entrer dans le Ministère de la Magie ! Sans aucun doute la pire offense qu'un sorcier puisse faire. Ce qui était le plus choquant était qu'ils ne l'avaient pas encore tuée, cependant, mais elle comprenait qu'ils en aient envie.

Comme que Harry se baissait devant elle, tout le monde se rassembla autour d'eux. Ils se trouvaient dans une grande pièce avec des bureau empilés et des chaises poussées sur les côtés, sans doute un bureau non utilisé. Hermione reporta ensuite son attention sur Harry. Il ouvrit la bouche pour lui parler, mais avant même de dire un mot, il referma la bouche en faisant claquer ses lèvres.

— Comment est-ce qu'on saura qu'il a remarqué sa disparition ?
— On le saura, répondit Maugrey en lâchant Barty sur le sol comme un sac de patates.

L'homme tressaillit mais resta sur le carreau.

— Elle a son charme Serpentine, reprit Maugrey. Personne n'est plus important pour lui qu'elle. Aucun doute que nous avons déjà toute son attention. Cela ne devrait pas être long avant qu'il ne nous demande de la lui rendre. Quand il le fera, nous aurons nos propres demandes.

Harry reporta son attention sur Hermione.

— Et que sommes-nous supposés faire d'elle jusque-là ? demanda-t-il.

Hermione frissonna au froid de son ton.

— L'interroger, bien entendu, répondit Maugrey, récoltant un regard de reproches de la part de Lupin. Quoi ? dit-il. Tu imagines tout ce qu'elle sur Voldemort ? Tous ses plans ? Son esprit est un petit coffre au trésor qui ne demande qu'à être ouvert. Je propose de commencer avec quelques sortilèges inoffensifs, puis nous passerons à l'arrachage des ongles - un truc que j'ai appris des Moldus - et peut-être ensuite, un bon Doloris...
— Stop ! s'exclama Hermione, terrorisée, attirant l'attention de tout le monde.

Le regard satisfait de Maugrey lui indiqua qu'il avait anticipé ce genre de réaction.

— Vous n'avez pas besoin de me torturer, demandez, je vous dirais tout ce que vous voulez, reprit la jeune sorcière.
— Eh bien, tu n'es pas une très loyale Mangemort, n'est-ce pas ? répondit Mme Weasley en croisant les bras.
— Je ne suis pas un Mangemort du tout, expliqua la Gryffondor. Peut-être au début, quand j'étais encore sous les ordres de Dumbledore, mais un Mangemort sert Voldemort avec révérence et sans questions ; je suis toujours moi-même.

Elle se tut alors et un silence s'installa.

— Peut-elle être sous Imperium ? demanda Ginny avec espoir.

Lupin secoua la tête et Maugrey prit la parole.

— J'ai vu pas mal de pauvres crétins sous Imperium, Miss Granger n'en montre aucun signe, dit-il.
— Si tu en es arrivée à de telles extrémités pour sauver Voldemort, alors pourquoi serais-tu prête à tout nous dire et le trahir ?
— Pas le trahir ! répondit Hermione un peu rapidement. Je ne vous dirais rien qui conduire à sa mort ou à sa capture.
— Je ne comprends pas, répondit Ron durement en faisant un pas en avant. Si tu n'es pas un Mangemort, alors pourquoi te battre avec lui ? Pour faire tout ça ? Qui est-il pour toi sinon ton précieux Seigneur des Ténèbres ?

Hermione se mit à réfléchir à la meilleure manière d'expliquer ce qu'elle ressentait pour Voldemort, sans qu'ils ne la croient folle.

— Je crois que nous sommes...

Quoi, des amis, des amants ?

