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            Nous faisons face à une maison imposante, la lune pleine et les quelques lumières extérieures me permettent de voir comme en plein jour. L'architecture n'a jamais été mon truc mais je suis subjuguée par la beauté de cette maison. Avec ces murs blanchis à la chaux et ces pans de bois couleur rouge, elle me semble typique de la région. Sur le trajet, menant à celle-ci j'avais découvert beaucoup de maisons lui ressemblant mais en moins imposante. Un immense jardin peuplé de fleurs entoure la maison. J'ai toujours adoré les fleurs et je souhaiterais m'y attarder un peu plus afin de les reconnaître chacune et d'y retrouver le réconfort et l'apaisement qu'elles me procurent. Une main se pose sur mon épaule et je manque de me casser la figure si Julen ne me m'avait pas rattrapé pas le poignet.

           Je me répète, tous va bien tout va bien, tu n'es pas à Lyon pas avec Nathanaël, tu es a des centaines de kilomètres. Respire, inspire... expire... facile à dire quand on est terrorisé. Avec crainte j'ose regarder dans les yeux de Julen et son regard me trouble et m'apaise. Dans ces yeux je lis son angoisse et son incompréhension face à mes réactions disproportionné depuis qu'il me connait. Je ne m'attarde pas sur ces craintes mais je reste plongé dans son regard cristallin, ce regard bleu pénétrant est comme un baume sur mes propres angoisses. Lorsqu'il capture mon regard et qu'il essaye de me faire passer un message rien qu'avec son regard, je sens les tensions une à une faiblir et détendre un à un mes muscles.

          Nous ne nous lâchons plus du regard, oubliant ou nous sommes, chacun essayant de lire les pensées de l'autre. Sa main n'a toujours pas lâché la mienne et par ce simple contact sa chaleur se propage dans tous mon corps mais nous sommes vite coupés par le bruit de la porte d'entrée.

              Je sursaute comme si j'avais été prise en faute, je n'ai rien fait de mal, il faut que j'arrête de penser que tous ce que je fais est toujours une erreur. Je ne suis pas parfaite, Nathanaël me l'a répétée mainte fois, mais cela ne m'empêche pas de vivre et de devenir la fille imparfaite la plus heureuse.

             Une femme d'un certain âge s'avance doucement vers moi, comme si elle s'approchait d'un animal apeuré. C'est l'image que je dois donner et je comprends qu'elle a l'habitude de parler avec des personnes comme moi. Elle n'a pas dû côtoyer que Ludivine mais elle a dû sauver encore beaucoup d'autres personnes. Elle est habillée d'une grande robe blanche qui descend jusqu'à ces pieds et est recouverte d'un grand châle rouge lui recouvrant les épaules qu'elle tient serré contre elle. Elle a un visage très doux et vieillit par le soleil. Ses cheveux sont attachés en un chignon lâche d'où je peux apercevoir quelques mèches blanchis par les années mais qu'elle n'essaye pas de cacher.

            L'apparence est tellement importante chez nous, ma mère aurait couru au premier salon de coiffure pour teindre rapidement les quelques traces du temps. Aucunes marques de vieillesses ne peuvent faire défaut à ma mère, le coiffeur lui prodigue de bonne coloration qui lui vont à ravir et les salons d'esthétiques lui vendent une multitude de pots de jour comme de nuit à se tartiner le visage pour éviter l'apparition de rides.

             Les quelques rides que j'aperçois sur le visage de mon hôtesse me rassure et me montre qu'elle n'est pas comme les personnes que j'ai quittées. Elle vit la vie et n'essaye pas à tous pris de ralentir le temps ou de regarder derrière elle.

- Vous comptez dormir là, ce n'est pas que je vous aime pas mais moi je commence à me geler. Bonsoir maman (il l'embrasse sur la joue et se retourne vers moi). Je monte ta valise dans ta chambre, maman la chambre rose ?

            Elle hoche simplement la tête et il fonce dans la maison sans se retourner. Par ces paroles je comprends que j'ai dû passer beaucoup de temps à détaillé sa mère en essayant de la comparer à le mienne. Combien de temps suis-je restée murer dans mon silence. Je baisse les yeux, j'ai tellement honte de mon comportement, je montre que je suis une personne grossière et sans éducation. Moi qui voulait donner une bonne image de moi dès les premiers instants pour qu'il ne change pas d'avis et ne me renvoi pas par le premier train.

- Je suis désolé... (je sanglote presque) pardonnez-moi de .... (Je n'ose toujours pas la regarder tellement j'ai peur de découvrir de la colère dans ces yeux ou du dégoût)

- M'avoir regardé (elle rigole) ne t'inquiète pas (elle me lance un clin d'œil) j'en ai fait de même.

