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Cela faisait deux semaines que j'avais invité ma supérieure à boire et je devais avouer que je le regrettais amèrement. Ses regards et sourires en coin me faisaient trembler de dégoût et de crainte, je n'allais tout de même pas lui mettre un énorme stop, pas maintenant ! Pas après la soirée que j'ai dû passer à être gentil avec elle avant de terminer par un petit « sinon pour mon ami c'est bon ? », je souffrais trop pour les beaux yeux de Chan. Elle avait accepté, parce qu'elle était incapable de me refuser quoi que ce soit.
Aujourd'hui était son premier jour et ça sonnait un peu comme la fin d'un calvaire. Pour commencer, Chan était sous ma protection durant un mois, j'avais réussi à le faire venir et c'était un exploit, nous allions passer janvier tous les deux. J'étais heureux. Deuxième raison, chaque fois que ma supérieure allait vouloir m'embêter, je n'aurais qu'à m'éclipser en lui disant que mon protégé avait besoin d'aide. Troisième raison, je pourrais le raccompagner chez lui le soir, dans ma voiture. Quatrième raison, je serais avec lui. Et c'était suffisant pour moi.
- Tu es prêt ? J'avais joyeusement lancé à mon ami tandis qu'il lançait son sac à l'arrière de ma voiture.
Celui-ci soupira lourdement sans rien ajouter puis s'était assis à côté de moi, place passager.
- C'est bon, tu as mis ta ceinture ?
Aucune réponse. Il regardait sa maison par la fenêtre, j'avais l'impression d'être en train de le kidnapper. Pourquoi ne disait-il rien encore ? Est-ce que je puais de la bouche ? Après un dernier checking de mon haleine, parfaite, j'avais enfin démarré et nous étions en route jusqu'au boulot. Tant pis pour ce blanc gênant, il fallait travailler.
En arrivant, je lui avais fait un tour des locaux. C'était spacieux, agréable, chic et les collègues étaient étrangement tous de bonne humeur aujourd'hui, c'était agréable.
Chan me suivait en traînant des pieds, pas sûr de lui ou de l'endroit mais au moins, il ne m'avait pas quitté durant toute la visite. Quand je lui avais proposé de monter dans mon bureau pour lui présenter ce qu'il devra faire, un simple mouvement de la tête avait répondu à ma question. Dans l'ascenseur, le silence sidéral me mettait mal à l'aise, mais je ne m'étais pas gêné pour le mater de haut en bas.
Chan était bien habillé, sobre et classe, parfait comme toujours, c'était très certainement grâce à sa mère, on ne refuse rien à maman, et ça me faisait plaisir. Malgré ce lourd silence, j'étais content d'être à ses côtés aujourd'hui.
- Bon, j'avais repris une fois enfermés dans mon bureau. Je vais avoir besoin de toi pour trier les dossiers, classer les affaires, m'aider pour quelques taches au quotidien en somme.
- Ton esclave en gros, avait-il résumé.
Miracle ! Il avait ouvert la bouche et en avait sorti des sons !
J'avais tout fait pour ne pas me laisser perturber par sa voix grave mais le long blanc que j'avais laissé traîner ensuite me trahissait.
- Juste pour aujourd'hui... J'avais répondu soudainement beaucoup moins certain. Il m'intimidait un peu. Le temps que tu te familiarises avec la maison.
Il avait hoché la tête sans rien ajouter d'autre, tant pis pour moi.
Quelques heures plus tard, Chan avait totalement trouvé ses marques entres ces quatre murs. Il avait même pratiquement terminé ce que je lui avais demandé et ça, ça ne m'aidait pas. Je ne savais pas trop quoi lui faire faire, c'était embêtant.
Lorsqu'il s'était posé droit comme un piquet devant moi, j'avais compris qu'il avait terminé.
- C'est bon ? j'avais souri en levant les yeux d'un dossier.
Hochement de tête.
- Tu as faim ?
Hochement de tête.
- On peut aller à la cantine si tu veux.
- Je n'aime pas trop ce genre d'endroit.
Mon Dieu étais-je béni ?
- On peut aller manger un bout dehors ensemble si tu préfères.
Il avait lâché un long soupire. C'était un peu vexant j'avouais mais il n'avait pas refusé, point gagné pour moi.
- Laisse-moi quelques secondes, le temps que je termine, et je suis à toi.
J'avais à nouveau souri et il s'était assis sur la chaise face à mon bureau.
Honteusement, je ne m'étais pas gêné pour le regarder. L'admirer.
Il était beau. Terriblement attirant.
Ses cheveux légèrement en bataille après son travail, sa cravate quelque peu défaite, les manches de sa chemise propre et repassée relevées sur ses avants-bras, son pantalon un poil trop serré dans ses cuisses musclées, c'était... Argh... C'était divin.