— Des partenaires. Nous prenons soin l'un de l'autre. Nous apprenons l'un de l'autre. Nous donnons à l'autre ce dont il a besoin, que ce soit une oreille, une main tendue... ou juste, une compagnie.
— Je croirais entendre Bellatrix avant que je n'achève sa misérable vie ! grogna Molly.
— Hermione, dit alors Lupin doucement en s'agenouillant près d'elle. Il arrive parfois, quand une personne et retenue captive, qu'elle se reporte sur son geôlier. C'est une manière de gérer cette situation inconfortable. Ils ne voient plus leur ravisseur comme une menace et peuvent développer des sentiments pour lui.
— Je ne suis pas sa prisonnière, répondit Hermione. J'ai choisi d'être avec lui.
— Vous voyez ! s'exclama Georges, choqué. Elle est complètement cinglée ! On dirait qu'on lui a lavé le cerveau ou un truc comme ça !

Monsieur Weasley s'approcha alors et prit la parole à son tour, le visage sérieux.

— Hermione, je vais te poser une question, et tu dois me répondre avec la plus absolue honnêteté. Est-ce que tu comprends ?

La jeune femme hocha la tête lentement.

— La raison pour laquelle tu as fait tout ça, tous ces crimes, nous tourner le dos, est-ce parce que tu es amoureuse de Voldemort ?

Hermione regarda chaque personne autour d'elle. Tous haïssaient Voldemort, ils ne le connaissaient pas comme elle le connaissait, ils pensaient qu'il n'était rien de plus qu'un meurtrier sans sentiments, indifférent à tous sauf lui-même. En quoi cette question était-elle donc importante ?

— Vous ne comprendriez pas, répondit-elle en baissant les yeux sur le sol.

Elle grimaça quand ils se mirent tous à exprimer leur surprise.

— Je ne sais pas qui tu penses être, répondit Harry d'une voix glaciale. Mais la Hermione que j'ai connue n'aurait jamais pensé une seule seconde à choisir Voldemort plutôt que ses amis. Et encore moins... s'enticher de lui.
— Ce fut l'erreur de Bellatrix, et vous savez comment cela s'est terminé, dit Lupin. La même chose vous arrivera si vous n'êtes pas prudent, Hermione.

Celle-ci jeta un coup d'œil avec Madame Weasley puis revint sur Lupin. Elle reconnaissait une menace quand elle entendant une...

— Hermione est morte, souffla alors Harry. Je ne sais pas qui est cette fille.

Hermione sentit un poignard s'enfoncer dans sa poitrine à l'entente de ces mots et son cœur se brisa en morceaux ; les larmes jaillirent de ses yeux et dévalèrent son visage. Harry se détourna alors d'elle et rejoignit Ron qui posa une main réconfortante sur son épaule.

— Je sais ce que vous pensez de moi, dit alors Hermione. Après tout ce que j'ai fait, toute la douleur que j'ai causée, vous avez tous les droits de me haïr. Je suis désolée, je suis tellement désolée, vraiment.

Harry tourna la tête pour l'observer et cela lui donna l'envie de continuer.

— Quand j'ai accepté d'espionner Voldemort pour Dumbledore, je n'avais aucune idée que je finirais par découvrir une facette du Seigneur des Ténèbres que personne n'avait jamais vue encore. Que je finirais par me reconnaître en lui... Que lorsque je lui montrais un tout petit peu de chaleur, il me montrait de la chaleur en retour. Je le craignais, mais je l'admirais aussi. Il n'était pas ce que je pensais, et cela m'a prise au dépourvu... Je suis devenue vulnérable avec lui, ce qui l'a rendu vulnérable avec moi. Une expérience qu'il n'avait encore jamais eue, et je pense que ses sentiments pour moi l'effraient un peu. Il a du mal à s'exprimer correctement, mais avec mon aide, cela s'arrange. J'en suis fière. J'espère qu'un jour, vous pourrez le voir...

Elle se tut alors et tout la pièce fut plongée dans le silence. Personne ne bougeait. Hermione ne put s'empêcher de se sourire à elle-même. Cela faisait du bien de vider son sac. Elle avait redouté ce moment quand elle allait devoir faire face à ses amis, désormais, elle avait une sensation de légèreté.

