Le Pouvoir des Mots (I)

C'était un de ces jours ou elle se sentait mal.

Enfin, il était encore trop tôt pour parler de jour.

Brûlante et glacée à la fois, Calliope posa les pieds au sol. Sa nuisette de nuit, lui collait à la peau marquant ses formes et elle ne put s'empêcher de songer à Terrence.

Par bonheur, elle avait jusqu'ici réussi à lui interdire l'accès à sa chambre.

Elle secoua la tête, refusant de penser davantage à son prétentieux de prétendant. Le geste lui fit plisser le nez, sa tête était lourde.

S'extirpant des draps, elle se laissa glisser à pas feutré dans le couloir.

Malgré ses maux, ce jour était aussi l'un de ceux qui étrangement, l'a comblée le plus, car il était synonyme de complicité pour la jeune fille.

Le plus silencieusement, elle poussa la porte de la chambre de ses parents, une pièce immense qui bien loin de la faire se sentir minuscule, ne faisait naître chez elle que ce désir de tendresse.

Sa mère leva le regard en l'entendant rentrer et un sourire attendrit naquit sur ses lèvres.

Sa chevelure ébène lui tombait sur une épaule, encadrant un visage quelque peu fatigué. Elle tapota sans un mot le côté du lit que son mari avait déserté.

Sans doute pour se rendre au bureau. Son père avait toujours été un bourreau de travail.

Heureuse, elle rejoignit sa mère, savourant le contact des draps autant que celui des bras de sa mère qui se refermèrent autour d'elle dans une étreinte dès plus bienvenue.

Mathilde embrassa son front et Calliope ferma les yeux, sereine.

- Ta mauvaise journée ? J'en suis désolée ma chérie.

- Ce n'est pas grave, ne t'en fais pas. J'accepte volontiers d'être dans cet état sachant qu'il me permet d'être avec toi.

D'aussi loin qu'elle se souvienne la jeune fille avait toujours subit ce désagrément. Une fois par semaine, son corps semblait lutter contre quelque chose, l'incendiant et la gelant tour à tour pendant plusieurs heures avant de s'apaiser.

Et durant ses heures compliquées, elle rejoignait sa mère dans son lit et savourait le fait de laisser les titres et le vouvoiement de rigueur habituellement, au placard.

- Alors, glissa Calliope.

Elle n'avait pas oublié la promesse de sa mère, faite plusieurs semaines avant le soir du gala. Et le moment lui semblait adéquat pour avoir des réponses, elles avaient après tout, tout le temps du monde.

- Raconte-moi comment toi et papa vous vous-êtes rencontré !

Mathilde coula à sa fille un regard rieur et la jeune fille se contenta de lui sourire innocemment.

- Ton père et moi... commença-t-elle les yeux lointain. Nous devions avoir ton âge.

Ses sourcils se froncèrent et elle reprit de nouveau.

- Aaron et moi venions tous juste d'arriver dans la Zone Ouest.

- Aaron ? Aaron Chase ? Le père de Sarah et Lucas ?

Mathilde hocha gravement la tête.

- Vous vous connaissiez d'avant ?

- Nous avons été élevés ensemble, c'est mon ami d'enfance... Enfin, était. Tout ceci au passé...

- Je l'ignorais.

Calliope se serra davantage contre sa mère, la tristesse qui peignait ses traits lui faisait mal. Elle aurait souhaité que celle-ci partage avec elle cette information plus tôt, elle aurait alors pu à son échelle peut-être un peu adoucir sa peine.

Mais Mathilde était toujours si discrète.

Voyant la mélancolie s'appesantir sur le visage de sa mère, elle préféra rediriger le sujet de la conversation.

- Et donc... Papa ? Où l'as-tu rencontré ?

Clignant des yeux et essuyant rapidement une larme, sa mère lui offrit un sourire :

- Au détour d'une ruelle !

Les yeux de Calliope s'agrandirent. Bien que pragmatique, elle était également quelqu'un de romantique, aussi dans son esprit s'était-elle imaginé la rencontre de ses parents comme étant bien plus romanesque.

- Et... Ça a été le coup de foudre ?

Mathilde éclata d'un rire franc.

- Tu penses ! Ton père était toutes griffes dehors ! J'ai mis près de deux heures à l'apprivoiser.

La jeune fille sourit. Sa mère et ses métaphores...

- Quoi, il avait peur de toi ?

- Peut-être... Mais je pense qu'il avait surtout peur de lui.

- Pourquoi ça ?

- Nous venions de deux mondes totalement différents.

- Oui, souffla Calliope. Vous avez eu beaucoup de chance, ajoute-t-elle en relevant la tête vers celle qui l'avait mise au monde. C'était peut-être le Destin que vous vous trouviez.

- Tiens donc, tu crois au destin toi ?

- Pas pour tout, mais dans une certaine mesure, oui, avança prudemment l'adolescente.

- Hum... Moi je ne parlerai pas de Destin, mais plus de probabilité.

- Charmant, c'est d'un romantisme !

La réplique tira un nouveau rire à Mathilde.

- Aller, dors maintenant.

- Déjà ! Mais tu ne m'as pratiquement rien dit, s'écria-t-elle déçue.

- Tu bailles à t'en décrocher la mâchoire. Dors, nous aurons tout le temps plus tard pour ça, l'apaisa sa mère en arrangeant une mèche de cheveux derrière l'oreille de sa fille.

Quelque peu boudeuse, Calliope s'enfonça sous les couvertures en soupirant.

Pourtant, sa mère avait raison, elle tombait de fatigue et le froid qui la parcourait ne cesser pas, ni même la pression dans son estomac, aussi abdiqua-t-elle devant le sommeil, sa mère lui murmurant qu'elle l'aimait.

-... rions jamais dû !

-Mon amour...vions pas savoir !

Paupières lourdes, il fallut un certain temps à Calliope pour comprendre que ce qu'elle entendait n'était pas un rêve, mais une véritable conversation, tout comme il lui en fallut tout autant pour se rendre compte que sa mère n'était plus à côté d'elle, et que c'était celle-ci, qui parlait derrière la porte. Avec son père.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top