16 In-extremis
Petite note : Jade Mervin est une collègue de l'inspecteur Jones, on la voit à deux reprises dans le chapitre cinq intitulé l'agent Malone.
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Les portières du véhicule de police claquent l'une après l'autre. L'intensité neigeuse réduit la visibilité et handicape Malone dans la perception visuelle de la plaque d'immatriculation du pick-up qui s'éloigne. L'agent du FBI exécute plusieurs pas sur l'asphalte blanc et tente, par défaut professionnel, de déchiffrer l'inscription, bloc-notes en main.
— Merde ! Quelle poisse, j'ai pas tout !
Jade Mervin l'attend sur le trottoir, avec en toile de fond l'enseigne Chez Gigi qui s'affiche en rouge. Il la rejoint, puis marchent vers l'entrée du bar.
— Vous semblez inquiète, madame.
— Tout à fait, Malone. Avec cette lettre, on peut craindre le pire pour cette jeune fille. L'enterrement de Greta et de son fiancé Zack me suffisent pour le reste de cette année.
— Je le conçois volontiers. C'est pour quand ?
— Demain à quatorze heures.
L'Afro-américaine attrape la poignée et pousse la porte. Une odeur d'urine leur pique au nez, tandis qu'ils tapent des pieds sur la bordure cimentée, puis se dirigent vers le comptoir. Le bruit des extracteurs de fumée exerce un raffut permanent, ce qui donne une ambiance particulière à ce lieu, cependant, une flaque au sol, suscitent leur curiosité.
— Bonsoir messieurs dames, j'ai rien fait de mal, précise le barman, muni d'une cuvette d'eau et de gants Mapa rouge.
— Pas de soucis, monsieur, on a juste deux trois questions à vous poser. Je dois admettre que mon gilet manque de discrétion.
— Ben, au moins, on sait à qui on s'adresse.
Il se met à éponger.
— Il s'est passé quoi ici, ça semble récent ?
— Of, un de ces types là-bas, membre d'une bande de ségrégationnistes pure et dure, vient de se faire remettre en place de valeur par un black. Celui-là même qui vient de partir au volant de son pick-up, lorsque vous êtes arrivés.
Puis l'homme, à genoux, passe en mode murmure.
— Et, entre nous soit dit, ça fait du bien.
— Ce black, il fréquente votre établissement de façon régulière ? demande jade, insigne en main.
— Euh, non, plutôt de manière sporadique, m'dame.
— Un truc particulier à ce sujet-là ? insiste-elle.
Dans le même laps de temps, Malone pose le sachet avec le rouge à lèvres sur un tabouret. Le zig se lève et observe l'objet.
— Oui, il rencontre un gars à chaque fois, il doit être muet, car il ne parle jamais.
Les deux flics se regardent, circonspects.
— Ça provient bien de mon établissement, confirme-t-il.
Malone reprend l'objet.
— Merci. Son contact, je pense qu'on peut le qualifier de la sorte, vous pourriez nous le décrire ?
— Facile, de plus, il vient de quitter les lieux il n'y a pas dix minutes de ça. Pas grand, toujours un long manteau gris, une fine moustache...
— Et un chapeau de cowboy ?
Malone termine sa phrase, le barman cligne des yeux, puis acquiesce. Le poing de l'agent FBI cogne sur le bar et le fait trembler.
— Et merde ! Putain de merde, cet enfoiré était là et je l'ai encore loupé de peu !
Malone s'assoit sur un tabouret et passe une main dans ses cheveux humides, à plusieurs reprises. Le flux sanguin vient de doubler de fréquence et la rage monte en lui.
— Si vous voulez, j'vous avertis la prochaine fois que ça se produit ?
Jade lui passe sa carte. Malone tente de se calmer et poursuit avec la raison de sa présence ici.
— Maria Mancini, ça vous évoque quelque chose ?
— Bien sûr, elle fait partie des régulières du secteur. Grande, perruque noire en règle générale et je crois qu'elle possède des cheveux blonds à l'origine. Une prostituée comme il y en a des dizaines par ici, d'origine italienne. Ça semble tout con, mais j'ai fait faire ces rouges à lèvres pour ces pauvres filles et le leur donne lorsqu'elles en ont besoin. Une bien maigre contribution, mais à la mesure de mes moyens financiers. Je changerai pas le monde de toute manière et j'ai arrêté de chercher à comprendre l'intérêt des humains dans celui-ci.
