🏵️ chapitre 8

Chan venait de terminer de préparer son sac. Il y avait glissé quelques vêtements de rechange et s’il n’en avait pas assez, il pourrait toujours s’arrêter à un lavomatique. Il se redressa et fronça les sourcils. C’était sans doute ce que Minho était obligé de faire puisqu’il n’avait pas de domicile fixe. Il se demanda s’il avait des amis chez qui il pouvait parfois s’arrêter. Outre les camarades qu’il avait à Santa Cruz — et Chan finit par se dire qu’ils ne devaient pas être si proches en réalité — Minho avait l’air plutôt solitaire.

Il soupira. Il avait promis de ne pas lui poser de question, mais cela ne signifiait pas qu’il ne pouvait pas s’en poser tout seul dans son coin. Il obtiendrait peut-être des réponses sans chercher, c’était tout ce qu’il pouvait espérer pour connaître davantage Minho sans passer pour un curieux. Il espérait vraiment qu’il soit assez en confiance à ses côtés pour s’ouvrir un peu plus. Il l’intriguait, car il pouvait se montrer aussi froid qu’exubérant. Il avait envie de briser cette carapace qui, il en était certain, cachait une faiblesse. Seulement, il ne devait pas braquer Minho au risque de tout perdre.

Il observa son sac un long moment, il n’avait plus aucun doute quant au fait qu’il avait pris la bonne décision. Il voulait continuer son chemin dans cette direction, passer du temps avec le jeune homme qu’il venait de rencontrer et qui lui retournait la tête. Il ne précipiterait pas les choses, il prendrait ce que Minho voulait bien lui donner et il ne pouvait que croire qu’il ferait tomber le masque à force de le côtoyer.

Il était aussi rassuré que Felix lui ait donné son aval, il était même heureux pour lui. Ça lui faisait chaud au cœur de savoir que son cousin ne lui en voulait pas. Et puis, ce dernier pourrait passer un peu plus de temps avec Dario.

— Alors, t’as terminé ?

Il se retourna d’un bond, une main au niveau du cœur. Felix, dans l’encadrement de la porte de sa chambre, lui adressa un petit sourire. Chan le lui rendit et fit un petit signe de tête.

— Je crois que j’ai tout.

— Ça va aller ?

— Oui, t’inquiète pas pour moi. J’vais pas faire de folies, juste voyager un peu.

— Et t’envoyer en l’air.

Chan lâcha un petit rire, amusé par la réflexion de son cousin. Il n’avait pas tort, c’était clairement une activité qui faisait partie du programme, surtout avec un gars comme Minho. Il n’allait pas s’ennuyer.

— J’ai pas raison ? demanda Felix.

— Si, bien sûr. Comment veux-tu qu’on se retienne ? Des vrais animaux, s’amusa Chan.

Ils s’observèrent un moment, un petit rictus aux lèvres. Felix entra dans la chambre et s’approcha de son cousin, les bras écartés. Il les enroula autour de sa taille et le serra contre lui de toutes ses forces. Chan l’étreignit tout aussi puissamment, en lui caressant le dos. 

— Tu vas me manquer.

— Toi aussi Lix, vraiment.

— J’espère que tu vas t’éclater, passer du bon temps, et pas te retrouver dans des histoires de merde.

Chan se recula légèrement pour l’observer.

— T’inquiète pas pour ça, je suis sûr que ça ira.

— Promis ?

Il acquiesça.

— Minho est peut-être spécial, c’est pas un délinquant.

— Hm, j’espère. Et fume pas trop, garde toujours les idées claires.

— Je suis un grand garçon. J’vais pas faire de conneries, je te le jure.

Felix acquiesça, même si dans ses yeux, Chan pouvait y lire une certaine inquiétude. Il comprenait que son départ le tracassait, il allait tout de même voyager dans le pays avec un — presque — inconnu, loin de sa famille et de ses repères. Il était adulte, certes, et il ne pouvait pas lui interdire de faire ce dont il avait envie, mais Felix ne pouvait s’empêcher de s’en faire pour lui.

— Je te passerai des coups de fil d’une cabine pour te donner des nouvelles assez souvent.

— J’espère bien !

Felix lui asséna une tape sur l’épaule et Chan se massa, feignant d’avoir mal.

— Et oublie pas ton avion aussi, ce serait bien !

Cette fois, il grimaça. Pour le moment, il n’avait pas vraiment envie de penser au jour où il devrait quitter la Californie. Il voulait juste profiter des deux semaines à venir, sans se mettre la pression, sans anticipation. Il retournerait bien trop vite à Séoul pour être obligé de se focaliser sur son retour. Il aurait de nouveau ses parents sur le dos, devrait retourner à l’université et reprendre son job étudiant pour espérer pouvoir refaire un voyage comme celui-ci. Il voulait pouvoir revoir Felix, sa famille, peut-être même Minho si le destin en décidait ainsi. Mais là, il était sur place, alors il ne devait penser qu’à l’instant présent.

