Vendredi : C'est Mon Kwami

Plagg était une vraie bénédiction dans la vie d'Adrien. Il avait beau donner l'impression que son kwami ne faisait que l'ennuyer avec ses plaintes et son appétit insatiable, reste que le petit chat était apparu au moment où le jeune homme était le plus solitaire. Orphelin de mère, sous le joug d'un père qui lui imposait multiples obligations et l'empêchait pratiquement de sortir, le modèle avait été plus qu'heureux d'accueillir dans sa vie, ce petit être qui le suivrait partout où il allait.

Nino était un ami incomparable, mais Plagg était une présence constante. Personne d'autre ne connaissait Adrien autant que lui. Depuis plus d'un an, il avait été à chaque seconde de son existence vivant avec lui les joies et les déceptions, découvrant les multiples facettes du jeune homme, que ce soit le masque du bon modèle ou celui du Chat Noir. Lorsque l'adolescent vivait des moments durs, il ne trouvait pas toujours les mots justes comme l'aurait fait Tikki, mais il venait tout de même poser sa petite patte sur son épaule pour lui assurer qu'il était là. Il avait beau adopter le style sarcastique et moqueur avec son protégé, il l'aimait de tout son petit cœur et il aurait fait n'importe quoi pour lui. Et c'était réciproque.

Malgré les remarques souvent acerbes de son kwami, Adrien n'hésitait jamais à lui demander conseil ou à discuter de sujets sensibles avec lui. Parfois, il arrivait que les commentaires de Plagg était réellement pertinents et le jeune homme percevait alors la sagesse d'un être qui avait vécu plus de 5000 ans. Un jour de pluie particulièrement ennuyeux, ils avaient discuté du passé du petit dieu. Plagg avait vécu des milliers d'aventures, connu des dizaines de chat noir et ses propos était teintés de l'affection qu'il avait pour sa moitié : Tikki. Le jeune homme savait, qu'un jour, il connaîtrait l'identité de Ladybug et cette journée-là, son kwami retrouverait enfin sa coccinelle. Il épouserait Ladybug et tous ensemble, ils formeraient une famille. La vie parfaite.

Parce qu'il savait maintenant que son kwami lui avait été confié pour toute sa vie. En discutant avec le grand gardien, il avait appris que les Miraculous du chat et de la coccinelle leur étaient liés jusqu'à la mort. C'était un contrat qui convenait totalement à Adrien, un allié pour la vie : fini la solitude.

Un an et demi après avoir fait la connaissance de Plagg, un autre évènement majeur vint rompre la solitude, désormais beaucoup moins pesante, du jeune homme. À la suite d'un combat particulièrement ardue, la coccinelle avait manqué de temps pour fuir avant que le dernier avertissement de ses boucles d'oreille ne retontissent. Heureusement, il n'y avait que son partenaire dans les parages. Comme Chat Noir avait croisé Marinette quelques fois déjà, elle ne fut pas surprise d'entendre son nom sortir de ses lèvres. Elle resta cependant sans voix lorsque la joie fit faire quelque chose d'inattendu de la part du félin. Il la prit dans ses bras, la serra plus fort qu'attendu au regard de la relation plutôt élémentaire qu'ils entretenaient. Lorsqu'il lui souffla, « Je suis tellement content que ce soit toi. », elle eut des doutes.

« Chat? »

Sans se décoller le félin lui répondit. « Hmmmm! »

« On se connaît dans la vraie vie. »

Il hocha la tête dans son cou.

« Beaucoup ? »

Il se décolla et la regarda dans les yeux. « Très bien. Détransformation. »

Il avait passé près d'une heure à tenter de calmer Marinette suite à la révélation. Il ne s'attendait pas à lui faire un tel choc. De surprenantes révélations s'en étaient suivies et l'adolescent se disait alors qu'il ne pouvait pas être plus heureux. De bonheur, Plagg s'était rué dans les bras de Tikki et alors que les adolescents se remémoraient ces fois où ils auraient dû s'en douter, les kwamis rattrapaient le temps perdu.

