Troisième phase
Mon séraphin était beaucoup trop intelligent pour mon propre bien et beaucoup trop beau pour son propre bien.
Je le regardais m'expliquer la procédure ligne par ligne, mot par mot et pourtant seule sa beauté renversante captivait mon attention.
Sans oublier les milles mots techniques qui n'étaient pas encore ajoutés dans mon modeste dictionnaire.
_Tu suis ?
Je hoche lassement la tête et Saphir reprend son explication avec autant de ferveur et d'enthousiasme.
Je soupire et lève les yeux vers le toit du laboratoire et attend gentiment le moment où il arrive enfin à la conclusion
Or malgré mon louable don de patience, cette dernière ne dura pas long feu faute des maints principaux actifs avec lesquels il me giflait constamment.
_Est-ce qu'on peut entamer les essais cliniques ou pas ? le coupé-je.
Visiblement peu enchanté par mon intervention, il me fusille de son regard le plus noir avant de m'indigner une réponse.
_ Non.
Je me redresse sitôt sur mon séant, fouettée en plein visage par la négativité de sa réponse.
_Comment ça non ? Tout ce blabla n'a aucun sens si la théorie ne matche pas avec la pratique !
_Je n'ai pas besoin d'un cours sur comment développer une drogue. Je connais la chanson.
_Tu as visiblement appris la chanson à l'envers dans ce cas si tu penses avoir « décoder la recette de mes parents » alors que ta drogue n'a même pas été validée pour des essaies cliniques !
C'est au tour de Saphir d'envoyer valser royalement son flegme. Son visage rembrunit effroyablement et il me tira brusquement par le poignet jusqu'à ce que ma chaise s'entrechoque avec la sienne.
_La stagiaire ici c'est toi. Le doctorant c'est moi. Garde tes pattes sur terre gamine.
J'arrache mon poignet de son emprise, nul intimidée par la petite bête egocentrique en lui qui montre une nouvelle fois ses crocs.
_Les essais cliniques Saphir, réitère-je, plus fermement
Il balance sa tête par derrière, réfléchissant probablement aux milles acides dans ce laboratoire avec lesquels il peut me bruler .
_Nous ne pouvons pas entamer les essaies cliniques. Enfin, pas légalement.
Je fronce les sourcils, ne comprenant plus où il veut en revenir.
_Comment ça ?
_On ne peut pas présenter la drogue au sein de la clinique.
_Mais n'importe quoi. Xavier et Paola seraient très enthousiastes pour nous aider avec la phase trois.
_Exactement, beaucoup trop enthousiastes.
Ses mots cryptés tissaient un voile si épaisse que même l'espoir de lire entre ses lignes se perdait dans l'ombre. Chaque fois qu'il parlait, ce n'était que pour me tirer d'une ignorance, puis me jeter dans une autre, encore plus opaque et sombre, où seule la folie me tenait compagnie.
Jusqu'à quand ce suspense sordide continuerait d'empoisonner l'air entre nous ?
_ Je peux comprendre que ta relation avec Paola soit délicate mais je te pensais légèrement professionnelle pour ne pas mélanger le personnel et le professionnel !
_C'est toi qui mélanges tout, souffle Saphir en passant une main dans ses cheveux.
_Nous avons besoin de Paola.
_Paola signerait notre déchéance Alora.
_Pourquoi ?
Saphir regarde à travers moi, semblait chercher des réponses qu'il ne trouvait même pas dans les méandres de sa propre langue.
Face à son trouble, ma colère se dissipa et seul l'envie d'apprivoiser ses angoisses domina.
Maladroitement, je posai ma main sur son genou.
_De quoi as-tu peur Saphir ? murmure-je.
_De l'industrie, répond-t-il de but en blanc.
Il ne voilait plus sa peur, il l'exposa sur un des cadres les plus saillants et tranchants, impossible à approcher sans que le sang coule et à flot.
_Nous sommes le futur de l'industrie, nous la faisons, nous la changerions.
Un rire mauvais fait la malle de la bouche Saphir avant d'enlever brusquement ma main de son genou et approcher son visage du mien.
_Tu sais qui tenait ce même discours mon ange ?
Je déglutis, beaucoup trop perturbée par la proximité de ses lèvres que je mourrais de gouter une nouvelle fois.