Un bruit de klaxon retentit en bas de la maison et Chan s’empressa de courir à la fenêtre qui donnait vue sur la rue. Son sang ne fit qu’un tour et son cœur se mit à tambouriner dans sa poitrine quand il remarqua le van orange, à moitié arrêté sur le trottoir. Minho n’était absolument pas en retard, comme s’il s’était préparé des minutes à l’avance pour arriver pile à l’heure. Chan se précipita vers son sac pour le saisir et il sortit de la chambre. Il dévala les escaliers, suivi de Felix, puis il rejoignit le salon où sa famille se trouvait. Son oncle haussa un sourcil en le voyant débarquer comme une furie.

— Il est là ?

Chan hocha frénétiquement la tête, presque paniqué à l’idée que Minho ne parte sans lui. S’il traînait trop longtemps, il était certain qu’il reprendrait la route sans se poser plus de questions. Et il n’allait sûrement pas manquer une occasion pareille.

— Je dois vraiment y aller !

Jaehwan se leva, sa tante et ses cousines en firent autant.

— Allez, dépêche-toi de descendre !

Chan ne se fit pas prier, il rejoignit le hall au rez-de-chaussée et attrapa sa paire de baskets à la volée. Il ne prit pas le temps de les mettre aux pieds, il était pressé, et Minho ne le jugerait pas sur ce point. Jaehwan ouvrit la porte d’entrée pour le laisser passer et Chan se dirigea à grandes enjambées vers le van. Il se posta à la fenêtre ouverte, côté passager, hors d’haleine et le visage rouge. Amusé, Minho le fixa, la main gauche cramponnée au volant, et ce qu’il identifia comme étant un joint dans l’autre. Il pouffa de rire.

— T’as baisé qui pour être aussi essoufflé ?

Les pommettes de Chan n’en furent que plus rouges. Il se fichait bien qu’il lui fasse ce genre de remarque en privé, mais devant sa famille, c’était autre chose. Il jeta un coup d’œil en arrière, ils l’avaient accompagné sur le trottoir pour le saluer. Felix le rejoignit, il le poussa un peu pour prendre sa place et se pencher sur le rebord de la fenêtre.

— Oh, tu vas bien ? demanda Minho. Pas trop dégoûté que ton cousin te lâche ?

Felix leva les yeux au ciel, mais son sourire le trahissait. Il n’avait pas eu l’occasion de discuter avec Minho la veille, et il le trouvait bien à l’aise avec lui, mais ce n’était peut-être pas si étonnant. Il était un personnage haut en couleur.

— Je sais que s’il le fait, c’est pas pour rien, rétorqua-t-il plus d’un ton sérieux.

Minho eut un mouvement de recul, les sourcils haussés. Chan attrapa le poignet de Felix, il percevait de l’amertume dans sa voix, et il ne voulait pas qu’il se sente délaissé, qu’il en veuille à Minho, ou qu’il s’en méfie. Il avait été le seul à décider de ce qu’il allait faire de la suite de ses vacances, personne ne l’avait influencé.

— Lix…

Le concerné lui adressa un regard bienveillant, et Chan comprit qu’il n’en voulait à personne, alors il le lâcha. Il se reconcentra sur Minho et lâcha un soupir.

— Prends bien soin de mon cousin, d’accord ?

Minho éclata de rire, la tête basculée en arrière. Il finit par s’arrêter quelques secondes plus tard et, de son regard perçant, il dévisagea Felix.

— Ça marche, t’en fais pas pour ça.

— Je compte sur toi pour lui faire passer les meilleures vacances de toute sa vie.

Minho sourit.

— Je promets rien, mais j’vais essayer.

— Merci.

Felix se redressa et fit face à son cousin. Ils se fixèrent avant d’à nouveau se prendre dans leurs bras. Chan inspira à pleins poumons, les yeux fermés, comme s’il voulait s’imprégner de sa présence. Il aurait très bien pu rester là, à Santa Cruz, sans trop se poser de questions. Il aurait pu simplement laisser Minho partir pour faire sa vie, se résigner et se dire qu’il n’était qu’une aventure, une expérience. Mais il n’y arrivait pas. Il n’en avait pas envie. Il voulait qu’il soit plus que cela. Il voulait qu’il le marque à vie, qu’il se souvienne encore de lui des années plus tard. Qu’il puisse parler de Minho en disant qu’il avait vécu une belle histoire à ses côtés.