Bordel mais qu'est-ce que j'étais en train d'imaginer ?!
Étais-je devenu un pervers psychopathe dans la nuit ?!
J'étais chanceux que Chan ne me surprenne pas dans ma contemplation. C'était vraiment la honte.
Pourquoi étais-je obsédé par lui ? Qu'avait-il de plus que les autres ? Ce n'était pas comme si j'étais attiré par les garçons. Mais Chan c'était... C'était plus que ça.
Peut-être de la curiosité mal placée. Peut-être une admiration un peu trop grande, je n'en savais rien. Depuis toujours, Chan trottait dans ma tête. Ça expliquerait sûrement ses muscles développés. Comment se faisait-il qu'il soit musclé ? Est-ce qu'il allait à la salle de sport ? Mais quand ? Il ne sortait jamais de sa chambre.
À y repenser, il avait toujours eu une carrure imposante mais depuis son retour d'Australie, c'était à la limite de l'impressionnant. Sûrement cette fougue Sofia qui l'avait obligé à faire du sport.
Putain mais ta gueule Hyunjin. Sofia n'est même plus sur le continent et tu continues à mal parler d'elle.
Chan me rendait dingue.
- J'ai fini. Tu as une envie particulière ? Je t'invite, j'avais dit en prenant mon manteau accroché au porte-manteau.
Il avait haussé les épaules.
- Bon, eh bien j'espère que tu apprécies le subway.
Il avait hoché la tête. C'était gagné.
Au subway, Chan avait longtemps regardé les aliments et avait commandé rapidement, sans aucune émotion. Ça avait un peu déstabilisé la vendeuse. Lorsque ce fut mon tour, je m'étais efforcé d'être bien plus amical, de peur de me faire griller auprès de ma cantine favorite du travail. Ça avait eu l'air de marcher, elle était tout sourire à me servir de généreuse portion. C'était mignon de sa part.
Au moment de payer, elle avait entamé une légère discussion que je m'étais empressé de finir, de peur de faire fuir mon invité de marque.
Peut-être que la nourriture lui déliera la langue.
Sandwich en main, bouche ouverte uniquement pour croquer dedans, je m'étais bien trompé. Chan n'avait une fois de plus pas décroché un mot de tout le repas. C'était gênant. Peut-être voulait-il manger seul ? Et qu'il n'avait pas eu la force de me le dire ? C'était encore plus gênant.
J'étais mal à l'aise et lui semblait n'en avoir strictement rien à faire. Au moins, il n'avait pas ses écouteurs vissés aux oreilles.
- Comment tu as trouvé cette première matinée ? j'avais lancé dans l'espoir d'entamer une discussion.
- Ça va. Le dossier de Madame Go était un peu en bordel alors je me suis permis d'arranger un peu.
J'étais tellement heureux qu'il décroche plus que trois mots que je n'allais pas relever cette erreur. Tant pis, je repasserais derrière pour m'assurer qu'il n'avait pas fait de bêtises.
- Tu as très bien fait ! Non. C'est gentil, merci !
- C'est mon boulot, avait-il conclu.
Bon. Au moins, il m'avait parlé, ça me faisait plaisir.
- Qu'est-ce que je vais faire cet après-midi ?
- Eh bien... Qu'est-ce que tu dirais d'éplucher les dossiers avec moi ? Grave erreur de confidentialité. Tant pis. De toute façon il travaillait avec moi, il était muet comme une tombe, alors je m'en moquais pas mal. J'assumerais en cas de problème. Peut-être que ça pourrait t'intéresser !
Il avait doucement hoché la tête.
- Ouais, pourquoi pas.
J'étais aux anges.
Si je perdais la raison, j'aurais probablement sauté par dessus la table pour le prendre dans mes bras.
- Tu as pu en feuilleter quelques uns ?
- Non, je n'ai pas trop osé.
- D'accord pas grave, on fera ça ensemble.
Chan et moi avions passé le reste de la journée côte à côte, à lire et analyser quelques dossiers. Bien que légèrement, pour ne pas dire totalement, désemparé au début, je m'étais vite habitué à sa présence à mes côtés. À son souffle chaud qui s'abattait sur ma main lorsque je prenais une feuille, à ses remarques rares mais agréables à entendre, à ses coups d'œil lorsque je lui apprenais quelque chose. Était-ce réciproque ?
Est-ce que Chan était autant dérouté par ma présence que je l'étais par la sienne ? Certainement pas, mais ça m'était égal. Il était là, à côté de moi, près de moi.
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comment trouvez-vous l'histoire ? pas trop planplan ? les péripéties arrivent bientôt (lol)
merci à tous celles et ceux qui lisent, votent, commentent, ça me fait super plaisir!!
bizou<3
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