Chapitre 12
Sur les remparts de la capitale, le groupe des plus hauts dirigeants du royaume regardait les débris de l'aéronef se consumer sur le bouclier de la ville. Finalement, le bouclier avait bien été activé et, s'il n'était pas capable de contenir une bombe d'arcane concentré, il avait au moins empêché les débris de s'écraser sur les habitations. Les habitants étaient saufs, mais on ne pouvait pas en dire autant de l'équipage. L'explosion des deux parties du bateau volant avait été tellement violente qu'il ne devait rester aucun survivant.
En contrebas, les habitants levaient eux aussi les yeux vers le ciel. Si les gardes avaient réussi à les rassurer en prétextant qu'il s'agissait de l'essai d'un nouveau sort, ici, il leur serait bien plus difficile de trouver une excuse quant au vaisseau qui venait de s'écraser dessus. Le roi et ses conseillers ne semblaient pas se soucier de cette légère panique qui envahissait les rues. Ils devaient se dire que cela aurait été bien pire sans le bouclier.
— Rentrons au palais, décida le roi. Je sais que vous êtes fatigués par cette nuit éreintante, mais je doute que la fédération en reste là. Une réunion de crise s'impose.
— Je préfère être fatigué que mort, répondit l'un des conseillers, soulagé que l'attaque se soit passée ainsi.
— Général, faites passer le mot à la garde. Qu'ils fassent tout leur possible pour calmer la population.
— À vos ordres, acquiesça l'homme en armure. Doivent-ils donner une autre justification que ce qui s'est réellement passé ?
— Pour l'instant, ne révélez pas les intentions de la fédération. Dites juste que leur aéronef a eu un accident en survolant la ville.
— Ça, le bouclier et le fait que nous ayons ramené toutes les personnes qui habitent dans les villages aux alentour... Ils ne sont pas stupides, cette excuse ne marchera pas, intervint Enzo.
— Peut-être, mais ça reste la vérité. Nous-mêmes ne savons pas ce qui s'est réellement passé.
— Tu n'as pas tort. Il n'empêche que cette excuse ne marchera sans doute pas. Je pense qu'il serait préférable d'être transparent au moins sur le fait que nous allons nous réunir pour discuter de ce qui vient de se passer.
— Ça les confortera dans l'idée que quelque chose se trame, mais au moins, certains seront rassurés de savoir que nous nous occupons de cet incident. Je compte sur vous pour faire passer le message et revenir au plus vite.
— J'y vais de ce pas, affirma le général.
Après avoir salué son roi, l'homme partit à pied vers l'escalier le plus proche qui permettait de descendre des remparts. Scyllia se demanda alors pourquoi ce devait être cette personne qui devait se charger de ce travail, mais elle trouva d'elle-même la réponse en se disant qu'il était responsable de l'armée, donc de la garde et qu'il rattraperait le temps perdu à aller d'un endroit à un autre en se faisant obéir directement plutôt qu'en devant prouver qu'il venait sous ordre du roi.
— Scyllia, appela Elisabeth en se tournant vers la prétendante. Tu devrais retourner à l'académie. Tu dois être épuisée après tout ça. Va te reposer, tu l'as bien mérité.
L'adolescente était sur le point de protester, mais son corps, lui, était en accord avec ce que disait la duchesse. Elle avait les jambes engourdies, les paupières lourdes et l'esprit embrouillé à cause de toutes ces émotions. De plus, elle avait beau être proche de beaucoup de personnes dans ce cercle de dirigeants, elle-même n'en faisait pas partie et n'avait aucune légitimité quant à assister à cette réunion.
— Je vais aller me coucher, répondit-elle finalement.
— Chanceuse ! rit le directeur. Tu veux que je te ramène ?
— Non, ça ira. Je vais rentrer par mes propres moyens.
— Comme tu voudras. Dans ce cas, rapprochez-vous tout le monde, je vais nous téléporter directement au palais.
Se tenant à l'écart pour ne pas être emportée avec eux, Scyllia observa les dirigeants se faire emporter par le sort d'Enzo puis, une fois qu'ils eurent tous disparus dans un déluge d'étincelle, la prétendante amorça à son tour sa téléportation. Les étincelles s'agglutinèrent devant elle, mais à l'évidence, elles n'étaient pas assez pour l'emmener où que ce soit. Après avoir passé la nuit à configurer le générateur de bouclier, sa capacité à se concentrer couplé à sa fatigue faisaient qu'elle ne pouvait plus utiliser un sort tel que celui-ci.