— Bonne initiative, je trouve, envoie Jade.
Malone se lève, moins agacé et surtout démuni face à ce tueur qui lui glisse entre les doigts telle une anguille, à chaque fois, puis s'adresse au gérant.
— Le plus dingue dans tout ça, c'est que personne peut me fournir une photo de cette jeune femme, tu parles d'un système judiciaire pourri ! Merci pour votre aide, monsieur. Allez, on poursuit notre investigation.
L'homme les salue et se remet à sa besogne, tandis que les représentants des forces de l'ordre sortent. Le froid les saisit, accompagné d'une bourrasque. Ils rejoignent le véhicule de Mervin, elle démarre et met le chauffage à fond.
— Et maintenant ?
Les essuie-glaces balayent le pare-brise dans un mouvement rapide et la buée se retrouve chassée de bas en haut grâce à la chaleur émise par la Fiat. Néanmoins, la réponse se fait attendre, Malone sort son arme de poing et vérifie le chargeur, ainsi que le cran de sûreté.
— C'est obsessionnel chez vous, Malone !
Elle le sort de ses pensées, puis, comme pris en flagrant délit, il range son pistolet dans son holster.
— Direction la fameuse boîte de nuit, Le Scorpion Rouge.
Le clignotant apparaît dans son intermittence, puis la voiture s'engage à faible allure sur le tarmac.
— Comment une gamine, qui vit dans un tel luxe, j'veux dire, vous avez vu le palace ? Comment peut-elle envisager de se suicider ?
— Comme quoi, le pognon ne fait pas tout. Et cette pauvre Greta nous montre l'importance primordiale de l'entourage, désolé... Quel manque de tact de ma part.
Jade secoue un peu la tête, puis essuie l'apparition d'une larme.
— C'est rien.
— La famille, à mes yeux, reste la pierre angulaire dans une vie, et lorsqu'on vous la subtilise, de quelconque manière que ce soit, tout s'effondre.
Jade remarque qu'il serre les poings, puis grince des dents. Elle n'ose pas lui demander plus de détails sur son passé qui, au vu de son comportement, semble douloureux. Les souvenirs défilent chez Malone, sa femme, son fils, le sang qui s'écoule de leurs têtes. Il tente de se focaliser sur sa confrontation avec le tueur, quelques heures auparavant.
Son ennemi juré doit pratiquer les arts martiaux, vu le coup de pied circulaire qui l'a mis au sol. Un détail peut-être ? Il tente de se remémorer la scène. L'instant reste bref, vague, il revoit la fin de l'action de départ. Son cœur se libère et ses yeux pétillent un court instant, à cet indice : le tueur est gaucher du pied ! Malone sait que ça peut devenir important, parfois, ça se joue à trois fois rien, une futilité, une babiole de rien du tout, pour démasquer une personne. Un sourire éphémère s'esquisse son visage, mais la réalité le percute à nouveau et efface d'un revers de main ce court instant de satisfaction. Il déglutit et le goût de la défaite maintient son côté amer.
Le véhicule s'engage sur l'Interstate et l'horloge digitale affiche dix-sept heures trente passées, puis son portable sonne.
— Encore elle ?
Il cligne des yeux, acquiesce et répond.
— Madame James, s'il vous plaît, je comprends votre désarroi, mais arrêtez de m'appeler sans bout sans fin.
— Excusez-moi, Monsieur l'Agent... je, je suis désespérée... J'ai toujours pas de nouvelles et mon ex... il ne décroche pas...
Elle éclate en sanglots. Malone, embarrassé, tente de la calmer.
— Restez focalisée et rappelez-vous les questions qu'on vous a posées. On a rien trouvé en termes de produits illicites dans la chambre, mais ça ne veut rien dire. Vous êtes bien sûre qu'elle ne se drogue pas ?