Ce soir-là, les deux héros s'étaient mis d'accord pour prendre leur temps afin de ne pas éveiller les soupçons. Mais après près d'un mois à passer chaque jour un peu plus de temps ensemble et à discuter de plus en plus aisément, tout le collège savait que Adrien Agreste avait jeté son dévolu sur Marinette Dupain-Cheng.

Il n'avait pas été facile de faire accepter cette relation par son père, mais jugeant que la future styliste était une jeune fille bien, Gabriel avait fini par donner son accord et elle avait maintenant le droit de le visiter, tout comme il pouvait, à l'occasion, aller passer un moment chez elle. Cela permettait aussi aux deux kwamis d'avoir une vie sociale un peu plus trépidante. Au lieu de former deux duos solitaires, il était maintenant un quatuor avec tout le bonheur et les désagréments que cela apportait.

Ce n'est pas qu'Adrien n'appréciait pas que Plagg puisse discuter avec d'autres personne que lui, c'est juste qu'il lui semblait que le kwami agissait de façon bien plus agréable avec Tikki et Marinette qu'avec lui-même. Ce que le jeune homme ignorait, c'était que le seul être vivant pouvant avoir une quelconque influence positive sur le dieu-chat était la petite coccinelle qui servait de compagne à Ladybug. Quand Tikki était dans les parages, Plagg soignait ses manières. Il était moins incisif, moins sarcastique et beaucoup plus sympathique. Mais de retour au manoir, le naturel revenait au galop, pire encore, il semblait que le kwami se faisait un point d'honneur de rattraper le temps perdu. Il était, si c'était possible, encore plus geignard, plus acerbe, plus affamé. Deux seules choses ne l'intéressaient : dormir et manger.

Fini les discussions si désagréables furent-elles, fini les confidences. Aussitôt passé la porte, le kwami s'éclipsait dans son coin pour dormir. Pour le petit chat, il semblait qu'Adrien n'était plus rien d'autre qu'un accessoire en cas d'attaque et cela affectait de plus en plus le caractère du modèle.

Lentement, son comportement avec sa copine en fût affecté. Les premières fois, Marinette se dit qu'il était épuisé. Après tout, il avait un horaire extrêmement chargé en plus des attaques d'Akuma et de leur relation nouvelle. Mais tranquillement, elle se mit à douter de cette théorie. Lorsqu'elle était seule avec lui, il était totalement charmant, très affectueux, toujours blagueur, et un compliment n'attendait pas l'autre. Mais lorsque les kwamis se joignaient à eux, il devenait boudeur et sarcastique.

Il faut dire que plus le temps passait, plus Plagg semblait s'attacher à Marinette. Elle-même trouvait le petit chat extrêmement mignon, passait son temps à le gâter et à le câliner. Il répondait à ses attentions en plaisantant avec elle, en lui parlant mielleusement et la complimentant sans cesse. Plus ça allait, non seulement Adrien trouvait que l'affection de son kwami avait été volé par sa copine mais il commençait aussi à trouver que Marinette accordait beaucoup trop d'attention à son kwami et même si Tikki était toujours très gentille avec lui, il voyait bien que son attachement pour Marinette était pratiquement sans borne. Comment faire autrement avec une fille aussi extraordinaire ?

Un soir où le jeune homme fût particulièrement morose, Marinette s'inquiéta et interrogea sa kwami dès qu'il fut parti avec Plagg.

« Tikki, est-ce que tu sais si Plagg et Adrien se sont querellés ? »

« Je ne crois pas, Plagg ne m'a rien dit. Pourquoi ? »

« Tu n'as pas remarqué qu'Adrien est plutôt, disons, désagréable ces temps-ci ? »

« Oh... euh... j'avais remarqué oui mais tu m'as dit que tout allait pour le mieux entre vous deux alors... »

« Oh c'est que lorsque nous sommes seuls, il agit normalement. C'est lorsque vous êtes dans les parages qu'il change d'attitude. »

« Tu crois qu'il aimerait que Plagg et moi on soit plus discrets, je veux dire qu'on vous laisse plus seul à seul. »

« Peut-être que c'est ça Tikki, tu as raison. »

« Je vais tout de même m'informer auprès de Plagg. »

« Merci parce que ça m'inquiète vraiment beaucoup. »

Quand ils se rencontrèrent la fois suivante, les kwamis s'éclipsèrent rapidement. Adrien le prit un peu personnel parce que Plagg avait été particulièrement absent la veille et le matin même. C'était clair, la seule personne qui comptait vraiment dans sa vie, c'était Tikki... et peut-être Marinette. Lui n'était définitivement pas dans son top 3...

