Chapitre 8: Poissaculture.
Contexte : 2h avant la catastrophe.
- Héy, Isaac. Réveilles toi s'il te plaît.
En temps normal, je n'aime pas quand on me dérange dans mon sommeil. Les gens qui le font s'exposent souvent à un coup de gueule plutôt... désagréable. Mais cette fois, je n'ai pas la force de gueuler.
En fait:
Je n'aurai jamais la force de faire quoique ce soit de négatif en sa présence.
Puisque je sais effectivement de qui il s'agit...ou plutôt je me doute de qui il s'agit. J'ai reconnu assez facilement le timbre de voix et le parfum -qui fouette allègrement mes narines- utilisés par cette personne:
Je me surprends moi même.
Je n'ai pas un caractère sensoriel très développé donc techniquement je suis -presque- incapable de reconnaître quelqu'un de par son odeur...encore moins si j'ai rencontré ce quelqu'un moins de trois (3) fois.
Mais, là bizarrement, j'arrive à le faire et ça, ça me mets mal à l'aise.
J'ai l'impression d'être un prédateur qui arrive à reconnaître sa proie dans le noir ou un truc du genre....c'est très macabre tout ça. Donc je vais ouvrir les yeux, et vais faire envoler cette pensée de mon esprit.
Bien, très très bien même.
Bref, comme je le pensais, il s'agit bien du visage de Mikio, fixé à quelques mètres du mien, que mes yeux ont vu dès qu'ils se sont ouverts. Et si j'ai une seule chose à dire, c'est que : cette proximité est malaisante.
D'habitude, j'arrive à garder des distances physiquement convenables quand nous sommes ensemble, mais là elle est trop proche de moi... beaucoup trop proche même.
J'ai le cœur qui bat fortement, de grosses gouttes de sueur commencent à apparaître sur mon front et nos lèvres sont proches ; TERRIBLEMENT PROCHES. Je sens carrément la chaleur de son souffle s'abattre sur ma bouche.
C'est trop
Si ça continue, si ça continue
.
.
.
.
He bah rien du tout.
Elle s'est simplement éloignée de moi et m'a tendrement souri;
Bravo ! Je me sens ridicule maintenant.
comment ai je pu me faire autant d'illusions en un si court laps de temps ?
C'est peut-être ce que les personnages de mangas ressentent dans ce genre de moment ?
Je ne sais pas. Je ne suis pas dans un mangas.
Je ne suis pas encore au bout de mes peines avec cette fille. En même temps, j'en connais beaucoup qui n'auraient pas pu supporter toute cette tension s'ils étaient à ma place : elle ne peut vraiment pas, absolument pas, vous laisser indifférents.
Si ce n'est pas le reflet dans ses yeux qui vous fait chavirer, ce sera son air beaucoup trop mignon qu'elle adore afficher. Et si jusque là, vous n'êtes pas blasé, soit vous devez vous faire consulter, soit son style aura raison de vous.
J'aime beaucoup son style d'ailleurs.
Déjà qu'elle est très jolie, elle s'habille simplement et sans extravagances apparentes.
C'est une petite fleur.
M'enfin, j'imagine que c'est un truc de filles de bonne famille n'est ce pas: toujours être présentable. Même si parfois, j'avoue que j'aimerais la voir s'habiller autrement.
........
Stop !
N'oublie pas !
Vous ne sortez pas ensemble !
Ce n'est pas pour toi qu'elle fait tout ça !
Ça fait partie du jeu.
C'est bon ?
T'as enregistré cerveau ?
Bien !
Merci à mon subconscient qui m'a remis les pieds sur terre ; il ne faut surtout pas que j'oublie mon rôle : je sers juste de couverture à Mikio. Elle ne me l'a pas clairement dit mais je ne vois aucune autre raison pour laquelle elle se coltinerait à moi. Elle et moi ne sommes pas du même monde, c'est une fille bien au dessus de mes standard et de tout ce que j'aurais pu imaginer. En temps normal, ça aurait été inenvisageable de l'approcher ou de lui parler. Même si j'avais eu des vues sur elle, je n'aurais eu aucune chance.
Voilà ! Parfait ! J'ai foutu une bonne frustration à mon cœur pour qu'il n'ose plus divaguer.
Maintenant que je suis un peu plus calme, je peux peut être entamer une discussion non ? Je doute que Mikio fasse le premier pas.
Les filles ne font jamais le premier pas. (apparemment)
- Salut Mikio, je ne t'ai pas vu arrivé.
- Évidemment puisque tu dormais. J'ai dû te faire attendre longtemps, désolée.
- Ce n'est pas la peine de t'excuser, ça ne fait pas si longtemps que je suis là. Le plus important c'est qu'on soit tous les deux à l'heure.
