21
Toute la semaine, Chan avait tenté des approches mais je n'avais pas cédé, à peine un regard ou un « salut ». Il avait mal parlé à Jeongin, il m'avait mal parlé. J'avais besoin de lui parler entre quatre yeux mais à chaque fois il me choppait les hanches alors que sa famille était en bas.
Vendredi soir, enfin libéré de ma semaine de boulot, j'avais prévenu Jeongin que ce soir j'irai dormir dans mon studio après un dîner avec ma mère. Ça faisait un bail que je ne l'avais pas vu et après le dîner, j'avais compris pourquoi.
J'adorais ma mère mais plus d'une heure, c'était trop. Elle était trop caractérielle, trop perfectionniste, trop trop trop.
Chan ne s'était pas fait attendre, à peine avais-je posé le pied hors de ma voiture qu'il s'était approché de moi.
- Qu'est-ce que tu fous là ? j'avais marmonné en fermant ma portière pour rentrer dans l'immeuble.
Mon amant me suivait de très près caché sous la capuche de son sweat, les mains dans les poches de son jogging. Si je n'avais pas vu son visage j'aurai probablement crié.
Une fois dans le studio, je nous avais servi un verre d'eau à chacun puis nous étions allés s'assoir dans mon lit.
- Je suis désolé 'Jin, bredouilla Chan sans oser me regarder dans les yeux.
- Pourquoi ? j'avais répondu d'un ton bien plus sec. Pour avoir fait pleurer Jeongin ? Lui avoir balancé des horreurs ? M'avoir parlé comme à un moins que rien ?
- Pour... Tout ça...
- Tu t'es excusé auprès de Jeongin ?
Il avait soupiré.
- J'ai essayé toute la semaine mais il m'a donné le même châtiment que toi.
- Il a eu raison. Tu te rends compte comment tu lui as parlé ? Il a pleuré toute la nuit ! Je ne l'ai jamais vu pleurer plus longtemps que quatre minutes ! Toute sa vie, il t'a considéré comme son modèle et toi, tu lui balances ça en pleine tronche à deux heures du matin.
- Je sais que j'ai merdé... Comprends-moi aussi, ça faisait des mois que je pensais plus à tout ça, j'avais enfin réussi à complètement tourner la page et il arrive en pleine nuit pour en parler comme si de rien n'était ! Ça m'a troublé, j'ai eu peur, alors j'ai réagi comme un con...
J'avais laissé un doute planer quelques minutes, juste pour me laisser le temps de poser la bonne question. Chan baissa la tête avant de soupirer tristement.
- Tu veux en parler ?
C'était tout ce que j'avais su dire. Je n'allais pas lui demander directement qu'est-ce que c'était que cette histoire de demi-frère, ou qui était son père biologique. Je voulais que ça vienne de lui-même.
- C'est compliqué 'Jin... Toute ma vie j'ai essayé d'oublier alors en reparler...
- Je comprends. Ne t'en fais pas.
- J'aimerais installer une confiance entre nous, reprit-il. Il releva la tête pour encrer son regard dans le mien. Parce que tu me plais. Vraiment.
J'avais dégluti avant de sourire doucement. Ça me faisait extrêmement plaisir qu'il me dise ça.
- Toi aussi. Tu me plais.
Nous nous étions embrassés puis nous nous étions allongés après avoir posés nos verres par terre. Calé dans mes bras, Chan et moi étions restés dans le silence un court instant.
- Je ne pensais pas tout ce que j'ai dit à Jeongin, me dit Chan. Bien sûr que c'est mon frère, bien sûr qu'il compte pour moi, bien sûr que je l'aime.
- C'est à lui qu'il faut dire ça.
- C'est difficile de parler de ses sentiments.
- Je sais. Mais c'est important.
Il acquiesça.
- J'ai fui mon père, mon passé, j'ai toujours essayé de me reconstruire mais il passe son temps à me courir après.
J'avais envie qu'il continue de m'en parler, seulement j'avais peur qu'à la moindre parole il allait se braquer et arrêter.
- Il était si... Méchant. J'ai toujours cette peur d'être comme lui. Un nouveau silence marqua un temps de pause. J'ai passé les trois premières années de ma vie à essayer de fuir un type qui était sensé me protéger.
J'avais resserré ma prise autour de son corps faible pourtant si musclé.
- Ma mère a mis du temps à le quitter, c'était si difficile pour elle. Elle faisait tout pour essayer de me protéger mais quand elle se prenait les baffes à ma place, j'essayais de la défendre comme je le pouvais, tu imagines bien que du haut de mon quatre-vingt centimètres c'était compliqué de rivaliser.
Putain.
Ma gorge se serrait au fil de ses mots. Si je n'avais pas si peur de le gêner, j'aurai pu pleurer.
- Chaque jour, il déglutit fort, c'était encore plus terrifiant que la veille. Un jour, ma mère a fini à l'hôpital. Les médecins ont fait un signalement à la police, une enquête a été faite et il est tombé. Il a pris encore plus que ce qu'on aurait imaginé alors on était content. Entre temps, maman a rencontré papa, enfin... le père de Jeongin et Taegwon, elle a trouvé un travail, on s'en est pas trop mal sorti en fin de compte, non ?
J'avais acquiescé alors que ma gorge me faisait mal. Je me sentais nul d'être sur le point de pleurer alors que c'était lui qui avait vécu tout ça.
Jamais je n'aurais pensé qu'il ait vécu ça.
Pour commencer, jamais je n'aurais imaginé qu'il n'était pas le fils biologique de son père.
- Quand ma mère a réussi à lui retirer tous ses droits parentaux, papa m'a adopté. C'était quelques mois après la naissance de Jeongin. Alors on est des vrais frères, bien sûr, et chaque jour je le remercie d'avoir sauvé ma mère.
Ma main se faufila dans ses doux cheveux pour les caresser, un geste simple mais j'espérais qu'il comprenait ce que ça signifiait. Que j'étais là, qu'il était en sécurité, que je l'aimais.
- Ma mère a tellement souffert, en partie par ma faute. Chaque matin, quand je me réveille, je me dis qu'elle aurait pu mourir à cause de moi. Si je n'étais pas né, elle n'aurait jamais eu à rester avec ce sale type. J'aurais aimé être celui qui la sauve, conclu-t-il.
Comment aurait-il pu sauver sa mère ? Il n'était qu'un bébé, complètement sans défense. Je suis heureux que sa mère ait eu la chance de réussir à s'en sortir. Maintenant, il fallait que Chan parle à son frère.
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