Pour ma Promesse (III)
La tête lui tournait et une boule lui nouait la gorge alors qu'il se précipitait au bord, tant par sa peur du vide, que par l'effroyable idée que peut-être, sa petite sœur gisait en bas sur le sol.
Il allait la tuer !
- Salut, lâcha-t-elle alors qu'elle pendait lamentablement à la grille d'une fenêtre, pantelante et en sueur. Un petit coup de main s'il vous plait !
Le spectacle le laissa incrédule un instant, avant qu'il ne déverse sur elle une quantité de jurons qu'elle accepta sans broncher. Il la remonta, furieux !
Ne pouvait-elle par cesser de lui donner des sueurs froides pendant au moins cinq minutes !
- Tu vois, lança-t-elle à brûle pourpoint. Je t'avais dit que c'était pas si loin !
Il ouvrit la bouche sidéré qu'elle ose lui dire cela :
- Je...Tu....Raaah !
Et c'est qu'elle osait ricaner en plus !
- N'y pense même pas, menaça-t-il.
Une explosion tout près les fit sursauter.
- Pas le temps pour vos disputes, en avant !
Grommelant et tremblant, Lucas fermait la marche alors qu'ils reprenaient leur route dans les hauteurs, jouant les funambules au-dessus des tirs de blaster, de la fumée blanche et du silence qui dans leur dos se faisait de plus en plus fort.
Quand ils mirent pied à terre, le jeune homme fut envahi d'une sensation de gratitude bienvenue à l'égard du quartier de Julie. Une gratitude bien vite dissipée par le coup d'œil en arrière qu'il lança. La fumée blanche les poursuivait toujours et avec elle, ce calme surnaturel.
La maison de Julie était au coin de la rue, il la voyait d'ici, ça et le rayon bleu qui projeta l'ombre sur le mur d'en face d'un combat au corps à corps d'où provenait des cris. Des cris féminins appartenant à Julie.
Lorsqu'ils arrivèrent sur place, Julie était à genoux près d'un garçon de son âge et d'un paladin. Il vomit.
Ils étaient couverts de sang. Lucas ne supportait pas le sang.
- Morts tous les deux, déclara Valérie. Julie ma chérie ça va ?
- J'étais sur le point de le soigner ! On y était presque ! Il a....Il s'appelait Pierre.Ça devait pas se passer comme ça, mais bon sang, qu'est-ce qui se passe aujourd'hui !
- Je n'ai pas de réponse ma belle. Tu peux marcher ?
- Oui. Qu'est-ce que vous faites la et Par le Roi, Lucas ! Ton visage, ta chemise !
La blonde écarquilla les yeux avant de caresser délicatement sa pommette droite, lui tirant un tressautement et l'arrachant à son observation morbide.
- Si tu avais vu l'autre ! fit Sarah.
- Quoi tu vas me dire que Lucas lui a mis une trempe ?
- Bien sûr que non, j'allais te dire que c'était un colosse !
L'échange le fit rire, brutalisant ses côtes meurtries.
- Fumée, articula-t-il
Par la porte arrière, Julie les fit se précipiter dans sa cave menant le pas de course après qu'elle ait appris les déboires de sa mère.
- Par le Roi, Julie ! Je t'aime s'écria Solange quand elle vit sa fille. Je t'aime mais...
- Oui je sais maman, je t'aime aussi ! répondit la jeune fille avant d'accourir vers le patient le plus proche.
Sa propre mère était déjà en train d'aider aux soins et lui restait statique, immobile au milieu de ses fichues marches.
La cave était bondée. Bondée de monde et de sang ! Il était tout bonnement impossible pour lui de descendre dans ce caveau. Pas alors que l'odeur métallique qu'il haïssait tant lui assaillait les narines et l'empêchait de respirer convenablement.
Il mit ses mains sur ses genoux cherchant à reprendre son souffle.
- Lulu...Respire par la bouche, lui conseilla sa sœur.
