VI. Quand la folie prend le rôle de psy
Le lendemain, alors que je faisais un tour de la colonie, oui ça m'arrive parfois, je vis les campeurs chuchoter entre eux dans mon dos. J'avais l'habitude de ne pas être apprécié mais il y avait quelque chose de différent, comme si quelque chose se préparait. Je vis du coin de l'œil les Cazimir ou Aladdin, peu importe leur nom, apporter une caisse dans leur bungalow. N'ignorant pas les nombreux trafics qu'ils faisaient pour revendre illégalement diverses choses aux campeurs, je m'avançai vers eux avec mon air de directeur sévère. Oui, je m'en fiche de ce que font les demi-dieux mais je ne rate jamais une occasion de voir la peur sur leur visage à ma vue ou de les faire chier.
-Travesti et Sarah Connor, je peux savoir ce que vous faîtes ?
Ils se tendirent d'un coup puis se tournèrent lentement vers moi. Celui que je supposais être l'aîné prit la parole.
-C'est Travis et Connor !
-Est-ce que j'ai l'air de m'en soucier ?
-D'ailleurs nous avons nous aussi quelque chose à vous dire, Continua le plus jeune.
J'haussai un sourcil tout en croisant les bras.
-Je viens de vous prendre à l'un de vos trafics, vous avez intérêt à ne pas me chercher.
-Ce n'est pas un trafic, on ne fait que déplacer des caisses !
-Vous me prenez un idiot ? Des enfants d'Hermès qui déplacent des caisses, il y a forcément une arnaque quelque part.
-Certes, il y en a une mais ce n'est pas un trafic illégal !
-Connor, tu en dis trop ! Bref, ce n'est pas le sujet, arrêtez de nous en éloigner !
Je ricanai, c'est déjà très facile de détourner le sujet avec les demi-dieux, merci TDAH, mais les enfants d'Hermès, ils font presque le travail à votre place. Finalement Ouistiti reprit :
-Notre réserve de coca, elle est où ?
Et mince, ils n'ont pas oublié.
-Ouais parce qu'on voit que votre chère porte est de retour mais notre réserve est toujours portée disparue ! Alors que vous avez dit qu'elle était confisquée, pour des raisons injustes en plus, le temps de la disparition de votre porte !
-Très bien, très bien, je vous la rendrai, Soupirai-je en balayant leur demande de la main.
-Ah non, vous ne nous aurez pas comme ça ! On sait que vous allez encore une fois "oublier". On la veut maintenant ! S'écria l'un des deux, je ne sais pas lequel mais je m'en fichais royalement.
Je soufflai d'exaspération puis claquai des doigts, faisant apparaître les cannettes de coca devant eux.
-Contents ?
Les deux frères échangèrent un regard complice avant de s'enfuir vers leur bungalow avec. Voilà une chose de faite. Ayant l'impression d'avoir fini ma journée, je n'ai pas l'habitude d'avoir autant d'interaction avec les demi-dieux ! Enfin il y a Nico mais c'est un cas à part mais ne me demandez pas pourquoi. Bref, je disais ! Ayant l'impression d'avoir fini ma journée, je retournai à la Grande Maison, vider une nouvelle cannette de coca light.
Mais une fois que je passai la porte, je compris que mes plans allaient changer. Il se passait quelque chose d'étrange ici, étant le dieu de la folie, je pouvais ressentir ce genre de chose, quand quelqu'un est pris d'hallucinations ou de démence. Ça ne pouvait pas être Chiron mais alors qui pourrait être dans cette situation à la Grande Maison ? Je réalisai soudain, Nico, qu'est-ce qu'il a encore trouvé pour me casser les pieds ? Il a trouvé ma réserve de cannabis cachée derrière celle de café ? Non, ce n'était pas ça, je sentais de la peur. Je m'avançai dans les couloirs, là où la sensation se faisait plus forte avant de finalement le trouver complètement paniqué. Je m'approchai de lui doucement puis posai ma main sur son épaule.
-Nico ?
Il ne répondit pas.
-Nico, qu'est-ce qui se passe ? Peux-tu me décrire ce que tu vois ?
Il se mit à marmonner des choses incompréhensibles. Je compris que je devrai aller moi-même à la source du problème même s'il m'en voudra probablement après. J'inspirai un bon coup avant de souffler lentement, comme pour éjecter mon esprit de mon corps. Je me sentais quitter mon enveloppe mortelle doucement pour rejoindre la folie qui prenait l'enfant d'Hadès.
