Devoir n°11




Voilà prêt d'un quart d'heure que Maya nous parle des philosophes des Lumières. Et, même si je connais déjà la plupart des informations qu'elle nous donne, je n'ai pas trop de mal à m'y intéresser. Rafraîchir un peu toutes ces informations ne fait jamais de mal.

Tandis que je prends consciencieusement note de tout ce qu'elle dit, quelqu'un frappe à la porte.

Nous levons toutes la tête, et Maya s'interrompt pour aller ouvrir.

Peut-être est-ce le Prince qui vient parler à l'une d'entre nous ? Pourtant, habituellement, il évite de le faire pendant nos cours...

Peut-être est-ce seulement un message qu'on nous apporte ? Un changement d'horaire pourquoi pas ?

Maya se tourne finalement vers nous avec un grand sourire.

-Mesdemoiselles, vous avez de la visite !

Ah, donc c'est bien le Prince finalement ?...

La joie remplace mes question quand je vois mes parents me chercher du regard en entrant dans la pièce.

Que devrais-je faire ? Foncer vers eux ou...

Ma mère met immédiatement fin à mes interrogations en s'approchant rapidement de moi, les bras ouverts pour m'enlacer.

Elle a toujours été plus douée que moi pour improviser. L'expérience sans doute.

Me laissant porter, je la prends dans mes bras à mon tour, avant de faire de même avec mon père.

-Comment ça va, ma chérie ?, me demande ma mère.

-Bien, mais... Que faites-vous ici ?

Evidemment, je me doute qu'ils ont été invités. Sans doute est-ce même là une idée du Prince. Mais m'en tenir à une conversation simple quand je dois improviser m'évite de faire trop de faux pas.

-Nous avons été invités, par son Altesse royale le Prince Ilban d'Illéa, à venir te rendre visite, répond mon père. Et voilà donc ta gouvernante ?, demande-t-il en désignant Maya.

-Oui, c'est elle.

Aussitôt, il se dirige vers elle pour lui serrer la main.

-Enchanté Madame, je suis Darnell Atkins, le père d'Auriane. Je tenais simplement à vous remercier de prendre soin de ma fille depuis ces derniers mois.

-Il n'y a aucun souci, je ne fais que mon travail.

Ils échangent encore quelques phrases, jusqu'à ce que ma mère propose :

-Et si tu nous montrais ta chambre ?

-Avec plaisir !

Je prends la main de ma mère et la lui serre légèrement pour lui faire signe de me suivre. En apparence.

Pour être plus tranquilles, quand j'étais plus jeune, mes parents et moi avons mis au point quelques codes simples.

Lui presser la main comme je l'ai fait signifie que nous allons probablement croiser des journalistes. Je compte les faire passer parles endroits où ils sont le plus souvent, cela fera de belles photos pour les magazines.

Ma mère me sourit, signe qu'elle a compris, puis elle prend la main de mon père l'entraîner avec elle et lui faire passer le message.

Cela ne rate pas, nous croisons plusieurs journalistes et posons de bonne grâce pour certains, tandis que d'autres préfèrent prendre des photos sur le vif.

Mes parents acceptent de répondre à quelques questions, avant de s'éclipser en expliquant qu'ils veulent passer du temps avec moi.

Au final, il nous a fallut presque un quart d'heure pour atteindre la porte de ma chambre.

En l'ouvrant, nous tombons sur Rosie, qui s'empresse de s'incliner.

-Excusez-moi, j'allais partir, je voulais juste finir de nettoyer..., bredouille-t-elle.

-Ne t'en fait pas pour ça ! Je te présente mes parents... Et voici donc Rosie, l'une de mes trois caméristes qui m'aident chaque jour.

-Ravi de vous rencontrer !

Elle s'en va rapidement après une autre révérence, et referme la porte derrière elle.

Ma mère se rapproche de la porte, et écoute les bruits venant du couloir. Satisfaite, elle se retourne vers moi pour m'étreindre de nouveau, avec un peu plus de force cette fois. A présent que nous ne sommes plus écoutés, nous pouvons finalement vraiment nous retrouver – en restant vigilants tout de même.

