25. À l'aveugle
Evy :
Mes sourcils se froncent parce que je le sens agité, même s'il tente de me le cacher. Ou peut-être est-ce de l'inquiétude. Je n'arrive pas à déterminer l'état dans lequel je le retrouve.
— Eliot ? tenté-je.
Son regard me scanne avec tant d'intensité que j'ai l'impression d'être complètement nue. Je déglutis et, sans le vouloir, me mets à faire de même. J'analyse ses cheveux ébouriffés. Tout chez lui est sauvage : son regard, son teint, sa barbe. Il dégage un quelque chose d'érotique, de viril. Je n'ai jamais fantasmé sur les hommes comme lui, pourtant il m'attire plus qu'aucun ne l'a jamais fait. J'ai l'impression d'être une gazelle désireuse de se faire dévorer par le lion. Mes yeux remontent et, sans le vouloir, sont directement attirés par sa cicatrice. Cette imperfection qui le rend pourtant si parfait.
Je poursuis mon exploration visuelle, sa pomme d'Adam remonte lentement. Je laisse mes yeux glisser sur son t-shirt qui moule à la perfection son corps divinement sculpté. Il est beau comme un dieu, je ne peux pas le nier. Mes sourcils se froncent lorsque je remarque les tremblements de ses mains. Je relève la tête sur lui et n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche qu'il m'attrape le poignet et m'attire dans la chambre. La force qu'il y a mise me fait le percuter.
J'ai le souffle coupé et, maintenant qu'il me touche, mon désir explose. Je relève la tête sur lui et ses yeux s'ancrent aux miens. Ils sont dilatés et provoquent une vague de chaleur le long de mon corps. J'attends, le cœur battant. Je retarde le moment, celui où nous déposerons les armes. C'est euphorisant, délicieux et en même temps douloureux.
Sa tête se rapproche de la mienne et ses mains se posent sur mes hanches, elles m'électrisent et me donnent envie de tellement plus. Mes paupières alourdies s'abaissent quand, dans une langueur extrême, son nez frôle mon visage et son souffle m'enivre. Il descend dans mon cou puis remonte jusqu'à mon oreille.
— Ne rouvre pas les yeux, me susurre-t-il.
J'ai envie de mettre au placard la Evy raisonnable et de lui demander de me prendre, maintenant, mais je me retiens et m'exécute. La chaleur de son corps disparaît. L'ouïe aux aguets, je l'entends s'éloigner. Je fais taire ma curiosité, puis attends patiemment, le souffle lourd. Un bruit d'ouverture de tiroir me parvient. Avant que mon impatience ne soit arrivée à son comble, il revient près de moi. Je sursaute lorsque je sens un fin tissu se poser sur mes yeux. Eliot, dans mon dos, lâche un rire muet puis se rapproche de nouveau. Mon corps, comme aimanté, se colle au sien.
— On va jouer, Evy, me susurre-t-il.
Mon souffle s'accélère et je me contente d'acquiescer d'un mouvement de tête. La luminosité perceptible à travers mes paupières disparaît lorsqu'il noue le bandeau.
Quand il a terminé, il reste là, et ses mains glissent le long de mes bras, je me cambre parce que je n'en peux déjà plus.
— Tsss, tsss, me réprimande-t-il.
Ses mains calleuses poursuivent leur descente, puis se posent sur mes hanches. D'un mouvement brusque, il me fait pivoter et je dois m'accrocher à ses bras pour ne pas chuter.
— Embrasse-moi, le supplié-je à bout.
— Patience, se moque-t-il.
Ses mains attrapent mon t-shirt puis il me le retire. Là encore, c'est fait dans une lenteur extrême. Il s'éloigne quelques secondes, pas longtemps, mais assez pour que le froid m'envahisse, faisant frissonner ma peau. Il revient, puis un de ses doigts vient se poser sur mon menton et descend le long de ma gorge, entre mes seins. Il disparaît le temps de passer au-dessus de mon sous-vêtement, puis réapparaît. Privée de la vue, je ressens ce toucher avec puissance, j'ai l'impression qu'à ce contact, ma peau brûle. Il poursuit son chemin le long de mon ventre, qui se creuse à son passage, puis passe sur mon nombril et je relâche mon souffle. Je ne m'étais pas rendu compte que je l'avais retenu. Enfin, il arrive à l'orée de mon jean.
Je ne sens plus la texture de sa peau, mais il augmente la pression pour que je le sente descendre et remonter sur le tissu. Je ne peux retenir un gémissement de frustration lorsqu'il disparaît.
Son rire rauque hérisse ma peau, puis ses deux mains réapparaissent et s'affairent à détacher le bouton de mon pantalon puis à descendre la fermeture éclair. Il ne tarde pas à le faire glisser le long de mes jambes en m'aidant à prendre appui pour me l'ôter. Ses doigts remontent en frôlant ma peau. Ils passent sur mes mollets, dans le creux de mes genoux, ce qui déclenche une nouvelle vague de désir. Si ça continue, je vais me liquéfier. L'une de ses mains se pose sur mes hanches alors que l'autre poursuit son ascension à l'intérieur de mes cuisses. Je voudrais les refermer pour soulager la tension qui ne fait que grandir. Il se redresse puis, alors que sa main arrive à l'orée de mon tanga, il suspend son geste, m'arrachant un grognement.
Je libère mon avidité, puis avance mon bassin jusqu'à sa main. Je me fous de ce qu'il pourrait penser, j'ai juste besoin qu'il me touche, qu'il assouvisse ce besoin animal. La paume de sa main exerce des pressions puis, enfin, sa bouche s'empare de la mienne. Je gémis, de bien-être cette fois-ci. Je mordille sa lèvre pour lui faire payer cette attente. Il a le goût de la bière et du tabac, deux odeurs qui, chez lui, me plaisent. Je m'en délecte avec gourmandise.
