Chapitre 13
La phrase prononcée par Jong Suk mit quelques secondes à pénétrer dans le cerveau de Rin qui, après avoir compris, écarquilla les yeux de stupeur. Elle resta interdite pendant une minute. Son regard ne cessait de passer d'un soldat à un autre. Qu'allaient-ils lui faire ? Que faisait-elle là ? Pourquoi Kang lui avait-il ordonné une telle chose ? Etait-ce normal ? En avait-il le droit ?
Alors que ses pensées se mélangeaient dans sa tête en un puissant maelström, son corps prit les commandes et elle s'écarta vivement des deux hommes. Presque par réflexe, elle pointa son arme sur eux, même en sachant que cette dernière ne lui serait pas d'une grande utilité puisqu'elle n'était pas chargée.
- Que m'avez-vous demandé ? siffla-t-elle, les dents serrées.
Jong Suk ne lui répondit pas et s'avança d'un pas vers elle. Ses doigts se crispèrent sur la poignée de son pistolet et les muscles de ses bras se contractèrent sous l'effort phénoménal qu'elle entreprenait pour ne pas lui sauter à la gorge.
- Ne vous approchez pas de moi !
Impuissante, la jeune femme le vit esquisser un sourire en coin avant qu'il ne pointe son silencieux vers elle. Il pencha légèrement la tête sur le côté, lui laissant tout le loisir d'observer son visage réjoui de la voir dans une position compromettante.
- Qu'allez-vous donc me faire, Uchiyama ? C'est moi qui possède l'arme. Déshabillez-vous sans faire d'histoire, votre réticence me montre seulement que vous avez quelque chose à cacher.
Rin envoya une œillade désespérée à Tae Hwan. Il lui rendit un regard plus glacé que la mort elle-même. Elle qui avait cru réussir à le duper et à usurper sa confiance, elle s'était bien trompée. Mais cela ne résolvait pas ses multiples questions : pourquoi ne réagissait-il pas ? Son compagnon était en train de la menacer avec une arme chargée ! Pourquoi ne faisait-il rien ?
- Pourquoi ne dites-vous rien, Tae Hwan ? Ne vous rendez vous pas compte que ce qu'il demande est hors-la-loi ? Vous êtes son supérieur ! Vous avez le droit de lui interdire de faire un pas de plus ! Je croyais que nous avions réussi à nous entendre ! Tae Hwan !
La japonaise plaidait de tout son cœur. Elle ne pouvait se résoudre à se dévêtir devant eux. Elle ne s'abaisserait pas à une telle chose ! Jamais ! Ils pourraient marcher sur son corps, la blesser jusqu'au plus profond de son être mais jamais, au grand jamais, ils ne piétineront sa dignité de la sorte !
- Vous n'avez rien à dire à ce sujet, Uchiyama. C'est vous qui avez commencé à violer ces lois. Ne commencez pas à nous faire la morale, vous êtes bien pire que nous.
- Taisez-vous, Kang, lui cracha-t-elle au visage, je ne vous adressais pas la parole.
A ces mots, Jong Suk fronça les sourcils. Etait-elle encore capable de le provoquer de la sorte ? Décidemment, cette petite japonaise était pleine de surprise... quoiqu'exécrable. Quelle sotte !
- Je me fiche de savoir à qui vous parlez, ce ne sont pas mes affaires. Obéissez ou je tire.
Au fond d'elle-même, le Lieutenant était affolé. Elle regarda de tous les côtés, à la recherche d'une échappatoire qui ne vint pas. Et Jong Suk qui avançait toujours. Et Tae Hwan qui ne faisait rien. Et elle qui avait peur. Elle ne pouvait pas. Qu'il s'éloigne. Elle ne devait pas. Qu'il la laisse.
- Réagissez ! s'écria-t-elle, en dernier recours, alors qu'elle continuait de reculer inlassablement vers l'étendue verte où se dressaient les cibles.