— Bon, eh bien il ne reste qu'à rentrer avec un moyen plus conventionnel.
Plus conventionnel ? Si elle devait y retourner à pied, cela allait lui prendre un temps fou !
— Qui t'as dit d'y aller à pied ? Je parle de moyen plus conventionnel pour nous. Utilise tes ailes.
— C'est vrai, je n'y avais pas pensé, souffla-t-elle.
— On va mettre ça sur le compte de la fatigue.
Oui, la fatigue. Elle avait hâte de retrouver son lit et d'enfin pouvoir dormir. Plus tôt elle serait de retour à l'académie et plus tôt elle pourrait aller se coucher. C'est avec cette seule idée en tête que Scyllia fit apparaître ses ailes de brume et sauta du haut des remparts pour prendre son envol. Contrairement à la téléportation, se déplacer ainsi était presque devenu une seconde nature pour la prétendante. Elle n'eut donc aucun mal à retourner à l'académie.
En survolant la ville, l'adolescente remarqua l'inquiétude des habitants dans les rues. Ça n'était pas le chaos, mais elle voyait des rassemblements se former pour parler de ce qui venait de se passer dans le ciel. Les gardes n'avaient pas encore reçu leurs consignes, mais même sans la version officielle de l'histoire, ils restaient tout de même présents pour rassurer la population et éviter tout débordement.
Après une vingtaine de minutes à survoler les habitations, Scyllia arriva enfin en vue de l'académie. Avec un dernier effort, elle accéléra et passa au-dessus du mur d'enceinte pour se poser devant les dortoirs. À cette heure-ci, malgré le fait qu'il s'agisse d'un jour de repos, la plupart des élèves étaient déjà réveillés et vaquaient à leurs occupations dans toute l'académie. Certains, plus jeunes que Scyllia, se tournèrent vers elle en la voyant arriver tandis que les autres, ici depuis plus longtemps, étaient habitués à la voir se déplacer ainsi.
La prétendante ne se soucia même pas de ces regards braqués sur elle et entra dans les dortoirs pour rejoindre sa chambre. Cependant, en voyant sa porte grande ouverte, elle se souvint d'une chose. Sa chambre était sans dessus-dessous et son lit était totalement défait. Son matelas ne se trouvait même plus sur le sommier, mais était collé contre le mur.
— C'est pas vrai, gémit-elle.
Depuis la porte de sa chambre, Scyllia entendit les voix de ses amis qui venaient du fond du couloir, dans la salle commune. Même si l'envie de refaire son lit et de se coucher était forte, celle de les retrouver l'était encore plus. Après tout, elle avait failli ne plus les revoir.
— Moi je te dis que ça cache quelque chose ! affirma Ronan. D'abord un bouclier, ensuite un aéronef qui s'écrase. Et puis, même s'ils disent que c'est le test d'un sort qui a été créé ici, je suis désolé, mais c'est le genre de chose qui prend des années pour être mis au point. On en aurait entendu parler avant.
— Mais pourquoi vouloir détruire un aéronef ? questionna Alex. Et qu'est-ce qu'il faisait l... Scyllia ?
En entendant le nom de la prétendante, tous se retournèrent vers l'entrée. Scyllia, elle, s'avança et s'installa auprès d'eux, puis croisa les bras sur la table avant d'enfouir sa tête dedans.
— Tout va bien ? s'inquiéta Zoé. Je ne t'ai pas revue depuis que tu es entrée dans ma chambre. D'ailleurs, il est arrivé quoi à ta chambre ? Et tu sais ce qui se passe à l'extérieur ? Et c'était quoi ce...
— Du calme, une question à la fois, la calma Lise. Elle semble épuisée.
— On leur dit ou ça doit rester un secret ?
— Ils finiront bien par le savoir, souffla-t-elle.
— Savoir quoi ? demanda Camille.
— Je suis restée toute la nuit avec Elisabeth et Enzo.
— Et ?
— Promettez-moi de ne rien répéter à qui que ce soit.
— Tu commences à me faire peur, mais d'accord, hocha Zack.
Un à un, ses amis lui firent signe qu'elle pouvait leur parler en toute tranquillité et qu'ils ne diraient rien à personne. La prétendante se redressa alors et prit quelques secondes pour remettre de l'ordre dans ses idées et raconter quelque chose de cohérent.
— Hier, en fin d'après-midi, quelqu'un s'est introduit dans ma chambre, commença-t-elle.
