19 Turbulences


Malone s'avance dans un des étroits couloirs de circulation de l'avion. La température, agréable, contraste avec l'extérieur, où le ciel couvert a laissé place aux étoiles, accompagnées d'un vent glacial. Il regarde à nouveau son ticket et atteint enfin sa place, juste pas à côté d'un hublot. Il espère se retrouver seul, juste pour ne pas avoir à discuter, de plus, avec sa grande taille, le voyage jusqu'à Los Angeles va vite devenir un calvaire. Mais il connaît un petit tour de passe-passe pour remédier à ce problème, le whisky. En règle générale, une fois en vol, il s'en enfile une bonne dose et tout ceci se déroule sans accroc.

L'alcool reste pour lui une sorte de bénédiction, d'échappatoire, toutefois sporadique. Par moments, certains soirs, comme aujourd'hui, une espèce de coup de cafard se glisse dans son âme et boire jusqu'à la limite de l'admissible lui permet de ne pas se loger une balle dans la tête. Une sorte d'automédication.

Il range son petit sac dans le coffre dédié à cet effet, au-dessus des places assises, puis s'installe. Il grimace déjà à cette promiscuité, surtout pour ses jambes, puis soupire et en profite pour observer les gens.

Tous des tueurs, à ses yeux.

Un type, sur la rangée du milieu, avec des lunettes rondes et une fine moustache, l'interpelle, bien entendu. L'énergumène reluque toutes les femmes et semble se délecter dans des fantasmes malsains.

Tueur, pas tueur ?

La présence du son ennemi devient obsessionnelle, comme d'habitude. Mais se faire ridiculiser de la sorte, depuis la découverte d'Emmy Bosco, donne une ampleur encore un peu plus destructeur au phénomène.

Il soupçonne tous les types qui s'approchent de près ou de loin de cet enfoiré. Un steward passe, l'agent fédéral s'adresse à lui.

— Excusez-moi, monsieur.

— Oui, répond l'homme d'une trentaine d'années, avec un beau sourire.

— Vous passez quand avec les boissons ?

— Pas longtemps après le décollage, si vous voulez, je vous sers en priorité, monsieur l'agent.

Malone vient de retirer son manteau et dessous, son gilet noir ne passe pas inaperçu avec les initiales FBI. Il grimace à cet oubli.

— Mince, il me faut vraiment une bonne nuit de sommeil. Oui, ça serait sympa de votre part, merci d'avance.

— Pas de soucis, précise l'employé, qui note sa demande sur un petit bloc-notes jaune.

Le steward enlève le post-it et le colle sur le revers de sa main gauche. Une sorte de coup de froid envahit Malone, dû à cette similitude liée au mode de communication de celui qui vient de lui échapper à deux reprises dans la journée. L'employé poursuit son trajet vers l'avant de l'appareil.

Tueur, pas tueur ?

Fatigué, Malone retire son gilet, se lève et l'enfonce dans son sac, quant à son manteau, il le pose dessus, puis se rassoit. Le brouhaha commence à s'estomper petit à petit, pour laisser place à quelque chose de plus acceptable. Fixés au plafond, à distance régulière, des écrans plats diffusent les informations et notamment l'élection présidentielle mardi prochain. Au même moment, un quidam, qu'il estime sec, muni d'un gilet de motard et d'un satané chapeau de cow-boy passe à côté de lui. Il l'a déjà repéré depuis le quai d'embarquement. Le énième potentiel suspect s'installe quatre rangées plus loin, puis une voix féminine attire son attention.

— Bonsoir, monsieur. Désolée de vous importuner, mais ma place se trouve à côté du hublot.