En fait si, ça fait longtemps que j'attends, trois quart d'heure pour être exact. Mais Mikio n'est pas en retard pour autant, j'ai juste été trop en avance; je ne peux donc pas l'accuser de quoi que ce soit. Ce serait parfaitement égoïste et macho de ma part.
Et puis ça ne se fait pas de faire attendre une dame.
Ça se fait encore moins de la faire culpabiliser d'avoir été trop longue.
Les bonnes manières ça fatigue.
Et puis, c n'est pas non plus de sa faute si je me suis endormi.
D'ailleurs,
comment j'ai fait pour dormir en étant adossé à un mur moi ?
Le cerveau est censé fournir de l'adrénaline au corps pour le préparer au stress...pas un somnifère. Si mon corps commence à me lâcher et à agir à contre sens aussi tôt, alors j'ai peur pour la suite.
Et puis zut,
. J'ai fait toute une semaine sans poisse.
Ce n'est pas maintenant qu'elle va revenir non? (aïe) Je ne vais pas vivre éternellement dans la peur aussi.
- Alors, cette activité, qu'est-ce que c'est réellement ?
- Ne sois pas impatient. Elle nous attend juste dans la salle à côté. On y va ?
- D'accord je te laisse me guider.
- Tu gagnes beaucoup des points là, ça me plaît que tu t'investisse autant. Bon, très bien allons y. dit-elle à la suite d'un léger mais très beau petit rire carillon.
***
Alors, heu... Comment formuler ça ?
Dire que je m'attendais à tout sauf à ça serait un euphémisme.
En même temps, j'aurais dû y voir clair dès le début. Nous sommes dans le bâtiment des filières de travail manuel: des gens plutôt cool et qui font des choses plutôt pas mal je dois l'avouer.
Mais là, c'est trop gros pour moi....et pour Mikio aussi apparemment puisque de légères rougeurs sont apparues sur ses joues. Je comprends bien son embarras : qu'est ce que deux enfants à peine sortis de l'adolescence peuvent bien faire dans un endroit pareil ?
C'est bien ce que le regard de toutes ces dames semblent dire non ? Enfin...dames ? Plutôt jeunes femmes, toutes âgées entre la vingt-cinquaine et la trentaine.
J'ai rarement aussi eu honte de ma vie je crois.
Normalement, un jeune couple, nouvellement formé, ça choisit comme activité manuelle un atelier pâtisserie ou cuisine n'est ce pas ?
Ne dîtes pas le contraire.
C'est le meilleur moyen de vérifier les qualités culinaires d'un homme -parceque très peu d'hommes savent faire la cuisine- afin de savoir s'il sera un bon partenaire avec qui la possibilité de partager cette mission qu'est de "préparer de bons petits plats" aura une plus forte probabilité de réussite.
Dans le cas contraire, à moins de s'être résiliée à travailler comme une pseudo domestique maltraitée et non payée -je déteste cette vision des choses- un autre critère sur lequel les femmes s'attardent est la capacité du monsieur à être un bon père. Sinon comment expliquer que je sois présentement en train d'assister à un cours d'éducation ménagère ? Ah non un cours de "Puériculture" plutôt.
C'est ce qui est marqué au tableau en tout cas.
Et personnellement, je ne comprends pas comment j'ai fait pour me retrouver là, mais ça n'a pas l'air de déplaire à Mikio pour autant ; bien au contraire. Même si je doute que c'était ce qu'elle avait prévu pour la journée.
En fin de compte, cen'est peut-être pas si mal finalement. Ça donnera sûrement aux gens l'image d'un jeune couple trop pressé en besogne et qui ne sait sûrement pas ce que c'est que la vie à deux, mais ça leur donnera aussi l'image de deux jeunes gens qui s'aiment follement et qui s'imaginent un avenir commun. Ce qui est phénomène assez rare chez les jeunes d'aujourd'hui, ils ne pourront qu'être comblés et ne souhaiter le meilleur.
Et ma foi cette pensée était beaucoup trop longue.
Oui je sais.
- Veuillez rangez tout ce qu'il y'a de superflu autour de vous et éteignez vos téléphones, nous allons commencer.
J'imagine que c'est la responsable de la classe qui vient de parler. --elle se tient tout à l'avant de la salle donc c'est évident-- Elle est entrée comme une furie et ce n'est pas qu'une expression.
Les cheveux en pagaille, les grosses cernes sous les yeux, le chemisier mal boutonné, le maquillage trop pressé et légèrement mal fait -elle a quand même réussi à se rattraper- et une poussette au bras.... C'est clair.
C'est une mère dépassée par son bébé.
La pauvre.
En plus de devoir supporter un bébé d'environ huit mois -j'imagine- elle doit aussi nous enseigner. D'ailleurs comment enseigner aux gens ce qui vous dépasse vous même ?
Je ne comprends pas.
