Chapitre 24...
Roxane était en train de faire les cent pas dans sa chambre les bras croisés. Elle marmonnait dans sa barbe tout en fixant le sol. Elle venait de réaliser au moins une dizaine de tours en rond lorsque Suzanne toqua doucement à la porte avant de l'entrouvrir. La jeune fille entra par la suite timidement tandis que son amie alla s'asseoir sur son lit. Suzanne la rejoignit et se posa doucement sur le lit de son amie. Elles restèrent un moment en silence avant que finalement Suzanne ne rompt le silence :
– Quand j'étais petite les autres enfants ne voulaient pas jouer avec moi dans la cour de l'orphelinat. Ils disaient que j'étais bizarre. Que je mangeais tout le temps et que j'étais grosse. Il est vrai que j'ai tout le temps était un peu plus enveloppée que les autres enfants et que je ne supportais pas de ne rien avoir dans ma bouche. Imagine comment j'ai été heureuse lorsque j'ai découvert les chewing-gums.
Elle marqua une pause avec un petit rire avant de reprendre.
– Et puis j'ai grandi. Pleins de familles sont venues me voir dans l'hypothèse de m'adopter mais jamais une n'a franchi le pas. J'ai vu tous les enfants que j'avais connus petite se faire adopter. Même les plus turbulents. La directrice de l'orphelinat, dans un geste de gentillesse de sa part je présume, voulut me cacher les vraies raisons de ces refus mais je n'étais pas dupe. Eux aussi me trouvaient bizarre.
Elle tourna par la suite la tête vers son amie en posant sa main gauche sur la sienne.
– J'étais un monstre à leurs yeux. Tout comme Katia, Maël et Sam l'étaient aux yeux de ceux qui vivaient près d'eux. On a tous vécu comme des monstres. Nous posant des questions du genre «qu'est-ce que je fais dans ce monde ?», «pourquoi je n'ai pas pu naître normal comme les autres ?». Mais tu sais quoi ?
Roxane releva doucement la tête vers elle.
– Au moment où le Professeur Martin est venue me chercher dans cet orphelinat, j'ai su que tout cela allait changer. Que lui ne me prenait pas pour un monstre.
– C'est normal Suzanne, il est à l'origine de ce que nous sommes...
– Non tu ne comprends pas, reprit son amie en élevant légèrement la voix, même s'il est à l'origine de ce que nous sommes, la fois où il est venu me chercher, il m'a sauvée Roxane. Il nous a tous sauvés.
La jeune femme la regardait en essayant de comprendre les paroles de son amie. Depuis toujours Suzanne avait des difficultés à s'exprimer auprès des autres. Il faut dire qu'elle n'avait pas eu beaucoup l'occasion de le faire.
– Je ne vois pas où tu veux en venir Suzie...
– Ce que je veux dire, tenta une nouvelle fois la jeune fille, c'est que le Professeur nous a sauvé de cette société qui ne nous comprenait pas. Il nous a sauvé de la solitude. Il nous a tous amenés ici. On est devenu une famille. On a appris à gérer nos dons. C'est comme l'histoire avec la jeune fille et le prince. On était comme elle, cloîtré chez nous à regarder la vie de l'intérieur et puis une nuit, notre bonne fée est apparue et nous a transformés pour que l'on puisse aller découvrir le monde.
Un sourire se dessina sur le visage de Roxane face à la comparaison faite par son amie. Cette dernière pensa qu'elle n'avait pas compris et se mit à bafouiller. Roxane prit son amie dans ses bras afin de l'enlacer puis chuchota doucement.
– Merci Suzie...
– Tu as compris ce que je voulais dire ? S'étonna cette dernière.
– Oui ton histoire de bonne fée m'a bien aidée.
Suzanne se mit à sourire fière d'elle avant de lui rendre son câlin. Elles restèrent un moment sans bouger puis finalement Roxane déclara :
– On devrait se préparer nous aussi.
– Oui.
*
Le voyage jusqu'à Marseille se fit dans le silence. Tout le monde se concentrait sur la mission qui arrivait. De son côté, le Professeur était anxieux. Il n'aimait pas du tout ce qu'il s'apprêtait à faire. Son entrevue avec Ferraud était un piège, il en était conscient. Ferraud allait sûrement le prendre en otage afin de recevoir la fameuse «recette».
Douglas vint s'asseoir vers lui.
– Ne vous inquiétez pas Professeur, je serai avec vous.
