Chapitre 38

Alice

J'attrapai mon sac et allai m'installer dans la voiture. J'avais hâte d'aller chercher Julius. Il m'avait beaucoup manqué ce week-end. Depuis qu'il n'habitait plus avec nous, ma chambre me paraissait trop grande et mon lit trop vide, la présence du jeune homme m'était nécessaire. La voiture avançait trop lentement à mon goût, nous passâmes devant la propriété des Danvers, mais Gerd ne s'arrêta pas.

— Gerd, arrête-toi ! criai-je.

— Alice, c'est M. Danvers qui amène son fils aujourd'hui, me révéla-t-il.

Quoi ? Mais Julius m'aurait prévenue si son père l'amenait. J'étais troublée mais ne montrai rien. Gwen était serrée contre Kaede qui toussait, le pauvre n'était pas très bien, mais refusait de rester alité plus longtemps. Isa regardait par la fenêtre, distraite, tandis que Fried discutait avec Adams. Je me sentais isolée, et agacée.

Arrivé sur la place de parc, je récupérai rapidement mon sac et essayai de repérer Julius dans la foule. Je l'aperçus quelques mètres plus loin en train de se disputer avec son père.

— Essaye de comprendre, soupira M. Danvers.

— Comprendre quoi ? Que tu essayes de m'empêcher de vivre !

M. Danvers soupira, regarda son fils droit dans les yeux et conclut :

— C'est non tu ne passeras pas cette semaine là-bas. Point final. Un 5 n'est pas acceptable, il fallait t'y attendre.

Julius paraissait dégoûté. Il agrippa son sac et s'éloigna avant de crier :

— Je te déteste !

— Julius !

Julius courut en direction du lycée avant que son père ne le rattrape. Mais qu'est-ce qui se passait ? J'avais le vague souvenir que le directeur avait dit que pendant la troisième année à Welton on pouvait passer une semaine dans une autre école, il s'agissait peut-être de ça, mais je ne pouvais pas l'affirmer à 100%. Je regardai les autres, apparemment, ils n'avaient rien vu.

— Bon on y va ? dis-je.

Je croisai Marianna, la fille de Clade, une véritable emmerdeuse. Du regard, je la regardai se diriger vers la cour du lycée. Daemon, son frère, la suivait, mais il n'allait pas s'asseoir vers sa sœur et vint vers nous. Timidement, il se tourna vers l'une de mes cousines.

— Salut Isabelle, dit-il en rougissant.

— Hello Daemon.

Je le détaillai, il avait des cheveux châtains coupés courts et brillants. Une mèche cachait son œil droit, il l'écarta et j'aperçus ses yeux vairons. Son œil droit, d'un brun chocolat contrastait avec celui de gauche d'un bleu océan. Contrairement à Kaede ou Adams qui avaient la mâchoire carrée, son visage avait des traits d'une vraie finesse. Je n'eus pas le temps de m'attarder plus sur le jeune homme car celui-ci me demanda :

— Tu cherches Julius ?

— Oui, tu sais où il est ?

Il opina de la tête et se dirigea vers un bâtiment secondaires, les autres me suivirent et Kaede toussa bruyamment. Daemon nous laissa à quelques mètres d'un banc. Julius appuyé contre le tronc d'un arbre, regardant dans le vide. Je remerciai Daemon et lui proposai de rester avec nous. Il me sourit mais hésita à accepter, il paraissait gêné et pas vraiment à l'aise en présence de Kaede. Visiblement le jeune démon lui faisait peur.

— Julius, ça va ? demandai-je inquiète de ne pas le voir bouger.

Le jeune homme ne répondit rien et baissa la tête, en la relevant, il regarda de façon meurtrière Kaede dont le visage se décomposa à vue d'œil. Cette attitude attira mon attention, Kaede n'était pas du genre à pâlir pour rien. Qu'est-ce manigançait Julius ? Le jeune homme aux longs cheveux bleus vit alors Daemon et se raidit, ce que je comprenais pas vraiment, car les autres fois où Daemon était venu vers nous, Julius s'était montré enclin à l'accepter comme ami.

Trop occupée à regarder Julius, je ne vis pas Marianna apparaitre. Toutes dents dehors, l'air aguicheur, elle embrassa le bout de ses doigts et envoya un baiser à Julius, qui ne détachait pas le regard de la brunette. Sans que je sache pourquoi, Julius se leva et sans nous adresser un mot, suivit Marianna.

— C'est pas vrai, elle a recommencé ! murmura Daemon.

— Qui a recommencé quoi ? interrogea Kaede.

Même s'il malade, il regardait Daemon avec un air menaçant, ce qui invita le jeune homme, hésitant, à dire :

— Ma sœur maitrise l'hypnose, grâce à ses yeux elle peut faire revivre des souvenirs pénibles à sa victime et la manipuler grâce à ça.