Son cri strident sembla réveiller le Sergent Major puisqu'il posa sa large main sur l'épaule de Jong Suk, l'arrêtant dans son mouvement. Une bouffée de soulagement parcourut la japonaise qui baissa lentement son arme, tout en gardant un œil vigilant sur les agissements du soldat. Ce dernier mit plus de temps qu'elle à se calmer. Elle sentit qu'il se contrôlait autant qu'elle pour ne pas tirer.
- Laisse Jong Suk. Je vais m'en charger.
Abasourdie par les paroles de Tae Hwan, Rin recula encore d'un pas. Elle lui lança un regard dégouté ainsi qu'une grimace de dépit amer. Comment pouvait-il ? Elle qui lui avait donné sa confiance ! Elle qui lui avait demandé de la sauver ! Que faisait-il maintenant ? Que lui prenait-il ?
Elle brandit une nouvelle fois son arme chargée à blanc, mais cette fois-ci vers le Sergent Major. Celui-ci ne s'en préoccupa pas et, après trois pas, se retrouva en face d'elle. Il lui saisit brutalement le poignet avant de la tirer vers la sortie. Jong Suk ne détacha pas ses yeux d'eux et les suivit sans dire un mot.
- Suivez-moi sans faire d'histoires. Je ne tiens pas à utiliser la force sur vous.
La japonaise se débattit comme une belle diablesse et réussit même à se défaire de son emprise. Elle lui lança un regard brûlant de haine avant de sentir le canon d'une arme pointé entre ses omoplates. Elle se figea aussitôt et son visage se ferma.
Qu'il tire. Qu'il la blesse. Qu'il ose seulement.
- Jong Suk !
La voix de Tae Hwan claque dans l'air.
- Je t'ai dit de me la laisser. Je n'ai pas besoin de toi, tu peux partir.
Rin entendit un grognement dans son dos et le métal froid du silencieux glissa sur sa peau. Un frisson la parcourut toute entière et elle serra les points pour ne pas qu'ils le détectent. Un léger rictus prit place sur ses lèvres quand Jong Suk passa à côté d'elle, la frôlant plus qu'il n'aurait dû.
- Pauvre petit, obligé d'obéir à plus fort que lui, ricana-t-elle.
- Encore un mot et c'est le soldat Kang qui s'occupera de vous, l'interrompit Tae Hwan d'une voix glaçante, je ne suis pas sûr que cela vous convienne particulièrement.
Rin scella ses lèvres en une ligne aussi fine qu'un fil de fer et se tut. Le soldat en profita pour la narguer. Il ne lui parla pas, ne la toucha pas mais lui renvoya son rictus en pleine figure. Les pupilles de la jeune femme se rétrécir jusqu'à ne devenir que deux minces fentes. Elle se contint pour ne pas lui cracher son mépris au visage et détourna son regard dans une attitude fière et insultante.
- Assez d'enfantillages. Venez maintenant. Jong Suk, dit-il en se tournant vers son camarade, je ne veux pas que cela soit raconté au Général, est-ce clair ?
Le soldat Kang inclina légèrement la nuque, ne posant pas de questions. De toute façon, jamais il ne serait allé de son plein gré raconter tout cela au Général. Ce n'était pas du tout son genre. Et, même si la demande de son aîné l'intriguait, il savait tout de même respecter un ordre quand il le trouvait juste et justifié.
- Si jamais tu as besoin d'aide, appelle-moi, dit-il à Tae Hwan avant de s'éclipser, adressant un dernier regard menaçant à la japonaise qui lui répondit de la même façon.
Une fois seuls, le Sergent Major reprit violemment le poignet de la jeune femme et la tira vers la sortie. Elle se démena un court instant avant qu'il ne lui broie les os et qu'elle se décide à se calmer, au moins dans l'espoir de garder l'usage de sa main.
