Lettre 2



Mon amour,

Suis-je folle ? Je ne sais pas, mais c'est probable. Revoir ton visage chaque instant et rêver ton retour. La souffrance que j'endurais et la tristesse qui me terrassait ne pouvaient pas être supportables. Tout cela devait prouver ma démence, et je ne cherchais pas à y échapper. Peut-être que je souffrirais moins si je laissais la folie me consumer, peut-être qu'elle me permettrait d'oublier ...

Regarde-moi Danaël, regarde ce monde, celui que j'ai contribué à créer. Ces lieux vides, d'une laideur sans nom, en suis-je responsable ? Les couleurs se ressemblent, n'ont aucunes singularités. Où est la beauté ? Celle qu'autrefois je pouvais lire partout, dans la chose la plus insignifiante. Elle est morte en même temps que toi. A l'instant où la lumière dans tes yeux s'est éteinte, j'ai su que toute était fini pour moi. Pour les couleurs qui chatoyaient partout, pour les sons, pour les saveurs. Il n'y a plus rien de tout ça maintenant. Tu les as emmenés avec toi, dans ce monde que je ne connais pas. Ce monde que personne ne nomme, comme un secret, celui que tu me chuchotes à l'oreille. Ce beau monde !

Je m'en veux autant que je t'en veux. Peut-être que j'aurais mieux fait de ne pas suivre les conseils de cette femme, n'écouter que ta voix. Au péril de tout Alysia, de toutes ces vies innocentes, les laisser aux mercis de ce dieu. Juste pour voir un instant de plus ton sourire, ton visage, admirer ta beauté pour ne jamais l'oublier. Mais j'ai fait taire cette envie, ce besoin, ma volonté aussi forte soit-elle et je t'ai tué. Si tu savais comme je m'en veux ! Je ne me répète inlassablement que c'était le bon choix, la bonne décision, que j'ai fait ce qu'il fallait, mais je ne convins personne, surtout pas moi !

Je t'en veux parce que tu m'as laissé seule. Parce que maintenant, plus rien ne me retient ici. Lorsque la douleur se fait trop forte, trop insupportable, je t'en veux, oui. Ma haine se porte contre tout, contre ces dieux qui ont détruits nos vies, contre mes amis, contre moi, contre toi. Contre le monde entier !

Je suis tellement seule. Tout s'est écroulé autour de moi, comme un château de cartes emporté par le vent. Et je suis seule dans cette prison de glace, un enfer qui n'existait que pour moi. Une douleur que l'imaginaire rendait toujours plus lancinante, plus réelle.

Suis-je folle ?

Avec tout mon amour,

Jadina.


Et la deuxième lettre de cette série qui comptera, je le rappelle, dix lettres dont une adressée aux Légendaires. Jadina a d'énormes remords quant à la mort de Danaël. Quant à la folie ... J'aime bien cette facette d'elle, je la trouve intéressante à développer (comme celle de Samaël, en fait). En espérant que tout ça vous plait toujours, n'hésitez pas à me soutenir :3

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