Contrairement à ce qu'on aurait pu penser j'ai passer une nuit très reposante. J'ai dormis presque dix heures de suite, sans être réveillée par un cauchemar. Je prends mon téléphone sur ma table de nuit avec l'intention d'envoyer un message à Linaë pour lui dire de venir dans ma chambre quand elle sera réveillée, il faut qu'on ait une discussion. Mais elle m'a devancée. Son message ne me dit pas qu'elle veut discuter mais qu'elle est partie pour la journée, et qu'il ne faut pas que je m'inquiète, elle va bien et est en bonne compagnie.

C'est justement ce genre de message qui n'est pas rassurant, je connais Linaë depuis toujours. C'est une fille adorable et très sociable, mais parfois trop. Elle serait capable de partir se promener avec quelqu'un qu'elle connaît à peine.

La possibilité qu'elle soit avec Daerios ne m'enchante pas, tout simplement parce que c'est un connard. Mais je sais bien que Linaë ne va pas se laisser faire, elle accorde vite sa confiance, mais on la perd rapidement quand on la déçoit. D'un autre côté ça me fait de la peine pour lui, au fond il avait un seul but : obéir à son père. Mais il avait tellement pour objectif de ne pas décevoir ce monstre qu'il n'a pas hésité à agir comme ce modèle de cruauté. Maintenant il paie pour ces actes.

Il faut que j'arrête de penser à lui ! J'ai l'impression qu'en ce moment tout me rappelle l'existence de Daerios et ça commence vraiment à m'énerver !

Il faut que je m'occupe, que je me sorte son visage de la tête, alors je sors du lit et file dans le réfectoire où je prends un bon petit déjeuner en compagnie de Luna. Elle est jeune mais elle comprend vite, elle sait qu'il se passe quelque chose. Elle me pose beaucoup de questions sur les garçons qui étaient dans l'orphelinat hier soir. Je ne sais pas trop quoi lui dire, je ne sais même pas si elle est comme moi. Peut-être que ses parents étaient originaires du monde parallèle, et si c'est le cas Luna découvrira un jour qu'elle est différente de ses amies, qu'elle possède un don particulier et qu'elle n'a pas sa place dans ce monde. Je n'ai pas envie qu'elle vive ce que je vis actuellement mais je n'en sais rien, je ne connais pas la vérité, alors une fois que j'ai fini de manger, je vais me vider l'esprit en me promenant dans le parc de l'orphelinat.

C'est un grand jardin avec beaucoup d'arbres qui, en cette saison commencent à perdre leurs feuilles. Mais il y a aussi de beaux petits parterres de fleurs colorées dont l'un des jardiniers de la ville s'occupe bénévolement, il veut apporter de la gaieté dans notre quotidien, c'est très gentil de sa part.

Ce que je préfère c'est m'asseoir dans l'herbe et laisser divaguer mon esprit. Même si en cette fin d'été la pelouse est un peu brûlée par le soleil et qu'elle me pique les jambes, cela me détends de regarder les autres enfants jouer. Ils s'amusent comme des frères et sœurs sauf que là ils sont une quinzaine, ce n'est donc pas tout à fait une famille normale. Ils sont tous orphelins, où peut-être qu'ils appartiennent tous à une famille qui comme la mienne peut transmettre ses pouvoirs à plusieurs enfants, ainsi tout ces enfants seraient comme moi, mais ne le sauraient pas.

C'est dingue ! Je pense sans arrêt à ce foutu monde parallèle, et à ces êtres particuliers dotés de pouvoirs. Le pire c'est que j'ai l'impression de détester toutes les personnes possédant un don magique, c'est paradoxal puisque apparemment je suis sourcière, moi aussi je suis particulière.

Puis un avion passe dans le ciel et je fais le lien avec le voyage d'Asmiel et Daerios, ont-ils pris l'avion ? Comment fait-on pour aller dans le monde parallèle ? Est-ce qu'on passe au travers d'un mur d'une gare comme dans Harry Potter ? Ou alors on se déplace sur des comètes comme dans Lux ? Mais peut-être qu'on utilise nos pouvoirs pour ouvrir une porte dans un arbre comme dans Wings ? En fait je ne réalise pas bien, je n'ai pas l'impression que ce que je vis est bien réel, je me crois peut-être dans un des livres que j'ai lu. Il faut à tout prix que je revienne à la réalité, sinon comme la dernière fois la chute fera mal, et cette fois je doute que Daerios sois là pour me soigner...

Pour moi la seule personne qui puisse remédier à ce problème est Asmiel, alors je prends mon téléphone et je lui envoie un message pour lui demander si on peut se voir, je lui dis que j'ai quelques questions à lui poser.

Sa réponse ne se fait pas attendre, il me dit qu'il arrive à l'orphelinat dans une demi-heure. Le temps selon lui de passer acheter un sac dont il a besoin.

Quand Asmiel arrive il a un énorme sac étanche dans les bras. Il s'avance le sourire aux lèvres puis dépose le sac devant moi.

- Surprise !

Je le regarde avec les yeux grand ouverts.

- Heu, c'est quoi ?

- Un sac étanche, me répond-il malicieusement, tu en auras bien besoin.

- Mais pourquoi faire ? Pour le monde parallèle ?

- T'as tout compris championne ! L'entrée se trouve en Argentine, sous une cascade. Avec ce sac tes affaires seront sèches dès ton arrivée.

- Mais non, en Argentine ? Sérieux ? Pas plus loin encore ?

- Bah non, il n'y a qu'une entrée et qu'une sortie. Quand on est sortis du monde parallèle on est arrivés dans une grotte très glauque en Asie. J'avais peur qu'une chauve-souris m'attaque par surprise, je l'aurai pas supporté !

Sa remarque me fait sourire.

- Attends, je comprends pas un truc. Il y a une entrée et une sortie donc je suppose qu'on ne fait pas ce qu'on veut. Mais c'est Eliad qui dirige les entrées et sorties aussi ?

- Oui, c'est lui. Et c'est aussi lui qui envoie des personnes espionner les humains sans pouvoirs, c'est à cause de lui que j'ai galéré à l'école pour apprendre par cœur la carte de votre monde, je connais tout les pays et les principales villes, et c'est clairement pas passionnant !

- C'est vraiment un dictateur ce gars ! J'espère que ce n'est pas non plus lui qui fait la justice !

- Non, ça c'est ta famille qui s'en occupe depuis des générations, et elle se bat encore aujourd'hui pour garder ce privilège. Mais il arrive que pour des cas extrêmes le père de Daerios prenne une décision sans passer par la justice.

- Comme pour la sœur du malade qui torturait Daerios hier ?

- Oui, mais ce n'est rien en comparaison de ce qu'il a déjà fait. Chez nous il n'y a pas de peine de mort, mais je sais que de temps à autres il s'arrange pour que quelqu'un disparaisse. Tout le monde le sait, mais personne ne dit rien, à part ma mère quand elle a apprit pour sa première victime, elle était prête à le bannir du monde parallèle, mais elle n'en n'a pas eu le temps...

Son regard est devenu triste, ce qui me coupe l'envie de lui poser des questions.