Lorsque j'ouvris les yeux, il faisait très sombre et une odeur de sang me prit les narines. Je plissai le nez tout en cherchant Nico du regard. Alors que je tournais la tête, je compris d'où venait l'odeur. Les murs dégoulinaient de sang frais, comme s'ils transpiraient à l'instant le liquide rouge. Je retrouvai le demi-dieu marchant dans le couloir de plus en plus sombre. Il semblait fuir quelque chose, sûrement les voix que j'entendais chuchoter dans tous les sens. C'est seulement lorsque je vis les phrases affichées sur les tableaux que je compris.
"La guerre n'arrêtera,
Les problèmes de l'au-delà,
Le sang versé de l'enfant des Grands,
Est le début d'un bon aboutissement,
Mais seul un choix déterminera,
Celui que la mort prendra,
Pour rejoindre sa mère,
Et sauver les Enfers"
J'ignorais de quoi les vers parlaient mais Nico les avait déjà entendu et vu son expression, c'était un très mauvais présage. Sa démarche se faisait de plus en plus difficile, comme si quelque chose que je ne pouvais pas voir le retenait. Alors qu'il semblait vouloir se mettre à courir, il se figea d'un coup, une expression d'horreur sur le visage. Ne me posant pas plus de questions, je me dépêchai de le rattraper puis posai mes mains sur ses épaules lorsque je fus à sa hauteur. À ce moment, je pus fouiller dans sa mémoire à la recherche de ses souvenirs heureux. Il y avait le fils de Zeus, sa rencontre avec Mr. Blondinet-Sunshine. Je me fis la réflexion qu'il devait vraiment avoir un truc pour les blonds. En même temps de lui envoyer toutes ces visions, je lui adressais des paroles réconfortantes, lui demandant de se réveiller. Alors que je parcourais ses bons souvenirs, je fus surpris de tomber sur nos parties de cartes. Je décidai de ne pas avancer plus loin sur ce chemin, craignant ce que je pourrais trouver que je ne devrais pas savoir et partis plutôt vers la voix de sa mère, un souvenir de quand il était petit, lorsqu'elle le prenait dans ses bras, lui soufflait des mots encourageants puis un autre moment avec Hadès cette fois, il regardait son fils avec un sourire fier. Mon cœur se serra légèrement, je réalisai que jamais, de toute ma vie, mon père ne m'a adressé ou ne m'adressera un signe de reconnaissance ou de fierté. Je secouai la tête pour chasser ces pensées, je ne devais pas lui envoyer d'ondes négatives. Finalement, je nous sentis basculer hors de la vision pour retourner dans le monde réel. Il s'effondra en face de moi et je le rattrapai avant qu'il n'attérisse sur le sol et le déposai plus délicatement par terre. Déjà ses paupières papillonnèrent et il regarda autour de lui, un air confus sur le visage.
-Tu m'as flanqué une sacrée frousse, Plaisantai-je mais mon inquiétude prenait le dessus.
Il ne répondit pas tout de suite. Sa poitrine se soulevait et se baissait rapidement, comme s'il cherchait de l'air. Il regardait autour de lui, puis sembla remarquer ma présence et finalement prit la parole.
-Vous m'avez aussi flanqué une sacré frousse, quand vous êtes venu dans ma tête !
-Tu aurais préféré que je te laisse dans ton hallucination, peut-être ?
-Non, je veux dire, c'est gentil de votre part...
Il trouvait ça... Gentil ? Je ne faisais que mon rôle de directeur, il ne manquerait plus qu'il me trouve sympathique !
-Ne dis jamais que c'est "gentil", je ne fais rien par gentillesse.
-Je vous remercie de votre non-gentillesse alors.
J'esquissai un sourire avant de passer aux questions sérieuses.
-Qu'est-ce qu'il s'est passé, d'ailleurs ?
Il eut un moment d'hésitation.
-Rien. Je vous conseille d'oublier tout ce qui vient de se passer.
Je hochai la tête. Après un silence, je repris la parole afin de m'assurer d'une chose.
-D'abord petite question, juste comme ça, tu ne serais pas malencontreusement tombé sur une réserve de cannabis d'origine inconnue ?