Il la regarde, jolie, grands yeux bleus, pas très grande et avec de beaux cheveux blonds bouclés. Elle coince son ticket entre ses dents, retire son long manteau en fourrure et dévoile une robe noire courte et osée, que ce soit au niveau de la poitrine, arborée d'un magnifique collier avec une amulette, qu'en dessous de la taille, où le tissu ne dépasse pas la mi-cuisse. L'autre espèce de pervers à lunettes ne rate rien de la scène et remonte ses binocles d'un geste de son index. Devant, le crétin enlève enfin son chapeau de cow-boy. Il sent qu'il perd la raison et que tout ceci le consume de l'intérieur.

Tueurs, pas tueurs ?

Face à ce beau spécimen, l'agent fédéral déplie ses un mètre quatre-vingt-dix encore une fois, afin de libérer l'accès. Une fois la trentenaire installée, il se laisse choir dans son siège.

— Encore désolée.

— Vous en faîtes pas, y a pas de mal.

Elle regarde par le hublot et il ne peut s'empêcher, l'espace d'un instant, d'observer avec envie ses belles jambes et sa petite poitrine ferme. Il imagine un probable push-up, ce qui explique une superbe mise en valeur de ses seins dans ce décolleté osé. Frappé par une réalité cruelle, il se rend compte qu'il n'a plus eu de rapports sexuels avec une femme depuis plusieurs années. Il cligne des yeux et tente de reprendre ses esprits. Son regard se détourne de ce tableau plus qu'alléchant pour croiser celui du gars à lunettes rondes. Ce dernier, décide de l'éviter, ce qui satisfait Malone.

Tueur, pas tueur ?

— Pour le travail ou le loisir ? La famille, peut-être ?

Il se retourne et met un certain temps avant de réaliser que sa voisine de voyage lui pose une question.

— Euh, excusez-moi, vous disiez ?

— Pour quelle raison vous rendez-vous à Los Angeles ?

— Oh, le boulot. Et vous ?

Il ne peut s'empêcher de fondre comme une patate chaude à cette voix toute douce.

— Idem, j'vous passe les détails. Vous allez voter pour qui ?

— Hilary. Et vous ?

— Personne, tous des pourris !

Malone acquiesce et un petit bruit, accompagné d'un voyant, indique aux passagers de verrouiller leurs ceintures. L'avion se met à rouler sur le bitume et le pilote se présente par le système de communication avec les formulations de politesses habituelles. Quelques minutes plus tard, l'engin délivre sa puissance et décolle. Par le hublot, Philly, dans ses éclairages nocturnes, expose une certaine beauté. Sur l'écran plat, s'affichent les paramètres de vol, plus de trente mille pieds (dix kilomètres), une température extérieure à moins soixante degrés et la vitesse de vol qui joue avec les six cents miles par heure (mille kilomètres par heure).

L'appareil bien stabilisé, les passagers peuvent défaire leur ceinture. Le steward passe avec son chariot, il en va de même dans l'autre couloir avec une collègue de travail. Le type s'arrête à son niveau et lui sert un verre de whisky.

— Tenez, le protocole m'oblige à commencer par le fond de l'appareil, mais je fais une exception. Il faut bien bichonner un représentant de la loi, ça peut toujours servir, on ne sait jamais, finit-il, avec une intonation proche du murmure.

Malone fait pivoter l'élément en haut du dossier de siège devant lui, ce qui libère ainsi le plateau.

— Oh, euh, vous désirez quelque chose ? demande Malone à la femme.

— Oui, j'opte pour un scotch, monsieur l'agent de police, s'il vous plaît.

— Oh, une puriste !

L'employé dépose le verre sur le plateau de l'agent fédéral.

— J'aime l'orge, bien plus agréable à l'œil qu'un fichu champ de maïs, explique-t-elle, les doigts d'une main sur son amulette.

Les deux autres rigolent.

— Non, mais, votre analyse dénote une certaine vérité, conclut Malone.

— Bien entendu, de plus, mes origines écossaises ne peuvent pas me faire défaut. D'ailleurs, mettez-moi un verre d'eau avec, de manière à déguster ce breuvage avec la reconnaissance qu'il se doit.