— J'en sais plus rien. Ses amis d'école ne m'ont rien dit de tel... Elle... cependant, elle semblait... distante.
— Pas de retour de l'opérateur téléphonique pour ma part, mais il va pouvoir me donner un secteur depuis lequel son signal a émis la dernière fois. Ça donnera un début de piste.
— D'accord... Tenez-moi au courant si vous avez du nouveau... Merci.
— Sans souci.
Malone range son portable.
— Pourquoi il ne me donne pas de nouvelles d'ailleurs, cet opérateur ? En règle générale, je devrais être en possession de ce genre d'information, depuis le temps. Bizarre.
l'Interstate, malgré le déluge neigeux, se trouve bien praticable de par le travail des chasse-neiges.
— Ce Henry James, il... Je ne me l'explique pas encore, mais il émane une sorte de mauvaise aura de ce type. Il ne m'inspire pas confiance.
— En-tout-cas, il ne se laisse pas déstabiliser par la présence de forces de l'ordre chez lui. Mais bon, ce genre de gars, à la tête d'une fortune colossale, ça ne flanche pas à la moindre brise de traviole. Ce qui m'inquiète le plus, au moment où nous parlons, c'est bien le fait de n'avoir aucune nouvelle de ce Harry Bosco et de Maria Mancini.
— Vous trouverez Bosco au siège de l'entreprise Hermanz.Co.
— Pas sûr. Leurs têtes sont mises à prix et je reste convaincu qu'un autre tueur va tenter de les liquider.
— Possible. Cependant, ce Bosco semble pouvoir se sortir de situations délicates. Réussir la prouesse d'évincer un professionnel du genre de cette manière, qui plus est avec une vieille Dodge, chapeau.
— Sauf que maintenant, ils ont un plus gros poisson à leurs trousses.
Les regards s'ancrent.
— Sérieux ? Vous pensez réellement que le tueur au scorpion a jeté son dévolu sur eux ?
Malone acquiesce.
— Dites, vous voulez pas vous poser un peu ? Parce qu'à ce rythme-là, vous n'allez pas tenir des lustres.
— Ça ira. Il me faut ce tueur et la course contre la montre est engagée, finit-il en bâillant.
— Essayez de dormir un peu, Malone. On est pas rendu.
Il décide de s'octroyer un moment de récupération et ferme les yeux. Bien plus tard, la Fiat sort de l'Interstate et s'enfonce dans Camden. À dix-neuf heures quarante, le véhicule se gare sur le parking privé de la boîte de nuit Le Scorpion Rouge. L'instant d'après, le duo se présente à l'entrée, un videur Afro-américain les réceptionne et ils montrent leurs insignes.
— Maria Mancini, ça évoque quelque chose chez vous ?
— Bien entendu m'sieur l'agent. Elle fréquente régulièrement cet établissement. D'ailleurs, elle était ici et pas plus tard qu'hier soir.
— Sérieux ? Vers quelle heure ?
— Pfff, je vois tellement de monde, je dirais aux alentours des vingt et une heures.
— Seule ? rajoute Jade.
— Jamais, et là un type, barbu, pas super grand, la quarantaine, l'accompagnait, son client du soir, je suppose.
— Bosco. Très bien, on peut voir le barman ?
— Oui, il est là et prépare pour cette nuit.
— Merci.
Le surveillant ouvre la porte d'accès et ils entrent, puis se retrouvent sur la piste de danse. Les boules à facettes tournent et la chanson The bitter end de Placébo percute d'un coup les ouïes. Jade accuse l'instant et s'immobilise, puis positionne ses mains sur ses oreilles, tandis que Malone finit d'arriver jusqu'au comptoir, badge FBI en main.
— Nous savons qu'une certaine Maria Mancini, se trouvait ici hier soir.
— Vrai. J'ai eu une discussion passionnante avec son client d'ailleurs.
Jade les rejoint, toujours perturbée par le volume sonore.
— À quel sujet ?
— À propos de vis à bois de meubles anciens.
Malone relève les sourcils, tandis que le barman écrit Camden's Paradise sur un bout de papier arraché de son calepin qui fait office d'inventaire des stocks d'alcool.