               Elle a les mimiques que son fils et je l'apprécie déjà. Sans ménagement elle passe un bras sur mes épaules, comme une étreinte pour me souhaiter la bienvenue et nous marchons jusqu'à sa maison. Elle me parle tous bas, me berce par ces mots si rassurants :

- Moi c'est Ana et à partir de maintenant on se tutoie, tu vas vivre dans ma maison et nous allons nous parler beaucoup toutes les deux. Cela sera beaucoup plus simple comme ça. Tu peux me faire confiance je suis là pour t'aider. Mon mari se nomme Antton (je cherche le personnage à travers les fenêtres), tu ne le verras pas ce soir. Il est un peu rustre au premier abhorre, comme mon fils, mais ce sont de vrai nounours.

- Euh... OK.

- Je suis désolé de ne pas avoir pu t'accueillir à la gare mais à cette heure –ci... et puis notre fils était dans le même train que toi... donc on a sauté sur l'occasion... j'espère que tu nous en veux pas trop ?

              Nous marchons aux ralentis comme –ci ce qu'elle souhaitait me dire ne pouvait se faire que sur l'extérieur et non à l'intérieur de la maison.

- Ne vous inquiétez pas c'est déjà très gentil de me recevoir (elle me fait les gros yeux et je suis un instant perdu).

- Recommence ta phrase en me disant tu, ce sera beaucoup mieux. N'oublie pas une chose notre famille est connue ici dû à notre activité, nous avons commencé à parler de toi surtout à notre fils. Tu es la fille d'une amie qui souhaitait changer d'air.

- D'accord je vais tout faire pour ne pas vous... te porter préjudice.

- L'erreur est humaine et je serais heureuse que tu fasses des bêtises comme n'importe quelle fille de ton âge mais il faudra que tu fasses attention sur les liens qui nous unisse pour le reste de notre entourage.

- J'ai compris.

             Nous nous arrêtons maintenant pile devant leur grande porte en bois, elle me retourne, prend délicatement mon menton et le maintien en douceur mais fermement pour que je ne baisse pas le regard. Je remarque automatiquement qu'elle a les mêmes yeux que son fils et que son regard m'apporte autant de bien être que son fils. Je lis chez l'un comme chez l'autre tellement de douceur et d'empathie.

- Je ne sais que très peu de chose de toi mais je serais heureuse d'apprendre à te connaître. Tu peux te confier à-moi si tu veux je serais ta confidente, si tu à peur je serais là pour te rassurer et si tu es triste je serais là pour te réconforter. Ludivine est mon amie, elle avait confiance en moi et je suis sûre que tu te fies à son jugement.

- Merci, je ne sais pas... comment te remercier ?

- Ne me remercie pas tous de suite je vais être toujours derrière ton dos (elle se met à rire toute seule comme si elle venait de dire une bonne blague). Quand tu passeras le pas de la porte je te considérerais comme ma file. Cela à ces avantages mais aussi ces inconvénients.

- Permettez-moi... permet moi d'en doutez. Je ne vois pas ce qu'il y'à de mal d'avoir une mère qui veille sur sa fille.

- Sache que je suis une mère qui angoisse très vite et qui est surprotectrice donc aux vues de ton passé je serais peut-être un peu trop surprotectrice. Mon mari sera souvent là pour me faire revenir à la raison mais je préfère te prévenir.

              Je n'ai jamais été une fille tactile enfin au plus loin que je m'en souvienne. Ma mère m'a toujours dit que je devais me fier à mon jugement et que je devais faire mes choix seuls pour apprendre de mes erreurs. Avoir une personne qui ne me connait ni d'Adam ni d'Ève et qui me soutient en m'annonçant qu'à partir de ce jour je deviens sa fille adoptive, qu'elle sera toujours là en cas de nécessité pour me protéger et me rassurer je ne me retiens plus et je fais la chose la plus naturel celle que je rêvais de faire un jour avec ma mère. Je la serre dans mes bras et pleure à chaude larmes en lui murmurant le seul mot que je connaisse qui définit au mieux mon état d'esprit "merci". Elle est surprise de mon initiative et de ma réaction face à ces paroles qui sont pour elle tout naturelle mais pour moi en quelques minutes elle en a fait plus que toutes ma famille ou mes amis réunis.

- Oh, ma puce, ne me remercie pas. (Elle me serre encore une fois dans ces bras et me desserre de son étreinte en me tenant toujours par les épaules). Ici c'est ta maison, tu fais ce que tu veux, tu nous aideras juste un peu pour l'entretien de la maison ce sera ta part pour vivre ici.

- Ce que tu veux.