-Non, jamais ! Les seules herbes que je consomme sont les médicaments de Will.
-Tant mieux, c'est parfait ! D'ailleurs oublie ma question, c'est mieux.
-J'oublie votre question et vous oubliez ce que vous avez vu, okay ? Enfin, qu'est-ce que vous avez vu au fait ?
-Je, Commençai-je avant de me stopper.
Devais-je lui dire la vérité ? Il m'en voudrait probablement mais je ne pouvais pas lui mentir sur ce sujet, si ? Mais toutes ces choses que j'ai vues... Je n'étais pas censé les voir, c'était beaucoup trop personnel. C'est pourquoi je préférai mentir, s'il voulait que je les sache, il m'en parlerait de lui-même.
- Je n'ai en fait pas vu grand chose, si ça peut te rassurer.
-Pas grand chose ? Dites-moi exactement ce que vous avez vu, c'est la seule chose qui peut me rassurer.
-Juste qu'il faisait très sombre et que tu semblais effrayé, c'est tout. Ensuite j'ai commandé à ton cerveau de t'envoyer des images agréables mais j'ignore ce qu'il t'a montré, Mentis-je.
-Tant mieux, même le dieu de la folie que vous êtes n'aurait pas voulu voir le reste...
S'il savait...
-Ça t'arrive souvent ce genre d'hallucination ? Demandai-je pour détourner la conversation.
-Honnêtement, j'ai rarement vécu ça réveillé. Dans mes rêves, c'est une autre question.
-Tous les demi-dieux ont des rêves... Étranges mais ce que tu viens de nous faire, c'est la première fois que je vois ça. Il y a une raison particulière que ce soit arrivé ?
-Peut-être car je n'ai pas dormi depuis trois jours, ou peut-être qu'on veut m'envoyer un message, je ne sais pas.
-Je pencherais plus pour la première proposition. C'est pourquoi je suis tellement chiant avec toi pour que tu dormes.
-Maintenant que vous avez vu ce que vous avez vu, je peux être honnête ! Je ne dors pas car je n'avais pas envie que vous sachiez qu'il y a des risques que je crie en dormant. Will dormait parfois avec moi pour me calmer quand je faisais ça.
Mon cœur se serra à l'entente de la dernière phrase. Je ne sais pas pourquoi, enfin si, je le sais mais je préférai ignorer la raison. J'étais là pour l'aider avec ses problèmes de sommeil, pas parce qu'il a partagé son lit avec un demi-dieu, une histoire dont je n'avais que faire ! Je dois bien être honnête, je ne pensais pas qu'il se confierait à moi, encore moins aussi facilement. Mais s'il avait besoin de parler, alors je serai là pour l'écouter. Qui d'autre le ferait pour lui, sinon ?
-Nico, il n'y a aucun problème avec ça, tu ne dois pas te priver de sommeil pour ça. Et puis je suis le dieu de la folie donc si tu as besoin d'en discuter avec quelqu'un...
-On en a déjà parlé, il y a longtemps, quand j'étais encore jeune. Je pense que ce serait bien d'en parler avec vous... Vous êtes un dieu, je sens que des choses changent et ce serait mieux de vous le dire, même si je crois que c'est la pire décision de ma vie.
-Peut-être pas la pire, tu as bien défié ton père, le dieu des enfers, pour un crush d'enfance. Mais allons dans mon bureau même si ce sera l'une de nos pires décisions.
Je lui ouvris la voie du chemin vers mon bureau. Il garda le silence tout le chemin, enfin c'est ce que je pensais jusqu'à ce qu'il recommence à parler une fois dans les escaliers.
-Je confondais admiration et amour à l'époque ! Je n'ai même pas envie de savoir comment vous savez ça.
-Hermès, rumeurs,... Ça va vite sur l'Olympe. Tous les dieux sont au courant.
-Pire que des gossip girls...
Tiens, une référence... J'ignorais qu'il connaissait cette série. Je le notai dans un coin de ma tête, je l'interrogerai plus tard.
-Je ne te le fais pas dire ! Mais c'est très drôle.
-Pour vous en tout cas... Bon, on va dans votre bureau ou on continue de papoter ?
-Allons-y ! Dis-je théâtralement en lui ouvrant la porte.
-Vous êtes Dora maintenant ?
Je plissai les yeux, le regardant sceptique.
-Tu connais Dora ?