— Je pense avec certitude qu'il crèche là. En-tout-cas, ils en parlaient avec Maria. Il y a un type qui y habite, dans un des mobile-homes pourris, je vous ai rajouté le numéro, et le barbu voulait lui parler.
— Excellent.
Le portable de Malone sonne, intrigué par un appel aussi tardif, il décroche.
— Allô.
— Agent fédéral Malone ?
— Exact.
— Une collègue m'a demandé de vous signaler un appel inconnu suspect, mentionnant votre nom.
— À quel sujet ? demande t-il alors que sa montre affiche vingt heures.
— De la part du Scorpion Rouge...
L'évocation de ce nom lui hérisse le poil.
— La personne affirme qu'une certaine Emmy Bosco se trouve dans le secteur de la zone industrielle du port de Philly, visiblement en mauvaise posture.
— Je m'y rends de suite. Envoyez des patrouilles afin de ratisser le secteur au plus vite.
— Deux voitures s'y rendent déjà.
— Bon boulot.
Il raccroche et se met à courir, Jade écarte les bras puis l'imite. Elle le rejoint devant sa voiture.
— Quel est le problème ?
— Emmy Bosco, direction la zone industrielle de Philly, on est pas très loin.
En un rien de temps, ils se retrouvent dans la Fiat, qui démarre en trombe, gyrophare allumé. Les épais flocons ne dépaississent pas, ce qui n'empêche pas Jade d'appuyer sur l'accélérateur. Dans la foulée, Malone appelle une ambulance afin d'intervenir dans les plus brefs délais. L'agent fédéral ressort son pistolet et vérifie à nouveau le magasin et le cran de sûreté. La tension monte à chaque minute qui s'écoule.
— Salaud ! En attendant, ça fait un second indice important sur le tueur au scorpion.
Interloquée, l'Afro-américaine fronce les sourcils, dans l'espoir d'une argumentation plus précise.
— Il s'est présenté comme le Scorpion Rouge, puis a demandé de me transférer le message. Il connaît Emmy Bosco, car elle est mentionnée dans son appel.
— C'est tordu, bon sang ! Pourquoi faire ce genre de choses ?
Malone regarde son arme, ses pensées divaguent un instant, mais sa réponse ne tarde pas.
— Il s'amuse. Ce type adore ce genre de petit jeu avec ses futures victimes, les torturer à petit feu, s'approcher sournoisement, mais il ne me bernera pas, je vais le coincer.
— J'veux pas dire, Malone, mais faut avouer qu'il réussit son coup à chaque fois. Nous ne faisons que ramasser les miettes qu'il veut bien nous laisser.
Le véhicule file sur le tarmac, les réverbères défilent et à chaque fois, leurs ombres passent et repassent dans la luminosité délivrée par l'éclairage public. L'angoisse monte lorsqu'ils s'engagent sur le Benjamin Franklin Bridge, Malone souffle comme un taureau en cage, tandis que Jade exécute un désagréable mouvement des phalanges sur le volant. Puis le véhicule prend la direction du port vers le nord. Mervin ralentit la cadence bien trop élevée, car elle sent que la Fiat chasse à l'arrière. Le regard de Malone la juge mal et ça l'agace.
— Quoi ? Je fais de mon mieux, on va finir dans la Delaware à ce rythme-là et on aura rien gagné !
— Ok, ok, je m'excuse, je suis à cran.
Elle soupire. L'instant d'après, les gyrophares de la première voiture de police, renforcé par les pleins phares, leur permettent de visualiser les deux agents qui marchent dans la rue. Mervin poursuit jusqu'à l'intersection suivante, tandis que derrière eux, apparaît la seconde patrouille.
— On y va ! Arrêtez-vous !
La Fiat se gare sur un trottoir.
— Il va bien finir par commettre une erreur fatale, ils le font tous tôt ou tard.
Sur cette affirmation, qui reste toutefois peu convaincante à ses yeux, Malone s'extirpe hors de l'habitacle. Leurs collègues s'arrêtent à leur hauteur et la vitre descend.
— On prend la route suivante, m'sieur l'agent fédéral.
— Non, celle d'après, faut se diviser.