_Tes parents, reprend-t-il sans attendre ma réponse.
Un coup bas, très bas qui ne manqua pas de me faire saillir cruellement.
_Où sont tes parents mon ange ?
Son cirque était machiavélique, magnant les armes les plus indignes avec une telle délicatesse, pareille que celle du diable qui t'invite dans un enfer avec un tel sourire que brûler ne te semblait plus une si mauvaise idée.
_Six pieds sous terre, tu veux tant les rejoindre ? ajoute-il
_Arrête, craqué-je tandis que ma voix se brisait, ne supportant plus la douleur que Séraphin m'Infligeait.
_Non, toi, tu arrêtes de vouloir me guider dans un abime dont tu ne connais pas l'obscurité ! On ne dance pas avec les démons de cet abime, on les fuit car s'ils nous attrapent nous serons que cendres qui nourrirait d'avantage leur brasier.
_Qui sont ces démons ? osé-je demander.
_Le premier et celui le plus dangereux est ta curiosité mon ange qui signerait ta fin avant même que tu entres dans cet abime.
Je respirais mal, j'étais asphyxiée par toute sombreur avec laquelle Saphir continuait de me submerger. Je me levai en trombe et m'approche de la petite fenêtre du laboratoire, cherchant un peu d'air.
Je levai mes yeux vers le ciel infini, là où ils disent que les morts nous regardaient or à quoi bon contempler une humanité qui s'entretuait, courrait à grande jambe vers sa propre fin comme si elle était en éternel combat avec sa propre damnation, qui détruira l'humain en premier ?
L'industrie pharmaceutique dans toute sa noblesse qu'est de sauver l'humain est tombée entre des mains de la faucheuse en personne avide d'âme, de sang et d'argent. Une faucheuse qu'on ne peut même pas abattre, sans visage et sans nom, elle sillonnait entre nous, choisissant silencieusement sa prochaine victime.
Des pas feutrés se font entendre derrière moi et bientôt une main se posa délicatement sur le bas de mon dos, m'arrachant de ma transe
_Fais-moi confiance mon ange, susurre-t-il, permettant à son souffle chaud de caresser timidement lobe de mon oreille. Laisse-moi te guider.
_Tu as l'honneur de mes parents entre les mains Saphir.
_Et je leur rendrai hommage.
_Pourquoi vouloir porter ce fardeau ?
_Ce n'est pas un fardeau mon ange, tes parents ont offert un cadeau certes très délicat à l'humanité. Je ne fais que le délivrer.
Je ne peux m'empêcher d'étirer un sourire au coin alors que je me retourne pour faire face à mon Séraphin.
_Tu parles de moi ? le larguai-je en enroulant son cou par mes deux mains.
_Non, toi tu es un cadeau empoisonné et enlève tes pattes, je n'ai pas envie d'attraper des puces.
Mon sourire s'élargit et mon nez vient caresser le sien.
_Tu ne disais pas ça lorsque ta langue danser avec la mienne.
_Ah et moi qui pensais que ma glossite était due au poulet trop épicé que j'ai mangé la veille.
Connard.
_Tu connais l'homéopathie ? demandé-je sérieusement ne quittant plus ses yeux.
_Je n'ai pas besoin d'un cours de pharmacologie non plus, soupire-t-il.
_L'homéopathie est une méthode médicinale qui se repose sur le principe « les semblables soignent les semblables ». En d'autres termes, les substances qui provoquent des symptômes spécifiques chez une personne en bonne santé peuvent, à des doses très diluées, traiter ces mêmes symptômes chez une personne malade.
_ C'est très intéressant, je m'en fous.
Je roule des yeux et reprend.
_Si ma langue a causé ta glossite, seule ma langue pourrait la guérir.
Ses yeux s'écarquillent, toutefois, je doute si c'est à cause de mon intelligence époustouflante ou de mon charme inouï.
_Tu as vraiment compris la médecine à l'envers. Ta stupidité me choquerait toujours.
Alors ce n'était ni mon charme ni mon intelligence, il m'envoyait déçue.
Il ôte mes bras de son cou et me tourna le dos avant d'enlever sa blouse blanche.
_Où tu vas ? demandé-je.
_Nous allons commencer la troisième phase mon ange.
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