— Pauvre enfant... souffla Monsieur Weasley.

Ron s'éloigna alors en marmonnant.

— Je n'en entendrai pas un mot de plus !

Il disparut dans un coin de la pièce et s'assit sur l'un des bureaux, bras croisés, sourcils froncés.
Balayant la pièce du regard, Hermione vit qu'ils la regardaient tous comme Monsieur Weasley, avec pitié, comme si elle était une enfant dont on avait profité. Elle savait qu'ils ne comprendraient pas, alors pourquoi s'embêter à la kidnapper ? Qu'avaient-ils à gagner ? Quand elle posa la question, Maugrey répondit.

— Comme vous le savez sans doute, Dame des Ténèbres, Voldemort a pris le contrôle du bureau du Ministre. Positionné ici, il peut prendre le contrôle du reste du Ministère. Il est assis tranquillement dans le fauteuil du Ministre, tandis que vos minions courent partout, tuant quiconque s'opposant à eux et au Seigneur des Ténèbres. Vous devez sans doute vous dire "Et voilà, Voldemort a gagné" ? Non, M'dame ! Voldemort a toujours le Ministre de la Magie - vivant ! - là-bas ! Et tant que notre Ministre sera en vie, notre combat pour reprendre le Ministère ne cessera pas !

Hermione comprit aussitôt ce qu'il se passait.

— Vous allez me marchander, dit-elle, la colère donnant du relief à sa voix.
— Votre vie contre celle du Ministre, rien de bien compliqué, acheva Maugrey.

Hermione sauta sur ses pieds. Tout le monde fit un pas en arrière, incertains de ce qu'elle pourrait faire, mais elle se contenta de marcher, les poings serrés.

— Elle n'est qu'une fidèle, dit alors Georges. Comment on saura qu'il accepte le marché ?
— Il a acceptera, répondirent Hermione et Maugrey d'une même voix.

Tout le monde les regarda et Hermione rougit.

— Comme je l'ai dit, elle a son Charme Serpentine. Elle est son héritière, la personne la plus importante dans son monde actuellement. Avec elle entre nos mains, tout ce que nous aurons à dire c'est "saute" et il répondra "de quelle hauteur".
— Et si jamais il a déjà tué le Ministre pendant que nous avons cette conversation ? demanda Hermione en s'arrêtant devant Maugrey.
— Eh bien... grogna-t-il. Eh bien, tu ferais mieux de te mettre à prier car tu ne va pas aimer ce qui va t'arriver.

Hermione plissa les yeux.

— C'est une menace ?

Un grognement fit soudain bondir tout le monde. Au pieds de Maugrey, Barty se redressa sur un coude en se tenant la tête.

— Bordel de... marmonna-t-il en regardant autour de lui. Et merde... dit-il ensuite en découvrant Maugrey.
— Ah quand même ! J'ai failli attendre ! répliqua celui-ci.

Il saisit le jeune homme par le col et le traîna jusqu'à un côté de la pièce.

— Vous allez vraiment le torturer maintenant ? demanda Hermione.
— Vous avez un problème avec ça, Dame des Ténèbres ?
— Nan.
— Excellent.
— Ce n'est juste pas nécessaire.

Maugrey lui jeta un regard de son œil fou.

— Ah ?

Hermione le rejoignit.

— Il est sous Serment Inviolable, dit-elle. Il ne peut pas toucher une femme sans mourir sur place. tout ce que j'ai à faire...

Elle tendit le doigt vers le visage pâle de Barty.