Alphonse lui adressa un remerciement dans un souffle avant de reporter son attention au paysage qui défilait à travers le hublot. Même si l'Agent Spécial venait le couvrir avec ses hommes, Martin se doutait que l'accueil de son ancien collègue ne serait pas dans l'amical du tout.
Le pilote choisit d'atterrir à Aubagne afin de ne pas risquer de se faire voir par les hommes de Ferraud. Les adolescents accompagnés du Professeur, de l'Agent Spécial et ses hommes et de Lucas et Anne descendirent de l'engin avant de se diriger chez un transporteur routier. Ce dernier, à la vue de la plaque de James Douglas, accepta de leur prêter un bus et tous prirent par la suite la direction de Marseille.
Douglas, avec l'aide des garçons et de Katia, avait préparé un plan d'attaque. Les adolescents partiraient du Nord de Marseille, par groupe de deux et avanceraient jusqu'aux plages. Lucas et Anne, de leur côté, s'occuperaient des Ports et feraient en sorte que les possibles renforts de Ferraud ne quittent jamais l'eau. Douglas et ses hommes accompagneraient Martin au rendez-vous en se cachant. D'après le Professeur, Daniel Ferraud souhaitait le voir à un endroit qui lui était cher : La Cathédrale de la Major. L'Agent Spécial fit signe au chauffeur de s'arrêter avant d'arriver à Marseille. Il devait trouver une voiture pour le Professeur et un mini van pour lui et ses hommes. Ils firent donc une halte dans un village proche de la métropole et n'eurent pas grand mal à trouver ce qu'ils cherchaient. Vint alors le moment de la séparation avec les enfants. Ces derniers étaient inquiets pour lui. Ils savaient dans quoi il se plongeait et n'étaient pas rassurés.
– Tout va bien se passer les enfants, j'ai confiance en vous et en vos capacités. Sauvez les.
– On fait quoi pour ces hommes, demanda Katia, ceux utilisés par Ferraud ?
– Ce sont des victimes aussi, essayez de les mettre hors d'état de nuire ou de les raisonner.
Les adolescents hochèrent la tête tandis que le Professeur les regardaient les uns après les autres.
– Et si on n'y arrive pas, s'inquiéta Suzanne, si on se fait capturer ?
Alphonse la regarda chaleureusement avant de lui répondre.
– Vous y arriverez Suzanne, vous y arriverez parce que vous êtes nés pour ça, pour sauver le monde.
– Oui enfin, le monde ce n'est pas Marseille non plus, rétorqua Roxane rancunière.
– Marseille pourrait être le début d'une catastrophe qui toucherait tout le monde Roxane. Ferraud a en sa possession des armes qu'il peut utiliser. Il est dangereux. C'est pour cela qu'il faut l'arrêter maintenant.
La jeune femme ne répondit pas et puis le Professeur leur adressa un dernier conseil avant de quitter le bus en compagnie de Douglas. Les adolescents restèrent donc avec le chauffeur qui reprit le chemin de Marseille. Maintenant que le Professeur et l'Agent Spécial n'étaient plus avec eux, l'anxiété était à son comble. Allaient-ils y arriver ? En étaient-ils capables malgré ce que leur disait le Professeur ?
Sam se leva de son siège et se tourna vers les autres.
– Il faut que l'on fasse les groupes. Je pense que Roxane, Maël et Suzanne devraient être ensemble et que je me mette avec Katia.
Il dirigea son regard vers ses compagnons afin de guetter leurs réactions. Apparemment, ils étaient d'accord. Le chauffeur prit alors la parole en leur jetant un coup d'oeil dans le rétroviseur :
– On va bientôt arriver au premier endroit, qui descend en premier ?
Les adolescents se concertèrent du regard. Finalement il se décida que Sam et Katia descendraient en premier. Le chauffeur les conduisit jusqu'à l'endroit convenu et les deux adolescents quittèrent le bus après avoir embrassé leurs camarades. Par la suite, le bus alla jusqu'au deuxième point et livra les trois autres adolescents. Il roula encore quelques instants avant de finalement poser Lucas et Anne. Ces derniers passeraient par un coin moins gardé en vitesse, Lucas portant sa partenaire.
Finalement le chauffeur rebroussa chemin avant de se garer à l'endroit qu'ils avaient décidé. Il coupa le moteur et se tourna vers la route qu'il venait d'emprunter avant de regarder sa montre : 8h26. Il faisait déjà jour néanmoins le début de la journée leur serait favorable.
Enfin, il l'espérait.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top