Éberlué, Malone lève les sourcils. Une certaine satisfaction l'envahit, car rencontrer une personne avec une bonne dose de culture n'arrive pas tous les jours. D'ailleurs, le liquide limpide ne tarde pas à rejoindre le Scotch.

— Merci.

— Pas de quoi, je repasse tout à l'heure, il me faut un sacré moment pour servir tout le monde. Bon trajet.

Les deux le remercient de sa délicate attention, puis il s'éloigne.

— En fait, je suis agent fédéral.

Elle ajoute un peu d'eau et ils trinquent.

— Hum... FBI, eh ben, et en plus mignon !

Malone rougit un peu au compliment, puis descend la moitié de son verre. Elle préfère boire avec plus de retenue.

— Je ne vois pas d'alliance, célibataire ?

Cette question, il l'entend souvent, surtout lors de ses déplacements pour ses enquêtes. Il connaît ce genre de situation par cœur, un peu de drague, des mots gentils, mais ça ne va jamais plus loin, même pas dans la perspective d'un coup d'un soir. Il n'ose pas, se bloque à chaque fois au moment de passer à l'acte. Il reboit un bon coup, afin de se donner du courage, peut-être que ce soir, il va y arriver ?

— Tout à fait.

Il ment à moitié. Elle semble intéressée. Elles le sont toujours. En règle générale, son statut d'agent fédéral créé une sorte d'attraction. Il ne sait pas pourquoi d'ailleurs, à son avis, son cas se qualifie plutôt de pathétique. Ils trinquent à nouveau et elle rajoute le reste d'eau.

— À la bonne santé !

Elle sourit. Ils boivent. Malone se rend compte qu'il vient de vider son verre. Il regarde en direction du gros pervers à lunettes rondes, le type, menton collé sur son torse, roupille comme un loir. Il perçoit une certaine bave qui s'écoule de sa bouche, une affliction. À l'avant, le cow-boy motard, chantonne avec un casque sur les oreilles. Son cas est désespéré.

— Tenez, j'en reprendrai lorsque le steward repassera.

Sur son plateau, le reste du Scotch. Il hésite. Elle enlève l'élastique autour de son poignet et lève les bras, puis attrape ses cheveux et exécute d'un geste usité un magnifique chignon. Il se délecte de ses courbes féminines et boit presque la totalité de l'alcool. Pour une fois, rien qu'une fois, il doit pouvoir transformer l'essai. Un peu éméché, il tente une approche.

— L'amulette, vous croyez en ce genre de superstition ?

Elle observe l'objet, coincé dans sa poitrine, puis l'extrait et le lui montre.

— Hum... Tout à fait, oui, on se raccroche à ce qu'on peut, je pense.

— Pourquoi pas, après tout, je préfère ce genre de choses que la drogue, par exemple.

Elle semble aux anges et ne le contredit pas, puis replace sa protection bienfaitrice à sa place initiale.

Une bonne heure s'écoule, où les regards se croisent, se cherchent. Ils discutent de futilités, une sorte de jeu de séduction plus ou moins prononcé, puis le steward repasse. Malone n'hésite pas à reprendre la même chose, elle aussi d'ailleurs. Mais cette fois-ci, elle descend son précieux breuvage dans son intégralité. Malone remonte le plateau, les verres vides s'empilent entre les deux sièges, dans un emplacement réservé à cet effet. Les corps chauffent et la notion de la réalité se déforme au fur et à mesure.

Il doit se ressaisir, encore cette petite voix intérieure qui lui interdit l'interdit. Ça le bloque à nouveau. Il voit ce fichu tueur partout, il le hante, même avec un taux d'alcoolémie élevé. Une gangrène. Mais céder, rien qu'une fois, à la tentation de la chair, peut s'avérer comme une victoire face à ce salaud qui pourrit son existence depuis des années.

Elle pose une main sur sa cuisse gauche et s'approche de lui.

