Je suis toujours le même (IV)

Quel soulagement ce fut pour Alexandre quand son père émergea derrière lui.

— PAR LE ROI ! rugit l'adulte.

Son père se saisit du col de son vêtement et agrippa également avec force celui de Sarah.

— VOUS PARTAGEZ UN DEMI NEURONE OU QUOI !

D'un mouvement puissant, l'homme les fit tous deux basculer sur ses épaules avant d'entamer un trot difficile en direction de ce qui devait être leur maison, négligeant totalement le confort de ses charges dont les têtes rentraient régulièrement en collision l'une avec l'autre.

A peine eurent-ils franchit la porte, que son père les lâcha sur le sol pour fermer précipitamment l'entrée de l'habitation a grande peine avec l'aide d'Elliot.

Haletant et grelottant de froid, il les vit à peine avant de recevoir en pleine tête un épais morceau de tissus.

Une exclamation indignée lui apprit l'identique pour Sarah.

Il ne comprit ce qui se passait uniquement quand sa mère se mit à le sécher sans grande douceur, faisant glisser sous ses vêtements la neige qui s'était accumulée dans ses cheveux.

Une fois satisfaite, sa mère retira sèchement la serviette.

Dans le dos de l'adolescent, les deux hommes soufflaient péniblement, mais ce n'était là qu'un bruit de fond devant l'intensité du regard de sa mère, dont les yeux bleus avaient pris une teinte acier.

Coupant toute prise de parole d'une unique main levée, elle expliqua d'un calme olympien qui le fit frissonner autant que le froid :

— Silence. Si je viens à vous entendre tous les deux, croyez-moi bien, vous allez me sentir.

Elle passa son regard de l'un à l'autre.

— Alors voilà ce que vous allez faire. Vous allez monter, vous déshabiller, prendre une douche et quand vous serez calmés, vous descendrez manger, est-ce clair !

Alexandre s'empressa d'acquiescer, du coin de l'œil, il vit Sarah faire de même.

— Inutile de prévenir ta mère, je m'en suis occupée, apprit-elle à la jeune femme. Et maintenant filez !

Glissant sur le parquet mouillé, prenant la fuite comme lorsqu'ils étaient petits après une grosse bêtise, ils montèrent quatre à quatre les escaliers jusqu'à la chambre du brun.

Alexandre aurait presque rit de la situation s'il ne se sentait pas aussi mortifié.

Il s'empressa de retirer ses chaussures, T-Shirt et s'engouffra dans la salle de bain, laissant de faite Sarah, seule.

Lui l'empathe, avait du mal à comprendre les sentiments de sa meilleure amie. Elle avait certes, toujours accordé une immense importance à l'amitié, mais Alexandre avait huit ans quand les premières émotions d'autrui avaient parcourues leurs chemins jusqu'à lui. Il n'était qu'un petit garçon et la peur s'était montrée tellement plus persuasive que l'amitié en ce temps-là.

Le brun tourna le robinet d'eau chaude au maximum et se glissa sous l'eau, tant pis pour le choc thermique, il n'en mourrait pas.

En grandissant pourtant l'envie de parler s'était fait plus présente et ça, mais toujours la peur était là et Elliot aussi pour qui la divulgation de son secret n'était absolument pas une chose à penser.

Et maintenant Sarah était une Evoluée, une être comme lui et il s'était sentit libre !

Alors oui, il y aurait toujours les messages de propagandes à la télévision, les patrouilles de Paladins à l'extérieur et tout le reste, mais ils seraient deux, réellement deux ! Il n'aurait plus à mentir, à se cacher, il s'était même dit qu'elle lui pardonnerait de ne plus assister à ses courses, une fois la vérité sortie...

Attrapant une serviette, il frotta sa peau jusqu'à la rendre écarlate plongé dans ses pensées jusqu'à croiser son reflet dans le miroir.

Toujours le même garçon, reflet identique, yeux bleu, cheveux brun sombre, peau pale, et pourtant Sarah lui donnait l'impression qu'il était pour elle un étranger.

Comment lui faire comprendre le contraire ?

Elle avait qualifié son comportement d'égoïste, avait-elle raison ? En y réfléchissant maintenant au calme oui, oui c'était surement le cas.