-Vous croyez que j'ai appris comment l'anglais ?
Maintenant, j'avais du mal à cacher mon hilarité.
-J'aurais plus parié sur Harry Potter
-Harry Po-quoi ?
Cette remarque, c'était trop pour moi. Comment ne peut-il pas connaître ce chef-d'œuvre ?!
-Tu connais Dora mais pas Harry Potter ?!
-C'est le truc dans l'espace avec un grizzly mouillé et des robots que Will adore ?
-Ça c'est Star Wars... Je pense qu'on va d'abord parler de ta culture avant de s'attaquer à tes rêves.
-Harriette Pottfleur et Star Won, c'est du pareil au même, il y a plein d'explosions et puis le villain meurt, hyper réaliste quoi...
-C'est vrai que Dora l'exploratrice, c'est beaucoup mieux.
-Ça apprend des choses ! Harriette nous apprend juste que les sorciers ont une baguette magique.
-L'histoire est intéressante, il y a des morales ! C'est beaucoup plus profond.
-Genre quoi ? Qu'il faut croire au pouvoir de l'amitié et avoir une baguette magique ?
Ne fais pas de blagues, Dio, ce n'est pas le moment, retiens-toi.
-Va lire et on en reparlera...
-Car vous les avez lu ? Je ne savais pas qu'il y avait une traduction grec ancien pour les millénaires alcooliques.
-Je sais lire l'anglais... T'es sûr que tu veux que je t'aide encore pour tes cauchemars ?
-Oui sir
-Alors tu me parles un peu mieux et tu iras te cultiver.
-Très bien Ô grand Dionysos à la culture incroyable et à la bonté sans mesure envers les fous de mon genre !
-C'est mieux comme ça, maintenant va t'asseoir et raconte tout à Tonton Dio.
-À partir d'où ?
-De où tu veux, je t'écoute, Dis-je en prenant un bloc de feuille ainsi qu'un bic.
-Je fais des rêves depuis mon exploration du Labyrinthe. Au début, ce fut des rêves "normaux pour un demi-dieu". Cependant, au bout de quelque temps, juste avant la première Grande Guerre, ça a commencé à être pire. Mais, depuis mon aller-retour au Tartare, je... J'ai eu du mal à dormir après ça. Chaque nuit, je revois les horreurs que j'ai vues, les squelettes que j'ai dans mes placards et mes erreurs du passé. Et, très souvent, tout cela se mélange.
-Et tu veux me dire ce que tu vois exactement ?
-Des plaintes fumantes, des rivières de sang, des cris d'horreur, la décomposition de corps morts, l'obscurité, le corps vivant dans cette entité malveillante. Parfois, je suis même une des âmes du Tartare et j'expie mes péchés et... Je crois que je vais trop dans les détails.
Toutes ses descriptions me donnaient des sueurs froides dans le dos. Malgré tout, j'étais là pour lui alors je le laisserai s'exprimer s'il en a besoin. Il regardait vers le bas, j'avais l'impression qu'il avait des difficultés à respirer. Au moment où j'allais me lever pour vérifier qu'il ne me fasse pas une crise, il sembla se reprendre.
-Vas-y, lâche-toi, dis tout ce que tu as besoin de dire, Lui dis-je.
-Je ne peux pas vous dire la suite, c'est trop... personnel.
-Très bien, c'est comme tu le sens.
-Ensuite, comme vous le savez, il y a eu les voix. Je vous en avais déjà parlé, vous vous en souvenez ?
-En effet, qu'est-ce que ces voix te disent ?
-Certaines me disent de retourner au Tartare. D'autres me préviennent d'un événement, mais je ne sais pas trop quoi et après...
-Tu penses que quelque chose de grave va arriver ?
-Je ne pense pas, je le sais ! Elle me l'a dit, je suis juste trop bête pour savoir ce qui va se passer exactement !
-Mais non, tu n'es pas bête. Nous pouvons y réfléchir à deux ?
-Je ne sais pas, j'ai peur de savoir mais j'ai en même temps peur de l'inconnu.
-Je pense qu'il n'est pas bon d'ignorer le danger.
-Très bien. J'ai reçu une prophétie, ce n'est pas Rachel ou un prophète qui me l'a dit, c'est une personne du Tartare. "La guerre n'arrêtera, les problèmes de l'au-delà. Le sang versé de l'enfant des Grands est le début d'un bon aboutissement. Mais seul un choix déterminera, celui que la mort prendra pour rejoindre sa mère et sauver les Enfers"...