— C'est pour ça qu'elle est dans cet état-là ? questionna Alex.
— Il était à la recherche de quelque chose et, visiblement, il l'a trouvé. Le coffre contenant les deux fragments d'orbe a disparu.
— Quoi ? s'exclama le groupe.
— Paniquée, je suis allée voir Enzo. Grâce à un enchantement, il a réussi à découvrir qu'il se trouvait à la fédération d'Istram. À ce moment-là le roi a invoqué Enzo et je l'ai suivi. L'un des espions du royaume a alors révélé que la fédération d'Istram était en chemin avec une arme capable de raser la capitale.
— Attends, tu veux dire que nous sommes entrés en guerre contre la fédération ? s'inquiéta Zack.
— Je ne le sais pas encore. Pour éviter cette catastrophe, j'ai accompagné dame Elisabeth pour activer le bouclier qui est encore actif, puis nous avons rejoint le roi sur le rempart. L'aéronef de la fédération est arrivé et, avant qu'il n'utilise son arme, il a été détruit.
— Ils ont eu un problème avant de l'utiliser ? questionna Camille.
— Apparemment, avant qu'il ne s'écrase, l'arme avait disparu.
— Et tu as une idée de ce qui s'est passé ?
— Non, je...
Scyllia allait pour dire qu'elle n'en savait rien, mais s'interrompit en voyant qu'aucun de ses amis ne bougeait. Ils étaient comme figés et ne clignaient même pas des yeux. La prétendante sentit alors les poils de sa nuque se hérisser et, sans réfléchir, se retourna et invoqua une dague qu'elle lança immédiatement.
La lame frappa le mur à quelques centimètres de l'oreille de l'intrus et, au lieu de se planter dedans, rebondit dessus avant de tomber au sol. L'homme, les bras croisés et un sourire en coin, regardait Scyllia avec un air amusé.
— Tu as mûri, dit Ouros en guise de salutation.
Si la vue du dieu de la mort incommodait l'adolescente, ce qu'il venait de dire la dégouttait encore plus. Comme elle se l'était déjà dit, Ouros la comparait à un fruit et attendait qu'elle soit mûre pour la dévorer.
— Deux questions. Qu'est-ce que tu fais là et qu'est-ce que tu as fait à mes amis ?
— Tes amis vont bien, ne t'en fait pas. J'ai juste arrêté le temps pour que l'on puisse parler seul à seul.
— Pratique comme pouvoir, se contenta-t-elle de répondre en haussant les épaules.
— Mais pas aussi puissant que tu ne le crois. Comme tu as pu le remarquer en lançant ta dague, celle-ci ne s'est pas plantée. Il est impossible d'interagir avec ce qui est figé. C'est ce genre de pouvoirs qu'utilisent mes anges pour aller chercher les âmes et les conduire sur le plan des dieux ou celui des démons.
— Merci pour l'explication. Maintenant, réponds à ma deuxième question. Qu'est-ce que tu fais ici ? dit-elle de façon plus insistante.
— Au lieu de me lancer ce regard, tu devrais plutôt me remercier. Après tout, c'est moi qui ai transporté la bombe autre part et détruit l'aéronef. J'ai d'ailleurs été quelque peu surpris des passagers qui se trouvaient à bord. Mais revenons à la bombe. Même si le bouclier aurait tenu le coup, les conséquences d'une telle arme aurait été néfastes et aurait tué beaucoup de monde sur le long terme, alors un peu de gratitude serait grandement apprécié.
— Alors c'est toi qui as fait ça ? Je croyais que les dieux ne pouvaient pas intervenir.
— Ça n'est pas un acte personnel. C'est le panthéon qui a décidé qu'une intervention était nécessaire. Ils ont jugé qu'une bombe d'arcane concentré lancée sur une ville remplie d'innocents allait à l'encontre de leur vision de la guerre. Les dieux ont aussi décidé qu'ils resteraient neutres dans ce conflit.
— Difficile de te croire après l'aide que tu nous as apporté.
— J'ai dit neutre, pas inactif. Si vous décidez de faire la même chose qu'eux, les dieux interviendront et détruiront votre vaisseau ainsi que la bombe. De plus, tout soldat qui s'en prendra à une population qui s'est rendue et ne veut pas se battre sera immédiatement châtié par les anges du père de ton cher ami Ronan. Enfin bref, j'étais juste venu pour te donner ces quelques explications. À toi de voir ce que tu en feras.
— Attends ! s'exclama-t-elle en voyant qu'il s'apprêtait à rompre le sort.
