Fléchette

Première fléchette, elle atteint l'épaule.

Deuxième fléchette, elle atteint la clavicule.

Troisième fléchette, pile entre les yeux.

Je souris en regardant le portait de Mahely collé au mur devant moi, perforé de flechettes. Mon art était époustouflant et méritait d'être exposé à Louvres.

_ Ça ne sert à rien de broyer du noir comme ça, soupire Sarah à l'autre bout du fil.

_C'est les intestins de cette peste que je rêve de broyer, siffle-je en dévisageant le portait déformé de la dulcinée d'Aylan. Comme elle peut oser envoyer à Saphir une photo de moi avec un homme !

La colère cavalait dans mes veines et des envies meurtrières tissent des toiles dangereuses dans mon cerveau m'inspirant par des centaines de scenarios les plus assassins.

Si ce n'était pas ce petit con d'Aylan qui m'avait attrapé, j'aurais arraché cheveu par cheveu de son crane pour faire une délicieuse spaghetti qu'elle boufferait.

_Un homme en couple, précise Sarah, désabusée.

_J'avais prévenu Xénia et je tiens toujours mes promesses.

_Alors assume les conséquences de ta loyauté envers tes promesses tordues.

Je laisse tomber ma tête par derrière jusqu'à ce qu'elle heurte la tête du lit qui grinça. Des centaines d'appels manqués, des dizaines d'audio non lus, le laboratoire m'étais interdit d'accès. Saphir m'avait chassé de sa vie sans me donner la moindre chance de me justifier.

_Je ne comprends toujours pas pourquoi il a tant dramatisé les choses, ce n'est pas comme s'il t'avait mis la bague au doigt, maugrée Sarah. Tu es célibataire, tu fais ce que tu veux, bon sang!

Malgré que je n'eusse pas de compte à rendre à Saphir, une culpabilité viscérale me rongeait les entraille. C'est la deuxième fois qu'Il me trouve avec un homme en couple et je déteste cette image crasseuse qui se formait de plus en plus de moi dans ses yeux haineux.

_Je suis une pute, soupiré-je.

_Tu es plutôt une esclave de tes émotions. Tu agis toujours avant de penser, tu laisses ta colère, ton amour, ta haine braver ta raison. Tes sentiments sont intenses et brutaux, ils sont tellement puissants qu'ils peuvent créer l'amour le plus pure ou l'obsession la plus corrompue.

Les paroles de Sarah résonnèrent durement jusqu'à ouvrir mes plaies les plus profondes. En effet, mes actions s'échappaient toujours de ma raison, je laissais mes actes dicter leurs propres destin, manipulés par les ficelles si délicates de mes sentiments écaillés et je n'étais que spectatrice du feu que j'allumais toujours autour de moi.

Je sèche vite fait une larme solitaire, étouffant un sanglant qui osait à peine naitre.

_J'ai besoin de mon Séraphin, me confié-je en jetant un triste coup d'œil au tatouage qui ornait l'espace entre mes seins.

Mon ange si proche de mon cœur et pourtant si loin de ma personne.

Quand est-ce qu'il arrêterait de vouloir tant m'échapper ?

_ Alors retrouve le, répond Sarah, de but en blanc.

_Comment ? Je suis allée jusqu'à son appartement et il a refusé de m'ouvrir la porte.

À ce souvenir, un gout de frustration amer remplit ma bouche. J'ai toqué, crié son prénom à mainte reprise puis j'ai feigné une crise d'anxiété tout cela pour qu'Il augmente le son de son enceinte au fil que les décibels de ma voix escaladaient.

_ Essaie de contacter ses parents. J'ai pu comprendre qu'ils t'apprécient, je suis sure qu'ils peuvent t'aider à te réconcilier avec leur fils.

Et aussi facile que ça, une lueur d'espoir explosa contre ma rétine et je saute aussitôt de mon lit, complètement rassasiée.

_Sarah, tu es un genie !