La prophétie écrite partout dans son hallucination. Elle vient donc du Tartare, j'aurais dû m'en douter. Je ne devais pas laisser paraître que je l'avais déjà entendue.
-Le sang versé de l'enfant des Grands, c'est plutôt explicite. J'aimerais que ce soit comme pour le saignement de nez de Percy mais après ça parle de mort... Tu penses avoir une idée de quel choix ça parle ?
-Je ne sais pas. Je pense qu'il s'agit d'un choix d'un des enfants des Grands, celui de la prophétie. Je ne pense pas que ça concerne Percy ou Thalia, leur boulot pour les dieux est fini. Enfin, je sais déjà qui la mort prendra, c'est déjà ça...
-Et qui ça sera ?
-Jason.
Cette révélation laissa un froid dans la pièce. Je pouvais presque sentir sa mort planer entre nous.
-Mais comment sa mort sauverait les enfers ?
-Je n'en sais foutrement rien ! Le seul truc dont je suis au courant c'est qu'il y a beaucoup de problèmes en Enfer et que tout est lié : les voix, la prophétie, sa mort...
-Peut-être Hadès saura nous aider ?
-Non, il est trop occupé et c'est pas comme s'il allait m'aider.
-Je pourrais le convaincre...
-Non ! Je retournerai au Tartare, j'irai voir seul ce qui ne va pas, j'irai même voir Thanatos s'il le faut !
Retourner au Tartare ? Et puis quoi encore ? C'est déjà un miracle qu'il en soit revenu une fois sain et sauf.
-Je ne pense pas que ce soit la meilleure des solutions...
-Je l'ai fait une fois, pourquoi pas deux ? Après tout, j'y suis ressorti indemne. Les voix ? Je peux vivre avec. Les cauchemars ? Ce n'est pas si grave. Il est dans mon devoir de sauver cet endroit peu importe les conséquences ! Après tout, les gens ne sont plus étonnés de me voir disparaître et revenir des mois plus tard complètement toqué...
-Ce n'est pas bon pour ta santé mentale. Nous allons d'abord voir ce que veut dire la prophétie puis nous aviserons.
-Peu importe, je sais que je dois y retourner. Enfin, quand il sera mort... Bordel, pourquoi tous ceux que j'aime meurent à la fin ?
Je l'avoue, j'avais mal pour lui. Il ne mérite pas que les Moires s'acharnent autant sur lui, il a assez donné.
-Le destin peut être très cruel... Mais s'il te plait, attends un peu avant de foncer tête baissée au Tartare.
-J'attendrai le temps qu'il faut pour que la mort vienne de chercher. Après, vous serez débarrassé de moi jusqu'à ce que je rentre et que vous me forciez à refaire une séance de psy. N'est-ce pas chouette ?
-Je pense que je préfère te supporter ici que te savoir plonger lentement dans la folie au fin fond du Tartare.
C'était sorti tout seul. Je jure qu'en temps normal, jamais je n'aurais dit ça à un demi-dieu !
-Vraiment ?
Il était surpris. Qui ne le serait pas ? Mais je décidai de la jouer honnête.
-Vraiment.
-Au fait, je n'ai même pas peur de ma prochaine expédition au Tartare, j'ai peur de l'état dans lequel je vais revenir.
-Tu n'iras que si seulement c'est la seule solution et nous essayerons de te préparer au mieux.
Un mensonge, il le savait. Comment peut-on préparer quelqu'un au Tartare ?
-Vous ne comprenez pas. Enfin, vous ne voulez pas assumer. On sait tous les deux que, même si vous me préparez au mieux, je ne serais plus jamais le même. Vous savez que je ne pourrai peut-être jamais guérir de mon séjour là-bas. Vous n'avez pas besoin d'essayer de le cacher, je le sais et je vois bien que vous êtes aussi apeuré que moi.
Je gardai le silence. Que dire ? Il avait raison. Il reprit ensuite après un long silence pesant durant lequel je gardais le regard baissé.
-Alors ? C'est si compliqué à assumer que vous n'arrivez même plus à parler ? Dites-vous que vous serez un œil extérieur. Moi, j'ai dû affronter la fatalité et je devrai vivre tout ça.