— Je croyais que tu ne voulais que des réponses à tes deux questions, il faut savoir.
— Combien en ont-ils ?
Sans rien dire, Ouros mit fin au sort d'arrêt du temps. Étrangement, le champ de vision de Scyllia changea immédiatement. Elle était de nouveau en face de ses amis, dans la même position que lorsque le sort avait été lancé. Malgré le fait qu'il n'ait rien dit directement, sa voix résonnait dans la tête de Scyllia et répétait sans cesse le même mot. Trois.
— Non tu ? répéta Sin qui, lui, n'avait pas vécu de coupures dans la discussion.
— Je... Je dois y aller, répondit-elle en se levant.
Sous les regards surpris de ses amis, Scyllia se précipita vers la sortie et courut jusqu'à se retrouver à l'extérieur du bâtiment des dortoirs. Sa fatigue n'avait pas disparu, mais ces révélations lui avaient donné comme un coup de fouet qui avait eu pour effet une certaine reprise de ses forces et de ses esprits.
De nouveau, la prétendante invoqua ses ailes de brume et s'envola, cette fois-ci en direction du palais. D'après ses estimations, à la vitesse où elle allait, il ne lui faudrait même pas une demi-heure pour arriver à destination.
— J'y crois pas. Ces connards ont réussi à récupérer plus de fragments que nous et en plus, ils nous ont piqué les nôtres ! À moins que... Quand il a dit trois, il comptait les nôtres ou pas ?
— Non, je ne pense pas. Vu qu'ils ne peuvent pas ouvrir le coffre, ils ne les ont pas vraiment.
— Ce qui fait que cinq fragments sont réunis au même endroit. Pourvu que les pouvoirs accordés par ceux qu'ils peuvent déjà manipuler ne leur donnent pas accès à ceux enfermés.
— Je l'espère aussi, dit-elle en accélérant encore.
Comme elle l'avait prévu, il lui fallut un peu moins d'une demi-heure pour rejoindre le palais. De la même manière qu'à l'académie, elle se posa devant l'entrée sans se soucier des regards de ceux qui l'entouraient. Les deux gardes postés de chaque côté ne bougèrent même pas. Ils n'étaient pas autant habitués que les élèves à la voir atterrir ainsi, mais l'avaient bien assez vu arpenter le palais pour la reconnaître.
— Dame Eliar, salua le garde de gauche. Puis-je connaître la raison de cette visite ?
Surprise, Scyllia s'arrêta. Jamais personne ne lui avait demandé une telle chose. La plupart du temps, le palais était ouvert à tous et son statut de pupille du roi lui donnait même le droit d'entrer ou sortir comme bon lui semblait, même hors des heures d'ouverture.
— Je suis venue voir le roi, répondit-elle.
— Dans ce cas, je vous demanderai de patienter ou de repasser plus tard. Le roi a demandé à ne pas être dérangé pendant sa réunion...
— Réunion qui concerne l'aéronef qui s'est écrasé, je le sais, le coupa-t-elle. J'ai passé la nuit à aider dame Elisabeth à lever ce bouclier au-dessus de la ville. Je sais aussi ce que contenait l'aéronef et je sais de quoi ils discutent. C'est justement parce que j'ai de nouvelles informations que je dois le voir.
Un instant, le garde jeta un coup d'œil à son acolyte qui se trouvait de l'autre côté de l'entrée, puis, il revint sur Scyllia et souffla légèrement.
— J'espère que ces informations sont importantes ou je suis bon pour retourner à la surveillance des marchés, dit-il.
— Elles sont de premier ordre, affirma-t-elle. Ne vous en faites pas, Vous garderez votre poste.
Avec l'autorisation des gardes, Scyllia entra dans le palais et arpenta les couloirs et les escaliers jusqu'à arriver devant la salle dans laquelle elle et Enzo avaient été invoqués le jour précédent. Deux gardes étaient postés de chaque côté de la porte. La prétendante dut de nouveau expliquer la raison de sa présence et, malgré ses craintes, les soldats la laissèrent passé.
Dès qu'elle ouvrit la porte, toutes les discussions cessèrent et tous se tournèrent vers elle. Lucas, silencieux lui aussi, fouilla dans sa poche et y sortit une bourse en cuir qu'il ouvrit. Il y extirpa deux pièces d'or qu'il fit glisser sur la table en direction d'Enzo qui le récupéra avec un large sourire.
— C'est toujours un plaisir de parier avec vous mon roi.