Cette fois-ci Marinette fût encore plus inquiète car sa mauvaise humeur se répercutait même dans ce moment où ils étaient seuls. Il passait son temps à jeter des coups d'œil amer vers le coin où était disparu les kwamis. Marinette se dit que, malgré la mission confiée à Tikki, elle devait définitivement avoir un tête-à-tête avec Plagg parce qu'Adrien, lui, répondait inlassablement que tout allait à merveille.

Blottie dans leur petit coin avec Plagg, Tikki lui posait mille et une questions, le poussant presqu'à l'exaspération.

« Tu es certain Plagg que tout va bien entre vous deux ? »

« Je ne vois pas de raison pour qu'il y ait un problème. Le gamin est aussi ennuyeux que d'habitude, aussi amoureux que d'habitude, aussi désespérément romantique que d'habitude. »

« Il ne t'a rien dit ? »

« Honnêtement Tikki, je suis habitué à dormir toute la journée et depuis qu'il est avec Marinette, c'est fini les siestes alors dès que je peux aller me reposer... ça donne plus beaucoup de temps pour les conversations. »

« Marinette est vraiment inquiète pour lui Plagg. Il faudrait vraiment que tu lui parles pour savoir ce qu'il a. »

Plagg fit un grand soupir. « D'accord. »

« Oh Plagg, ne joue pas à ça avec moi. Je sais très bien combien il compte pour toi. Ça ne t'inquiète pas de le voir ainsi ? »

« Je n'avais pas remarqué. »

« Mais maintenant que tu le sais ? »

Le kwami noir tenta de faire comme si de rien n'était mais il ne réussit pas à résister au regard suppliant de sa moitié. « Bon d'accord, tu as gagné. Oui je vais lui parler. »

Elle lui fit un baiser sonore sur la joue.

« Après tout, c'est vrai que je l'aime bien ce gamin. »

Tikki fit un soupir d'exaspération. Elle connaissait bien son compagnon et elle savait pertinemment qu'il faisait plus que bien aimer son choisi. Elle reconnaissait tout de suite quand Plagg avait une relation privilégiée avec un de ses compagnons et Adrien était un des rares élus dans le cœur du dieu-chat. Maintenant qu'elle avait ouvert les yeux de Plagg, elle savait qu'il prendrait bien soin de lui.

Avant que les garçons ne partent, Marinette intercepta le kwami, ce qui ne passa pas inaperçu vis-à-vis le garçon qui les regardait d'un œil mauvais.

« Plagg, je sais que Tikki t'as sûrement demandé, mais qu'est-ce qu'il a Adrien ? » Elle avait agrémenté sa question d'un grattage derrière l'oreille, il ne pouvait décidément pas résister à cette fille. Il ronronna légèrement en répondant à la demoiselle.

Dans son coin, le garçon rageait en remarquant l'affection qui circulait entre les deux.

« Comme je l'ai dit à Tikki, je n'ai aucune idée de ce qu'il a. Pour moi, il a la même tête que d'habitude. Mais je vais lui parler. »

« Merci Plagg, tu es un amour comme toujours. » Elle lui fit un bref bisou sur la tête. D'où il était, Adrien n'en manqua rien.

« Plagg, allez, on a pas toute la journée. »

Le kwami alla docilement se loger dans la poche de veste du modèle et avec un dernier baiser à Marinette, il quitta.

Aussitôt arrivé dans le confort de la chambre d'Adrien, Plagg sortit de sa poche et l'interrogea avec sa délicatesse légendaire.