Ils parcoururent les couloirs du Quartier Général au pas de course. Tae Hwan s'arrêtait régulièrement au détour d'une allée, jetant de brefs coups d'œil à la recherche d'un quelconque témoin. Ils arrivèrent rapidement dans les quartiers des Forces Spéciales, Rin reconnut tout de suite la porte de sa chambre.
Malheureusement pour elle, le Sergent Major continua son chemin et entra dans une pièce voisine de de celle de la japonaise. Il la balança à l'intérieur sans douceur avant de refermer à double tours derrière lui.
Ne sachant pas où elle se trouvait, Rin se réfugia le plus loin possible de cet homme. Elle se plaça stratégiquement à côté de la fenêtre, tout en restant assez proche du bureau où s'étalaient toutes sortes de choses, allant du simple stylo au vase dans lequel mourrait une fleur fanée.
D'une main habile, elle ouvrit la vitre et colla son dos à la poignée pour ne pas qu'il remarque son petit manège. Cette position était tout sauf confortable, mais au moins, elle tenait sa sortie de secours. Elle laissa son regard observer au dehors, analysant ses possibles chances de survie si elle sautait de cette hauteur, autant dire tout de suite qu'elle se tuerait. Mais peut-être était-ce sa seule échappatoire ?
Un toussotement la fit sortir de ses pensées et elle se reconcentra sur le soldat en face d'elle. A sa plus grande surprise, son masque froid tomba alors qu'il passait une main fatiguée sur son visage. Il se laissa tomber sur le canapé qui reposait contre le mur et regarda la japonaise.
- Vous pouvez lâcher cette fenêtre, Rin – permettez que je vous appelle de cette façon – je ne vais rien vous faire.
Quoiqu'encore méfiante, la jeune femme fit ce qu'il dit et le bruit de la poignée qui se ferme brisa le silence qui s'était installé entre les deux. Elle se décolla de la vitre et garda les bras le long du corps, attendant la suite qui ne vint pas. Elle resta tout de même sur ses gardes, ne sachant pas ce qui pouvait surgir de derrière la porte de la chambre.
- Pourquoi ? finit-elle pas demander, sans émotion aucune dans la voix.
Elle crut voir le soldat sourire et s'en étonna encore plus. Mais que lui prenait-il à la fin ? Que s'était-il passé entre le moment où il l'avait amené de force ici et cet instant-ci ?
- Ne craignez rien, vous êtes en sécurité ici.
La jeune femme grimaça et croisa ses bras sur sa poitrine, pas convaincue le moins du monde.
- Comment pouvez-vous en être sûr ?
Cette fois-ci, l'homme se laissa aller et un rire profond sorti de sa gorge. Il se repositionna entre les coussins et croisa ses mains sur ses genoux.
- Parce que vous êtes, en ce moment-même, dans ma chambre. Et si je sais bien une chose, c'est que personne d'autres que moi-même ni à jamais mis les pieds, et personne ne se risquera à le faire.
Elle fronça les sourcils. Alors comme ça, personne n'avait encore pénétré dans cette pièce... intéressant... Le Sergent Major était-il aussi terrifiant que ça pour qu'aucun autre occupant de cette gigantesque base militaire n'ait osé poser un pied ici ? Tout cela était très étrange... D'ailleurs, pourquoi elle ? Elle n'était qu'une prisonnière, dangereuse qui plus est, alors que faisait-elle ici ?
La question lui brûla les lèvres trop longtemps et elle finit par l'énoncer à voix haute. Ne se souciant plus du tout des conséquences que cela pourrait avoir par la suite.
- Pourquoi moi ?
Le regard intense que lui adressa Tae Hwan la troubla au plus profond de son être. Quel était donc cet étrange sentiment ? Maintenant qu'elle avait posé sa question, elle ne voulait surtout pas attendre la réponse. Malheureusement, c'était bien trop tard pour s'inquiéter de ça.