— Tu n'as pas réussi à trouver le sommeil ? questionna Lucas en rangeant sa bourse.
— Je sais qui a détruit l'aéronef de la fédération.
— Tiens donc, rit le roi avec un regard insistant en direction du directeur.
À son tour, Enzo sortit sa bourse et retira quatre pièces qu'il envoya au souverain.
— Comme vous le disiez, archimage, c'est toujours un plaisir de parier avec vous. Mais passons. Explique-nous tout, dit-il en l'invitant à s'asseoir.
Après avoir pris place à la table, Scyllia raconta sa discussion avec Ouros. Seuls ceux qui ne la connaissaient pas vraiment étaient étonnés qu'elle ait rencontré le dieu de la mort. Pour les autres, une telle chose ne leur fit même pas lever un sourcil. Elle révéla ainsi qu'il était celui qui avait détruit le vaisseau et fait disparaître la bombe, que les dieux surveilleraient la guerre s'il y en avait une et que la fédération était en possession de trois fragments. Elle termina son résumé en pointant le fait qu'Ouros avait été étonné en apprenant qui se trouvait sur l'aéronef.
Alors qu'elle venait de finir de parler, une lueur jaune attira son regard vers sa droite. Sur un miroir attaché au mur, des symboles dorés se dessinaient peu à peu pour former une rune.
— Tien donc, la fédération daigne enfin nous répondre.
— Allez-y, ordonna le roi.
L'un des membres du conseil de la magie se leva pour se rendre jusqu'au miroir et appuya sur la rune. Le miroir cessa alors de refléter la pièce et montra trois hommes parés de robes de mages.
— Roi Sarkin, salua celui qui se trouvait devant les deux autres. Pourrais-je savoir pourquoi vous avez commis une telle agression envers la fédération ?
— Pardon ? Vous rigolez j'espère ! s'emporta l'un des conseillers. Vous venez nous attaquer et tout ce que vous trouvez à dire, c'est de nous accuser de nous être défendu ?
— Nos intentions n'étaient pas hostiles. C'était une visite protocolaire en vue d'une meilleure relation entre nos deux pays.
Faux. Tout sonnait faux chez eux. Leur air hautain, leur colère, leurs accusations... Ce genre de personne n'inspirait aucune confiance à Scyllia.
— Est-il dans votre habitude d'envoyer une bombe en tant qu'émissaire ? questionna Enzo.
— Une bombe ? feignit d'être surpris l'un des deux en retrait. Nous n'avons jamais envoyé de bombes ! C'était une visite pacifique et l'aéronef que vous avez abattu ne transportait rien de moins que l'ancien roi d'Istram et ces plus proches conseillés ! Même s'il n'est plus à la tête d'Istram, il restait une figure importante pour nous. Vous nous payerez ça !
Avant que quiconque n'ait le temps de répondre, la liaison se coupa et le miroir redevint normal. Tous se tournèrent alors vers le roi. Les adultes lui demandèrent du regard ce qu'ils devaient faire, mais Scyllia, elle, voulait en savoir plus. Pourquoi avaient-ils envoyé l'ancien roi ? Et pourquoi ancien ? Le regard de Lucas croisa celui de la prétendante et il comprit ce qu'elle voulait.
— Il y a de cela un peu plus de vingt ans, lorsque j'étais encore prince, une guerre civile a éclaté au royaume d'Istram. Mon père, roi à l'époque, avait décidé de ne pas intervenir. D'un côté, il n'aimait pas la politique de ce royaume qui pratiquait ouvertement l'esclavage, mais d'un autre, il avait signé un pacte de non-agression et ne pouvait donc pas supporter la rébellion. Finalement, le roi et son gouvernement a perdu et le royaume d'Istram est devenu la fédération d'Istram, dirigée par ces trois mages. Nous leur avons laissé une chance de s'améliorer par rapport à l'ancien régime, mais au lieu d'abolir l'esclavage, ils ont profité de cette main d'œuvre pour se rendre intouchables. Personne ne savait jusqu'à présent où le roi se trouvait et beaucoup pensaient qu'il était mort lors de leur prise de pouvoir.
— Mais pourquoi est-ce qu'ils l'ont envoyé avec la bombe ?
— Ils se sont servi de lui au cas où nous survivions. À présent, avec sa mort, ils ont une bonne excuse pour nous attaquer.
— Alors que faisons-nous ? questionna l'un des membres du conseil.
— On se prépare à la guerre, répondit-il d'une voix qui trahissait la gravité de la situation.
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