Chapitre 23...
Alphonse Martin était en train de travailler dans son laboratoire depuis maintenant plusieurs heures. Ils étaient à peine rentrés de Paris qu'il avait repris ses recherches : pourquoi que sur les enfants ? Il avait beau travailler sur ce point, il n'arrivait pas à mettre la main sur cette explication. Par moments, il avait eu l'envie de se dire que «c'est comme cela et puis voilà» mais son cerveau de scientifique refusait de se l'admettre. Il avait besoin de comprendre.
Il chiffonna une nouvelle feuille avant de se passer une main sur ses yeux. Il avait encore une fois foncé dans un mur et devait reprendre tout à zéro. Néanmoins, il devra attendre avant d'attaquer ses recherches à nouveau car on toqua à sa porte.
- Oui ?
Roxane entra doucement en évitant de marcher sur des morceaux de papier.
- Professeur ? Je suis désolée de vous déranger mais il faut que vous veniez voir ça...
Alphonse Martin fit tourner sa chaise afin de faire face à la jeune femme.
- Quoi donc ?
Sa protégée se dirigea vers lui et le prit par la main afin de le tirer avec elle.
- Je n'ai pas le temps de vous expliquer, venez.
Elle l'entraîna avec elle jusqu'à la salle de télévision où les autres s'étaient tous rassemblés. La machine était allumée sur un reportage de journal télévisé. Une jeune femme blonde avec un chignon parlait devant une caméra à Marseille, devant l'hippodrome. Le professeur écouta ce qu'elle disait en lançant des regards à James Douglas. Apparemment, ce dernier n'était pas au courant de ce qui se passait non plus. Soudain le visage de la femme laissa la place à une vidéo enregistrée d'un homme. Ce dernier fixait la caméra avec des yeux qui donnaient la chair de poule. Il avait le crâne rasé et semblait porter un débardeur de couleur kaki. Au moment où la vidéo commença, il parlait avec une voix caverneuse :
- «Moi, immatricule numéro 142, je m'adresse au Professeur Alphonse Martin de la part d'un vieil ami qu'il reconnaîtra forcément.»
Il sembla baisser les yeux un instant comme s'il lisait un papier.
- «Je demande au Professeur Martin qu'il me retrouve avant que la semaine soit terminée. Il saura où. Je veux qu'il apporte avec lui ce qu'il m'a volé il y a dix-sept ans. Si dans une semaine je n'ai toujours rien, je donnerai l'ordre à mes hommes de tuer la population de Marseille.»
L'homme termina sa phrase en souriant dangereusement puis sembla attraper la caméra avant que l'image ne devienne noir et que la journaliste du départ reprenne la place. Le Professeur était aussi blanc que sa blouse. Son regard passa sur ses protégés qui le regardaient abasourdis par les paroles de cet homme. De son côté, James Douglas s'assit sur un fauteuil en passant ses mains sur son visage.
- Qui est cet homme dont il parlait ?
Alphonse se tourna vers Roxane qui venait de lui poser cette question. La jeune femme le regardait en croisant les bras, sentant que visiblement le Professeur leur cachait quelque chose. Alphonse Martin rentra ses mains dans ses poches en se dirigeant vers une chaise.
- Les enfants, il faut que je vous raconte une histoire...
- Nous ne sommes plus des enfants Professeur, arrêtez de nous mentir et dites nous la vérité, commença à s'enflammer la jeune femme.
Les autres les regardaient sans comprendre ce qui se passait. Le Professeur s'assit sur sa chaise en silence avant de finalement reprendre la parole, s'adressant à ses protégés.
- Très bien, je vais vous dire la vérité.
Il y eut un silence durant lequel le Professeur sembla chercher ses mots, ce qu'il avait à dire allait être dur à entendre. Mais le temps de la vérité semblait venu, il ne pouvait rien y faire. Il prit alors une grande inspiration avant de commencer son récit :
- Il était une fois un scientifique qui voulait travailler sur la génétique et les cinq sens mais qui n'avait pas de soutien. Ce scientifique c'était moi. J'étais jeune à l'époque et je voyais le monde en grand. Après ma thèse et mon doctorat je me suis néanmoins retrouvé sans rien. Aucun labo ne voulait financer mes recherches. Et puis un jour j'ai été contacté par la société Genetics.