« Alors gamin, c'est quoi ton problème ? »

« De quoi tu parles Plagg ? »

« De cette tête que tu me fais. Je veux dire, tu as toujours été un peu mélodramatique mais maintenant que tu as ta Lady, je croyais que ce serait le bonheur. »

« Ouais ouais Plagg, le bonheur parfait. »

Il s'assit sur son divan d'un geste brusque et empoigna une manette de jeux vidéo, s'attendant à ce que son kwami s'éclipse comme à son habitude. Lorsqu'il tourna la tête pour s'assurer qu'il était bien seul, il sursauta en voyant que Plagg flottait toujours à ses côtés en le regardant.

« Quoi ? »

« J'attends. »

« Qu'est-ce que tu attends ? »

« Que tu me racontes c'est quoi le problème ? »

« Pourquoi est-ce qu'Il y aurait un problème ? »

« À toi de me le dire. Marinette et Tikki m'ont dit que tu n'avais pas le moral alors. »

« Évidemment. » Il quitta pour la salle de bain et ferma violemment la porte. Plagg traversa sans hésiter.

« Qu'est-ce que ça veut dire exactement ? »

« Rien Plagg, tu peux aller dormir. »

« Tu crois que je vais réussir à dormir. »

« Pourquoi tu ne dormirais pas ? Tu n'as jamais eu de problème de ce côté. »

« Parce que tu m'inquiètes gamin. »

« Et alors, qu'est-ce que ça change ? »

« Ça change tout. Je n'aime pas te voir comme ça. »

« Tu n'aimes surtout pas que les filles s'inquiètent comme ça. »

Plagg n'avait jamais été perspicace avec les sentiments humains. Il aurait réellement voulu que Tikki soit là pour traduire.

« Je ne te suis pas. »

« Les filles s'inquiètent, alors tu t'inquiètes. Il ne faudrait sûrement pas que leur petite vie soit affectée par moi. »

« Tu peux me parler en langage que je comprends s'il te plaît ? »

« Les filles, elles sont inquiètes de mon attitude ? »

« Oui et alors ? »

« Et toi Plagg. Tu t'en fous n'est-ce pas ? Tu ne t'en ai jamais vraiment fait avec mes états d'âmes. »

« C'est là que tu te trompes. J'avoue que les sorties chez Marinette m'épuisent beaucoup et que je n'ai peut-être pas remarqué ton humeur parce que je dormais. Mais là je suis bien réveillé et j'aimerais vraiment savoir ce que tu as parce que tu sais gamin, je veux juste t'aider. »

« M'aider ? »

« Oui t'aider, te supporter, être là pour toi. C'est ce que font les amis non ? »

« Amis ? Tu considères que nous sommes des amis. »

« En fait gamin, la relation entre un kwami et son héros est trop spéciale, trop puissante pour qu'aucun mot humain ne puisse les qualifier. Mais à défaut de trouver un meilleur terme, et surtout parce que disons, que tu es un peu plus... disons... attachant que les autres, je qualifierais notre relation d'amitié... BFF que vous dites je crois. »

Adrien n'en croyait pas ses oreilles. Alors les sorties chez Marinette l'épuisaient à ce point. Il faut dire qu'il avait l'habitude de dormir dans sa poche toute la journée et que c'était maintenant plus rare que cela était possible. Il frotta vigoureusement la tête de son kwami.

« C'est les filles qui disent ça Plagg. Nous on doit dire : meilleur pote. »

Il tendit son poing au kwami qui répondit à son geste en le frappant du sien.

« Mais, tu as raison Plagg, peut-être que de passer autant de temps avec Marinette m'épuise un peu moi aussi. On pourrait prendre la journée de demain que pour nous deux, une journée entre garçon à juste ne rien faire.

Plagg fut soulagé d'entendre qu'ils étaient sur la même longueur d'onde. Une journée à ne rien faire, voilà ce qui était alléchant.

« Une journée ici... une vraie journée juste nous deux ? »

« Ouep, avec tout plein de camembert. »

Une larme de joie perla au coin de l'œil du petit chat. « Gamin, tu sais comment m'avoir par les sentiments. »

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