Mes mains glissent sur son corps, puis je m'agrippe à son t-shirt pour qu'il se rapproche de moi. À la grosseur que je sens dans le creux de mon ventre, je devine que je ne suis pas la seule à être excitée. Pourtant, un désir de vengeance prend naissance en moi. Je le repousse légèrement, l'aide à ôter son t-shirt. Les yeux toujours bandés, je tâtonne jusqu'à la fermeture de son jean et, tout comme lui, je le fais descendre avec lenteur.
— Evy, grogne-t-il.
— Tu ne veux plus jouer ? demandé-je, espiègle. Moi, j'en ai très envie.
En sous-vêtement devant cette sculpture grecque – sauf au sud – je me sens féminine et audacieuse. Bien évidemment, la cécité m'aide. Je le pousse à reculer jusqu'à ce qu'il bute contre le lit. Pourtant, il ne tombe pas. Mes mains se posent sur ses hanches et, du bout des doigts, je remonte jusqu'à ses bras. Je me concentre sur la texture de sa peau - aussi lisse que celle d'une surface polie -, puis sur la forme de ses muscles. J'imprime sous mes paupières tout ce que je touche et à le dessiner ainsi, j'ai l'impression de le voir. Ma bouche se pose délicatement sur ses pectoraux où je dépose une multitude de baisers. Ma langue remonte et je l'entends frémir, je ne parviens pas à retenir mon sourire satisfait. Ses doigts, sur mes hanches, s'enfoncent dans ma peau. Mes mains passent dans son dos et je poursuis mon exploration puis je cesse lorsque je le sens se tendre dès que la pulpe de mes doigts rencontre une cicatrice.
Je m'apprête à reculer lorsque d'une pression, il me rapproche de lui. L'une de ses mains se niche dans mes cheveux et, d'une poigne ferme, il redresse mon visage. Sa bouche trouve la mienne. Notre baiser est enflammé, enfiévré. C'est à ce moment-là que nous déposons les armes, au bout de notre endurance.
Alors qu'il approfondit le baiser, ses doigts habiles dégrafent mon soutien-gorge. Mes mains pendant ce temps-là font descendre mon sous-vêtement, je n'ai pas le temps d'attendre qu'il s'en charge. D'un mouvement sec, il retire le tissu qui me privait de la vue. Mes yeux éblouis par la faible lumière, papillonnent. Ses yeux me percutent, une décharge de lubricité à l'état brut.
— Tu es magnifique, murmure-t-il, tout en m'embrassant.
Il me fait pivoter puis me repousse sur le lit. Le froid du tissu contraste avec l'incandescence de ma peau. Il ne tarde pas à me rejoindre et mes jambes s'écartent pour l'accueillir. Il récupère dans sa table de chevet un préservatif, puis retire son boxer avant de l'enfiler. Sa chaleur retrouve la mienne et je me demande comment il est possible de ne pas entrer en combustion. Mes genoux remontent et mes pieds viennent encercler ses hanches.
Nos mains s'enlacent et je me cambre lorsque son sexe s'approche de l'entrée du mien. Mon bassin se soulève instinctivement. Il recommence son manège à plusieurs reprises, mais je suis à bout et les larmes de frustration s'accumulent. C'est plus de tension que je ne peux en supporter.
— Eliot, le supplié-je à bout de souffle.
Ma respiration se bloque lorsque d'une poussée, il me pénètre. La brûlure est là, mon corps se crispe et je parviens difficilement à retenir un hoquet de douleur.
— Ça ne va pas ? s'inquiète-t-il en se détachant légèrement de moi.
Je suis partagée entre la honte de ma douleur et la gratitude face à sa prévenance.
— Ça va passer, ne t'inquiète pas, murmuré-je.
Ses sourcils se froncent et j'ai peur d'avoir gâché l'instant, mais il me surprend lorsque ses lèvres se posent sur les miennes. Nos yeux ne se quittent pas et, doucement, il reprend ses mouvements. La façon dont il me dévore du regard intensifie mon désir. Peu à peu, la douleur diminue. En tout cas, elle n'est plus aussi violente qu'elle l'était au début. Pendant quelques secondes, il est le seul à bouger, mon corps trop crispé pour l'accompagner puis, de façon synchronisée, nous nous mouvons.
Comme si nous avions libéré des chiens affamés, nous nous griffons, mordons, c'est intense, bestial. Je ne retiens ni mes soupirs ni mes gémissements et lui ne retient pas ses grognements. Nos corps ondulent, s'éloignent pour se percuter. C'est une cacophonie de gestes, de râles, de baisers.
La vague grossit, encore et encore. Mon corps se cambre encore plus alors que je m'accroche à ses bras. Le grognement qu'il relâche dans ma nuque accentue la sensation naissante. Je sens l'explosion menacer. Je voudrais la retarder, mais en même temps, j'ai besoin de la sentir. Il me mordille la nuque et c'est là que tout explose. Mon corps se tend, mes mains accentuent leur prise au point où j'en aurais presque mal. À son tour, le corps d'Eliot se contracte puis ses mains s'agrippent à mes cheveux lorsqu'il approfondit ses mouvements en lâchant un cri rauque. Le tiraillement de mon cuir chevelu prolonge un peu plus mon orgasme. La délivrance est planante. J'ai l'impression de faire une chute dans le vide, amortie par des nuages de coton. Eliot ralentit puis cesse enfin ses mouvements. Nous sommes essoufflés, transpirants, mais comblés.
— Le repas va être froid, ironise-t-il une fois que nous avons repris notre souffle.
Encore euphorique, je ne peux m'empêcher de pouffer de rire. Je veux bien manger froid tous les jours si c'est pour ça.
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