-Je suis si contente de te revoir.

-Comment est-ce que tu vas ?, demande mon père. Est-ce que tu tiens le coup ?

A la joie de les revoir se mêle insidieusement un autre sentiment. La honte. Est-ce que je devrais leur dire que j'ai craqué ? Que le Prince m'a percée à jour ?

Ma gorge se serre à cette idée.

-Ça va oui... Et vous ? Vous vous en sortez ?

-Oh, tu sais, la routine, réplique ma mère avec un sourire las. Même si, grâce à toi, les invitations sont de plus en plus nombreuses. Et si tu savais tous les cadeaux qu'on nous envoie pour se faire bien voir ! D'ailleurs, on commence à ne plus savoir où mettre les tiens.

-Et si jamais tu rentres, laisse moi te dire que tu auras l'embarras du choix pour te choisir un fiancé.

Je retiens une grimace. Evidemment, les demandes officieuses n'attendent pas la fin de la Sélection.

-Même si je doute qu'ils puissent remplacer un Prince...

Je tourne la tête vers ma mère. Elle me fait un sourire complice.

-Certes, on peut difficilement faire meilleur parti...

-Ne fais pas l'idiote avec nous.

Elle sous-entendait donc bien ce que je pensais.

Je garde le silence quelques instants.

-Qu'est-ce qui vous fait penser ça ?

-Tu fais partie de l'Elite. Les sondages à ton égard sont tous très bons, ta réputation n'est plus à faire à présent. Les familles les plus influentes d'Illéa n'attendent que de pouvoir t'inviter à leurs soirées. Ce n'est ni le confort, ni les occupations qui te manquent à la maison. Et on te connaît, tu n'es pas du genre à faire quoi que ce soit sans raison. Si tu es encore ici, c'est donc qu'il y a encore quelque chose que tu voudrais gagner dans cette compétition.

-Non, je...

Ilsont tort. Ils ont forcément tort. Je pense que je le saurais si c'était le cas, non ?

Le problème avec mes parents, c'est qu'ils ne lâchent pas l'affaire facilement. D'autant plus quand ils peuvent parler librement.

-Alors qu'est-ce que tu fais encore dans la compétition ?, demande mon père.

-Je ne sais pas... Je n'y ai juste pas réfléchi...

-Tu veux nous faire croire ça ?

-Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? Je ne sais pas !

Je me sens prise comme prise au piège, et je n'aime pas ça du tout. Je suis sûre qu'ils ont déjà préparé cette conversation avant de venir !

Ils faisaient ça parfois quand j'étais plus jeune : se mettre à deux pour me faire parler quand ils pensaient que quelque chose n'allait pas ou que j'avais un truc dont je n'osais pas leur parler.

Le problème étant qu'ils ne se trompent jamais, et qu'ils en sont parfaitement conscient.

Est-ce qu'ils ont réussi à remarquer je ne sais quoi pendant un Bulletin ?

-Et si nous parlions d'autre chose ? On ne va quand même pas passer nos retrouvailles à parler de ça quand même ?

-S'il le faut, nous le ferons, réplique ma mère, inflexible.

Mon agacement monte peu à peu. Pourquoi perdre du temps avec ça ? J'ai juste envie de passer une bonne après-midi avec eux ! Oublier un peu toute cette compétition, où il faut toujours que quelque chose ne se passe pas selon mes prévisions !

-Ce n'est pas pour t'embêter que nous faisons ça, lance calmement mon père en me prenant par l'épaule. Mais tu as tendance à tout garder pour toi. Et tu sais ce qui arrive quand on fait ça trop longtemps ? On éclate, et rarement au bon moment. C'est pour ça qu'on veut que tu nous parles.

Bien sûr, j'ai déjà eu le droit à ce discours des centaines de fois. Seulement cette fois, il me renvoie immédiatement aux erreurs que j'ai déjà faites, ce qui ne m'aide pas à rester calme.