Julius ne nous avait jamais parlé de souvenirs angoissants, pourtant il me disait tout, la jeune fille pouvait donc difficilement le manipuler. Cependant, Kaede semblait savoir de quoi parlait Daemon, mais je n'était pas sûre de pouvoir identifier son comportement.

— Votre ami a vécu des choses compliquées ? questionna Daemon.

Tout de suite, les regards se tournèrent vers moi. Ils étaient persuadés que je savais quelque chose, j'étais sa petite amie, il était normal que je le connaisse mieux que personne.

— Il ne m'a jamais rien dit qui ressemble à ça, répondis-je.

— Je crois qu'il y a quelque chose qui l'a profondément marqué dans sa jeunesse, intervint Kaede.

— Et qu'est-ce que c'est ?

— Il m'a demandé de ne rien dire.

— Kaede, il faut que tu nous dises, c'est important, dit Daemon.

— Bon. L'autre jour Julius n'était en cours de potions, je l'ai trouvé appuyé contre un mur, il pleurait et je lui ai demandé ce qui se passait. Il m'a révélé que pendant sa jeunesse, un homme l'avait agressé.

Sous le choc, je posai une main sur ma bouche et déglutis. Julius ne m'en avait jamais parlé, il ne me faisait donc pas confiance. Je regardai dans le vide, les autres paraissaient aussi choqués que moi, ne pouvant pas imaginer un seul instant ce que Julius avait dû éprouver ce jour-là. De la panique, de l'angoisse ? Aucun de ces sentiments ne pouvait décrire son ressenti.

— Maria le manipule grâce à ça, murmura Daemon. Si mon père lui demande de retourné Julius contre vous, elle n'hésitera pas une seule seconde.

— Il y a autre chose qu'on doit savoir ? demandai-je.

— Oui, ma sœur se sert aussi des sentiments de sa victime.

— C'est-à-dire ?

— Si Julius ressent des sentiments comme de la colère, une profonde tristesse ou des choses qui vont dans le même registre, elle peut les utiliser.

Je repensai à la dispute qu'il avait eue avec son père. Est-ce que cela pourrait aider Marianna à manipuler Julius ?

— Il s'est disputé avec son père, murmurai-je malgré tout.

— C'est vrai ? À propos de quoi ? questionna Gwen.

— Il me semble que c'était parce que son père refusait qu'il passe une semaine dans une école de musique, dis-je.

Il eut un grand silence, personne ne parlait, les autres doutaient-ils des intentions de Julius ? Marianna apparut alors dans la cour avec le principal intéressé de l'histoire. Elle regarda Daemon qui détourna le regard lui faisait, non intentionnellement, comprendre qu'il avait révélé son pouvoir. Elle plongea ses prunelles dans celles de Julius qui sembla complètement hypnotisé, les yeux dans le vague, comme perdu dans une pensée que seul lui pouvait comprendre.

— Bonjour mon petit frère chéri, chantonna-t-elle en regardant Daemon.

Elle fit un signe de tête à Julius. Voyant le visage sans expression de mon petit ami, je ressentis soudainement un impression bizarre, la chaleur monta dans ma poitrine et me musela. J'étouffai un sanglot lorsque mon copain murmura ces mots :

— Alice, il faut l'avouer, nous ne ressentons pas la même chose. Notre histoire n'a jamais commencé.

Marianna rayonnait alors qu'une larme silencieuse glissait sur ma joue. Je ne pouvais pas croire ce qu'il me disait, c'était un cauchemar. Elle avait tout prévu. Son plan était simple, elle voulait détruire notre groupe de l'intérieur. Je me levai, tandis que Daemon posait sa main sur mon avant-bras, sans que je ne comprenne la portée de mes actes, je giflai Julius du plat de la main. Sonné, il apposa une main sur sa joue et secoua la tête, comme s'il voulait reprendre ses esprits.

— Alice, qu'est-ce que tu fais enfin ?

— Je t'aide à te souvenir. Comment peux-tu être aussi faible face à l'hypnose ? Retiens bien, en magie, on contrôle ses sentiments.

Julius semblait se souvenir de ce qui s'était passé. Il s'excusa et le soulagement me submergea, il n'avait pas voulu me blesser, Marianna l'avait forcé. La jeune fille semblait surprise que son hypnose n'ait pas fonctionné, mais elle n'eut pas le temps de faire le moindre geste que Julius lui assena un coup avec le plat de la main, elle s'effondra dans les bras de son frère. Daemon regarda sa sœur et se mit à trembler.

— Daemon qu'est-ce qui se passe ? interrogea Julius.

— Si mon père apprend ce qui vient de se passer, je suis un homme mort...

— T'inquiète pas, Marianna ne dira rien, fais lui croire qu'elle a imaginé cette scène, le rassura Julius.

Daemon hocha de la tête. Ses yeux vairons n'exprimaient rien et il regardait négligemment le sol. La sonnerie retentit mettant fin à nos réflexions.

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