— C’est terminé votre séquence émotion ? J’vais finir par avoir la nausée de tant d’amour, s’exclama Minho.

Les deux cousins de détachèrent l’un de l’autre et Chan salua une dernière fois sa famille avant de grimper dans le van. Il balança son sac à l’arrière, il s’arrêta quand un élément d’un jaune criard attira son œil. Il fronça les sourcils pour mieux voir, il s’agissait d’un slip qui traînait là, sur le lit encore sens dessus dessous.

— Fais pas attention, j’ai pas rangé.

— J’avais compris que c’était pas ton fort le rangement.

— Je peux toujours te demander de sortir de chez moi, le taquina-t-il.

Chan posa une main sur la cuisse de Minho.

— J’ai vraiment pas envie de te quitter maintenant.

— Alors tiens-toi bien.

Ils sourirent et Minho démarra. Chan passa un bras par la fenêtre, son dernier au revoir à sa famille et surtout à Felix avant de revenir il ne savait quand. Le van s’engouffra sur les routes, les bâtiments défilèrent autour d’eux alors que le ciel se noircissait de plus en plus. Les vitres baissées, l’air frais s’insinua dans l’habitacle et Chan profita du vent qui venait emmêler ses cheveux ondulés. Il ferma les yeux, le crâne reposant contre l’appui-tête et les lèvres étirées par la satisfaction. Il se sentait bien, il se sentait libre. Il avait l’impression que tout était possible, que tout était permis. Il avait un goût de plénitude, il ne s’était pas senti aussi bien et détendu depuis longtemps. Pourtant, il avait cru que son arrivée en Californie l’avait libéré de ses chaînes, mais là, aux côtés de Minho, il prenait conscience de ce qu’était réellement de ne pas être captif.

— On roule encore un peu et on s’arrête manger un truc.

Chan sortit de ses pensées quand la voix de son camarade retentit enfin.

— Où ça ?

— J’sais pas, dois y avoir une station pas loin où ils vendent des hot-dogs.

Il hocha la tête. Il n’avait toujours pas osé proposer à Minho de dormir dans un motel. Il avait peur qu’il se vexe car, de ce qu’il avait compris, il tenait à son van et le considérait comme sa maison. Il s’éclaircit la gorge et referma légèrement la fenêtre pour atténuer le bruit de la route et de la brise qui résonnait dans le véhicule.

— Mon oncle m’a filé de la thune, dit-il pour tâter le terrain.

Minho lui jeta un bref coup d’œil avant de se reconcentrer sur sa trajectoire.

— Et ?

— J’me suis dit qu’on pourrait l’utiliser.

— J’espère bien, rétorqua-t-il plein d'entrain. Enfin, c’est pas que j’veux profiter de toi, mais je suis pas contre un coup de main. On va pas vivre de cul et d’eau fraîche.

Minho sautait toujours sur l’occasion pour lui balancer une petite allusion sexuelle, mais ça l'amusait beaucoup. C'était lui. Et il trouvait ça plaisant.

— Enfin, moi ça me dérange pas, ajouta-t-il. Mais toi t’as l’air d’avoir une masse musculaire à entretenir.

Cette remarque fit rire Chan, il était flatté qu’il ait noté le fait qu’il prenait soin de son corps, même s’il ne pratiquait pas non plus du sport à l’extrême.

— J’veux dire, faut bien que tu tiennes le coup, j’ai pas fini de t’épuiser.

— Qui s’endort à chaque fois ?

— J'ai tenu hier, jusqu’à ce qu’on jouisse tous les deux, et c'était génial. Tu pourrais faire un effort et t’en souvenir quand même, sale ingrat.

Ils se lancèrent un regard équivoque, il était on ne peut plus clair qu’ils avaient tous deux hâte de recommencer. Chan profita de cette perche qui lui était tendue pour se lancer.

— D’ailleurs, ça serait pas mal qu’on s’arrête dans un motel pour la nuit.

Minho mit un petit coup de frein qui les obligea tous les deux à se pencher en avant.

— Monsieur est trop habitué au luxe.

— Non, mais ça serait cool de pouvoir prendre une douche aussi.

— J’en ai pris une ce matin.

Il avait réponse à tout, le convaincre ne serait peut-être pas chose facile.

— Ouais, mais ce serait plus confortable.

— J’ai un lit derrière, on dirait que t’as déjà oublié à quel point il est génial pour baiser.

— Loin de moi l’idée de te vexer, mais j’me suis pété le dos quand même. Et je te parle pas de baiser, je te parle de dormir.

Le châtain soupira.

— T’es vraiment une petite nature. Qu’est-ce que ça va être quand tu vas te faire sauter ?