Il s'exécuta. C'était un cauchemar, il était de retour dans cette salle d'identification au mur froid. Il avait même l'impression de sentir le brûler. Il vomit de nouveau. Arrosant sa sœur au passage qui se contenta de le serrer contre elle.
- Sarah ! J'ai besoin que tu aides Julie là-bas. Lucas il ne m'est pas indispensable que tu tournes de l'œil et vomisse, va dans la cuisine ! ordonna Solange.
- Je...Je peux pas bouger, balbutia-t-il.
- Bien sûr que tu peux mon grand ! Traverse-moi cette pièce !
Il le fit, puisant dans ses ressources.
- Tu te souviens comment on réduit une fracture ?
- Oui, oui, mais je suis pilote pas médecin alors vérifie, mes mains sont bien placées ?!
- Parfait.
- Attendez, ça veut dire quoi réduire une fracture ?
- Franchement monsieur, ça veut dire que vous allez avoir mal ! déclara Sarah à un patient alors qu'il passait près d'elle.
Le craquement qui suivit acheva de faire traverser la pièce au jeune homme.
Il émergea dans le placard des Dubois et suivit le couloir jusqu'à la cuisine où il s'effondra sur une chaise. Il n'en pouvait plus. Les derniers événements l'avaient vidé de toute son énergie. Il n'espérait plus que dormir un peu, malheureusement cela devrait attendre. Il ne pouvait croire que les choses allaient se calmer si facilement.
S'exhortant à un dernier effort, il se leva et entreprit de s'occuper. Peut-être raccommoder sa chemise et aussi se débarrasser de ce goût infeste dans sa bouche.
Il tira de l'eau et grimaça en apercevant son reflet. L'image qu'il renvoyait était tout, sauf attrayante. Sa pommette avait pris une teinte bleutée de même que le côté droit de ses côtes et il pouvait sentir à l'arrière de son crâne le début d'une bosse se former, suite à la grenade.
Par instinct, il fit courir ses doigts au-dessus de l'emplacement de son cœur : dix-sept juin, dix-neuf heures trente-cinq. La mort de son père était encrée dans sa chair.
- Qu'est-ce que tu en penses papa, qu'est-ce que je fais maintenant ? murmura-t-il sans pour autant s'attendre à une réponse, il les avait déjà trop attendues...
Sa chemise n'était pas réparable aussi, il la jeta et reprit son poste d'attente et d'observation dans la cuisine. La maison était rythmée par les râles de douleur s'échappant de la cave. Il les bloqua, préférant occuper son esprit à trouver des solutions pour le futur. L'après Grand Partage ne serait plus le même, il en avait la conviction et il avait promis...
Un peu plus d'une heure trente s'écoula ainsi, lui dans la cuisine, Solange donnant des instructions et les filles lui suivant à la lettre. Il les admirait.
C'est le fracas des bottes à l'extérieur qui le fit se lever. S'approchant discrètement de la porte, il les vit. Les Blancs, venaient de pénétrer dans le quartier. Avaient-ils vu les corps dehors ?
- Abriel...prévient Solange et Julie s'il te plaît, ordonna-t-il d'une voix plus calme qu'il ne l'était alors que les Paladins s'enfonçaient dans la maison voisine en forçant le passage.
Elles arrivèrent toutes deux en quelques minutes.
- Julie lave toi les mains, enlève le sang sur celles-ci et enfile ton manteau. Lucas prend nos blouses, descend et demande à tout le monde de ne pas faire de bruit. Nous nous en occupons.
Son calme était toujours aussi acéré, l'avantage de gérer sans cesse des situations de vie ou de mort, déduisit Lucas en obtempérant.
Il récupéra les blouses sans les regarder, le blanc de celles-ci ayant tourné rouge et descendit pour tomber sur sa sœur qui appuyait frénétiquement sur le torse immobile d'un homme, elle était trempée de sueur.
Tous en bas se tournèrent vers lui.
- Pas un bruit, fit-il en luttant contre une nouvelle nausée. Ils sont ici.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top