- Tu as travaillé avec Daniel Ferraud ? S'étonna Sam en écarquillant les yeux.
- Pas avec lui au départ, mais avec son père, Jean Ferraud. Cet homme était un visionnaire pour son époque. Il me soutenait à cent pour cent dans mes recherches et c'est grâce à lui que j'ai pu commencer à avoir des résultats dans mes travaux.
Il marqua une pause, laissant le temps à ses interlocuteurs de s'imprégner de ce qu'il disait, puis il reprit :
- Néanmoins, quelques années après, je devais avoir dans la trentaine, Daniel commença à seconder son père. Ce dernier se faisait vieux et venait de moins en moins au labo, laissant la place à son fils. C'est à ce moment là que tout bascula.
Un nouveau silence régna dans la pièce avant que le professeur ne reprenne la parole, se tournant vers Roxane :
- Ta mère était avec nous.
La jeune femme le regarda sans savoir quoi dire. C'était la première fois que quelqu'un lui parlait de sa mère. Sa mère biologique. Elle l'avait jamais connue. Elle avait été élevée par une tante avant de décider de vivre sa vie toute seule, se servant de son don pour y arriver.
- Vous avez connu ma mère...?
Le Professeur hocha la tête tristement.
- C'est la première femme qui accepta de nous prêter son corps.
- Pardon ?!
- Comme je vous l'ai dit, je travaillé sur la génétique et le lien entre les cinq sens. Alors, ta mère a accepté que tu sois notre première expérience.
Elle se leva, un mélange de surprise mais également un début d'énervement.
- Et mon père ?
- Tu viens d'une fécondation in-vitro Roxane, ton père n'est pas connu.
La jeune femme le regardait en s'imprégnant de tout ce qu'il venait de lui dire. Le Professeur se tourna alors vers ses autres protégés.
- Vous venez tous d'une fécondation in-vitro les enfants. Vos mères ont fait parties de notre expérience sur les cinq sens.
Les adolescents n'en revenaient pas. Ils ne savaient plus comment réagir également. Ils hésitaient entre l'envie d'en savoir plus sur ces mères qu'ils n'avaient jamais connus mais ils étaient déçus que le Professeur, le seul adulte en qui ils avaient vraiment confiance, leur ait caché cela. Pourquoi ne leur en avait-il pas parlé ?
- Pourquoi vous nous avez cachés cela ? Demanda Sam en serrant les poings.
- Je comptais le faire un jour, j'attendais juste que le bon moment soit venu.
Au regard des garçons, Alphonse sentit que la réponse les déplut.
- Et... après ? Voulut savoir Suzanne avec une petite voix.
- Roxane fut la première née. Puis arrivèrent les jumeaux. Assister à vos naissances fut l'un des plus beaux moments de ma vie.
Le Professeur se ferma par la suite, baissant sa tête vers ses mains croisées devant lui.
- C'est à ce moment là que je compris les réelles attentions de Ferraud. Ils voulaient se servir de vous...
L'Agent Spécial se leva en prenant la suite :
- C'est là que la CIA est intervenue. Le Professeur, après le silence des forces spéciales française, s'est tourné vers nous. Nous expliquant ce qui se tramait, qui vous étiez, combien vous étiez précieux. Alors j'ai fait mon premier voyage en France pour venir l'aider. Vous n'imaginez pas la fierté que j'avais lorsque la Directrice m'a attribué cette mission. Je n'étais qu'un jeune diplômé sans expérience et me voilà parachuté en France.
Il alla vers le Professeur et posa une main amicale sur son épaule.