— Si vous ne voulez pas aller plus loin, pas de problème, mon taux de progestérone dépasse l'entendement, mais bon, je ne vous force pas.

Dans l'avion, le silence règne en maître. Elle se lève, puis l'enjambe. Ce corps, cette proximité, la présence délibérée de sa poitrine presque nue devant ses yeux, lui provoque un désir de s'accoupler avec elle. Elle finit son action, laisse traîner ses doigts sur ses lèvres. Son cœur va exploser. Puis elle se penche vers lui et expose ses arguments féminins par la même occasion, avec l'amulette qui se dérobe de sa cachette sous l'effet de la gravité. Ses lèvres se collent sur son oreille droite et elle susurre quelques mots.

— Tapez trois fois sur la porte des toilettes et je vous ouvrirai.

Il n'en croit pas ses oreilles, faire ce genre de choses dans un lieu avec aussi peu d'espace et avec un monde pareil lui semble fou. Elle s'éloigne et il regarde ses fesses se dandiner, ses hanches le fascinent, pourquoi pas au final ? Il observe, tant bien que mal, les passagers, personne ne semble voir ce qui risque de se produire.

Il inspire à pleins poumons et essaie de se revigorer, puis décide de tenter cette folie. Qu'il aille au diable, ce tueur de merde, il va le défier et cette fois-ci, il doit gagner.

Il titube presque, sa démarche s'améliore au fur et à mesure qu'il avance vers les sanitaires. Deux toilettes, et les deux sont occupées. Il déglutit, hésite, puis tape trois fois sur celle de droite. Il suffoque presque à ce délire. La porte s'ouvre et le type au chapeau de cow-boy sort.

— Ça va, crétin, tu peux pas attendre ?

Un coup de froid le traverse. Sans savoir quoi répondre, il le laisse s'éloigner. À nouveau, les suspicions refont surface et la libido baisse d'intensité. Son courage s'estompe, la tête tourne, mais l'autre porte s'ouvre. La femme tend son bras et l'agrippe par ses vêtements pour l'entraîner avec elle. À peine fermée à clé, elle l'inonde de baisers dans le cou, jusqu'à atteindre sa bouche. Il ne peut résister. La circulation sanguine explose dans ses veines, il lui retire le haut de sa robe, la soulève pour la poser sur le lavabo métallique et enfonce son visage dans ses seins, les embrasse.

L'excitation monte très vite dans un incroyable silence, d'un érotisme plus qu'improbable. La jouissance s'extériorise sans accrocs, dans un plaisir mutuel. Des caresses s'ensuivent, délicates, attentionnées. Un tel bonheur, il n'en a plus vécu depuis bien trop longtemps. Il le regrette quelque part, vu la sensation de bien-être que cela vient de lui procurer.

Ils se rhabillent, les yeux pétillent, s'embrassent un peu.

— Tu regrettes pas, j'espère ?

— Non, peut-être une fois sobre, mais je ne pense pas, merci.

— J'ai adoré.

Elle ouvre la porte, ils sortent et croisent le steward qui s'immobilise. Il secoue la tête. Malone lui demande une faveur et réitère pour la troisième fois sa commande, il accepte. Elle passe devant, il la suit et n'arrive toujours pas à croire ce qui vient de se produire. Il est heureux, il vient de botter le cul de ce tueur au scorpion et à l'enfer qu'il apporte avec lui. Essai transformé.

Elle prend sa place, il fait de même. L'employé arrive avec deux verres, Malone le remercie. Sans un mot, ils sirotent, se délectent du moment qu'ils viennent de passer. Puis la fatigue s'accapare la part belle, ils baillent, finissent par ingurgiter la dose d'alcool en leur possession. Les paupières s'alourdissent et le sommeil s'installe.

Malone se retrouve secoué par l'épaule. Il ouvre les yeux, puis cligne des paupières et reconnaît le cow-boy qui le réveille.