-D'accord, il est très gentil et attentionné, ça vous va ?, lâché-je, cherchant désespérément à mettre fin à la discussion.

-C'est tout ce que tu as ?

N'y tenant plus, comprenant que je ne gagnerais pas, je craque.

-D'accord ! D'accord, vous voulez toute la vérité ? Eh ben tout ce qu'on fait là ne sert à rien ! J'ai déjà craqué, et devant le Prince avec ça ! Je n'ai pas été capable d'improviser, et quand il m'a demandé ce que je ressentais pour lui, je n'ai rien pu lui répondre et je suis partie en pleurant !

Je me crispe, m'attendant à voir de la déception sur leur visage. Ils ne bronchent même pas. Ils continuent de m'écouter.

De plus en plus agacée, cherchant à obtenir une réaction, je continue sur ma lancée.

-Et après ça, il ne m'a pas renvoyée. Mais vous savez quoi ? Il m'a avoué qu'il savait depuis le début que je mentais tout le temps. Depuis le début ! Je n'ai pas été capable de tenir mon rôle le temps d'une seule entrevue ! Et maintenant, je suis censée me montrer sincère avec lui. Et j'essaye de tenir ma promesse, même si... C'est difficile. Voilà !

Toujours aucune réaction. Ça me rend folle !

-Allez-y, vous pouvez montrer votre déception !

-Pourquoi être honnête avec lui, si c'est si difficile ?, demande ma mère.

Ils ont toujours un visage parfaitement neutre. Foutus politiciens !

-Parce qu'il le devinerait si je continuais à mentir, et qu'il pourrait ruiner ma carrière, je réponds du tac au tac.

-Pourquoi ne pas partir dans ce cas-là ?

-Pour la même raison, il pourrait ruiner ma carrière.

-C'est donc le genre de personne à se venger dès qu'on lui refuse quoi que ce soit, lance mon père.

Je me mords la langue.

-Non, je concède. Non je ne crois pas...

Et voilà, je me suis contredite.

Et évidemment, cette erreur n'est pas tombée dans l'oreille de sourds.

-On en revient à la même question : qu'est-ce que tu fais encore ici ?

Adoptant une autre technique, je décide de me taire. Ce n'est vraiment pas comme ça que je pensais revoir mes parents.

Ils restent eux aussi silencieux de longues secondes.

-D'accord, donc tu repars avec nous ce soir, lâche simplement mon père. Puisqu'il n'y a apparemment plus rien qui ne te retiens ici.

A cette idée, je ressens un pincement au cœur, mais j'essaye de le cacher et conserve mon mutisme.

-Si c'est pour ne pas le laisser tout seul que tu restes, ne t'en fais pas pour lui. Il ne fait aucun doute que la plupart des filles encore présentes ici sont folles de lui, renchérit ma mère.

Elle se lève et se dirige vers l'armoire de ma chambre, tandis que j'aide plus en plus de mal à réprimer toutes les émotions qui ont décidé de se faire la guerre dans ma tête.

-Tu veux qu'on t'aide à emballer tes affaires ?

J'essaye d'articuler une phrase, mais aucune voix ne sort.

-Tu voulais dire quelque chose ?

-Je reste ici !, répété-je de façon intelligible.

-Pour quoi faire ?

-Je...J'aime... bien le Prince, d'accord ? J'aime passer du temps avec lui, et même pouvoir être honnête avec lui. Même si c'est dur. Alors je veux rester ici... Au moins jusqu'à ce qu'il me demande de partir.

Au milieu de toutes les émotions qui continuent de m'embrouiller l'esprit, il me semble distinguer un nouveau sentiment, beaucoup plus encombrant. Je n'avais vraiment pas besoin de ça.

-Et bien, tu deviens de plus en plus têtue avec l'âge toi, s'adoucit finalement ma mère. Tu t'entêtes de plus à ignorer ce qui ne te plaît pas

-Ce n'est pas comme ça que cela disparaît, renchérit mon père.