- Bien, que je sache, tu es majeur et vacciné donc tu es libre de tes mouvements mais je veux savoir où tu vas et quand tu reviens. Je ne veux pas les détails ni pourquoi tu y vas, cela ne me regarde pas c'est ta vie. Mais je dois savoir s'il t'est arriver quelques choses, on ne sait jamais...

               Je comprends soudain quel parle de Nathanaël, elle veut savoir mes déplacements et mes heures de retour car si je ne rentrais pas elle serait automatiquement qu'il m'aurait retrouvé. Je tremble à l'idée de le recroiser ce qui signerais ma fin.

- Allée assez d'émotion pour aujourd'hui, rentrons ou nous allons mourir de froid.

                Nous entrons dans la maison et je la suis. Face à nous un grand escalier montant à l'étage très certainement aux chambres. À ma droite je vois un spacieux salon mais je ne peux distinguer grand-chose vu qu'il n'y qu'une veilleuse d'allumer. À ma gauche une grande cuisine toute coloré de rouge et de blanc avec des piments suspendus. Mais je m'arrête devant la contemplation de cette cuisine ultra moderne sur Julen assis à table lisant le journal une tasse de café à la main.

- Vous en avez mis du temps (il nous regarde d'un œil suspicieux), vous faisiez quoi ?

- Oh tu sais ce que c'est les retrouvailles entre filles.

- Non justement et tu ne m'avais jamais parler d'elle. Je n'ai pas le souvenir d'une dénommé Pandora.

- Toi ? écouter ? c'est nouveau, mais tu connais mon amie Ludivine c'est sa fille.

- Elle a une fille maintenant ?

- Tu vois que tu n'écoutes pas, oui elle est devant toi et elle l'a depuis vingt ans.

- OK, si tu le dis (il lui sourit affectueusement), bon je te laisse maman je dois me lever tôt demain j'ai pas mal de boulot qui m'attends.

- Pas de soucis mon chéri, ne te fatigue pas trop et n'oublie pas de venir dimanche pour déjeuner.

- Tout dépendra du monde maman tu le sais très bien.

- On se tient au courant, tu viendras pour le café sinon...

- Oh, les mères...

            Il s'adresse à moi avec un grand sourire et un clin d'œil complice comme si je savais de quoi il parlait. Comme si la relation qu'il avait avec sa mère était la chose la plus naturelle. Il l'embrasse sur la joue, me regarde un instant hésitant s'il pouvait faire la même chose avec moi. Il doit déceler ma peur car avec un sourire plus timide il me murmure plus qu'il me parle :

- Bonne nuit Pandora

- Bonne nuit Julen

          Le silence s'éternise et j'ai l'impression qu'il dure plusieurs minutes alors que je suis persuadée que cela ne fait que quelques secondes lorsque qu'Ana reprend la parole.

- J'ai le sentiment d'avoir rater quelques choses mais je n'arrive pas à déterminer quoi. (Je suis toujours muette). Bref, il se fait tard je vais te montrer ta chambre.

          Nous reprenons le chemin de l'entré mais cette fois nous prenons le grand escalier, il dessert un long couloir avec quatre grande portes toutes fermés. Elle me montre la première sur la gauche

- Cette chambre est la nôtre. Si tu as besoin de quoi que ce soit, je te le répète, tu peux venir. De jour comme de nuit.

- Merci c'est trop.

- La seconde (elle fait un geste de la main comme si je n'avais rien dit) celle juste à côté de notre chambre est l'ancienne chambre de notre fils (je commence à me diriger vers celle-ci mais elle continue de parler ce qui me stop), celle en face est ta chambre. Tu ne croyais pas que j'allais te faire dormir dans la vieille chambre d'adolescent de Julen ? (Je suis rouge de honte.) Pas pour les raisons que tu crois mais cela doit sentir encore les vieilles chaussettes je n'ai pas encore eu le temps de la redécorer.

- A OK

- En plus dans celle que je t'ai choisi tu as ta salle de bain privé.

- Mais c'est beaucoup trop, Ana. Je me serais contentée de l'ancienne chambre de Julen même si elle sentait la vielle chaussettes. Tous ce que vous faites je ne le mérite pas.

- Je ne sais pas pourquoi mais je suis sûre que tu feras de grande chose et ce jour-là je suis certaine que tu trouveras le temps de me remercier.

          Elle m'ouvre la porte devant ma nouvelle chambre, le lieu qui sera mon refuge. Je suis estomaquée par la taille de la chambre et par le raffinement. Une chambre dans les tons de blanc et rose poudré. Tous les meubles ont l'aire ancien surement repeins pour la nouvelle décoration. Je n'arrive pas à croire que c'est ici que je vais construire ma nouvelle vie, j'ai l'impression de vivre un rêve. Si c'est le cas, ne me réveiller surtout pas. Pourtant ma valise et mon sac à dos sont bien posé, toujours fermé, sur le lit. Je fais le tour du propriétaire rapidement je vois une porte fermée surement la salle de bain que m'a parler Ana. Un bâillement me fait réaliser que je ne suis toujours pas seul.