-Je sais, Nico. C'est pour toi que je suis inquiet, pas pour moi.
-Je veux juste savoir une chose, pensez-vous que je pourrai seulement guérir ? Est-ce que mon esprit restera au Tartare à vie ou est-ce que vous pourrez me guérir ? Je ne veux pas avoir de faux-espoir.
-Je ne peux rien prédire à l'avance mais j'ai bien peur que... Que ton esprit y reste... Bien sûr je ferai mon possible pour que ce ne soit pas le cas ou le moins possible mais je ne peux rien promettre.
-Je le savais, je le savais et pourtant j'y ai cru. Je-
Sa voix se brisa et il n'arriva plus à contenir ses larmes. Mon cœur se serra de le voir si misérable et je ne pus m'empêcher de le prendre dans mes bras. À ma plus grande surprise, il se laissa faire. Je ne pouvais pas le consoler alors je me contentai de rester là.
-Je suis désolé, Murmurai-je.
-Aidez-moi, je ne veux pas disparaître...
-Je promets de faire tout ce que je peux.
-Si... S'il n'y a pas d'issue possible quand je rentrerai, promettez-moi, non, jurez-moi que vous me tuerez... Je ne veux pas vivre comme ça, je ne veux pas que Hazel-
Je me tendis immédiatement à sa demande.
-Nous n'y sommes pas encore, nous verrons par la suite ce qui se passera.
-Jurez-le moi. Promettez sur votre honneur que vous le ferez ! Il y a nonante pourcent de chance que ça arrive, vous le savez aussi, vous êtes le dieu de tout ça.
-Je ne peux pas te promettre ça...
-Je ne vous le demande pas, je vous l'exige. Préférez-vous me voir fou à lié ? Vous savez à quoi ça ressemble, et je ne suis pas sûr que vous vouliez avoir affaire à ça.
Oh que oui, je le sais, j'en ai vu tellement perdre la raison. Je ne souhaitais ça à personne.
-On fera chacun de notre mieux pour que ça n'arrive pas.
-Bordel, vous m'entendez ? Cria-t-il.
-Oui je t'entends !
-Vous devez le faire, c'est une question de bon sens !
Il avait raison, dans un sens mais je ne voulais pas y penser. Ma voix se durcit.
-Je verrai en temps et en lieu.
-Je ne vous ai jamais vu aussi apeuré, c'est étrange. Vous ne souffrirez pourtant pas dans l'affaire...
Effectivement, mes bras, maintenant sur ses épaules, tremblaient. Des larmes voulaient sortir. J'avais déjà pleuré tellement de demi-dieux, je n'ai plus la force d'en voir encore un autre partir vers sa mort.
-Tu crois que je ne souffre pas quand il arrive quelque chose à un demi-dieu ?
-Quoi ?
-Ça me fait mal, tu sais, de voir tous ces demi-dieux qui m'ont cassé les pieds pendant des années quitter la colonie, mourir, plonger dans la folie, savoir tout ce qu'ils ont dû traverser.
-Je... Je ne savais pas. Vous me l'avez dit, mais je n'ai jamais réalisé ce que vous viviez. Je suis vraiment, vraiment désolé.
-Ne t'en fais pas, c'est moins pire que les demi-dieux qui doivent le vivre.
-Vous êtes le spectateur de la plus horrible pièce de théâtre... Pourquoi votre père vous fait subir ça ? Moi qui croyait que je souffrais...
-Je préfère être spectateur ici que sur l'Olympe. Mais ne compare pas, ce n'est pas pareil.
-Encore une fois, les autres dieux devraient aussi vivre ça, ouvrir leur yeux de leur cage dorée.
-Tu as bien raison!
-Je crois que je vais un peu mieux.
-Tant mieux alors, Soufflai-je.
-Je suppose que je peux aller dormir. Si à un moment je crie, réveillez-moi, s'il vous plaît.
-Très bien, repose-toi bien !
-Dites, on peut continuer ça demain ? Je crois que ça m'a fait du bien au final. C'est gentil de votre part, enfin, c'est non-gentil de votre part.
-Quand tu voudras, petit, Dis-je en esquissant un sourire.
Il quitta la pièce et je me laissai tomber contre le dossier de ma chaise. J'étais épuisé mais j'avais le sentiment d'avoir accompli quelque chose.
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