- Bien je vois que nous avons un homme parmi nous aujourd'hui. Ça tombe bien, veuillez approcher s'il vous plaît.
Est ce qu'elle parle de moi ?
Oui, elle parle définitivement de moi.
Je ne vois pas d'autre hommes autour de moi..et les autres femmes non plus vu que je suis le seul que tout le monde regarde.
- Tu devrais y aller mon chéri, je suis sûr que tu apprendras plein de choses. me sussure Mikio
C'est moi ou elle se moque de moi.
Mikio a donc un sens de l'humour, c'est bon à savoir. Je crois que je vais y aller comme elle me l'a demandé. Je n'ai rien à craindre de toute façon: ma nuque ne me fait pas mal. C'est peut-être un gênant, mais ça pourrait bien être vraiment lucratif comme activité... enfin j'espère.
******
- Je suis lessivé.
- Tu as fait du bon travail Isaac, je suis fière de toi.
- Arrête de te moquer s'il te plaît.
Si vous ne comprenez pas la situation ; le cours de Puériculture est terminé
Et j'ai bien morflé.
Pendant que ma "petite amie" se moquait allègrement de moi en discret.
Mais je l'ai vu, et je lui ai promis une vengeance terrible: c'est pour ça que c'est elle qui s'occupe de la poussette du bébé, m'enfin de la poupée.
Parceque pour bien comprendre il faut s'exercer.
On nous a donc confié des poupées spéciales dont on devra s'occuper et qu'on devra rendre dans une semaine; elles sont équipées de capteurs et de mini caméra qui permettent de vérifier si oui ou non on a bien appliqué tout ce qu'on nous a montré.
Donc par suite logique des choses, Mikio et moi sommes en binôme pour s'occuper de notre "enfant" et là, sa mère a décidé de lui faire profiter des joies d'une balade en famille.
Mine de rien je passe un bon moment et j'en profite pour en savoir un peu plus sur elle...du moins, ce qu'elle me laisse savoir.
- Elle ne t'as pas ménagé la dame.
- Tu parles, j'ai eu l'impression qu'elle a déversé toute sa frustration sur moi.
- Tu es un peu dur non. Elle a juste fait ça pour ton bien.
- C'est pas mes oreilles qui te croiront. lui dis je en lui désignant mes oreilles légèrement rougies à force de se faire tirer.
Ma phrase n'était pas drôle, mais Mikio a ri...un petit rire cristallin --comme d'habitude-- plutôt agréable. J'aime bien l'entendre rire, ça lui donne un côté plus humain et moins fermé que ce qu'on pourrait croire aux premiers abords.
- Asseyons nous quelque part, pour que tu te reposes un peu.
- Non ça va ne t'inquiètes pas.
- J'insiste ! Un point tranquille, pour le bébé et toi.
- Mouais ok, allez y alors je vous rejoins tout de suite. Je te prends quelque chose ?
- Une bouteille d'eau s'il te plaît.
- Très bien, je reviens vite.
C'est presque....trop facile.
Je n'ai jamais été aussi naturel de ma vie. Comme quoi, quand quelqu'un vous voit dans l'embarras vous avez moins honte de vous ridiculiser à nouveau.
Je sais pas qui l'a dit, mais il avait raison, je me sens étrangement plus à l'aise avec Mikio pour le moment.
Peut être parce qu'on peut discuter de quelque chose sans trop se forcer. -le bébé en l'occurrence-
Je ne sais pas trop et personnellement je n'ai pas envie de savoir. Je suis tranquille et c'est l'essentiel.
Bon heureusement, y'avait une buvette non loin de nous, donc j'ai rapidement pris une bouteille d'eau pour Mikio et un soda pour moi. Ce n'est peut-être pas bon pour la santé, mais j'ai besoin d'une récompense après tout ce que j'ai fait aujourd'hui.
Mikio ne s'est pas posée bien loin.
Je la vois en train de fixer l'intérieur de la poussette un peu comme si elle jouait avec ce qu'il y'avait à l'intérieur.
C'est très mignon.
Et je n'ai pas pû m'empêcher de me dire que son futur mari a plutôt une sacrée veine...mari qui ne sera pas moi.
Parceque je n'ai pas de chance et surtout Parceque mes picotements sont de retour... Et ils sont forts; à chaque fois que je me rapproche de la poussette ils se font de plus en plus prononcés et douloureux....je n'aime pas ça... qu'est-ce qui va se passer encore.
Je finis par m'approcher de Mikio qui m'affiche un sourire plutôt gêné.
- Isaac....je crois qu'on a un problème.
Que ?
Je m'approche rapidement de la poussette par instinct et là; c'est l'explosion...de mon cou et de mes neurones.
Je ne sais pas par quel miracle c'est arrivé, mais voilà, pour faire simple : il y'a un vrai bébé dans la poussette.
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