— On est arrivé, mec !

— Ok, merci.

Il se tient la tête d'une main, en proie à un gros mal de crâne. À côté de lui, la place se retrouve vide. À son grand désarroi, le choix de la blonde à ne pas s'aventurer plus loin avec lui, dans une relation sérieuse, l'attriste un peu. Mais d'un autre côté, sa vie ressemble à un chaos et il en est mieux ainsi, il ne fait que s'autodétruire. Cependant, il réalise qu'un objet se trouve autour de son cou, l'amulette. Il la prend dans sa main et sourit. Au final, les six heures de vol et les trois heures de décalage horaire avec Philly, donnent une arrivée à Los Angeles au beau milieu de la nuit.

Il enlève sa ceinture, se met debout et fait tomber un bout de papier posé sur une cuisse. Il le ramasse et lit.

« Demain soir, hôtel restaurant Le Majestic, huit heures. Je compte bien récupérer mon amulette. »

Le tout suivi d'un cœur. Une sensation de papillons dans le ventre l'embarque. Satisfait, il se munit de ses affaires, puis met son manteau et marche vers la sortie. Dans l'accès, le steward s'allume une cigarette.

La vue de la petite boîte d'allumettes personnalisée avec un scorpion rouge lui fait virer le sang au noir. D'un geste professionnel, Malone exécute une clé de main et tourne l'employé contre la paroi métallique, puis le colle dessus.

— Eh, putain ! Vous êtes taré ou quoi ?

— Explique-toi, comment tu t'es procuré cette boîte d'allumettes ?

— Ça ? s'exclame le suspect.

Le steward contemple l'objet, tombé à ses pieds avec la cigarette.

— Du calme, mec. Moi aussi, j'en ai une, et beaucoup d'autres passagers aussi.

Malone tourne son attention vers la voix. Le pervers à lunettes rondes se tient à deux mètres de lui et pousse ses binocles avec son index. Plusieurs personnes, témoins de la scène, abondent dans son sens.

— Expliquez-vous.

— Des mômes, je sais pas combien, dix, quinze, distribuaient ces boîtes d'allumettes personnalisées en échange de briquets, moyennant une somme de quatre dollars. On a tous accepté, je pense, bon troc !

Dans les gens qui défilent, certains confirment, preuve à l'appui. Vert de rage, il lâche le steward et lève les bras au ciel, puis laisse tomber ses mains dans ses cheveux châtains et serre.

— Désolé, mon gars. Bordel, j'y crois pas, ce connard est à Los Angeles !

Stupéfait de ce constat bien amer et dans la probabilité que ça pourrait être n'importe qui, il décide de courir vers les bagages, afin de récupérer son arme de service grâce à un des contrôleurs assermenté. Il doit trouver Maria Mancini avant le tueur. Le compte à rebours vient de démarrer.

À la sortie de l'aéroport, la femme tend un bras afin d'interpeller un taxi stationné. Le chauffeur lui ouvre la porte arrière. Elle appelle sur son portable.

— Vous êtes arrivée ?

— Exact, la prostituée ne sera plus qu'un mauvais souvenir à la fin de la journée, monsieur.

— Excellent. Pourquoi avoir ordonné le déplacement du container ?

— Sauf votre respect, le crétin de docker fait bourdes sur bourdes. Une captive Chinoise a réussi à s'enfuir et, par chance, mon intervention vient de vous éviter de sérieuses complications. Il va falloir qu'il se mette du plomb dans la cervelle celui-là.

— D'accord. Tenez-moi au courant.

— Sans souci.

Elle range son portable, s'assied dans le véhicule. Le chauffeur ferme la porte et fait le tour. Elle passe sa main dans une poche extérieure de son manteau en fourrure, puis, au toucher, met en marche un petit boîtier. Désormais, le traceur dans l'amulette va la guider droit sur sa cible. Elle sourit de satisfaction.

Tueuse au scorpion.

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