Je suis toujours le même (I)
Un reste de flamme s'agitait sous les cendres dans l'âtre, mais Alexandre n'y prêtait aucune attention.
Rien n'aurait pu détourner son attention de sa meilleure amie à cet instant, pas même son père qui grommelait que le feu n'allait pas tarder à s'éteindre.
Il était bien rempli, le petit salon de ses parents, entre eux, Elliot, Sarah et lui et pourtant jamais le garçon ne s'était senti aussi seul.
Que faire maintenant ? Comment poursuivre ce qu'il avait annoncé à Sarah quelques instants plus tôt ? D'après Elliot, le plus dur était fait...
Il en avait de bonne.
Ce n'était pas lui, qui était à l'origine de la plus grosse perturbation qui secouait l'adolescente !
Comme pour marquer ses réflexions, le vent au-dehors secoua violemment les fenêtres. Un blizzard terrible s'était abattu sur la Zone en quelques minutes.
D'un trait de politesse, Sarah fut la première à couper le silence, mais cela ne rassura pas le garçon.
Son merci était éteint et ses yeux vides. Il échangea un regard avec Elliot qui resta de marbre, n'ayant apparemment aucune intention de l'aider dans cette délicate mission.
Comment tout expliquer à Sarah, se serina-t-il encore. Cela remontait à si longtemps pour lui...Il avait fallu attendre Elliot quelques semaines plus tard pour qu'il comprenne l'ampleur de sa situation. A l'époque, lui n'avait eu personne !
Le brun fut soudainement envahi d'une immense colère, si puissante, qu'elle lui donna le tournis.
Comment pouvait-elle se plaindre et réagir de cette façon alors qu'il lui tendait la main ! Lui n'avait eu personne, lui avait été seul, lui...
Non, non. Ce n'était pas lui !
Il écarquilla les yeux de stupeur. Ce n'était pas lui. Cette rancœur, cette colère n'était pas la sienne, mais celle de Sarah !
Nauséeux, un goût de bile lui remontant dans la bouche, il remonta brutalement ses barrières mentales en quête de protection.
Le vide se fit immédiat, le laissant uniquement avec son propre sentiment de confusion.
L'effort le laissa pantelant ; Comment avait-il pu se laisser ainsi distraire, Par le Roi ! La protection mentale était pourtant l'une des premières choses qu'on lui avait apprises.
Cherchant à reprendre son souffle, le garçon inspira profondément uniquement pour s'étouffer davantage.
Alors qu'une quinte de toux le secouait, sa mère vint près de lui et passa son pouce sous son nez.
Il revint taché de sang.
Son sang.
Le cœur d'Alexandre repartit à la course alors que ses parents et lui échangeaient des regards inquiets.
Ce pouvait-il que...
— Je te l'avais dit, fit Elliot en le fixant.
— Tais-toi, répliqua l'adolescent.
Ecouter Elliot le narguer de son : « je te l'avais dit » était bien la dernière chose qu'il avait envie de faire.
D'un revers de manche, il essuya son nez rougis de sang et se tourna vers Sarah. Elle ne disait rien, mais l'expression de son visage avait adopté un air inquiet qu'il trouva préférable à son air morne de tout à l'heure.
Pourquoi fallait-il qu'il ait tant de chose à lui dire au moment où le temps semblait jouer contre lui !
Il secoua la tête. Non, le sérum fonctionnait, il fonctionnait toujours. Ces saignements allaient s'arrêter. Il était juste fatigué.
Une vague de lassitude l'envahi et nul doute qu'il s'agissait bien de lui. Il était épuisé. Fatigué de devoir tout porter seul et aussi égoïste que cela pouvait paraître, il était heureux au fond de lui de ne plus être seul, d'avoir quelqu'un pour le soulager de ce poids, un épaule sur laquelle se reposer. Celle de Sarah peut-être...
Alors il se lança :
— Sarah, tu te souviens de l'attaque il y a plusieurs mois ? Celle qui t'a envoyé à l'hôpital et qui a marqué le début de tes migraines ? Eh bien, je crois que c'est ce qui a déclenché ce que tu sais faire maintenant, je crois...Non, je suis sûr que c'est ce qui fait que tu es comme moi maintenant.
— Ça, plus ta proximité, ajouta Elliot.
Alexandre hocha la tête, arrosant son pantalon de sang. Celui-ci s'écoulait toujours, glissant le long de ses narines jusque sur ses lèvres et son menton.
Il s'essuya une nouvelle fois.
— Les porteurs du gène sont sensibles aux uns et aux autres, comme quand quelque chose te revient en mémoire. Ça libère un truc et...et voilà, dit-il en désignant sa meilleure amie.
— Non, répliqua-t-elle d'une voix blanche et pourtant suffisamment forte pour faire trembler les barrières mentales du Quatre.
Elliot siffla de colère.
— Cesse ça, télépathe !
— Cesser quoi ! Je ne fais rien du tout et d'abord vous êtes qui vous !
Sarah s'était levée maintenant, et Elliot toujours fidèle à lui-même, eut un rictus.
— Oh ça tu ne fais rien, je te l'accorde. Tu es incapable de te contrôler !
— Contrôler quoi ! répliqua l'adolescente furieuse et terrifiée. Je ne fais rien du tout !
— Tu veux savoir ce que tu fais, s'agaça Elliot en se levant à son tour, Tu es télépathe, ce qui veut dire que tu entends les pensées, ce qui veut dire que tu peux projeter tes pensées. Oh et d'ailleurs, c'est ce que tu fais actuellement, si fort quelles sont en train d'écraser le garçon, qui n'a franchement pas besoin de ça !
Elliot s'approcha de Sarah jusqu'à la dominer de toute sa hauteur et Alexandre craint un instant que l'adulte ne lui fasse mal, une terreur sans nom s'emparant de lui sans qu'il parvienne de nouveau à dire s'il s'agissait de la sienne.
— Tu veux savoir ce que tu es gamine ! Tu es comme nous, tu es une Évoluée !
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