- Vous l'avez dit vous-même : nous commencions à nous entendre, expliqua-t-il du bout des lèvres et ses mots flottèrent dans l'air de la pièce.
Rin baissa aussitôt la tête. Qu'avait-elle fait ? Et pourquoi se sentait-elle coupable tout-à-coup. Elle n'avait fait que remplir sa mission, rien d'autre. C'était ce qu'elle avait voulu : réussir à se rapprocher de lui. C'était exactement ce qui était en train de se passer, alors pourquoi éprouvait-elle des remords à l'idée d'avoir réussi ?
- Si vous n'avez rien à me dire de plus... je... je vais m'en aller.
Elle hésita quelques secondes avant de faire un pas vers la sortie. Tae Hwan ne semblait pas de cet avis puisqu'il la retint en effleurant son bras de ses doigts.
- Restez s'il vous plaît, j'ai des choses à vous demander.
Sans se retourner, Rin se stoppa, le dos parfaitement droit et les poings serrés. Elle ferma ses paupières et reprit sa respiration. Il fallait qu'elle se calme. Il n'allait rien lui arriver, tout allait bien.
- Allez-y, souffla-t-elle.
Elle sentit qu'il se lever du canapé puisqu'il vint se poster juste derrière elle. Un peu plus et il la prenait dans ses bras.
- Pourquoi Jong Suk souhaitait-il vous voir vous déshabillée ?
Au fond d'elle-même, Rin se crispa. Ce qu'elle redoutait le plus venait d'arriver. Si jamais l'un d'eux en venait à découvrir ce qu'elle cachait, elle était finie ! Elle se mordit la lèvre inférieure et réfléchit à ses mots avant de les énoncer :
- Mmh... je ne sais pas trop... sans doute pour me ridiculiser une fois de plus...
Un silence pesant suivit ses paroles et elle s'en inquiéta aussitôt. Voilà qu'elle allait même devoir faire attention à ses mensonges !
- Je vois que vous ne me faites toujours pas confiance pour me révéler une telle chose, soupira l'homme dans son dos.
Sur ces mots, il déposa ses larges mains sur les épaules de la jeune femme qui, sous ce contact, dû se faire pression pour ne pas se dégager violemment. Les jointures de ses mains en devinrent blanches et elle mordit l'intérieur de ses joues jusqu'au sang. Il fallait qu'il la lâche. Elle ne tolérait pas qu'on la touche de cette façon. Le contact masculin la répugnait au plus haut point, surtout quand celui-ci se voulait réconfortant et bienveillant. Elle exécrait de tels gestes d'affections.
- J'espère que vous arriverez à me croire un jour.
Rin ne tenait plus, elle avait même arrêté de l'écouter. Elle se détacha rapidement de son emprise – peut-être un peu trop en vue du regard peiné que lui adressa le soldat. Elle s'inclina légèrement devant lui et prit la porte, presque en courant.
Une fois dans le couloir, elle prit une grande bouffée d'air frais pour se remettre les idées en place. Cela devenait dangereux pour elle. Il fallait qu'elle fasse terriblement attention maintenant. Elle ne savait pas quoi s'attendre avec Tae Hwan. Elle avait surtout peur de ne pas être assez forte pour résister à cela.
- Noona ?
Rin sursauta et découvrit le visage inquiet de Mark. Elle se composa aussitôt un masque serein et presque souriant pour ne pas que le jeune soldat lui pose des questions.
- Mark ! Comment vas-tu ? lui demanda-t-elle comme si rien ne s'était passé plus tôt dans la journée.
Il lui sourit sincèrement, avec toutefois une lueur inquiète dans le regard.
- Ca va. Et vous Noona ? Vous n'avez pas l'air bien... que faisiez-vous chez Tae Hwan Hyung, quelque chose ne va pas ?
