Chapitre 23
Gwendolyn
Je me réveillai en sursaut. Quel heure était-il ? Je tournai mon regard vers l'horloge, elle indiquait 9h00. Mon coeur loupa un battement lorsque je réalisai que j'étais en retard de plus de trente minutes.
Sans me poser plus de question, je repoussai les draps et me levai en vitesse, envoyant valser mon oreiller dans la chambre. Dans la précipitation, le drap se retrouva au sol et je me hâtai sous la douche, manquant de laisser mes affaires sur le sol mouillé.
Je ne profitai pas de la chaleur de l'eau comme je le faisais chaque matin. Passant la première robe qui me tombait sous la main, je finis par descendre les escaliers quatre à quatre, essayant de remettre de l'ordre dans mes pensées.
Je n'eus pas le temps de m'asseoir que l'on m'agressa verbalement ! La deuxième chaîne du sceau avait lâché, nous devions aller chercher une Marque. Ça m'inquiétait, je n'aimais pas aller dans le passé, je n'avais pas assez de connaissances pour que ce soit sans risque.
Fried s'était assis sur un des canapés, se préparant à ce que j'active son pouvoir de la Sentinelle. Malgré l'agitation que créait mon cerveau, je parvins à me concentrer. De légers picotements parcoururent mon avant-bras, ils s'atténuèrent rapidement. Mon corps semblait s'être habitué aux désagréments que causait une activation.
Le prince fut entouré d'un halo argenté et se laissa aller contre le fauteuil. Après quelques minutes en transe, il ouvrit à nouveau un oeil.
— Alors, où est la Marque ? questionna mon père sans lui laisser le temps de reprendre réellement ses esprits.
— J'ai aperçu une ruelle sombre et plusieurs femmes légèrement habillées. Il y avait une lanterne rouge...
Je gardai le silence, ne comprenant pas vraiment ce que représentait ce symbole. Le regard plein d'espoir, je me tournai vers Julius. Si quelqu'un devait savoir ce qu'il signifiait, c'était bien lui.
— La lanterne rouge indiquait, au XVème siècle, les maisons closes publiques à l'heure de leur ouverture.
La Marque se trouvait-elle dans l'un de ces lieux ? Cette réflexion ne tenait pas la route, Fried nous aurait dit s'il avait vu la Marque ! D'une voix que je voulais ferme, je demandai :
— As-tu vu la Marque sur l'une de ses femmes ?
— Non, je ne l'ai pas vue, je n'ai senti que sa présence.
Voilà qui ne nous aidait pas ! Mon père et ma tante échangèrent un regard désemparé alors que Gerd paraissait réfléchir. Les trois Sentinelles semblaient communiquer silencieusement entre elles tandis que je cherchais une solution. J'avais le sentiment que sans Pierre de Villiers, nous étions perdus... Sans sa présence, Alice et Isabelle n'avaient pas jugé utiles de venir au déjeuner.
Il fallait que je prenne les choses en main. J'étais, sans l'avoir vraiment voulu, l'Annonceuse. Il était de mon devoir de retrouver ces Marques. Je regardai les trois Sentinelles et déclarai :
— Si ce n'est pas à nous d'aller vers elle, c'est elle qui viendra à nous.
***
Je ne ressentais qu'une sensation de vide alors que je tombais. Le vent, passant d'un air tiède à glacé, semblait enrober ma peau tout en me faisant frissonner. J'avais l'impression que mon estomac était retourné et je craignais de vomir lorsque nous atterririons.
Comme à chaque mission, Julius et Kaede m'accompagnaient. Nous n'avions pas changé de tenues, nous n'en voyions pas l'intérêt.
Nous tombâmes au milieu d'une ruelle sombre. Les pavés étaient éclairés par la pleine lune, qui donnait une impression surnaturelle. Des spectres de poussières passèrent devant mes yeux alors que je me redressais.
Les murs de briques, sur lesquels serpentaient des longues lézardes, nous encadraient, semblant nous garder prisonniers. Il faisait tellement nuit que je n'apercevais pas le bout de la ruelle. Plongée dans les ténèbres, elle avait l'air de retenir toute la misère du monde. Une odeur d'urine et de détritus assaillit mes narines et me fit froncer le nez alors que je me détournais vers mes amis.
— Que fait-on maintenant ?
— Je croyais que tu avais un plan, s'étonna Kaede.
— Non pas vraiment...
Kaede leva les yeux au ciel, visiblement agacé par mon manque de réactivité. À vrai dire, je ne savais pas du tout par où et par quoi commencer. Je ne connaissais pas le lieu dans lequel nous étions, les événements de cette époque restaient troubles et j'avais secrètement espéré que les garçons sauraient quoi faire.
— Essayons de trouver un quartier avec un lampe rouge, déclara Julius.
Avant de partir, Fried avait dessiné l'endroit dans la lanterne rouge. Il excellait dans les arts et en réalisant ce croquis, il nous avait aider du mieux qu'il le pouvait.
J'emboitai le pas de Kaede et de Julius. D'un accord commun, mais silencieux, ils se dirigeaient vers le nuage de ténèbres. J'entendis une sorte de couinement, peut-être venait-il d'un rat, le long des murs. Frissonnant, je me rapprochai de Kaede, craignant un quelconque danger provenant de l'ombre.
Le silence était pesant, aucun de nous ne parlait. Concentrés sur le moindre détail intéressant, nous essayâmes de trouver le décor qui correspondait le mieux au croquis de Fried. Nous ne trouvâmes pourtant rien. Étions-nous réellement au bon endroit ? Je commençais fortement à en douter...
À nouveau, un couinement se fit entendre. Je m'arrêtai net et me retournai brusquement. La nuit nous enveloppait dans son noir manteau, m'empêchant de voir quoi que ce soit. Je sentis la présence de Kaede à mes côtés alors qu'il me murmurait :
— Partons d'ici, il y a quelque chose d'étrange.
Un tremblement me parcourut tandis que nous tournions le dos. J'avais l'impression d'être observée, et je n'aimais pas ça... Cette présence se fit ressentir intensément à l'instant même où nous approchions d'une source de lumière.
— Qu'avons-nous là ? Un joli trio !
Une voix, mielleuse et envoûtante s'éleva à côté de moi. Je voulus me retourner, mais l'inconnu plaqua sur mon visage un morceau de tissu imbibé d'une étrange odeur. Prise de panique, je tentai de me débattre, mais l'inhabituelle senteur me fit tourner la tête. Mes mouvements devinrent lents, mon corps s'engourdit à mesure que je respirais. Ma vision finit par se troubler, je ne vis plus mes amis. Allaient-ils bien ? Ma conscience m'abandonna.
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