Il avait d'une certaine façon attendue que la jeune femme n'ait plus aucunes portes de sorties avant de lui dire ce qu'il était entièrement, mettant à nu des années d'amitié dressée sur un mensonge, pour son bien à lui plus que le sien à elle.

Du moins dans un premier temps.

Et leur rôles inversés, Sarah aurait-elle agit différemment ? Même avec toute la bonne volonté du monde, Alexandre en doutait.

Mais pouvait-on vraiment lui en vouloir ! Il était humain, juste humain !

Il se stoppa, sa serviette dans une main.

Mais bien sûr, voilà comment lui faire comprendre ! Il avait tout fait de travers !

Lorsqu'il pénétra dans sa chambre, il fut saisit par la vision de Sarah près de la fenêtre. Une large flaque s'étalait à ses pieds et bien que tremblante de froid et lui décocha ce regard sombre et blessé qui lui serra le cœur.

Comme il était étrange de voir que tout pouvait changer en quelques minutes !

Elle était venue un millier de fois ici, dans cette chambre. Alexandre ne comptait plus le nombre de fois où elle était venue dormir chez eux, où ils avaient joué des heures entières, regardé l'holo télé, révisé cours et terrain de course.

— La salle de bain est libre, lui apprit-il bien qu'il n'en avait nul besoin.

D'un pas lourd, cherchant à traduire son énervement Sarah passa à côté de lui et il en profita pour se saisir de son coude.

Il craint un instant que son nez se remette à saigner, mais il n'en fit rien, juste subsisté un mal de tête carabiné.

Sarah le dévisagea.

— Ecoute, fit-il par une voix rendue rauque par son aventure au-dehors. Je sais que tu es en colère et que tu m'en veux de ne pas t'avoir dit plutôt pour moi et ma...

Il pinça les lèvres.

— Ma malformation génétique... Je comprends et je m'excuse, mais je ne m'excuserais pas pour aujourd'hui, ni même pour avant. Tu as dit que j'étais égoïste et oui tu as peut-être raison, mais tu sais quoi, je pense qu'on est tous égoïste quand ça concerne les personnes auxquels on tient.

Il secoua la tête et Sarah le dévisagea davantage, lèvres bleutés tordu en une mimique qui fit se demander à Alexandre si elle n'allait pas pleurer.

— Alors vas-y, continua-t-il. Boude, fais-moi la tronche, je préfère ça à te voir mourir sous les coups d'un blaster ou emmenée on ne sait ou dans un Sanctuaire pour faire je ne sais quoi parce que tu auras utilisé tes capacités sans t'en rendre compte ! Oh et encore une chose !

Il pressa son coude.

— Ce n'est pas parce que j'ai un gène qui a changé que je suis différent. Je suis toujours celui avec qui, lorsque tu étais petite, tu construisais des forts avec tous les draps et les coussins de la maison. Je suis toujours le garçon avec lequel tu pleures devant ce film avec le chien, celui avec qui tu vas courir, et qui te donne les cours quand tu t'endors en classe, celui qui t'envoie trente-six mille messages avant tes courses. Je suis toujours cet Alexandre avec qui tu allais demander du caramel fondu à mon père quand tu restais dormir à la maison et avec qui tu te retrouvais à manger un bâton de concombre car l'Hiver on a jamais de sucre. Je suis toujours le même...Et tu es toujours la même, ajouta-il d'une voix tremblotante.

Ils se fixèrent un instant et Alexandre fut tenter de rabaisser ses barrière mentales nouvellement réparées pour saisir un instant ce que pensait Sarah.

Celle-ci se dégagea doucement sans chercher à être brusque et se mordant les lèvres prit la direction non pas de la salle de bain, mais de l'escalier.

Il l'entendit descendre et une boule se forma dans sa gorge.

Fini, c'était fini.

Il resta là, les bras ballant et le cœur lourd, tendant l'oreille pour écouter une porte qui pourtant ne s'ouvrit et ne se ferma jamais.

Silencieusement, la rousse réapparut dans sa chambre.

Leurs regards se croisèrent, elle s'avança et leva timidement une main dans sa direction.

Alexandre se mit à pleurer.

Un bâton de concombre...

Ils étaient toujours les mêmes.

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