Tanière du loup
« Ne m'attends pas pour le diner, je dors avec une amie »
Au moment même où j'envoie mon message mensonger à mon oncle, la voiture freina devant une maison dont l'apparence semblait plutôt anodine.
Ni petite, ni énorme, avec un toit en ardoise gris légèrement incliné qui ressemblait à une invitation pour boire un bon chocolat chaud à l'intérieur.
_Pour notre sauveur, je misais plus sur un laboratoire futuriste qu'une maison de grande mère.
Et dieu sait combien j'étais loin d'être fan des grandes mères.
Saphir ne jugea pas important de commenter sur ma remarque et sort en silence de la voiture, se dirigeant vers la maison, et bien sûr ne prenant même pas soin de m'ouvrir la porte !
Je le rejoins en continuant de médire à haute voix sur son manque cruel de chevalerie jusqu'à ce qu'un homme aussi grand que l'égo de Saphir se dévoila au seuil de la porte.
Barbe mal, très mal coiffée. Lunettes aux montures minablement défaillantes.
Je descends mon regard sur ses vêtements qui avaient l'air de pousser leur dernier souffle de vie.
J'ai bien l'Impression que notre sauveur a lui-même besoin d'un sauveur, de préférence un coiffeur et hélico.
_Bonjour Saphir, dit l'homme de sa voix rocailleuse.
Malgré son apparence défraichie, une odeur plutôt douce s'émanait de lui ainsi que sa maison embaumée par des notes friandes de bois.
_Hadès, le salua Saphir en lui empoignant la main amicalement.
Il ne dépassait probablement pas les cinquantaines d'année or son style négligé le faisait paraitre malheureusement beaucoup plus vieux.
Ses traits quant à eux étaient plutôt harmonieux, il ne suffisait que d'un propre rasage pour leur redonner un peu d'éclat.
Perdue dans mes songes sur les milles façons avec lesquels je peux lui faire un total makeover, je ne remarque même pas la main de Hadès tendue vers moi jusqu'à ce que le coude de Saphir s'enfonce sur mon flanc.
Connard.
Je ravale un couinement de douleur et m'efforce d'étirer un faux sourire avant de répondre à sa poignée de main.
_Alora, l'unique fille de Alphée et Paol, entame Saphir les présentations.
Les prénoms de mes parents semblèrent le gifler brutalement, installant très vite un malaise entre nous.
Après d'infernaux secondes où il digérait doucement l'information, il nous invita enfin à entrer au sein de la main d'un geste courtois de la main.
Je cherche le regard de Saphir pour comprendre dans quel merdier il nous a encore mis or il ne répond à mon angoisse que par sa main qui se posa sur ma chute de reins, me poussant à avancer.
_Il va nous décapiter, lui murmuré-je tandis que nous longeons un long couloir plongé dans la pénombre.
_J'espère alors qu'il commencerait par toi, rien de mieux que le souvenir de ta tête moche qui jonche le sol avant ma mort.
Je fais mine d'être profondément choquée par ses mots cruels tandis qu'intérieurement je jubilais de voir mon ange épousait enfin ses facettes démoniaques, ainsi nous pourrions commencer notre voyage ensemble dans les ténèbres.
_Je vous en prie, asseyez-vous.
Hadès choisit un ton chaleureux, pareil que celui que prend les prédateurs pour amadouer puis démembrer ses victimes.
Je rejoins Saphir sur le canapé en face de Hadès en prenant soin d'être bien collée à mon séraphin comme un naufragée attachée à sa buée.
Hadès nous tend une bière que je refuse évidemment par peur qu'elle soit mélangée à une drogue qu'il a concocté avant notre venue, tandis que Saphir n'hésite pas l'ingurgiter. Quel gros con.
_Comment pourrais-je vous aider ?
_Nous avons besoin de tes ressources, répond Saphir, tes ressources humaines.
Un hoquet d'effroi s'échappe aussitôt de ma bouche à l'entente des mots si naturellement prononcés par Saphir.
Mes yeux s'écarquillent, grand ouverts, ils bringuebalent entre Saphir et Hadès qui étudiaient silencieusement ma réaction.
_Ressources humaines ?! beuglai-je en sautant de ma place,comme brulée aux fesses par le canapé.
_Elle ne sait pas ? demande Hadés, calmement à Saphir qui ne bougeait toujours pas d'un poil.
_Savoir quoi putain !
J'allais perdre la tête. Certes, j'avais un mauvais pressentiment sur ce vieillard ignoble, Ô que je ne pensais pas une seconde que mes blagues sordides n'était que réalité.