-Mais bon, l'important c'est que tu l'ais dit.

Je croise les bras, sans dire un mot.

-Allons, ne fais pas cette tête là, je te donne deux jours avant de reconnaître que nous avons eu raison d'insister. Tu vas voir que tu auras moins de mal à gérer ton image.

Toujours pas convaincue par leur méthode, je me contente de hocher la tête et de me diriger vers ma coiffeuse, pour vérifier ma coiffure - et m'éloigner de cette discussion.

Ma mère apparaît dans le miroir à côté de moi.

-Ah, et, ma chérie : nous sommes très fiers de toi. N'en doute jamais, affirme-t-elle, probablement en réponse à ce que je leur ai dit plus tôt.

Elle le dit avec une telle conviction, que des larmes me montent aux yeux malgré moi, alors qu'un certain soulagement m'envahit.

Ils ne sont pas fâchés, ni déçus. Je n'ai pas tout raté.

Je passe rapidement un coup de coton sous mes yeux, pour ne pas ruiner mon maquillage.

Ils sourient.

-Est-ce qu'on peut finalement passer une après-midi tranquille tous les trois, ou vous avez encore des réponses à exiger ?

-Mais bien sûr ma chérie !, s'exclame ma mère, en se recoiffant rapidement dans le miroir. Et si tu nous emmenais à ce jardin collaboratif ?

J'acquiesce et me détends un peu, avant de me remettre dans mon rôle une fois dans le couloir.

Mes parents font de même et commencent à me poser des questions sur le projet.

Cette fois-ci, nous évitons les journalistes, et arrivons rapidement à l'extérieur.

Tandis que mes parents plantent leurs propres graines, je me retourne, entendant des pas.

Le Prince. Evidemment.

-Bonjour Auriane !

Immédiatement, je m'incite au calme. Je veux bien être sincère, mais seulement une fois que je saurais quoi penser de ce sentiment gênant.

-Votre Altesse.

-Je venais voir si tout se passait bien de votre côté. Cette surprise vous a-t-elle fait plaisir ?

-Plus que vous ne pouvez l'imaginer. Merci beaucoup !

-J'en suis ravi ! Puis-je vous demander de faire les présentations ?

-Bien sûr !

Je me retourne vers mes parents, qui ont jusqu'ici fait semblant de ne rien remarquer.

Ils se lèvent tous deux et s'inclinent.

-Votre Altesse, quel honneur de vous rencontrer !, s'exclame ma mère.

-Voici donc ma mère, Carolyn Atkins, et mon père Darnell.

-Enchanté !

Ils échangent quelques phrases, avant que le Prince ne s'excuse et ne s'éclipse.

Je le suis de regard probablement une seconde de trop, car quand je me retourne vers mes parents, ils ont de grands sourires sur le visage.

Nous passons le reste de l'après-midi à faire le tour du Palais, que mes parents visitent pour la première fois.

Avant de me voir, ils avaient apparemment reçu quelques instructions, ils m'indiquent donc peu avant l'heure du dîner que nous mangeons tous ensemble avec les familles des autres filles.

Soucieux d'être ponctuels, nous arrivons un peu en avance.

Pas le moins du monde intimidés, durant le repas, mes parents en profitent pour échanger quelques mots avec le Roi et la Reine.

Je me fais quand à moi discrète, jetant quelques coups d'œil au Prince de temps en temps.

Je remarque à peine ce qu'il y a dans mon assiette, perdue dans mes pensées.

Pour le moment, je ne suis toujours pas convaincue par la méthode de mes parents.

Et si je partais vraiment ? Ce serait bien plus simple, et probablement plus avisé.

Nouveau coup d'œil au Prince.

Bon, pour le moment, je vais juste faire ce que j'ai dis à mes parents, et j'aviserai ensuite... Oui, c'est très bien comme ça.


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Wattpad a décidé de coller certains mots entre eux, du coup je m'excuse si j'en ai oublié certains ^^'

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