_Attends je-

Je raccroche avant qu'elle puisse terminer et me dirige hélico vers mon dressing où je choppe ma robe la plus classe, en espérant qu'elle me donne l'allure d'une jeune demoiselle maniérée et qu'elle cache subtilement mes milles facettes de garce immorale à mes futurs beaux-parents.

_ Où vas-tu comme ça jeune fille ?

Je soupire en lâchant le poignet de la porte et me tourne vers oncle Isaac qui avait les mains clouées sur les hanches, me jugeant gravement depuis la cuisine.

_Chez Eliot et Liam, j'ai besoin de leur précieux conseils pour mon projet de fin d'étude.

Le visage de Isaac s'Illumina aussitôt.

Le mensonge ondulait tellement parfaitement ma langue que c'était devenu une mes saveurs préférées.

_C'est super. Passe-leur mon bonjour !

Je hoche la tête et avant que je puisse sortir de la barque, je fus une nouvelle fois hélée par mon oncle.

_Évite de créer un scandale dans leur demeure comme tu as fait chez mamie Giselle !

Je roule des yeux et claque la porte derrière moi en maudissant silencieusement mamie Giselle, son hideux chat et sa maudite maison.

Après avoir survécu à une route catastrophique avec un chauffeur de taxi qui me réexpliquait les « réels causes » politiques de la deuxième guerre mondiale, je me retrouve enfin devant la maison des Fernandez dont le luxe continuait toujours de me fasciner.

Je ne m'habituerai jamais à autant de blancheur.

Déterminée, je lisse ma chevelure, m'assure d'avoir une bonne haleine puis toque trois fois d'affilés sur la porte en bois massif. Bientôt, le visage gai de Liam est à ma bienvenue. La surprise peint en premier ses prunelles vertes mais fut très vite troquée par un plaisir de me voir.

_ Oh mon dieu Alora, entrez, vous allez attraper froid !

Bien que ma robe me donnait bel et bien l'effet d'une sage fille, son mince tissue ne me protégeait guerre du froid de cet après-midi et mon menu corps tremblotait ce qui n'échappa bien évidemment pas à Liam. Je me dépêche alors de suivre ses commandes et me trouvai à l'intérieur où Eliot, son mari, lisait paisiblement son journal dans son séjour tandis que des notes de pain tout juste sorti du four embaumait la maison.

La parfaite petite famille.

_Quelle jolie surprise tu nous a fait Alora, m'acclame Liam.

Je lui souris en guise de réponse puis salue son mari qui était tout autant comblé de me voir.

Encore une fois, leur excès de gentillesse m'étreignît car tout simplement je ne voyais en elle qu'une pitié déguisée par des masques de candeur.

Liam et Elliot étaient des amis très proches de mes défunts parents, ils savaient à quel point j'étais proche d'eux, ils ne pouvaient alors qu'imaginer à quel point leur perte m'a annihilé.

_Je suis heureuse de vous voir aussi, mentis-je en me posant sur le canapé, rejoint par Liam qui posa sa main en dessus de la mienne d'un élan maternel. Cependant, je suis légèrement inquiète pour Saphir, il ne retourne plus mes appels depuis qu'un léger malentendu est arrivé entre nous, poursuivi-je mimiquant un air sincèrement inquiet et une mine véritablement désolée.

_Saphir a cette fâcheuse manie de se renfermer sur lui-même à la moindre contrainte, soupire Monsieur Fernandez qui partage notre discussion depuis l'autre bout du salon.

Liam appuie les paroles de son mari en hochant la tête tout en serrant ma main, partageant avec moi une sorte de compréhension.

_Saphir ne nous visite malheureusement que rarement, la plupart du temps, il est enfermé dans son laboratoire ou dans son appartement en forme de cage. Je ne comprends toujours pas pourquoi il refuse de vivre avec nous, souffle Liam, dépitée et profondément attristée.

_Votre fils a passé toute son adolescence à l'autre bout du monde, c'est difficile pour lui d'abandonner son independence et intimité une fois revenue.

Les yeux de Liam brillent, signe que les larmes allaient bientôt se déverser. Je partage avec elle un sourire de compassion.