- Excuse-moi je commence à fatiguer, je vais aller rejoindre mon époux. N'hésite pas si tu as besoin de quoi que ce soit.

          Encore une fois je me précipite dans ces bras, je ne suis pas une personne tactile et je ne sais pas pourquoi j'aime autant me réfugier dans ces bras que je ne connais pas. Mais c'est la seule manière que je trouve pour lui montrer mes remerciements le plus honnêtement. Elle me rend mon étreinte en me serrant me dépose un baisé sur la joue et commence à s'éloigné. Elle se fige quelque instant puis se tape le front. Je me demande avec inquiétude ce qui a pu la faire réagir ainsi.

- Je savais que j'avais oublié quelque chose, tu as rencontré mon fils mais dès demain soir c'est aussi ton employeur. (Oh, non...). Comme je te l'ai dit et Ludivine à du te l'expliquer il n'est au courant de rien et c'est moi qui gère la logistique de la boite. Il savait qu'il avait un nouvel employé mais lui non plus ne sais pas que c'est toi (nous voilà beau).

- Euh...

- On en parle demain matin ? On à toute la journée pour en discuter.

- OK

- Je sais que cela fait beaucoup pour toi, tu as montré beaucoup de courage pour faire ce que tu as fait mais il va-t'en falloir encore pour poursuivre ce que souhaites.

          Sur ces dernières paroles elle me quitte en fermant la porte. Je me dirige vers la porte fermée et découvre une salle de bain magnifique avec une grande baignoire. Un bon bain me fera le plus grand bien pour analyser tous ce qui s'est produit et toutes les révélations que ma fait Ana. Je récupère dans ma valise un pyjama pose ma valise au sol, je m'en chargerais plus tard et me dirige vers la salle de bain. Je fais couler l'eau chaude de la grande baignoire et commence à me déshabiller. Je découvre sur un pan de mur un très grand miroir, une coquetterie que toute femme rêve d'avoir pour se contempler une fois prête de tous son long.

           Je n'ai jamais aimé les miroirs les seules fois ou je me suis regardé dans ceux-ci c'était pour cacher un énième bleu ou blessures. Je me promets que plus jamais un homme ne me touchera de cette manière. L'amour ne se compte pas aux nombres de marques que vous portez sur le corps. Un à un j'enlève mes vêtements révélant des cicatrices encore roses d'autres plus profondes et blanches qui ne s'effaceront jamais. Des petites marques bleues à certains endroits et d'autres plus grosses vertes violettes. Mon corps ressemble à une palette de peinture ou à un arc en ciel c'est un peu plus poétique. Je me gifle mentalement qui peut trouver que c'est poétique un corps meurtri ?

           Je force mes yeux à faire ce que jamais je ne m'autorisais, les obliger à lever le voile qui les faisaient vivre dans le déni. Je m'oblige à inspecter chaque marque, chaque couleur de ma peau, chaque meurtrissure. Je serre les poings m'enfonçant mes ongles dans mes paumes et je verse enfin les larmes de tristesse de ce qu'il m'a fait perdre, de colère contre ma famille et contre moi-même, la haine et le dégoût que m'apporte Nathanaël face à tous ce qu'il a pu m'infliger.

            JE SUIS COURAGEUSE.

            Je me plonge dans mon bain pour effacer toute la peine et toute la rancœur que j'ai pu lire dans le miroir. Je m'autorise d'évacuer tous ce que je ressens, demain est un autre jour. Je n'oublierais jamais qui je suis et d'où je viens mais demain une nouvelle Pandora renaîtra, une Pandora forte qui fera des erreurs mais qui apprendra de celles-ci. Qui sera fière de tous ce qu'elle fera et qui réussira. Je vais devoir apprendre à vivre avec la peur, je suis encore réaliste je ne pourrais l'éradique du jour au lendemain de ma vie mais un pas après l'autre. Il arrivera un jour ou je n'aurais plus peur ou je vivrais ma vie sans me retourner de peur de retrouver Nathanaël et ce jour-là je serais la fille la plus heureuse qui existe. En attendant ce jour, je serais courageuse car le courage est la seule chose qui me fera avancer chaque jour vers ce bonheur suprême inaccessible pour l'instant.

Il n'a point de bonheur sans courage, ni de vertu sans combat. Jean Jacques Rousseau  

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