Chapitre 12 : Le prix de la liberté

Alors que la femme restait en retrait à observer, le professeur principal de la 1A se plaça à mes côtés.

Mon regard ne se détournait plus de celui du prisonnier en face de moi. J'ai peur. J'ai peur. Mon esprit répétait en boucle ces deux mots, jusqu'à ce qu'une voix brise le silence.

- Cet homme est un criminel de haut rang, il est coupable d'un grand nombre de meurtres prémédités. Pour cela, il a été condamné à la peine de mort. Son exécution aura lieu dans trois jours. En définitive, il n'a plus rien à perdre

Je savais ce qu'il était entrain de faire. Cet homme qui parlait de l'autre côté de la vitre. Et je savais ce qu'il attendait de moi.

- Roru Kanjo, pour votre premier exercice vous devrez-

- Vous voulez que j'abrège ses souffrances, c'est bien ça ?

Qui ne dit mot consent. Et puisque plus un seul mot ne sorti de sa bouche après ça, je le prit comme une confirmation.

Ignoble. C'est ce que m'évoque cette personne. Pas celle en face de moi, non, mais bien celui qui n'a même pas le cran de rester dans la même pièce que moi tellement il a peur des conséquences de ses propres demandes.

Même si mon ton n'indiquait qu'une grande condescendance, mes véritables émotions étaient une peur viscérale de mes propres capacités, et une angoisse profonde de ne pas savoir les maîtriser.

Mes mains tremblaient rien qu'à cette idée. Mes yeux s'abaissèrent vers celles-ci, et un soupir tremblant passa la barrière de mes lèvres.

N'ai-je pas fait une promesse ? Si, celle de me battre pour mon rêve. Pour être libre. Si j'arrive à avoir une totale maîtrise sur mon alter, j'aurai une chance de l'être un jour prochain. Je ne dois plus hésiter à présent.

Je me levai de la chaise, après avoir adressé un dernier regard un peu plus assuré au professeur à côté de moi. J'avais bien vu que malgré leurs postures détendues, aucun des deux héros présents dans la salle ne semblait réellement à l'aise.

Je leur en voulait beaucoup de m'avoir piégé comme ça, mais j'en voulais aussi à moi-même, de leur causer un tracas inutile.

Je me postai en face du prisonnier, qui leva immédiatement les yeux dans ma direction. Avant même de tendre la main pour le toucher, je senti par ce contact visuel la multitude d'émotions négatives qu'il ressentait.

Plus que trois jours à vivre, c'est peu. Il avait perdu toute combativité, son destin était sinistre et il en était bien conscient.

Je pris une grande inspiration, et posa ma main sur l'une des siennes. Toute ma concentration était dès lors dédiée à remplir l'objectif que l'on m'avait fixé.

Regrets. Peur. Tristesse. Remords. Désespoir. Autant de négativité que je ressentais à ce contact. Cette exercice n'était peut-être pas si cruel qu'il n'y paraissait. C'était même une chance pour cet homme. Il allait pouvoir goûter à la délivrance pour le temps qui lui restait.


Mes yeux se fermèrent.


Ça y est. Mon alter finalement activé, aucun retour en arrière n'était plus possible.

Peu à peu, le détenu changea du tout au tout. Sous le regard stupéfait des trois adultes, l'expression de l'homme devint de plus en plus sereine.

Mes yeux toujours clos, ma concentration était à son paroxysme. Marmonnant à voix basse pour ne pas perdre le fil, la chose était bien moins aisée que je ne le pensai.

- Ça ira.. tout va bien... le mal disparaîtra... il rendra son unique souffle...


Au bout d'une minute à peine, je rompais le contact avec le condamné et reculai de plusieurs pas.

Immédiatement, un frisson désagréable, suivi d'une douleur fulgurante qui me foudroya littéralement. Je m'en doutais, la charge était bien trop lourde pour moi.

Tout mon corps se crispa et se mit à trembler. Ma respiration accéléra, et je devins parfaitement incapable de retenir les larmes qui dévalaient mes joues. Mes mains pressant chaque côté de ma tête, je tentai de l'endiguer mais rien n'y fit.

Peu à peu, tout mon corps fut enserré par un mal insupportable. Ployant sous la douleur, je fini par ne plus tenir debout.

Mes jambes me lâchèrent, et mes pleurs redoublèrent d'intensité.

- A-arrêtez ça... pitié...

Au sol, je tentai vainement de calmer ma douleur, ma respiration s'emballait.

L'impression que des milliers de pieux me transperçaient, que ma tête et mon cœur étaient en proie aux flammes de l'enfer. Telle était la contrepartie de cet effort.

Je suffoquais.

À l'aide. S'il vous plaît... pourquoi personne.. n'intervient...

- ... à l'aide...

C'est pourtant à eux... c'est leur rôle... alors pourquoi...

Et alors qu'aucun mot ne pouvait plus exprimer ma souffrance, que mes pleurs et hurlements de désespoir envahissaient la pièce, un autre son vint s'ajouter au reste.

Ce son, c'était le rire du prisonnier. Il riait de bon cœur, tandis que je me tordais de douleur. Une douleur qui continua à s'accentuer de seconde en seconde. Qui m'oppressa de plus en plus. Qui me détruit de l'intérieur.

Arriva le moment où ma vision, déjà embuée par les larmes, se brouilla alors qu'une brume au parfum étrange m'entoura. Sentant mes dernières forces m'abandonner, je sombrai enfin dans l'inconscience.

La pièce redevint calme, et l'on entendit plus que le détenu rire à gorge déployée, et clamer haut et fort son bien-être.

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