Elle détourna la tête et jura entre ses deux. Et elle qui croyait être seule dans ce couloir. Elle se recomposa un visage calme et adoucit ses traits. Elle prétendit soudainement à une extrême fatigue et s'excusa rapidement auprès du membre de l'unité des « Flying Tigers ».
- J'aurai bien voulu rester plus longtemps, Mark. Mais je commence à avoir extrêmement mal à la tête, lui mentit-elle effrontement.
- Oh ! Je suis désolé, Noona ! répondit-il, tout confus, je ne voulais pas vous embêter ! Vous avez besoin d'aide pour retourner dans votre chambre ou ça va aller ? Dites-moi si je dois aller vous chercher des médicaments à l'infirmerie, ça ne prendra pas longtemps !
Rin nia de la tête. Cela ne valait pas le coup. Elle souhaitait seulement rester seule, rien de plus. Elle ne voulait voir personne, et surtout pas un des camarades du Sergent Major Lee ou encore du soldat Kang.
- Ce n'est pas la peine, mes migraines passent rapidement et j'en ai l'habitude. Ne t'occupe pas de moi et continue ce que tu as à faire, Mark. Tes Hyung vont s'impatienter, sinon.
Le jeune soldat s'inclina respectueusement devant elle et s'éclipsa sans un mot.
Après son départ, la jeune femme se précipita dans sa chambre et claqua la porte dans son dos. Elle fut soudainement prise d'une bouffée de chaleur. D'un geste, elle enleva sa veste et la jeta sur son lit. Elle alla ouvrir en grand sa fenêtre, laissant l'air frais emplir la pièce. Ses bras dénudés furent parcourus d'une agréable brise glacée et, bientôt, son haut suivi sa veste et finit sur la couverture.
Rin était en brassière, recroquevillée sur son lit. Elle colla ses cuisses contre sa poitrine et enfouit sa tête entre ses genoux. Une fatigue la prit et elle se laissa aller dans son lit. Elle finit par se blottir contre son oreiller et sombrer dans les bras de Morphée, quoique son sommeil fût agité.
La japonaise se réveilla le lendemain matin, alors que des gouttes vinrent s'écraser sur sa peau pâle. Elle ouvrit ses paupières encore ourdies de sommeil avant de les écarquiller en se rendant compte qu'elle avait laissé sa fenêtre ouverte toute la nuit et que l'eau sur son épiderme était due à la pluie torrentielle au-dehors. Elle s'empressa de fermer les portes vitrées et lâcha un immense soupir. Si à cause de cette nuit passée, elle n'était pas tombée malade, c'était que la chance était de son côté.
D'un mouvement vif, elle sortit de son lit en effectuant un bond et se dépêcha d'aller prendre une douche brûlante pour se réchauffer. Son moment dans la salle de bain ne dura pas bien longtemps et, pendant qu'elle s'habillait, elle tourna le dos au miroir quelque peu abimé dans sa chambre.
Son regard charbonneux capta son reflet et elle stoppa son geste. Lentement, elle fit glisser le vêtement qu'elle comptait mettre sur le sol. Elle croisa ses bras pour cacher sa poitrine et se tourna de façon à ce que son dos apparaisse en entier dans la surface miroitante.
Un voile de rage et de tristesse passa dans ses yeux. Elle effleura de la pulpe de son doigt son épiderme qui frissonna sous ce contact à peine perceptible. Cela faisait bien longtemps que plus aucune cicatrice ne s'étalait sur son dos, autrefois d'une pâleur mortelle. Ses muscles, secs et fins, n'étaient plus les seuls à définir son dos.
Un majestueux dragon y régnait, comme maître de cette peau et de ce corps marqué à jamais.
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Bisoir ~
Voici donc ce dernier chapitre avant les vacances ! Halléluia !
J'espère que vous appréciez la suite de Secret ! En attendant, n'hésitez pas à commenter et à me laisser une petite trace de votre passage, ça me fait toujours immensément plaisir !
Je vous aime mes tigrous en sucre <3
Sweety ~
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