Dans quoi je me suis foutue putain ? Un trafique d'humain ? Un gang ? Une secte !
_Alora calme toi et assis toi, soupire Saphir nul impressionné par ma folie, buvant calmement sa bière.
_Ou sinon quoi ? Vous allez m'ajouter à votre trafique d'humain ? Vendre mes membres à mon tour ? Attends ! j'ai déjà une idée sur votre membre préféré avec laquelle vous allez commencer, bande de connard pervers !
Saphir me dévisage silencieusement alors que ma tête continuait de bringuebaler entre lui et Hadès, à l'affut.
_Je ne suis pas un trafiquant d'humain Alora, je suis un scientifique comme vous, déclare paisiblement Hadès.
Un scientifique ? Mes ovaires oui !
_Laisse-moi deviner, ta science préférée consiste à démembrer tes « ressources humaines » ?
_Saphir aurait probablement choisir des mots plus subtils, souffle Hadès. Assis toi Alora, le danger que tu guettes n'est pas ici mais dehors.
Je me retourne vers Saphir qui continuait de me fixer avec une expression neutre et troublante.
_Je vous préviens, j'ai déjà envoyé un message à mon oncle si vous me coupez ne serait-ce qu'une seule oreille, il vous le ferait regretter ! le menaçé-je en le pointant dangereusement du doigt.
_C'est noté, affirme Hadès.
Toujours aussi sceptique, je finis par me rasseoir sur le canapé, toutefois, en imposant cette fois-ci une distance bienséante entre moi et Saphir. À ce stade, le plus proche des amis pourrait se montrer tel que l'ennemi.
Saphir m'a entrainé dans cet antre de diable, ça fait de lui un être tout autant démoniaque.
_Tu penses sérieusement que je peux te faire du mal ? demande Saphir d'une voix basse, de façon à ce que nous sommes les seuls à l'entendre.
Ses yeux s'étaient maintenant chargés par une colère sourde mélangée à une déception profonde. Je détourne mon regard par peur que sa beauté et son air angélique vienne biaiser mon opinion.
_Je vous écoute, craché-je en croisant les bras.
Hadès prend une gorgée de son café ,calmement, avant de commencer sa tirade :
_Moi et tes parents avions un ennemi en commun qu'est le cancer et bien que j'ai rencontré les mêmes obstacles qui ont empêché Alphée et Paol de suivre leur objectif, j'ai su aller au dela de ces barricades.
_De manière illégal, précise-je.
Saphir soupire à coté de moi.
_La fin justifie les moyens, répond-t-il.
_Connerie ! Vous torturez des humains !
Hadès me dévisage silencieusement et reprend une gorgée de son café en pestant qu'il se soit refroidi aussi vite tandis que je fulminais devant lui.
_Je ne torture aucun humain Alora, je les sauve et avec leur plein gré, affirme-t-il en me regardant droit dans les yeux. Tes accusations devraient être dirigés vers une autre personne.
Je fronce les sourcils et me retourne vers Saphir en guète de réponses or celui-là avait le regard simplement vide, le visage masqué par une expression neutre ne laissant fuite à aucune émotion.
_Quelle personne ? demandai-je.
_Je suis sure que tu vas bientôt la rencontrer et la decouvrir à ton tour car elle tentera sans doute d'entraver vos recherches comme elle a fait avec les miens, me poussant à créer ma propre voie.
_Et quelle est votre voie ?
Hadès se lève calmement en prenant soin de défriser sa chemise à carreaux qui se voulait vintage mais qui est juste perdu dans le temps. Silencieux, il montre les escaliers qui mène à la cave par un geste de la main.
_Je t'invite à la découvrir toi-même Alora.
Je déglutis avec difficulté ,tandis que mille scènes de films de tueurs en série que j'ai visionnés défilent devant mes yeux.
Je lance un énième regard de détresse à Saphir qui haussa simplement les épaules d'un air indiffèrent qui me donne de très fortes envies de lui donner une bonne claque.
Beaucoup trop de cran pour me dégonfler devant ces deux connards et beaucoup trop de curiosité pour rester ignorante et vivante.
Je lève ma tête, d'un air faussement assuré, et me détache du canapé.
_ Pour ton information, j'ai une insuffisance cardiaque, une insuffisance rénale, une hypertension pulmonaire et un diabète avancé. Crois-moi, mes organes ne te seraient pas bien vendus, le prévenais-je
Pour la première fois, un sourire nait au coin des lèvres de Hadès et il hoche simplement la tête.
Je descends la première marche, Saphir sur mes pas, et me prépare à pénétrer dans la tanière du loup.
Sortirais-je en un seul morceau ?
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