— Mais, la procédure nous oblige à rester en binôme, à...
— Bougez vos culs, maintenant !
Le véhicule repart dans la foulée après ce coup de gueule de Malone.
— Je prends la rue d'après, précise Jade.
Elle s'exaspère face à cette recherche qui peut s'avérer très fastidieuse, surtout par un temps aussi exécrable. Le verrouillage centralisé s'opère, tandis que Malone rejoint le trottoir.
— Hâtons-nous.
Sur ces mots, il disparaît et elle se dirige vers la rue suivante. Un panneau indique une voie sans issue. Elle s'y engage.
Malone, les mains en position autour de la crosse, court et ratisse les lieux, il sait que le temps joue en sa défaveur. Les expirations condensent, tandis que la neige s'agglutine. Il passe, à plusieurs reprises, sa main gauche sur son visage, afin de garder un regard le plus correct possible dans cette ambiance de fin du monde. Au loin, l'ambulance indique sa présence vers la Fiat, avec ses éclairages intermittents bleus et ses gyrophares rouges.
Des cartons entre deux containers à ordures. Une personne, un SDF, ou pas ? Il s'approche et secoue l'individu, qui maugrée, une bouteille d'alcool à la main.
— Excusez-moi de vous déranger, vous n'avez rien remarqué d'anormal ? Une jeune femme blonde. C'est vital.
L'énergumène, enveloppé dans d'épaisses couches de vêtements, tend un bras et pointe de l'index un endroit un peu plus éloigné, puis laisse tomber son membre. L'électrochoc fait bondir Malone, qui fonce à la course plus loin dans la rue, fustigeant un merci. Il exécute de grands signes et l'ambulance s'engage dans sa direction, les phares n'améliorent qu'un peu la visibilité. À nouveau deux containers à ordures et un corps adossé contre l'un d'eux.
Malone range son arme et finit à genoux, puis enlève l'épaisse couche de neige sur l'individu. Il doit la sauver, d'autres parents ne doivent pas subir ce qu'il a vécu lui. Des cheveux blonds, pas de doute possible. Un pouls, faible. Du sang qui sort des voies respiratoires. La civière arrive déjà et il s'écarte afin de laisser la place aux ambulanciers. Après une rapide inspection, l'urgentiste autorise de déplacer avec douceur le corps de la jeune femme. Emmy se retrouve allongée et embarquée dans le véhicule, qui ne tarde pas à prendre la route. Le logo à l'arrière indique l'hôpital, alors que Jade le rejoint.
— Sacré coup de bol !
— Tout à fait, c'est un, qui...
Son souffle rapide se coupe net, puis son sang se fige et la chair de poule envahit son être.
— C'est pas possible ! Dites-moi que c'est pas vrai, mon Dieu, non !
Jade écarte les bras lorsqu'elle le voit repartir à la course.
— Une explication, ça...
Elle secoue la tête et décide de le suivre. Il arrive à l'emplacement où seuls les cartons attestent de la présence du sans-abri. Son cœur va exploser. Il les soulève avec vigueur. Sur le tapis blanc tombe une boîte d'allumettes personnalisée avec un scorpion rouge. Il tombe à genoux et son visage se défigure lorsqu'il attrape l'objet dans une main, puis la chair de poule l'envahit. La bile remonte illico et il vomit ses tripes.
— M'enfin ? Qu'est-ce qu'il y a, Malone ? demande-t-elle, le souffle court.
Il reprend sa respiration, s'essuie la tête et la regarde, front plissé. La colère, la frustration, tout se mélange dans ses pensées et se transforme en un besoin d'expression physique. D'un bond, Malone se retrouve debout et attrape un container à ordures, puis l'envoie valdinguer au sol en le tirant vers lui. Jade recule, désemparée face à son cri de rage et les détritus qui se déversent par terre.
Malone fait des va-et-vient sur le trottoir, les deux mains arrachent presque ses cheveux. Les bras ballants, Jade attend qu'il se calme afin d'avoir une explication.
— Il était là, cet enfoiré de mes deux était là et je me suis fait avoir comme un con !
La consternation percute Mervin et son regard hagard tente en vain de trouver l'individu.
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