Devoir n°2


Ne te déconcentre pas.

Ais l'air naturelle. Pas de sourire forcé.

Avance lentement, et avec grâce. Ne sois pas molle non plus. Le juste milieu Auriane, trouve le juste milieu.

Lève un peu la tête quand tu regardes la façade, pour capter la lumière. On ne sait jamais quand tu peux être photographiée.

Et le voilà finalement.

Le Palais.

Sans me précipiter, j'attends que la plupart des Sélectionnées soient sorties de la limousine, pour mettre à mon tour pied à terre avec toute l'élégance dont je suis capable.

De grands murs en stuc jaune me font face, tandis que je me tiens sur une allée bordée de pelouse verdoyante.

J'affiche une mine émerveillée. Bien évidemment, un tel luxe ne m'impressionne plus depuis longtemps ; les maisons de Deux pouvant rivaliser sont légion.

Néanmoins, ce n'est pas le moment de snober le château.

A présent, plus que jamais, je n'ai plus droit à l'erreur.

Souris.

Tiens-toi droite.

Une mine réjouie au visage, j'atteins l'entrée, où se trouvent déjà la plupart des autres Sélectionnées.

Devant la porte se tient une belle femme, à l'élégance soulignée par un carré blond parfaitement lissé : Maya Deaggle, notre gouvernante.

Elle nous souhaite la bienvenue, nous faisant comprendre implicitement que le timing est serré.

Sans perdre de temps, elle nous conduit toutes dans une pièce du rez-de-chaussée, puis nous attribue à chacune un « box ». Une cabine où nous allons nous faire relooker.

Sous son ordre, je me dirige docilement vers le box 9, où m'attend déjà une jeune femme brune, très souriante. D'un geste, elle m'invite à prendre place devant le miroir, où elle commence à étudier attentivement mon visage et mes cheveux.

-Les autres membres de l'équipe sont partis chercher quelques produits à droite à gauche, ils ne vont pas tarder. Pendant ce temps, et si vous me disiez ce que vous voudriez qu'on fasse avec le maquillage et la coiffure ?

N'ais pas l'air prétentieuse.

Je me compose aussitôt un sourire gêné et baisse modestement les yeux.

-Oh, je ne sais pas vraiment à vrai dire... Je m'en remets entièrement à vous.

-Ça marche ! Nous allons vous rendre encore plus magnifique.

Je relève un peu les yeux, et elle me fait un clin d'oeil complice.

Deux autres personnes arrivent les bras chargés de flacons.

Concentrés, ils ne disent plus rien tandis qu'ils me passent un gommage et me démaquillent. Voilà qui m'arrange ; je vais pouvoir faire le point de la matinée et me préparer pour le reste de la journée.

Je ferme alors les yeux, adoptant une expression décontractée.

Avant de partir, j'ai pu lire de nombreux articles sur les différentes Sélectionnées, et ainsi disposer d'une mine d'informations.

Caractère, famille, activités... J'ai pris note de tout ce qui pourrait m'être utile.

J'en ai également profité pour regarder ce que les journalistes disaient de moi. En résumé : « Auriane Autkins est une jeune fille un peu réservée, humble et assez mature pour son âge. Mais c'est avant tout une demoiselle très humaine, bienveillante et toujours souriante, avec en prime un brin d'innocence touchant. »

Ce sont en tout cas les traits qui revenaient le plus souvent. Une description plutôt élogieuse. Et qui avait l'air de beaucoup plaire au peuple, de surcroît.

Si c'est ce que les gens veulent, c'est que les gens auront.

Je me suis donc efforcée de coller à ce portrait avec les différentes personnes que j'ai pu voir aujourd'hui : lors des bains de foule, où j'ai signé des dizaines et des dizaines d'autographes et pris autant de photos ; lorsque j'étais dans l'avion avec les autres Sélectionnées ; à présent avec l'équipe de relooking...

Ça a eu l'air de fonctionner. Il faut que je continue ainsi. Si je joue bien mes cartes, je pourrais devenir populaire auprès de tout le monde relativement rapidement.

Heureusement, le caractère que l'on me prête dans les journaux n'est pas très éloigné de celui que je montre en règle générale.

C'est un masque que j'ai l'habitude de porter.

Après le gommage, ils m'appliquent de la crème. Une odeur fruitée vient chatouiller mes narines.

Pour la suite, j'ai simplement à faire comme d'habitude. Sourire. Etre agréable. M'adapter.

Une fois la crème appliquée, ils se répartissent le travail : un à la coiffure, une au maquillage, et une autre à la manucure. La même femme que tout à l'heure me sourit d'un air rassurant avant de me tourner vers elle afin qu'elle et ses collègues puissent travailler sans se gêner.

Ils n'échangent que très brièvement entre eux pendant qu'ils s'occupent de moi, aussi je n'ai qu'une idée très vague de ce que va être le rendu final.

Finalement, une demi-heure plus tard, ils me retournent face au miroir.

A présent, un trait de crayon et du mascara mettent mes yeux en valeur, et mes lèvres sont d'un joli rose clair.

Mes cheveux ont été légèrement bouclés, et mes ongles limés, polis, puis vernis de blanc et sertis de petites fleurs rose pastel.

Evidemment, c'est magnifique ; ils ne travaillent pas au Palais pour rien. Cependant, je suis soulagée de voir que ce n'est rien de trop extravagant. Ainsi, je ressemble exactement à ce à quoi je dois ressembler.

-Ça vous plaît ?

-C'est formidable !

Ils me sourient, et se jettent des regards satisfaits.

-Maintenant, vous allez pouvoir choisir votre robe. C'est juste ici.

Un peu plus loin, elle me présente une dizaine de robes, que j'analyse rapidement en prenant une expression ébahie.

Trop extravagante.

Trop tape-à-l'oeil.

Trop banale...

Finalement, celle collant le plus à mon image apparaît comme étant une longue robe blanche, ni trop simple, ni trop voyante.

-Puis-je essayer celle-ci ?, demandé-je humblement.

-Bien sûr !

Aussitôt, elles se mettent à deux pour m'aider à l'enfiler, avant de m'attacher un collier d'argent avec un pendentif en forme de plume.

Deux minutes plus tard, je me retrouve à nouveau devant un miroir, cachant mon sourire derrière mes mains jointes.

J'en profite pour m'examiner une dernière fois. Ce n'est peut-être pas aussi parfait que ce que j'aurais pu prévoir avec davantage de préparation, mais c'est correct.

Je me retourne et remercie mes trois préparateurs en baissant la tête.

Et ils se laissent prendre au piège sans suspecter quoi que ce soit, me lançant compliment sur compliment que j'accepte en rougissant.

Je maîtrise mon rôle. Tout se passera bien.




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