12
Seersha
entendait
les rumeurs qui couraient.
Comme quoi la fille du pêcheur – mais si, voyez-vous, la famille sur la colline, la fille n'est toujours pas mariée, on raconte qu'elle est différente, qu'elle parle à la lune, que les enfants qui mangent les poissons de son père tombent malades – se livrerait à des pratiques étranges
païennes
sorcières
bannies
dangereuses
surtout à l'heure où les guerres de religion faisaient rage.
Ne pas dévier, surtout
rester dans le rang
ne pas attirer l'attention
et espérer survivre aux purges sanglantes meurtrières à l'heure où le danger régnait partout aucun répit aucune échappatoire les soupçons dominaient dénoncer pour survivre une vie contre une vie.
Ça arrangeait Seersha. Elle apportait du soutien à la jeune fille. Une présence familière, sympathique
alors que toutes ses amies
les jeunes filles du village
les jeunes hommes
se détournaient d'elle
médisant sur son chemin.
Elle gagnait sa confiance
et c'est ce qu'elle se disait pour tenir.
Elle ne faisait que mener sa mission à bien. Il n'y avait pas d'autre raison. Pas d'affection particulière, de tendresse face à son enthousiasme
(on aurait dit un chiot, encore pataud)
d'admiration pour l'innocence dans son regard, pour la maturité qui surgissaient parfois, surprenante, désarçonnante, attirante
non
elle ne voulait pas se noyer dans ses yeux où pulsaient toutes les merveilles du monde
non.
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