Saphir avait des parents en or, qui étaient prets à remuer ciel et terre pour lui offrir tout le bonheur et fortune du monde, toutefois j'ai bien l'impression qu'il est loin d'en être reconnaissant.

_J'espère que ta présence dans sa vie saura fondre ce mur de glace qui l'entoure, commente Liam.

_C'est difficile lorsqu'il s'entête à me chasser continuellement de sa vie.

Les yeux de Liam s'illuminent, m'annonçant qu'une brillante idée lui est tombée dessus et j'étais déjà toute ouïe pour l'entendre.

_Eliot, chéri, passe-moi mon téléphone, demande Liam qui se montrait soudainement beaucoup trop excitée.

Son mari lui tend le mobile et la quadragénaire commence aussitôt à composer un numéro qu'elle ne connaissait que trop bien, l'appel commença et Liam le met en haut-parleur.

_Allô.

Mon cœur rata un battement lorsque j'entendis cette voix qui m'était privée depuis plus d'une semaine, son manque se creusa dans ma poitrine et cette faim de le revoir se fait plus fugace.

Sa voix était comme un amuse-bouche qui accentuait douloureusement une famine brutale.

_Mon sucre d'orge, la fièvre est en train d'emporter ton père, viens vite à la maison !

Je réprime un sourire en contemplant la petite comédie de Liam. Oh le vice des femmes.

Son cirque était très convainquant et Saphir n'y voit que du feu. Fort inquiet, il s'empresse de terminer l'appel téléphonique pour venir très vite en aide à son papa chéri.

Liam se tourna vers moi, fière de ses talents d'actrices tandis que son mari lui reproche d'être une vilaine menteuse.

_Sa chambre est à l'étage, première porte à ta droite. Attends-lui là-bas pour que tu lui fasses les plus belles des surprises.

Le sourire coquin de Liam me fait avaler de travers ma salive mais je n'hésite pas à obtempérer, charmée par ce plan qui m'offrait mon ange dans un plateau en or jusqu'à moi.

Je me dépêche à monter vers l'étage et m'engouffre dans sa chambre qui était encore marqué par son unique odeur malgré qu'elle fût désertée pour un long moment. Au début très obscure, j'allume l'interrupteur qui leva le voile sur une pièce vide de toutes vies. Tout juste comme son appartement, les couleurs y étaient bannies, toutefois, cette chambre-là ne portait pas l'empreinte du doctorant chaotique.

Méticuleusement rangée, rien de sentimental n'attrapait l'œil, juste des meubles lambda qui coutaient la peau des fesses.

Je me dirige vers la fenêtre et ouvre les volets, permettant à cette misérable chambre de gouter aux raies de lumières et échauffer ses recoins froids par l'absence de mon Séraphin. Tout juste comme mon cœur.

Je secoue ma tête, ce n'était guère le moment pour faire ma fleur bleue.

Je m'assois sagement sur son lit et fixe son plafond. Les minutes s'égrenèrent et toujours pas un signe de Saphir. Lasse, je m'ennuyais comme un rat mort et cherche du regard quelconque objet qui pourrait me divertir jusqu'à l'arrivée de mon ange.

Rien, walou, nada.

Cette pièce ne pourrait accueillir que les morts !

Fouineuse, je trottine des pieds jusqu'a son armoire où je trouvai des tas de vêtements qui ne conviendraient qu'a un gamin de quinze ans ou moins. Je souris en prenant dans mes mains une paire de jean déchiré et encore remplie de terre.

Notre cher doctorant n'était pas aussi sage que ça finalement ,mais avait bel et bien ses petites aventures juvéniles.

Je fronce les sourcils lorsque je ressens un truc dans les poches du jean puis fourre ma main dans la poche et en extirpe une photo.

Ma respiration se bloqua dans mes poumons en regardant une Paola encore jeune, encore adolescente portant dans ses bras un bébé.

Le souffle court, je tourne périlleusement la photo et lis  la note écris dessus :

« Ta mère, la seule et unique »

Sous le choc, la photo tomba de mes mains au moment que Saphir débarqua dans sa chambre.

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