- Je sais que cette histoire peut paraître ambiguë pour vous. Que vous ne savez plus en qui avoir confiance. Mais sachez que le Professeur a toujours été là pour vous cinq. Quand il a compris ce que Daniel Ferraud voulait faire, il a tout fait pour vous éloigner de lui, pour vous cacher. Roxane tu as atterri chez ta «tante» (il fit le signe des guillemets avec ses doigts en prononçant ce dernier mot) qui est en fait une femme qu'il a payé pour te cacher et t'élever. Les jumeaux ont fini dans une ferme en Alsace. Katia chez un couple de Grenoble et enfin Suzanne, dans un orphelinat.
Le silence se mit à régner dans la salle suite à cette annonce. Les adolescents avaient du mal à comprendre toutes ces informations qui arrivaient d'un coup. Ils étaient complètement perdus.
- C'est pour cela que l'on n'a jamais connu nos mères... comprit Katia en passant une main sous l'un de ses yeux, cachant sûrement une larme.
- C'est ça... lui répondit doucement le Professeur.
- Dans la vidéo, l'homme parle de quelque chose que vous auriez volé à Ferraud, c'est quoi ? Demanda par la suite Maël, tenant la main de Suzanne dans la sienne.
- Après avoir aidé vos mères à disparaître, j'ai dû moi-aussi partir me cacher, craignant pour ma vie. Mais avant de partir, j'ai détruit toutes les marques de mon travail à son labo et j'ai emporté avec moi mes recherches, dont la formule permettant d'accentuer les sens chez un fœtus. C'est ça que Ferraud veut.
Le garçon hocha doucement la tête avant de se lever et d'aller vers le Professeur. Ce dernier le regarda avec une mine triste, il avait peur qu'ils lui en veulent. Ils aimaient ces gamins comme s'ils étaient ses propres enfants. Il avait choisi de ne pas en avoir afin de se consacrer à eux et à leur protection. Ils étaient tout pour lui.
- Je vous pardonne, dit-il doucement.
Les autres approuvèrent ce qu'ils venaient de dire. Tous, sauf Roxane. Cette dernière avait la tête baissée vers ses pieds et les poings serrés.
- Roxy...? Essaya Katia en s'approchant d'elle.
- Je ne peux pas croire que vous lui pardonniez si facilement ! On avait confiance en lui mais depuis le début il nous ment ! Il sait très bien pourquoi nous avons ces pouvoirs, c'est parce qu'il nous les a mis ! Toute notre vie on a été considérés comme des monstres à cause de lui !
Katia voulut la prendre dans ses bras afin de la calmer mais la jeune femme se dégagea violemment.
- Je ne peux pas lui pardonner !
Elle quitta la pièce après avoir envoyer valser la chaise qui se trouvait vers elle. Katia se tourna par la suite vers le Professeur avec un sourire désolé.
- Elle n'a pas tord en ce qui concerne le fait que l'on a toujours été considéré comme des monstres, avoua Sam par la suite.
Il tourna sa tête vers Suzanne. La jeune fille baissa la tête avant de se lever à son tour, se dirigeant vers l'endroit par où était partie leur amie.
- Suzie ? L'appela Maël, la regardant avec inquiétude.
La jeune fille se mit de profile afin de le voir puis esquissa un petit sourire.
- Préparez le départ pour Marseille, je vais lui parler.
Son copain hocha doucement la tête, toujours surpris quand sa copine prenait de l'assurance. Suzanne quitta la pièce afin d'aller retrouver son amie. Anne adressa un regard à Lucas et celui-ci s'avança par la suite vers les autres.
- Elle a raison, nous devons nous préparer à partir. Il faut que l'on aille aider ces gens à Marseille, nous ne pouvons pas rester à rien faire.
- Je vais préparer l'avion, annonça Douglas, venez m'aider les garçons.
Ils quittèrent la pièce rapidement. Le Professeur resta avec Anne et Katia, toujours sous l'effet des paroles de Roxane.
- Professeur ?
Il releva la tête vers sa jeune protégé.
- Je vais arranger tout cela, nous vous inquiétez pas.
Il leur adressa un petit sourire avant de reprendre la direction de son bureau. Les filles se regardèrent puis chacune partit préparer ses affaires.
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