— Non, attendez ! s'exclama-t-il aussitôt en essayant de s'éloigner d'elle, pour revenir aussi sec, Maugrey le tenant solidement. Qu'est-ce que vous voulez de moi, Fol'Oeil ? Je ferais tout ce que vous voudrez, tout !
— Je n'en doute pas, petit crétin, siffla Maugrey.
— Alastor, s'il te plaît, répondit Lupin. Nous avons plus important à faire.
— Il a raison, répondit Monsieur Weasley. Nous devons initier la transaction le plus rapidement possible, avant que le Seigneur des Ténèbres décide d'en finir avec le Ministre.
— Nous devons nous assurer qu'il sait que nous l'avons, dit Harry.
— Je te l'ai dit, il le sait, répondit Maugrey.
— Mais nous devons nous en assurer.
— Envoyez Barty lui parler, proposa alors Hermione.
— Bah bien sûr ! s'exclama Maugrey. Aucun risque que je laisse ce cafard hors de ma surveillance !
— Il reviendra si je le lui demande, répondit Hermione. C'est une partie du Serment Inviolable. N'est-ce pas, Barty ?

Celui-ci la regarda d'un air suppliant.

— Je vous en prie, ne m'envoyez pas là-bas... Vous savez à quel point il me hait ; il me maudira à la seconde où son regard se posera sur moi, je le sais !
— Hm, je suis prête à en faire le sacrifie, répondit Hermione en faisant mine de considérer sa plainte.
— C'est cruel, Hermione, siffla alors George. Pas que je le plains, il n'est rien, mais c'est cruel quand même.
— Très bien, soupira Maugrey en mettant Barty sur ses pieds. Va et dis à ton maître que nous avons sa belle et que nous serons ravis de faire un échange avec le Ministre. Et t'as pas intérêt à faire quelque chose de stupide, comme te faire tuer ! Ça ne ferait que me voler ma joie de le faire moi-même. Capiche ?

Barty déglutit.

— Faites ce qu'il demande, Barty. Dépêchez-vous, dit Hermione.

Il hocha la tête et quitta la pièce en courant.

— Pressez de retourner auprès de votre maître, hein, dit alors Molly.

Hermione fit face à la matriarche Weasley avec un sourire triste.

— Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que ma place n'est plus avec vous tous, dit-elle. Plus vite cet échange aura lieu, plus vite vous pourrez vous mettre à l'abri et passer à autre chose...
— Passez à autre chose ? demanda Ron sèchement. Et faire comme si tu n'avais jamais été notre meilleure amie ?

Hermione baissa les yeux, honteuse.

— Ça sera pour le mieux.
— Non, répondit Ron. Je ne pourrais pas oublier. Tu as peut-être perdu la tête et... succombé à notre pire ennemi, mais mes meilleures années auront été avec Harry et toi. Ça doit compter pour quelque chose.
— Oui, ajouta Ginny. Tu as toujours été la sœur que je n'ai jamais eue. Je veux dire, il y a Fleur, mais... tu sais ce que je ressens pour elle.

Hermione ne put retenir un sourire tremblant.

— Et il y avait aussi ce moment quand Fred...

Il fit une pause et déglutit, refoulant des émotions, les larmes aux yeux.

— Quand Fred et moi on a planqué des bonbons à hoquet (1) dans le gâteau d'anniversaire de Ron, une année, Poudlard...

Tout le monde le regarda, attendant qu'il finisse l'histoire.

— Qu'est-ce que ça a à voir avec Hermione ? demanda Ginny.

Georges cligna.

— Rien.
— Je me souviens, répondit Hermione avec un rictus. On n'a pas pu s'arrêter d'avoir le hoquet pendant des jours !
— Je sais, c'était drôle. L'idée de Fred, répondit Georges. Il avait toujours les meilleures.
— Le truc, Hermione, reprit alors Ginny. C'est qu'on ne pourra pas aller de l'avant après ça. On fera toujours partie de la vie des uns et des autres, que tu le veuilles ou non. Tu comprends ?

Hermione croisa alors le regard de son amie et lui adressa un sourire triste.


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(1) Je n'ai pas retrouvé le nom français de ces bonbons qui donnent le hoquet, donc j'ai laissé la traduction littérale.

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