Chan battit des cils. Était-ce clairement une demande ? Minho avait plusieurs fois émis le souhait de coucher avec lui, il lui avait demandé de lui faire du bien avec ses doigts, puis il l’avait chevauché, il n’avait jamais été question de l’inverse. En pensant à cette éventualité, Chan n’était au final pas dérangé, plutôt intimidé. Après tout, Minho était le premier homme avec qui il avait des rapports alors que, de son côté, ce dernier semblait habitué à ça. Dans le fond, ça le rassurait. Il préférait avoir affaire à quelqu’un d’expérimenté et entreprenant, qui savait ce qu’il faisait, plutôt qu’à un novice. Il savait que son partenaire, même s’il se montrait impatient et espiègle, saurait prendre soin de lui et faire attention à son bien être.

— Bon, tu payes le motel alors ? demanda-t-il pour changer de discussion.

— Oui, bien sûr.

— Tout ça pour tirer ton coup…

Le sourire malicieux sur le visage de Minho en arracha un à Chan. Il avait conscience que sous couvert de plaisanterie, il lui faisait passer des messages. Et ce n’était pas pour lui déplaire, il mourait d’envie de le faire sien encore une fois. Il voulait sentir Minho fondre sous son toucher, entendre ses gémissements puissants et ses rires éclater sans retenue. Il voulait le sentir se serrer autour de son sexe, juste avant l’orgasme.

— Je m’arrête dès que j’en repère un qui me plait. J’ai quand même le droit de choisir.

Il fallut près d’une heure de route pour que Minho se décide. Ils venaient de traverser San Juan Bautista quand le panneau lumineux d’un petit établissement en bordure de route attira l’œil du jeune homme. Ce n’était clairement pas le grand luxe, mais cela ferait amplement l’affaire. Le parking semblait assez rempli, et le motel devait déjà accueillir pas mal de visiteurs. Chan espérait qu’il resterait au moins une chambre pour eux, il avait envie de passer une agréable nuit dans un lit.

Le van se gara, Minho coupa le moteur. Il se tourna vers son camarade, un sourcil haussé.

— Va voir si y a encore de la place.

— Moi ?

Il fit mine de regarder dans tous les coins.

— Qui d’autre ? C’est toi qui as insisté pour dormir dans un motel, alors tu t’en démerdes.

Chan soupira, mais il ne dit rien. Il avait raison, et c’était lui qui devait payer, alors il pouvait bien aller à l’accueil lui-même. Il sortit du véhicule, le sac banane contenant son argent et ses papiers fermement accroché à sa taille, puis il traversa le parking pour arriver à la petite réception. Deux distributeurs de boissons étaient à disposition et, derrière la fenêtre, sous un néon « open » rose qui clignotait, une machine à hot-dog était installée. Elle semblait peu entretenue. Chan grimaça, mais il avait tellement faim qu’il pouvait avaler n’importe quoi. Il poussa la porte vitrée, le son d’une clochette retentit dans la pièce plus qu’exiguë et, de derrière le comptoir, un homme à la calvitie notoire se redressa. Il était immense et bedonnant, si bien que le t-shirt tâché et trop court qu’il portait dévoilait une partie de son abdomen.

Chan le salua d’une petite voix, impressionné par sa carrure et son strabisme conséquent. Derrière lui, plusieurs clés ornaient le mur, et il en déduisit qu’il devait rester des chambres à disposition.

— Alors ? grogna l’homme de sa voix caverneuse.

— Hm, euh, il vous reste des chambres ?

— Ouais, t’en veux une ?

Chan acquiesça, le réceptionniste lui indiqua un panneau sur le côté où le prix était indiqué. Cinquante-trois dollars la nuit, ça lui paraissait convenable. Il extirpa les billets de son sac pour les tendre à l’homme. Il les lui arracha des mains avec une force qui, dans ces circonstances, n’était pas utile.

— Je vais prendre deux hot-dogs aussi.

L’homme hocha la tête et lui rendit la monnaie, la balançant sur une petite coupelle en porcelaine. Chan s’empressa de la ranger et d’aller chercher leur repas du soir dans la machine, puis il quitta la réception. Il déglutit. Il n’avait jamais vu un gars aussi peu sympathique et il lui faisait froid dans le dos. Il évita de se retourner et traça à travers le parking pour retrouver Minho.

— J’ai une chambre, et de la bouffe.

Le jeune homme, encore installé au volant, afficha une mine étonnée, mais pas déçue.

— Parfait, j'espère que t'es prêt à passer une nuit torride.

•••

Hellooo (◕ᴗ◕✿)
Ça y est, Chan est parti, et il ne sait pas dans quoi il s'est embarqué. Et vous non plus en fait 👀
J'espère que la suite vous plaira !
À très vite 💜

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